Écho de notre page Facebook : septembre 2023

30 septembre 2023

Fête de saint Jérôme (env. 347-420), auteur de la Vulgate

Le P. Lagrange, un nouveau saint Jérôme ?

Il est, pour moi, le saint Jérôme de notre temps. Il inaugure une période d’une exégèse scientifique en lien avec les bases théologiques. Une nouvelle théologie se forme sur l’exégèse. Lagrange, par son obéissance à l’Église en tant que pionnier dans cette nouvelle perspective, témoigne, dans sa personne même, ce lien visible entre exégèse scientifique et foi. C’est un nouveau saint Jérôme et plus grand même que saint Jérôme, car il possède une science humaine qu’il doit traduire dans un langage théologique nouveau. (Témoignage de Jean Guitton de l’Académie française.)

 

 

Le père Lagrange comparé à saint Jérôme

En vue de donner grand éclat à la célébration à Rome du seizième centenaire de saint Jérôme, le pape Benoît XV, qui avait, en 1914, arraché le P. Lagrange à la déportation par les Turcs, sollicita le grand universitaire qu’était un autre évêque belge, le cardinal Mercier, de présenter solennellement saint Jérôme et son œuvre. Le cardinal reconnaissait n’être pas lui-même un exégète, mais il avait toujours suivi, compris et appuyé le P. Lagrange, dont il mesurait l’importance de l’œuvre dans l’Église du XIXe siècle. Le grand cardinal ne pouvait comparer l’opportunité, l’importance et l’influence du père Lagrange qu’à celles de saint Jérôme, si profondément attaché à l’Écriture pour qu’en vivent les croyants. (Témoignage de fr. Ephrem Lauzière O. P.)

Le plus grand depuis saint Jérôme

De nos jours, quand éclata soudain, au cœur de la chrétienté, la crise biblique, l’Ordre eut alors la gloire de posséder, en la personne du P. Lagrange, un religieux exemplaire qui pouvait d’autant mieux combattre ces nouveaux hérétiques sur leur propre terrain, que ceux-ci, par la plume de leurs chefs de file, n’avaient jamais osé contester son savoir ni son orthodoxie.

On se rendra mieux compte, à mesure que les années passeront sur la tombe du père Lagrange, et que ceux qui l’ont le mieux connu pourront parler de lui plus librement, sans crainte d’offenser sa réelle modestie, de quelle hauteur il dépasse les exégètes de ce temps dont les meilleurs l’ont toujours tenu pour un maître. (Témoignage de Mgr Bruno de Solages, 1922.)

Nota : C’était en 1922. Aujourd’hui, le travail du P. Lagrange a été un tremplin pour progresser dans la Vérité. Il ne faut pas l’oublier.

P. Marie-Joseph Lagrange o.p. (1855-1938)

Le 10 novembre 1990, à Toulon, à l’occasion d’un colloque pour le centenaire de la création de l’École biblique de Jérusalem, le P. Bernard Montagnes, o. p., docteur en philosophie et docteur en histoire de l’art, membre de l’Institut historique dominicain prononce une conférence au cours de laquelle il mentionne : « Il me paraît encore plus important de dire que le P. Lagrange est l’un de ceux auquel nous devons essentiellement que la Bible nous soit devenue familière et je pense que lorsque nous ouvrons la Bible de Jérusalem nous devrions avoir une pensée de gratitude pour l’École biblique de Jérusalem et pour son fondateur ».

« J’estime que le père Lagrange est comme l’initiateur de toute la renaissance catholique des études bibliques. Penser qu’au début de ce renouveau il y a eu un saint nous encourage à vivre ces études avec l’attitude de saint Jérôme et des autres saints exégètes qui ont cherché le visage de Dieu dans les Écritures. » (Cardinal Carlo Maria Martini s.j. à Fr. Manuel Rivero o.p., le 22 juillet 2007. Cité dans le Journal spirituel du Père Lagrange.)

 

 

25 septembre 2023

« Dans l’ignorance où nous sommes de Dieu, il nous est doux de savoir
qu’il est Père, par conséquent infiniment tendre et indulgent ; Fils incarné
pour nous, vivant en nous pour nous faire participer à ce qu’il tient du Père ;
Esprit vivifiant et sanctificateur, principe de charité. Oh ! Que cette
révélation de la Trinité des personnes divines nous est utile, et qu’il en faut
remercier Notre Seigneur ! » (Journal spirituel, Cerf, 2014,10 octobre 1895).

La dévotion mariale du père Lagrange plongeait ses racines dans le mystère trinitaire, source et sommet de la foi chrétienne.

Pour le frère Lagrange, Marie est à situer dans le mystère du Christ et de l’Église comme le dira plus tard le concile Vatican II dans sa Constitution Lumen gentium. (extrait de Manuel Rivero, o. p., Le père Lagrange et la Vierge Marie, Cerf, 2012)

Photo : Vierge Marie et l’Enfant Jésus. S’abandonner à l’amour de Dieu.

 

21 septembre 2013

en la fête de saint Matthieu, apôtre et évangéliste.

Le premier évangile fut toujours le plus cher à la piété et aux prédicateurs. Saint Dominique le possédait avec les épîtres de saint Paul dans le mince bagage qu’il portait lui-même au cours de ses marches apostoliques.

