Écho de notre page FB : février 2023

27 février 2023

Tu jugeras avec justice (Lv 19, 15)

Il faut aussi introduire l’humilité dans l’esprit. On se heurte souvent à des esprits diversement non humbles :

Les jugeurs : catégorie de gens qui jugent volontiers toutes choses facilement et tout haut : la valeur, l’esprit, la vertu de leurs confrères, la direction de la maison, l’esprit du milieu, l’enseignement. Leur autorité est souvent mince, mais l’âme des auditeurs en est souvent troublée : il faut faire attention au milieu. Très souvent c’est un défaut d’humilité : l’âme humble juge peu, discrètement, sobrement, sans prévention, elle inclinera plus volontiers vers les jugements favorables. – Il faut bien juger les gens comme ils sont. – Mais c’est fort difficile. Applications tirées du séminaire. Les jugements sont dictés par une secrète infatuation : on croit avoir les qualités qu’on blâme les autres de ne pas avoir. Il y a des petits esprits qui se choquent d’une foule de choses, les grands esprits sont plus portés à tout accepter.

(P. Lagrange, o.p., Journal spirituel, Cerf, 2014)

23 février 2023

 

« Le Fils de Dieu n’est pas venu juger, mais sauver. Aux tentations du jugement, penser à ses propres fautes, et si de fait on se trouve en présence d’une faute réelle, et qu’il y ait besoin d’expiation, s’offrir comme une victime, bien indigne. »

(P. Marie-Joseph Lagrange, O.P. Journal intime, Cerf, 2014, p. 208.)

 

22 février 2023

« Mon Dieu ! Vous avez été trop bon pour moi ! J’ai oublié que j’étais coupable, que mon pardon était le prix de votre Sang : disciplina pacis nostræ super eum, et livore ejus sanati sumus » « Le châtiment qui devait nous procurer la paix est tombé sur lui et nous avons été guéris par ses meurtrissures ‘Isaïe 53, 5’ ». (Marie-Joseph Lagrange. Journal spirituel, Artège, 2014, p. 263.)

Illustrations : Saint Pierre, le pénitent, par Gerard Seghers (17e)

P. Lagrange en 1896

 

20 février 2023

L’amour de Jésus est la racine de la sainteté

Santa Teresa de Jesus

Santa Teresa de Jesus

Il me semble que le résultat de l’étude de St Thomas (de Incarnatione) et de notre pèlerinage d’Albe doit être de me rapprocher bien davantage de la Très Sainte Humanité de Jésus. Je ne m’en suis jamais écarté, je crois, de parti pris, quoique j’aie été tenté de le faire : cette pensée me fait horreur. Mais je n’ai certes pas fait assez d’efforts pour converser familièrement avec Jésus : « L’amour de Jésus est la racine de la sainteté. »

Ce doit être le point principal de la dévotion à Marie Immaculée.

 

Salamanque, 1880

 

 

(Marie-Joseph Lagrange, o. p. Journal spirituel, Cerf, 2014, 20 février 1881, p. 125.)

18 février 2023

Un Sauveur crucifié

« Que peut donner l’homme en échange de son âme ? Celui qui aura rougi de moi et de mes paroles, dans cette génération adultère et pécheresse, le Fils de l’homme aussi rougira de lui, quand il viendra dans la gloire de son Père, avec les saints anges. » (Marc 8, 38)

(R. P. M.-J. Lagrange, o. p. Évangile selon saint Marc, 4e édition, Lecoffre-Gabalda, 1935.)