Le Christ de saint Matthieu est moins familier que celui de saint Marc, si indulgent envers des disciples lents à comprendre ; il apparaît moins que dans saint Luc comme le Sauveur du monde, et il n’est pas déclaré le Verbe comme dans saint Jean. Il est le révélateur d’une doctrine essentiellement intérieure, et le fondateur de l’institution chrétienne, établie sur le fondement de Pierre, auquel sont associés les apôtres.

Doux et humble de cœur, il n’éteint pas la mèche fumante, mais il résiste aux hypocrites et les démasque. Il est le Messie, législateur, non pas comme Moïse, au nom d’un autre, mais en Dieu : le Fils unique qu’Israël a méconnu, et que l’Église écoute.

Et si Matthieu n’a pas le réalisme expressif de Marc dans ses récits, ni au même degré la grâce attendrie de Luc, ni le regard de Jean fixé sur les choses divines, il a plus de paroles de Jésus, simples et droites, et si pénétrantes qu’on croit les entendre, avec l’accent et presque les intonations qu’elles avaient sur ses lèvres.

Aussi le plus ancien témoin de la tradition ecclésiastique, Papias, a-t-il vu dans l’évangile de Matthieu surtout les Paroles divines.

(Marie-Joseph Lagrange des Frères prêcheurs. Avant-Propos de la première édition de l’Évangile selon saint Matthieu. Gabalda. 1941.)

 

18 septembre 2023

 

 

Pensée du jour
« La foi… pour tous, savants ou ignorants, la difficulté principale est la même, croire au monde à venir et vivre selon cette croyance. Voilà pourquoi, en dépit des subtilités, la foi est si bien définie : « La foi est la substance des choses à espérer » (Épître aux Hébreux 11, 1). Quelle profondeur ! »
(Marie-Joseph Lagrange, o.p. Journal spirituel).

 

 

 

14 septembre 2023 

« La grâce ne coule pas comme un torrent qui ravage, mais comme une eau
tranquille qui se répand dans des canaux disposés avec art : les plantes les
plus rapprochées du réservoir sont arrosées avec plus d’abondance : ainsi
importe-t-il de se tenir, le plus possible, en communication avec ceux que
Dieu a chargés de nous distribuer la grâce avec leurs paroles, les sacrements
et les prières »

(P. Lagrange. Journal spirituel. Cerf. 2014).

 

10 septembre 2023

Dimanche, nous serons le 10 septembre 2023 – Jour-anniversaire pour les adhérents et les sympathisants de l’association. En union de prières avec Fr. Manuel Rivero, o. p. qui célèbre la messe mensuelle pour la béatification du père Marie-Joseph Lagrange, o. p.

Toutes les intentions particulières sont reçues sur cette page ou directement à manuel.rivero@free.fr

Le testament spirituel du P. Lagrange
« Ave Maria ! Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ! »
« […] Je déclare devant Dieu que mon intention est de mourir dans la
sainte Église catholique, à laquelle j’ai toujours appartenu de cœur et
d’âme depuis mon baptême, et de mourir fidèle à mes vœux de pauvreté, de
chasteté et d’obéissance, dans l’Ordre de Saint Dominique. Je me
recommande pour cela à mon bon Sauveur Jésus, et auprès de sa très
Sainte Mère, toujours si bonne pour moi. »

Le 10 septembre dans la vie du père Lagrange :

10 septembre 1879. Saint-Maximin : Il arrive au couvent avec le P. Cormier, provincial, qui vient prêcher la retraite conventuelle.

10 septembre 1896. Jérusalem : Conversation du patriarche Piavi avec Athanase Vanhove, A.A., au sujet de l’École biblique.

10 septembre 1906. Rome : Me Cormier au P. R. Boulanger, au sujet de l’École biblique de Jérusalem.

10 septembre 1929. Marseille : S’embarque le 12 vers Jérusalem, après un séjour en France où il a effectué diverses missions.

10 septembre 1935. Jérusalem : Les médecins jugent nécessaire son départ en Europe.

10 mars 1938. Saint-Maximin : Au retour de conférences et de causeries données à Montpellier, le père Lagrange succombe à une infection pulmonaire après avoir servi son Seigneur jusqu’aux derniers jours.

8 septembre 2023

Nativité de la bienheureuse Vierge Marie

Le père Lagrange s’était posé la question d’écrire un livre sur la Vierge Marie mais il y avait renoncé à cause des difficultés posées par les textes apocryphes (JS, Jaffa, 8 octobre 1930). Dans son Avant-propos au Commentaire de l’évangile selon saint Jean, le frère Lagrange met en lumière à la suite d’Origène le rôle de la Vierge Marie dans l’intelligence des Écritures :

Il sied d’être timide à la suite d’Origène. Osons le dire : les évangiles sont la part choisie de toutes les Écritures, et l’évangile de Jean est la part choisie parmi les autres ; nul ne peut en acquérir l’esprit s’il n’a pas reposé sur la poitrine de Jésus, et s’il n’a reçu de Jésus Marie pour sa mère. Le nom de Marie, cependant, ranime la confiance. C’est par elle que nous implorons la lumière surnaturelle nécessaire à l’intelligence, quelle qu’elle soit, d’un livre si chargé de sens divins. (MJ Lagrange, évangile selon saint Jean, Paris, Gabalda, 1927, avant-propos)

(Manuel Rivero, Le père Lagrange et la Vierge Marie, Cerf, Préface de Mgr Nicolas Brouwet, 2012.)

Marie, aurore de la Rédemption

« Cette fête, particulièrement vivante dans la piété populaire, nous conduit à admirer en Marie Enfant l’aurore très pure de la Rédemption. Nous contemplons une petite fille comme toutes les autres, et dans le même temps l’unique, celle qui est « bénie entre les femmes » (Lc 1, 42) », avait souligné le Saint Pape Jean-Paul II lors de l’audience générale du 8 septembre 2004. Le Souverain Pontife polonais dressait alors un parallèle entre le berceau de Marie Enfant et le devoir qui incombe à chaque homme de « protéger et défendre les fragiles créatures » que sont les enfants dans le monde (extrait de Vatican news).

Photo : Mosaïque de la Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie, Pietro Cavallini, 1291-1296.

 

6 septembre 2023 

Ma conclusion était toujours prière, obéissance : la prière c’est Jésus, l’obéissance c’est Jésus. D’où me vient cette certitude interne et inébranlable que l’amour de Jésus est la racine de la sainteté, le principe de la justice ? Sans lui, jamais je ne me détachais des créatures : il faut qu’à toute heure, à tout instant, il me sauve, me rachète, me guérisse.

Ô très pure Marie, donnez-moi cet amour !

(P. Lagrange, Journal spirituel, Cerf, 2017.)

 

5 septembre 2023

Texte en rediffusion, toujours actuel.

Faut-il s’intéresser au père Lagrange ? par Fr. Jean-Michel Poffet o. p. Directeur de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem 1999-2008.

S’il est un domaine d’actualité, c’est bien celui des rapports entre l’intelligence et la foi. De tout temps l’Église a cherché à honorer la quête intellectuelle à l’intérieur de l’acte de foi : pensons à saint Irénée, à saint Augustin, à saint Thomas. Mais notre époque vit cette question à nouveaux frais : à l’intérieur de notre Église et à l’extérieur. À l’intérieur, car depuis plus d’un siècle (c’était l’époque du père Lagrange), la critique historique ne cesse de poser des questions nouvelles, à partir de l’archéologie, des découvertes littéraires ou épigraphiques. Comment comprendre la Bible ? En quoi est-elle historique ? Quelle est la part littéraire des récits ? Quel fondement historique peut-on et doit-on défendre ? À l’extérieur de l’Église où le contact avec les autres traditions religieuses devient quotidien. La religion est souvent associée au fanatisme ou au fondamentalisme. Enfin, l’approche subjective et affective des traditions religieuses est de plus en plus envahissante. Dans ces conditions, donner aux fidèles l’exemple du père Lagrange revêt une importance et une actualité particulières. Il a, durant toute sa vie, cherché la vérité à travers l’étude de la Bible. Il a accepté les questions posées par les savants de son temps, cherchant non seulement à leur répondre mais aussi à mieux poser les questions. Pour lui, la vérité ne peut être qu’une : il n’y a pas une vérité pour les savants et une autre pour les croyants. Le père Lagrange soulignait la nécessité d’une recherche patiente de la vérité par l’étude. Et il le faisait sans crainte, puisant son courage dans la prière et la confiance qu’un jour la vérité triompherait.

Ce qui est paradoxal, c’est qu’il ait dû mener son combat au cœur de l’Église en étant soupçonné, inquiété (jamais condamné), et malgré tout il a gardé confiance dans l’Église, faisant peu de cas d’un triomphe solitaire. Il préférait s’effacer s’il le fallait. Mais jamais il n’a écrit contre sa conscience. Impressionné par sa fidélité et son obéissance, le pape l’a confirmé dans sa mission. Le père Lagrange est donc un exemple impressionnant de quête de la vérité, patiente et fidèle, au service d’une foi éclairée et en dialogue avec les questions posées par la culture. N’avons-nous pas besoin d’un tel exemple aujourd’hui ?

Les pèlerins qui passent à l’École biblique de Jérusalem et au couvent Saint-Étienne s’intéressent-ils au père Lagrange ?

Je dois à la vérité de dire que le père Lagrange n’est pas une personnalité mondialement connue comme Mère Teresa. Les foules ne se précipitent pas pour venir se recueillir sur sa tombe. Et pourtant, je suis frappé de voir combien les prêtres – jeunes et anciens –, les biblistes et tant de chrétiens soucieux de se former dans la foi, nous interrogent sur le père Lagrange. Et très vite on en vient aux questions d’aujourd’hui : science et foi, lecture critique et lecture croyante des Écritures etc. Le père Lagrange apparaît alors comme quelqu’un qui non seulement a tracé un chemin de lumière dans le passé, mais bien comme un frère aîné « infatigable interprète des textes sacrés » comme le dit l’inscription de sa pierre tombale.

Pouvez-vous citer quelques témoignages de personnes marquées dans leur foi par l’exemple et par l’œuvre du père Lagrange ?

Je sais que le pape Jean-Paul II avait une immense admiration pour l’exemple et l’œuvre du père Lagrange. Citons aussi ses premiers collaborateurs, en particulier le père Vincent, frère et ami de toujours. Les ténors de la troisième génération de l’École biblique : le père de Vaux, archéologue et exégète de l’Ancien Testament, et le père Benoit, exégète du Nouveau Testament, ont toujours eu une vénération pour le fondateur de l’œuvre à laquelle eux-même allaient donner leur vie. Pensons aussi au père Montagnes qui a consacré tant d’articles et d’ouvrages au père Lagrange : on y repère une profonde estime pour le frère et le Maître. Je n’ai pas la prétention de me comparer à ces grandes figures. Mais que l’on me permette de dire qu’à peine nommé directeur de l’École biblique, alors que j’enseignais à l’Université de Fribourg en Suisse, je me suis mis à étudier les écrits de notre fondateur : j’y ai découvert une inspiration quotidienne. Sa figure m’apparaît aujourd’hui beaucoup plus grande que ce que j’en percevais auparavant. Le père Lagrange reste de nos jours encore, dans ses intuitions fondamentales, d’une justesse et d’une actualité étonnantes. (Source : la Revue du Rosaire, n° 193, septembre 2007)