Les choses étaient si bien disposées pour le triomphe du Christianisme et la constitution de l’Église qu’ils semblent sortir du monde comme une fleur de sa tige : mais les moyens de Dieu, la Croix, est [sic] si contraire à l’esprit du monde, la résistance fut si atroce, que le triomphe du Christianisme apparaît clairement comme la marque de la force de Dieu. Sa sagesse se manifeste dans la préparation, sa force dans l’exécution de ce grand dessein. Souvent on exagère en sens opposé : on noircit ce qui précède pour faire ressortir la victoire du Christ ; ou bien, on exalte le paganisme pour diminuer la valeur des idées divines. Mais St Paul parle de la plénitude des temps : plénitude d’ignominie et d’abaissements ; l’humanité ainsi brisée, Dieu a pitié d’elle, et de ces fragments épars construit son Église. Sentant sa honte, l’humanité se reportait au beau temps de sa jeunesse, quand elle était sortie des mains de Dieu radieuse d’innocence, et soupirait après l’âge d’or : elle attendait le retour de cette félicité perdue. Dieu trompa et surpassa son attente ; il lui donna la Croix, un Sauveur Crucifié.

Les Juifs ont donné la tradition, l’histoire, la lettre ; les Grecs, la langue et la philosophie ; les Romains, le droit, l’administration, la hiérarchie, l’architecture, l’histoire.

(P. M.-J. Lagrange, o. p. Journal spirituel, 4 décembre 1880, Cerf, 2014, p.110)

 

15 février 2023

 

 

Les convictions et les sentiments qui doivent animer une vie religieuse : le P. Lagrange au P. Vincent, o.p.

« En termes paternels mais persuasifs, il me rappelait quelles convictions et quels sentiments devaient animer ma vie religieuse et mon labeur : foi intense, humilité sincère, ardent amour de Jésus, désir agissant d’être utile aux âmes suivant les directives de son Église, énergie résolue devant les épreuves, abandon aux desseins mystérieux de Notre Père qui est au ciel. » (L.-H. Vincent, o. p. Le père Marie-Joseph Lagrange. Sa vie et son œuvre. Parole et Silence, 2013, p. 604.)

 

 

14 février 2023

Saint Cyrille et saint Méthode – Apôtres des slaves – Copatrons de l’Europe

Fils de l’Orient, byzantins de patrie, grecs d’origine, romains par leur mission, slaves par leurs fruits apostoliques, ces deux saints frères constituent un exemple classique de ce que l’on indique aujourd’hui par le terme d’« d’inculturation » (Benoît XVI, 17 juin 2009).

L’Église catholique a mis plus d’un siècle pour répondre aux défis auxquels fut confronté le père Lagrange à la fin du 19esiècle ; il est remarquable de noter que bien des éléments de son intuition de départ se retrouvent aujourd’hui dans les solutions proposées par les documents magistériels relatifs à la pratique de l’exégèse biblique dans l’Église catholique ; à  savoir : ne renoncer en rien à la scientificité de l’étude du texte biblique, mais dans le même temps, ne renoncer en rien à la dimension théologale de l’étude du texte biblique – théologale, c’est-à-dire qui puisse rendre possible la rencontre de Dieu en Jésus-Christ.

(Olivier Artus, Exégèse et Fidélité « Le Père Lagrange dans l’histoire de l’Exégèse biblique catholique, extrait ». Journées Lagrange, 25-26 octobre 2015. Angelicum, volume 92, année 2015, fascicule 4.)

10 février 2023 

Jour-anniversaire du dies natalis du père Marie-Joseph Lagrange O. P.

P. Marie-Joseph Lagrange o.p. (1855-1938)

La messe mensuelle est célébrée par Fr. Manuel Rivero, o.p., pour la béatification du P. Lagrange auquel nous confions nos intentions personnelles à son intercession. Ce mois-ci une intention particulière pour Murielle est demandée. C’est la veille de la fête de Notre-Dame de Lourdes et la Journée mondiale des malades. Pensons à eux. Prenons soin d’eux. Le P. Lagrange savait ce qu’était la maladie, il fut souvent hospitalisé en raison d’une santé fragile.

Dans l’une de ses recensions concernant le P. Lagrange, Claude Savart (professeur d’histoire) écrit « Malgré sa volonté tenace de stricte obéissance, le Père Lagrange est ballotté jusqu’à la fin de ses jours dans les remous de la crise moderniste ou de ses séquelles. Il laisse néanmoins un magnifique exemple à la fois d’intelligence et de sainteté, qui n’a pas fini de porter des fruits ».

Avec la prière pour la glorification du P. Lagrange, « demandons au Père de hâter le jour où l’Église reconnaîtra publiquement la sainteté de sa vie ». Prière sur le site https://www.mj-lagrange.org

9 février 2023 

Souvenirs des Journées Lagrange. Rome octobre 2015

Fr. Manuel Rivero O.P.
La cause de béatification du père Marie-Joseph Lagrange (1855-1938), dominicain, fondateur de l’École biblique de Jérusalem
« Journées Lagrange », Institut français/Angelicum, Rome, les 23-24 octobre 2015
En commençant cette présentation de la cause de béatification du père Lagrange, je tiens à remercier Mgr Dominique Rey, évêque du diocèse de Fréjus-Toulon, pour sa proposition de ces Journées à Rome dans le but de faire connaître le fondateur et le maître de l’École biblique de Jérusalem dans les milieux intellectuels et académiques romains. En effet, des congrès et des colloques ont eu lieu à Jérusalem et en France, tandis que cette figure pionnière de l’exégèse est restée dans l’ombre dans les universités de la ville éternelle. Il s’agit ici de montrer l’apport du père Lagrange à l’intelligence de la foi, la sainteté de sa vie et l’intérêt de le mettre sur les autels comme modèle de foi chrétienne dans l’harmonie de la foi et de la raison.
Brève biographie
Qui est le père Lagrange ? Albert Lagrange est né à Bourg-en-Bresse le 7 mars 1855 en la fête de saint Thomas d’Aquin. Le Docteur Angélique restera sa référence théologique tout au long de son parcours d’exégète. Sa mère, Marie-Élisabeth Falsan, marquera spirituellement l’évolution de son fils par son sens de la miséricorde envers les pauvres et par sa ferveur mariale. D’origine lyonnaise, elle a transmis à Albert la dévotion à la Vierge Immaculée, qui deviendra la patronne de l’École biblique. Son père, Claude-Pierre Lagrange, notaire à Bourg-en-Bresse, donnera à Albert le sens du travail consciencieux et de la droiture ainsi que l’amour de la patrie française. Son parrain de baptême, Albert Falsan, oncle maternel et géologue, éveillera chez Albert l’intérêt pour les couches géologiques. Plus tard, il s’intéressera aux couches rédactionnelles. Élève au petit séminaire d’Autun, étudiant en droit à Paris, Albert Lagrange reçoit l’habit de saint Dominique au couvent royal de Saint-Maximin (Var) le 6 octobre 1879 des mains du prieur provincial, le frère Hyacinthe-Marie Cormier, qui assumera par la suite la charge de Maître de l’Ordre et qui sera béatifié par le saint pape Jean-Paul II en 1994. Ses reliques continuent d’apporter des grâces en cette université pontificale « Angelicum ». Ordonné prêtre à Zamora (Espagne) le 22 décembre 1883 pendant l’exil de la Province de Toulouse, le père Lagrange, en religion frère Marie-Joseph, fonde l’École biblique le 15 novembre 1890, en la fête de son saint patron de baptême. Un mot-clé apparaît déjà dans son discours inaugural : « progrès dans la vérité ». Pour le père Lagrange, Dieu a donné dans la Bible un champ infini de progrès dans la vérité. Toute sa vie sera consacrée à l’étude et à l’enseignement de la Parole de Dieu. Malade à la fin de sa vie, il aimait citer Dante en italien pour évoquer son retour « au bercail où il avait été agneau », c’est-à-dire au couvent de Saint-Maximin, d’où il partira vers le Père le 10 mars 1938.
Un goût passionné pour la Parole de Dieu
Alors que le modernisme menace de réduire la Bible à un texte simplement humain à étudier comme les autres ouvrages de la littérature mondiale, sans aucune dimension surnaturelle, le père Lagrange manifeste dès le premier numéro de la Revue biblique en janvier 1892 sa vision de la révélation : « L’Écriture sainte, comme substance divine, comme manne de l’intelligence, dans son dogme et dans sa morale, dans ses conseils pratiqués par les religieux, et par conséquent connus dans leur saveur intime, est vraiment pour l’Église catholique, après l’Eucharistie, le Verbe de Dieu qui nourrit » . Comment ne pas penser aux enseignements de l’Exhortation apostolique post-synodale Verbum Domini sur la sacramentalité de la Parole de Dieu ?