« J’ai toujours mis mon recours en Marie… » (P. Marie-Joseph Lagrange, septembre 1912)

« La prière ! Cesser de prier, c’est la ruine… 
Prier par Jésus et en Jésus, c’est le secret, prier par Marie…
L’Amour s’est déversé sur elle et que ne fait-on pas pour ceux qu’on aime…
Toute ma vie est là.
La réflexion est impuissante, tout élan, toute énergie sombre.
Un regard de Marie et tout renaît…
Quelle expérience et quelle leçon, quelle manifestation du surnaturel. Marie est le Signe ! » (P. Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, 24 septembre 1898, Notre-Dame de la Merci)

 

1er septembre 2023

Oh que le moi est haïssable ! Que ces retours sur moi doivent froisser le Cœur de Jésus ! Vraiment il y a bien à s’étonner qu’il supporte tant d’orgueil… Oleum effusum nomen tuum : Ton nom est une huile qui s’épanche (Cantique des Cantiques 1,2) ; Ô Marie Immaculée !

Marie-Joseph Lagrange, o. p. Journal spirituel, Cerf, 2017.

Pour les grâces reçues, une adresse : manuel.rivero@free.fr

Comme une huile de lampe
Se transforme en lumière,
Que nos vies soient prière
Et clarté dans la nuit !

(Jean-Claude Giannada)

Écho de notre page Facebook : août 2023

30 août 2023

Merci à tous. Vous êtes plus de 2000 amis à partager cette page créée pour faire connaître ce grand savant, homme d’une foi rayonnante que fut le père Lagrange, fondateur de l’École biblique de Jérusalem de renommée internationale.

Merci pour l’intérêt que vous lui portez

Pour faire avancer la Cause du père Lagrange nous avons besoin de vos témoignages de grâces reçues par son intercession. Nous en avons déjà mais elles ne sont pas encore assez nombreuses.

Vous connaissez tous la prière d’intercession, spécialement évoquée chaque mois le 10 et que vous pouvez trouver facilement sur le site internet : www.mj-lagrange.org

Nous faisons appel à vous tous, spécialement aux communautés religieuses dominicaines dont certaines ont souvent organisé des temps de prière pour demander l’intercession du père Lagrange.

Avec l’aide de la bienheureuse Vierge Marie, tant aimée par le père Lagrange.

 

 

25 août 2023

L’implantation dominicaine au Caire est due au père Lagrange

Un Dominicain égyptien

Dès avant le début de la Seconde Guerre mondiale, les Dominicains élaboraient des projets ambitieux pour leur antenne du Caire. Anawati y trouvera tout naturellement sa place.

L’implantation dominicaine au Caire est due au père Marie-Joseph Lagrange (1855-1938), le fondateur de l’École biblique de Jérusalem. En 1890, il avait eu la formidable intuition de renouveler l’étude du Livre saint en encourageant une enquête sur les pays de la Bible dans tous les domaines : histoire, géographie, épigraphie, archéologie, etc. Dès le départ, le projet était extensible : les pays de Bible ne se limitent à la vieille Terre sainte, telle que le Moyen Âge l’avait définie. Elle incluait tout

le Proche-Orient, y compris la Syrie, l’Irak et l’Arabie actuels. L’Égypte manquait à l’appel au cours des premières années de déploiement de l’École biblique, et la proposition du père Lagrange paraissait aller de soi. Elle aussi était un pays de la Bible. Mais l’Égypte était plus encore, et sur ce point l’archéologie antique n’avait rien à dire, c’était aujourd’hui un foyer culturel et religieux majeur.

L’argument du père Lagrange est formulé ainsi : Il serait honorable pour l’Église catholique de posséder au Caire un Institut d’études sur l’Égypte chrétienne, sans parler des études d’égyptologie ancienne et des études arabes. Le Caire est de beaucoup le foyer intellectuel le plus important de l’islamisme ; il possède une très importante école d’égyptologie. L’Église doit aussi y être représentée par un Institut d’études.

La mise en œuvre du projet incombera au père Antonin Jaussen (1871-1962, dominicain, ethnologue et archéologue), enseignant à l’École biblique.

Dans le concert bigarré des missions religieuses, l’ordre des Dominicains se distingue à plus d’un titre. Il relève le défi posé par l’offensive scientiste de la seconde moitié du XIXe siècle en s’investissant sans crainte dans les disciplines scientifiques les plus récentes. Nommé en 1890 au couvent de Jérusalem, Marie-Joseph Lagrange fonde l’École biblique dont le projet est à la fois original et audacieux : il s’agit d’étudier sur place les pays de la Bible en mettant à profit toutes les sciences modernes, de la linguistique à l’archéologie et l’histoire. En pleine crise moderniste, les Dominicains s’engageaient de cette manière à appliquer eux-mêmes à la Bible la critique historique plutôt que de rester sur la défensive. En toute logique, ce principe aurait dû guider leurs travaux en Égypte. Mais il n’en est rien.

Extrait de Georges Chehata Anawati (1905-1994) Dominicain et Égyptien par François Zabbal, Institut du monde arabe.