Le but de tous ses travaux sera de montrer comment la Bible a le Saint-Esprit pour auteur tout en passant par la médiation des langues et cultures du peuple d’Israël. Aussi s’investit-il dans la connaissance des langues anciennes (hébreu, grec, araméen, latin, arabe, égyptien…) et modernes (allemand, anglais, italien, espagnol). École pratique d’études bibliques, l’École biblique de Jérusalem conjoint les recherches sur les documents et les monuments.
Dans son encyclique « La joie de l’Évangile », le pape François exhorte l’Église à vivre « en sortie, en partance » et à « primerear » , c’est-à-dire à prendre des initiatives missionnaires. Dans son souci permanent du salut des âmes, le père Lagrange a enseigné en tirant du trésor de la Parole de Dieu du neuf et de l’ancien . Aussi s’est-il heurté à des incompréhensions voire des suspicions et des interdictions. Ayant commencé par le commentaire de l’Ancien Testament, il a vu son article sur le déluge typographié et tout prêt pour sa publication dans la Revue biblique arrêté et condamné à l’attente dans un carton . Ses réflexions sur l’universalité du déluge et sur la conception de l’histoire chez les Hébreux ont dû faire peur à certains. Le père Lagrange y apporte sa traduction à partir de l’hébreu et son commentaire riche en connaissance des religions et des civilisations orientales, pour aboutir au terme d’une étude technique du texte à des enseignements pour la vie spirituelle où « la miséricorde succède au temps de la justice » : « Enfin les Pères, prenant à la lettre l’universalité du déluge ont fait de l’Arche le symbole de l’Église, et les théologiens aiment à y voir le type de la Conception Immaculée de Marie. Toutes ces vérités demeurent ; quoi qu’il en soit de nos conclusions en matière de critique littéraire ou d’histoire, elles demeurent comme l’objet des méditations de tous les chrétiens, à commencer par les exégètes ».
L’œuvre de Dieu se fait dans la contradiction
Il faut rappeler la situation de l’enseignement religieux de l’époque en contradiction avec les découvertes scientifiques : « Le gamin de Paris qui récitait son catéchisme était tenu de dire que le monde a été créé quatre mille ans avant Jésus-Christ. Il savait parce qu’il apprenait à l’école primaire que ce n’était pas vrai » . C’est pourquoi Jacques Maritain, philosophe chrétien, qui a été ambassadeur de France près le Saint-Siège, disait que les manuels de théologie de cette époque-là représentaient « un pieux outrage à l’intelligence » .
Les difficultés du père Lagrange atteignirent leur sommet en l’année 1912, année terrible, où il dut quitter Jérusalem après une note de la Consistoriale qui demandait aux séminaires de retirer les ouvrages de quelques exégètes dont ceux du fondateur de l’École biblique sans donner d’explications.
Récemment le frère Augustin Laffay, historien, a découvert dans les archives du saint pape Pie X une lettre de dénonciation du père Louis Heidet envoyé à Pie X le 10 juin 1911 , ce qui provoqua sans doute la défiance du pape envers le père Lagrange. Il est à remarquer que dans sa lettre il n’y a aucune citation des enseignements du père Lagrange alors qu’il publiait régulièrement ses cours et ses recherches dans la collection « Études bibliques » et dans la Revue biblique. Il s’agit malheureusement d’un procès d’intention et de propos calomnieux et diffamatoires qui présentaient le père Lagrange comme rationaliste et hypocrite.
C’est en juillet 1913, que le père Lagrange fut autorisé à reprendre son enseignement à Jérusalem sans explication particulière après dix mois passés en France.
Il faut bien souligner que ni les enseignements ni le comportement du père Lagrange n’ont jamais fait l’objet de condamnation de la part des autorités de l’Église.
Ses idées développées dans « La Méthode historique » (1903), dans ses livres et articles passeront dans l’enseignement officiel de l’Église sur les genres littéraires notamment dans l’encyclique du pape Pie XII Divino Afflante Spiritu en 1943 et dans Dei Verbum (1965) du concile Vatican II.
Témoignages en faveur de l’œuvre du père Lagrange
Parmi les très nombreux soutiens aux intuitions et aux publications du père Lagrange, méritent d’être cités plusieurs papes . Léon XIII (+20 juillet 1903) brille dans l’histoire de l’Église comme promoteur des études bibliques. Il avait pensé faire de la Revue biblique l’organe officiel de la Commission biblique qu’il avait fondée. C’est lui aussi qui approuva la fondation de l’École biblique de Jérusalem. Pie XI (+ 1939) sera un fidèle abonné de la Revue biblique.
Le bienheureux pape Paul VI lui a rendu hommage lors de son discours aux membres de la Commission biblique pontificale le 14 mars 1974 : « Pour vous défendre des fausses pistes dans lesquelles l’exégèse risque de se fourvoyer, Nous allons emprunter les paroles d’un grand maître de l’exégèse, d’un homme dans lequel ont brillé de façon exceptionnelle la sagacité critique, la foi et l’attachement à l’Église : Nous voulons dire le père Lagrange » .
Le saint pape Jean-Paul II a fait ressortir son discernement dans des moments difficiles et sa critique saine : « Certains, dans le souci de défendre la foi, ont pensé qu’il fallait rejeter des conclusions historiques, sérieusement établies. Ce fut là une décision précipitée et malheureuse. L’œuvre d’un pionnier comme le père Lagrange aura été de savoir opérer les discernements nécessaires sur la base de critères sûrs » .
Les Maîtres de l’Ordre des prêcheurs ont aussi soutenu le père Lagrange dans sa mission . Lors de l’ « exode » du père Lagrange vers Dieu le Père le 10 mars 1938, le frère Martin-Stanislas Gillet, maître de l’Ordre, envoya une forte et émouvante lettre à tout l’Ordre pour mettre en lumière la trajectoire intellectuelle et spirituelle du fondateur de l’École biblique : « Tout le monde sait qu’il fut un exégète incomparable, un savant d’une rare culture, un esprit très fin, un travailleur acharné, mais la plupart ignorent qu’il fut en même temps et resta toute sa vie un saint religieux » .
Plus récemment, le cardinal Carlo Maria Martini, jésuite, ancien recteur de l’Institut biblique de Rome, archevêque émérite de Milan, a manifesté sa reconnaissance envers le père Lagrange dont « la prière était feu » : « J’estime que le père Lagrange est comme l’initiateur de toute la renaissance catholique des études bibliques. Penser qu’au début de ce renouveau il y a eu un saint nous encourage à vivre ces études avec l’attitude de saint Jérôme et des autres exégètes qui ont cherché le visage de Dieu dans les Écritures » .
Une multitude de témoignages furent rédigés en hommage au père Lagrange. Ses élèves l’aimaient. Parmi eux figurent le cardinal Eugène Tisserand et Jean Guitton.
Le rayonnement spirituel du père Lagrange
Outre son influence sur l’exégèse, le père Lagrange a impressionné son entourage par son exemple au quotidien : vie de prière intense, combat spirituel, travail acharné, magnanimité dans les conflits, humilité… Ses disciples l’ont vénéré aussi comme un maître spirituel : le frère Louis-Hugues Vincent O.P., le cardinal Eugène Tisserant , le philosophe et académicien Jean Guitton…
Parmi les témoignages d’admiration porteurs de symboles bibliques, je voudrais citer ici celui d’un frère dominicain espagnol, ancien élève du père Lagrange, le frère Vicente Berecibar : « Voici la silhouette du Maître vénéré, qui le 10 mars 1938 monta au Ciel, nous laissant comme un nouvel Élie, le riche héritage du merveilleux manteau de ses œuvres et de son esprit » ; ainsi que le témoignage du poète Paul Claudel, qui malgré son approche si éloignée de l’exégèse littérale, comparait le père Lagrange à Néhémie restaurant les murs de Jérusalem au retour de l’exil, avec le concours du grand-prêtre Elyashiv .
La sainteté du père Lagrange apparaît dans sa fidélité au travail. Par son travail, il a sanctifié l’exégèse ; il s’est sanctifié dans l’exégèse et il a sanctifié les autres par l’exégèse. C’est ainsi qu’il a incarné dans son existence la prière du Notre Père : « Que ton Nom soit sanctifié ». Le Nom de Dieu a été sanctifié en lui et par lui à travers le labeur jour après jour de l’interprétation de la révélation biblique.
Son attachement à l’Immaculée Conception et à la prière du Rosaire ont touché le cœur de ses contemporains. Il vivait en présence de la Vierge Marie. Très souvent il commençait la rédaction de chaque feuille de travail en inscrivant en haut de la page, dans le milieu : « Ave Maria ». Au couvent Saint-Étienne de Jérusalem, le père Lagrange priait chaque après-midi le rosaire à genoux dans le silence de la basilique, ce qui édifiait ses confrères.