Voir : Jean-Jacques Pérennès, Georges Anawati (1905 – 1994), un chrétien égyptien devant le mystère de l’islam, Éditions du Cerf, Paris, 2008

24 août 2023

Pensée du P. Lagrange

 

 

C’est par la foi qu’on se soumet à la volonté de Dieu, lui remettant tout. Mais si c’est dans le secret espoir de le décider à faire tourner comme je veux, est-ce un véritable abandon à sa volonté ? Comme il plaira ô Dieu ! Sans réserve. Cependant il faut toujours souhaiter que sa volonté se fasse et que son règne arrive, souhaiter d’être un instrument docile dans sa main. (Marie-Joseph Lagrange, o. p. 24 août 1910, Journal spirituel, Cerf, 2014.)

 

 

 

15 août 2023

Assomption de la Vierge Marie

Notre-Dame de l’Assomption, patronne principale de la France

Le père Lagrange, habité par la spiritualité mariale, vivait en présence de la Mère de Dieu. Il se plaisait à débuter chaque page d’écriture en faisant mémoire des paroles de l’ange Gabriel à Marie de manière à vivre en état d’Annonciation : « Ave Maria ».

Ressuscité d’entre les morts, Jésus, dans une démarche de piété filiale, a honoré sa Mère dans son âme et dans son corps dans le mystère de l’Assomption. Désormais la Vierge Marie partage sa victoire sur la mort sans connaître la corruption du tombeau. Là où est Jésus glorifié, là se trouve aussi sa Mère, glorifiée à son tour par l’Esprit Saint sous le regard aimant du Père.

Prions pour l’Église missionnaire, figurée par la Vierge Marie, disciple elle-même de Jésus-Christ, son Fils. (Manuel Rivero, o.p. Le père Lagrange et la Vierge Marie, extrait du quatrième mystère glorieux, Cerf, 2012.)

10 août 2023 : Jour-anniversaire de la naissance au Ciel du P. Lagrange.

Vous le savez, ô Jésus, j’ai essayé de vous comprendre mieux, de vous faire connaître, de défendre la vérité de votre Évangile… (P. Lagrange. Journal spirituel.)

En union de prières avec Fr. Manuel Rivero, o.p. Aujourd’hui, messe célébrée aux intentions particulières confiées à l’intercession du P. Lagrange par ses amis et pour qu’un miracle vienne confortée la reconnaissance par l’Église de sa sainteté.

8 août 2023

Saint Dominique, prêtre et Fondateur

Saint Dominique

Le fruit de la fête doit être un plus grand désir de connaître, d’aimer et d’imiter N.S. qui a daigné avoir une vocation apostolique que St Dominique a reproduite si parfaitement.

Autel de la Vierge noire. Église Notre-Dame, Bourg-en-Bresse

Autel de la Vierge noire. Église Notre-Dame, Bourg-en-Bresse

Ô mon Bienheureux Père, vous m’avez dit votre secret ! Seule la très Sainte Vierge peut former une image aussi parfaite de son fils Jésus. Cette grâce victorieuse, efficace, cet amour toujours triomphant, cette générosité, ce zèle, cette prière toute-puissante, c’est vous qui l’avez donnée à St Dominique. Cette fête a été, l’année dernière, un point décisif : en bien ou en mal, je n’ose le décider. Je vous prie de me pardonner, ô mon Père, toutes mes fautes contre vos saintes institutions. Donnez-moi votre esprit, votre esprit, votre esprit ! Ô Père, forme de tous vos enfants, donnez-nous votre esprit ! Combien les plus belles réformes sont loin de votre vie ! Donnez-nous votre esprit ! (4 août 1882. Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, Artège 2017)

 

4 août 2023

L’INFLUENCE DU SAINT CURÉ D’ARS

DANS LA VIE ET L’ŒUVRE DU PÈRE LAGRANGE

Fr. Manuel Rivero o.p.

Vice-postulateur de la cause de béatification du père Lagrange

Dès sa tendre enfance, la vie d’Albert Lagrange a été marquée par le curé d’Ars, comme il le raconte dans son Journal spirituel. Sa mère, Élisabeth, qui avait déjà perdu deux bébés, craignant pour la vie de son fils l’avait conduit à Ars : « Je suis né le 7 mars, jour de la Saint-Thomas ; j’ai été baptisé le 12, fête de saint Grégoire et, selon l’usage, sans doute consacré à Marie à l’autel de la Vierge noire. Je me trouvais donc, dès le début sous la protection de saint Joseph. Ma mère m’a mis en vœu pendant trois ans, me faisant porter le bleu et le blanc en l’honneur de Marie. Quelle douce pensée, et n’est-ce pas l’origine de sa tendresse pour moi !  Mes parents m’ont amené en pèlerinage à Ars, le saint curé m’a béni, et peut-être guéri d’une fatigue d’entrailles. »

Selon le frère L.-H. Vincent o.p., disciple, confident et ami du frère Lagrange pendant quarante-cinq ans, le curé d’Ars aurait dit à sa maman : « L’enfant ne mourra pas, il deviendra un jour une lumière pour l’Église. » La sœur du frère Lagrange, Thérèse Lagrange, affirmait tenir ces paroles de sa mère peu avant la mort de celle-ci.