Sa vie spirituelle transparaît nos seulement dans ses Souvenirs personnels rédigés en 1926 et dans ses journaux spirituels mais aussi dans ses commentaires exégétiques au service de la vérité de la foi chrétienne sans oublier son ouvrage de vulgarisation qui a illuminé le chemin de foi de beaucoup de prêtres et de laïcs L’Évangile de Jésus-Christ et qu’il serait bon de rééditer avec la synopse des pères Lagrange et Lavergne . La Constitution dogmatique sur l’Église Lumen Gentium enseigne que « la vraie dévotion procède de la vraie foi » .
Récemment le journal italien L’Avvenire l’appelait « le mystique de la Bible » à l’occasion de la présentation de son Journal spirituel inédit . L’exégèse, la théologie, la prédication, la morale et la mystique trouvaient en cet homme complet unité et harmonie.
Étudiant en théologie au couvent de Salamanque, le père Lagrange aimait se rendre en pèlerinage à Alba de Tormes pour vénérer les reliques de la grande mystique espagnole, sainte Thérèse d’Avila. C’est à ses enseignements qu’il devait sa formation à l’oraison et son initiation aux voies de la contemplation.
Nous venons de célébrer à Rome le 18 octobre 2015 la canonisation des parents de la petite Thérèse Martin. Dans son journal spirituel, le père Lagrange s’émerveille de la simplicité de Thérèse et il lui confie des intentions de prière : « Lu la vie de Ste Thérèse de Lisieux par elle-même. Première impression étrange. Elle parle tant d’elle, de ses goûts, des signes qu’elle a demandés et obtenus, de sa sainteté… avec tant de fleurettes, de jouets… on se sent si loin de S. Augustin ou de Ste Thérèse d’Avila… Mais le sens de tout cela est ‟ ama et fac quod vis ” (‟Aime et fais ce que tu veux ”, saint Augustin). Dans l’immense clarté d’amour divin où elle vivait, elle se voyait si peu de choses qu’elle pouvait parler d’elle sans le moindre amour-propre. Admirable leçon qu’elle donne plus que tout autre saint, avec un abandon d’enfant gâtée… » . Le père Lagrange, si sobre et scientifique dans ses propos, est entré par connaturalité dans l’âme mystique de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus.
De nombreux témoignages venus des cinq continents arrivent à l’Association des amis du père Lagrange dont le siège est au couvent de Nice. Des personnes appartenant à des milieux sociaux différents rendent grâce au Seigneur pour des grâces reçues dans leur vie spirituelle, familiale, professionnelle, ecclésiale. Nous aurions tort d’imaginer que les grâces attirées par le père Lagrange ne concernent que l’approche de la Bible ou l’adhésion au Christ, ce qui est déjà capital. Son témoignage de droiture et de fidélité éclaire aujourd’hui la conscience des employés devant de possibles injustices dans leur entreprise ou le choix à faire par des conjoints en crise. Il arrive que des malades témoignent des améliorations sans que cela ait pu devenir des cas de miracles reconnus par la science.
Où en est sa cause de béatification ?
L’intérêt pour sa cause de béatification a été exprimé par le chapitre général d’Avila en 1986. Le procès du diocèse de Fréjus-Toulon a été clôturé le 18 novembre 1992 et la Congrégation pour la cause des saints l’a validé en date du 3 décembre 1993. La Positio du père Lagrange a bénéficié des recherches du père Bernard Montagnes pour la biographie critique ; du père Maurice Gilbert, jésuite, pour le rapport théologique sur tous ses textes bibliques et théologiques et de Mgr Joseph Doré pour le rapport théologique sur ses vertus.
Que manque-t-il pour obtenir la béatification ? Un miracle évidemment. Il reste aussi un travail à accomplir pour actualiser et compléter la Positio sur le père Lagrange de manière qu’elle puisse passer après approbation à la Congrégation pour la cause des saints où sa vie et son œuvre seront examinées par des théologiens et des historiens.
Appelé « le nouveau saint Jérôme », des exégètes et des théologiens voient dans le père Lagrange non seulement un bienheureux et un saint mais aussi un docteur de l’Église.
Saint-Denis de La Réunion, le 7 octobre 2015, en la fête de Notre-Dame-du-Rosaire.
Fr. Manuel Rivero O.P.
Vice-postulateur de la cause de béatification du père Lagrange

9 février 2023 

 

« Ô mon Jésus, toutes les fois que j’ai voulu mettre du mien, j’ai mis obstacle à votre amour. C’en est fait, je vous abandonne ma volonté : tua voluntas fiat, non seulement parce que vous êtes mon maître absolu, mais encore parce que je vous ai abandonné ma volonté, parce que je vous aime et que tout mon bonheur est d’agir selon votre bon plaisir. »

(Marie-Joseph Lagrange o.p. 7 février 1881. Journal spirituel, Cerf, 2014).

Photo : Jésus et Jean-Icône de Sœur Marie-Paul-moniale bénédictine du mont des Oliviers-Jérusalem.

 

 

 

7 février 2023

 

 

« Ô Marie Immaculée, vous êtes ma bonne mère : je compte donc absolument sur vous, mais, en revanche, je ne puis rien vous refuser. Je vous promets donc d’être très fidèle à la grâce. Vrai pot sans couvercle ! »

(Marie-Joseph Lagrange o.p. 7 février 1881. Journal spirituel, Cerf, 2014).

Photo : Vierge de Miséricorde-Vincenzo Tamagni (15e)

 

 

4 Février 2023

« Vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde »

“C’est vous qui êtes le sel de la terre. Mais, si le sel s’affadit, avec quoi sera-t-il salé ? Il n’est plus bon à rien qu’à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes (Mt 5, 13). »