Au cours de l’été 1879, avant d’entrer dans l’ordre de saint Dominique, Albert Lagrange, alors séminariste à Issy-les-Moulineaux, avait fait avec sa mère un pèlerinage à Ars pour demander au saint curé Jean-Marie Vianney la grâce du discernement : « Pendant les vacances, j’allai à Ars avec ma mère, et je fus bien touché. »

Au couvent de Saint-Maximin, le frère Marie-Joseph Lagrange, novice, se confie à l’intercession du curé d’Ars afin d’obtenir l’humilité. Lors de la pose de la première pierre de l’École biblique de Jérusalem, le 5 juin 1891, le frère Lagrange y déposa un fragment de la soutane du curé d’Ars.

Tout au long de sa vie, le frère Lagrange œuvra pour le salut des âmes par l’interprétation de la Parole de Dieu. À la suite du curé d’Ars, il travailla à la sanctification du Peuple de Dieu. Les frères dominicains qui ont vécu avec lui témoignent de sa disponibilité quand il s’agissait d’écouter la confession d’un prêtre alors que le portier du couvent craignait de déranger ce frère si occupé par ses recherches et ses publications. À l’exemple du curé d’Ars, le père Lagrange aimait profondément le sacerdoce et les prêtres.

Le 25 mars 1992, en la fête de l’Annonciation du Seigneur, Monseigneur Guy Bagnard, évêque de Belley-Ars, a demandé la béatification du père Lagrange au pape Jean-Paul II.

Confions au saint curé d’Ars et au père Lagrange les vocations religieuses et sacerdotales dont l’Église a besoin.

Photo : Le Saint Curé d’Ars offrant son cœur à la Vierge Marie (détail). Basilique Saint-Sixte-Ars-sur-Formans (Ain)

Autel de la Vierge noire, église Notre-Dame, Bourg-en-Bresse.

1er août 2023

« Cœur immaculé de Marie, priez pour nous ! »

« C’est parce qu’elle a eu « le cœur brisé » que le Cœur Immaculé de Marie aime les âmes » (Marie-Joseph Lagrange. Journal spirituel).

« C’est par le Cœur Immaculé de Marie qu’il faut demander la paix, parce que c’est à Lui que le Seigneur l’a confiée ! » (Jacinta à Lucie. 1919).

Le Cœur Immaculé de Marie, si cher à la dévotion du père Lagrange, brille comme le lieu de la rencontre de Dieu et de l’humanité, lieu fécond d’où sortira le salut du monde.

(Fr. Manuel Rivero, o. p. Le Père Lagrange et la Vierge Marie. Méditations des mystères du Rosaire. Cerf. 2012.)

Écho de notre page Facebook : juillet 2023

31 juillet 2023

Saint Ignace de Loyola et le serviteur de Dieu Marie-Joseph Lagrange ont tous deux donné l’exemple d’un attachement sans réserve à l’Église et au pape.

 

Saint Ignace de Loyola, priez pour moi (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel)

 

 

 

L’enseignement en paraboles pour la foule

Jésus dit tout cela aux foules en paraboles, et il ne leur disait rien qu’en parabole, afin qu’il fût accompli ce qui avait été dit par le prophète : « J’ouvrira ma bouche en paraboles, je dirai à haute voix des choses cachées depuis la création ». (Matthieu 13, 34-35)

Dans l’évangile selon saint Matthieu, (Lecoffre, 1941) du P. Lagrange, quelques notes relevées : Jésus employait avec les foules le mode qui leur convenait, comme a compris Jérôme : et usque hodie turbae in parabolis audiunt. (…) Matthieu a insisté sur le caractère révélateur des choses cachées qu’avaient les paraboles pour qui les comprenait et fixait le passé à la création du monde, ce qui mettait dans un haut relief l’enseignement de Jésus. Israël péchait, Dieu le punissait et savait le mettre de nouveau sur le chemin du salut. De même Jésus exposait les mystères du règne de Dieu, caché jusqu’à présent, révélés aux seuls disciples, jusqu’au jour d’une révélation plus étendue (Eph. 3, 4 ss). Matthieu considérant la pratique de Jésus comme l’accomplissement d’une prophétie, sa pensée était sans doute que le programme que se traçait le psalmiste n’était qu’une esquisse de ce que le Messie devait faire beaucoup mieux selon les desseins de Dieu. C’est ce qu’on est convenu de nommer le sens typique.

 

28 juillet 2023

Le père Marie-Joseph Lagrange, o. p. : Un goût passionné pour la Parole de Dieu

Le père Lagrange a partagé sa foi et ses connaissances toute sa vie au service de l’Évangile. À la suite de saint Thomas d’Aquin, il a transmis aux autres le fruit de sa divine contemplation. Religieux dominicain, il aimait la vie communautaire. Homme complet, comme aimait à en témoigner son disciple le frère Roland de Vaux, il établit l’École pratique d’études bibliques au couvent dominicain Saint-Étienne de Jérusalem. Pour lui, l’exégète non seulement étudiait la Bible dans les bibliothèques et sur le terrain en Israël, mais il l’accueillait dans son cœur dans la prière et la lectio divina de manière à la communiquer dans la prédication. Il fallait surtout que cette Parole soit mise en pratique dans la charité fraternelle comme le dit l’apôtre saint Jacques : « Mettez la Parole en pratique. » La Traduction Œcuménique de la Bible (T.O.B.) traduit : « Soyez les réalisateurs de la Parole. » Ici le mot grec utilisé par saint Jacques peut nous surprendre : poiétai. Il s’agit de devenir « les poètes du Verbe ». Le verbe grec poiesis  se traduit en français par faire. Il est beau de relier l’action à la poésie. La poésie représente une création. Les saints embellissent le monde en le transformant par l’énergie de l’amour. Dans son Journal spirituel, le père Lagrange revient souvent sur le cœur du christianisme : la charité. En choisissant et rassemblant des mots, le père Lagrange « poétisait » la vie. Le prophète Isaïe compare la fécondité de la prédication à la puissance vivifiante de la pluie par qui la terre porte du fruit. Le père Lagrange réalisait la Parole dans l’étude et l’enseignement, actes de charité, la charité de la vérité. La Vérité étant le don par excellence. Si de nombreux saints ont servi l’humanité par des aumônes et des soins médicaux, les prêcheurs accomplissent le service de la Vérité par l’annonce de la Parole de Dieu. Pour saint Thomas d’Aquin, le but de la vie religieuse n’est rien d‘autre que la charité. « Enseigner, c’est aimer », écrivait le philosophe espagnol Joaquim Xirau (1895-1946), pour qui la transmission du savoir passe par la bonté. Enseigner l’Évangile, c’est aimer l’autre en lui donnant Dieu. L’évangélisation engendre en ce sens une nouvelle création avec des mentalités et des relations nouvelles.

(Manuel Rivero, o. p. Vice-postulateur de la Cause du père Lagrange, Extrait de Le fr. Marie-Joseph Lagrange, la sainteté de l’intelligence de la foi, 2018, Zenit.)

24 juillet 2023

L’interprétation de la Bible passe par la figure du grand scientifique dominicain Marie-Joseph LAGRANGE, qui a fondé en 1890 l’École Biblique de Jérusalem, le plus ancien centre de recherches bibliques et archéologiques de Terre sainte. Son combat fut de vérifier, par une approche scientifique, la validité des textes bibliques. Ici, chercheurs et étudiants du monde entier continuent d’étudier, d’interpréter et de traduire les écrits bibliques.

Voir : https://www.lejourduseigneur.com/videos/lecole-biblique-et-archeologique-de-jerusalem-1710

22 juillet 2023

Sainte Marie Magdeleine

« Ne me retiens pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père, mais va vers mes frères et dis-leur : je monte vers mon père et votre Père, et mon Dieu et votre Dieu. » Marie Magdeleine vient annoncer aux disciples : « J’ai vu le Seigneur », et ce qu’il lui avait dit (Jean 20, 17-18).

Comme aucun endroit n’est indiqué, il faut donc que « monter » s’entende de la résurrection, mais comment Jésus dit-il qu’il n’est pas encore monté ? Jésus n’est pas encore monté, mais il va monter, et redescendra pour donner aux Apôtres l’Esprit Saint qu’il va aller chercher auprès du Père. Mais est-ce une raison pour que Marie ne le touche pas ? Jésus est entré dans une vie spirituelle qui n’est plus la reprise des anciens rapports, mais plutôt une préparation à une séparation définitive. Cette vie nouvelle n’empêche pas qu’on touche le ressuscité, mais ne permet pas qu’on s’y attarde. Marie ne l’a pas compris, et il importe que les disciples en soient informés même avant de le voir.

(Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile selon saint Luc, 1936, pp. 511-512).

16 juillet 2023

Pour mieux connaître la vie et l’œuvre du P. Lagrange et son chemin vers la sainteté, voici un nouveau compte rendu de l’ouvrage de J.-M. Poffet, o. p. : La Bible : le livre et l’histoire. Actes du colloque de l’École biblique de Jérusalem (nov. 2005) pour le 150e annniversaire de la naissance du P. M.-J. Lagrange, o. p.

L’importance de la figure et de l’œuvre du père Lagrange (1855-1938) pour les études bibliques est connue de tous. Le volume qui résulte de deux colloques consacrés aux « difficiles chemins de l’exégèse » a le grand mérite d’en envisager les multiples facettes et de l’inscrire dans un contexte historique, celui du modernisme, dont la compréhension est indispensable pour apprécier l’apport novateur du père Lagrange. Tant à Jérusalem qu’à Toulouse, de manière significative, le titre des manifestations insistait sur l’enjeu « historique » dans le positionnement du père Lagrange : « l’écriture de l’histoire », d’une part, « la Bible et l’histoire » de l’autre. Car, au cœur des débats méthodologiques qui servent de toile de fond aux travaux du père Lagrange, à son rôle au sein de l’École biblique de Jérusalem (fondée par lui en 1890), se trouve bien la méthode historique, thème explicite de ses célèbres conférences de 1902, qui avait pour objectif de poser un terme à la « science catholique » pour insérer l’exégèse biblique dans le concert des sciences historiques et critiques. Beau défi qui valut au père Lagrange bien des hostilités et des obstacles.

Lire la suite : https://journals.openedition.org/anabases/2577

 

 

16 juillet 2023

N. D. du Mont-Carmel

« Travailler à la gloire de Dieu, en me sanctifiant moi-même. Honorer la très Sainte Vierge en imitant ses vertus » (16 juillet 1882, Marie-Joseph Lagrange, o. p. Lagrange, Journal spirituel).

Source Vatican News : N. D. du Mont-Carmel :

Une ancienne dévotion qui trouve ses racines dans l’Ancien Testament

Cette dévotion mariale, et c’est un cas unique, plonge ses racines neuf siècles avant la naissance de la Vierge Marie. Le prophète Elie, alors qu’il demeurait sur le Mont Carmel, eut la vision d’une nuée blanche montant de la mer, portant avec elle une pluie providentielle pour la terre d’Israël, alors dévastée par une terrible sècheresse (1 Rois 18). La Tradition y a vu l’annonce prophétique du mystère de la Vierge et de la naissance du Fils de Dieu. Dès le premier siècle, des ermites, voulant suivre l’exemple des prophètes Elie et d’Elisée, se retirèrent sur le Mont Carmel et y construisirent une petite chapelle consacrée à Marie.