C’est peut-être à cette occasion, peut-être dans le sermon sur la montagne, que Jésus a fait du sel le symbole de l’action que devaient exercer ses disciples. Le sel conserve et assaisonne : cette seconde fonction est de beaucoup la principale, et c’est d’elle qu’il s’agit ici. « Le sel est bon », dit le Maître, et de fait, en arabe, le mot « salé » est employé constamment dans le sens de « bon ». Si par impossible il perdait sa saveur : aucun autre élément ne pourrait la lui rendre : c’est sa qualité propre, c’est lui qui donne de la saveur à toutes choses, rien ne peut lui en donner. Plutarque a même écrit que la vertu du sel donnait une âme aux viandes mortes qu’il faudrait sans cela jeter dans le fumier. Les disciples doivent être pénétrés de cette saveur, une haute valeur morale qui est l’âme de la vie humaine. S’ils venaient à la perdre, qui pourrait la leur rendre ? Personne ! Qu’ils soient donc animés de cette vertu active, un peu âpre, mais salutaire, et que néanmoins ils restent en paix les uns avec les autres. C’est le dernier mot de toute instruction dans saint Marc.

(Marie-Joseph Lagrange, o.p. L’Évangile de Jésus-Christ avec la synopse évangélique, extrait, Artège, 2017, pp. 307-308.)

Illustration : Ste Catherine de Sienne-Citation :

« Si vous êtes ce que vous devez être, vous mettrez le feu au monde entier. »

3 février 2013 

« Le Seigneur est ma lumière et mon salut » (Ps 26 (27).

« Mon Jésus, vous êtes ma seule lumière, car sans vous rien ne me contente et ma raison succomberait

P. Lagrange priant
Photo EBAF

bientôt aux énigmes du monde et de l’homme. Vous êtes mon seul appui, le seul être qui m’aime vraiment et puisse vraiment me sauver. Vous m’avez créé pour quelque chose, et ce quelque chose est vous connaître et vous aimer. Vous m’avez fait prêtre pour vous faire connaître. »

(Marie-Joseph Lagrange, o.p. Journal spirituel, Cerf, 2014.)

Illustration Ps 26. Diocèse de Luçon.

2 février 2023

Présentation du Seigneur au Temple

Le cantique de Syméon

« Lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël » (Luc 2, 29-32)

Les plus éclairés des païens imaginaient qu’au moment de la mort, l’âme, bientôt affranchie des liens du corps, entrait plus avant dans la connaissance des choses divines. Cet espoir fut cette fois réalisé par la grâce de l’Esprit. Siméon voit plus loin que Zacharie, dont le regard s’arrêtait aux frontières d’Israël. Prenant l’enfant dans ses bras, ce véritable héritier d’Isaïe salue celui qui répandra le salut sur tous les peuples, étant la lumière des nations, sans cesser d’être la gloire d’Israël. Mais cette lumière ne percera pas toutes les ténèbres. Selon la force du terme légal, dès cette heure le premier-né de Marie est sanctifié à Dieu. C’est le terme dont Jésus se servira à la veille de sa Passion : « Je me sanctifie moi-même pour eux, afin qu’ils soient aussi sanctifiés en vérité (Jn 17-19) » Or la consécration au Dieu saint se fait par le sacrifice. Les premiers-nés de l’homme ne sont pas immolés, et Jésus lui-même est racheté pour cinq sicles au jour de sa Présentation, mais l’immolation l’attend dans l’avenir. Le vieillard Siméon en eut le pressentiment comme du résultat final de la contradiction qui devait conduire Jésus à la mort, une mort salutaire à tant d’autres. Et parce que l’enfant paraissait endormi dans la passiveté de son âge, c’est au cœur de sa Mère qu’il adresse le trait douloureux de sa prophétie : « Voici qu’il est placé pour la chute et le relèvement d’un grand nombre en Israël et pour être en butte à la contradiction, et ton âme sera transpercée d’un glaive. » Première douleur profonde de la Mère, frappée la première en attendant d’être associée à la Passion de son Fils.

(Marie-Joseph Lagrange, o. p. L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse, extrait, Artège, 2017)

Illustration : Présentation du Seigneur. (Portrait) Fra Angelico

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