L’ordre des carmes menacé de disparition

La communauté prit de l’importance, au point de se constituer en ordre religieux au XIIe siècle, qui fut placé sous le patronage de la Vierge Marie. La conquête de la Palestine par Saladin (prise de Jérusalem en 1187) entraîna la fuite des moines vers l’Occident, et fit craindre la disparition pure et simple de l’ordre. Une nuit, le supérieur général des carmes, St Simon Stock, d’origine irlandaise, aurait alors reçu la vision de Marie lui présentant une pièce d’étoffe marron, le scapulaire, en lui disant : « voici le privilège que je te donne, à toi et à tous les enfants du Carmel. Quiconque meurt revêtu de cet habit sera sauvé ».

Le 17 juillet 1274, le concile de Lyon vote la préservation de l’ordre du Carmel ; les moines, voyant dans cette décision la réponse de la Mère de Dieu à leurs prières, décidèrent alors de fêter Notre-Dame du Mont Carmel le 17 juillet de chaque année, en signe de reconnaissance envers la protection maternelle de leur sainte patronne.

ND du Carmel et les papes

« Mère, aide-nous à conserver des mains innocentes et un cœur pur, à ne pas mentir et à ne pas médire sur notre prochain. Nous pourrons ainsi gravir la montagne du Seigneur et obtenir sa bénédiction, sa justice et son salut » : c’est le tweet du pape François, à l’occasion de cette fête chère à de nombreux fidèles. En 2013, à l’occasion du chapitre général de l’Ordre des frères de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont Carmel, le Souverain Pontife évoquait les fruits de cette tradition spirituelle : « le témoignage du Carmel dans le passé appartient à une tradition spirituelle profonde qui s’est développée dans une des grandes écoles de prière. Elle a aussi suscité le courage d’hommes et de femmes qui ont affronté les dangers et même la mort. Souvenons-nous simplement des deux grands martyrs contemporains : Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix et le bienheureux Titus Brandsma », avait-il alors déclaré.

Le St Pape Jean-Paul II, qui portait lui-même le scapulaire ainsi qu’il le confia à plusieurs reprises, écrivit à ce propos : «le port du scapulaire signifie un style de vie chrétienne tissée de prière et de vie intérieure», c’est «un vêtement qui évoque d’une part, la protection continuelle de la Vierge Marie en cette vie et dans le passage à la plénitude de la gloire éternelle ; de l’autre, la conscience que la dévotion envers elle doit constituer un ‘uniforme’, c’est-à-dire un style de vie chrétienne, tissée de prière et de vie intérieure».

Article mis à jour le 16 juillet 2020.

14 juillet 2023

« Parce que » et non « afin que »

Évangile selon saint Matthieu 13, 10s :

« Et les disciples s’étant approchés lui dirent (à Jésus) : « Pourquoi leur parles-tu en paraboles ? Or il répondit et dit : « Parce qu’il vous a été donné de connaître les mystères du règne des cieux, mais à ceux-ci cela n’a pas été donné. Car celui qui a, on lui donnera, et il sera dans la surabondance ; mais celui qui n’a pas, même ce qu’il a lui sera enlevé. 13 Et donc je leur parle en paraboles, parce qu’ils voient sans voir et entendent sans entendre et sans comprendre ». (Traduction du père Lagrange).

Commentaire du père Lagrange sur le verset 13 : « Dans Matthieu Jésus dit clairement qu’il emploie les paraboles non pas : afin que les gens ne voient pas, mais : parce que tout en écoutant ils ne comprennent pas. (…) La forme est encore plus paradoxale que dans Marc : « voyant ils ne voient pas », c’est-à-dire ils ne veulent pas voir, ils n’appliquent ni leurs yeux ni leurs oreilles.

M.-J. Lagrange, des Frères prêcheurs. Évangile selon saint Matthieu, troisième édition, Paris. Libraire Lecoffre. J. Gabalda et fils, éditeurs. 1927. P. 259-260.

10 juillet 2023 – Jour-anniversaire (Marie-Joseph Lagrange, o. p. 7 mars 1855 – 10 mars 1938)

Il ne manque qu’un MIRACLE reconnu par son intercession pour faire avancer la cause de béatification du serviteur de Dieu, Fr. Marie-Joseph Lagrange, o.p.

Sur ce site, vous êtes nombreux à vous être inscrits et à prier pour cette cause. (Voir la prière jointe.)

Vous pouvez CONFIEZ vos intentions en commentaires sur cette page. Plus rapide qu’un mail.

Fr. Manuel Rivero, op., président de l’association, présentera les intentions de la communauté au cours de la messe de demain ainsi que pour la béatification du fondateur de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem, magnifique exemple d’intelligence et de sainteté.

« La prière instante, qui ne se lasse pas, est irrésistible. On sait bien que Dieu ne cédera pas pour avoir la paix ; on apprend du Fils, qui connaît si bien le Père, qu’il ne paraît sourd à nos instances que pour nous obliger à persévérer dans la prière qui nous est si bonne » (Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Jésus- Christ).

 

9 juillet 2023

Invitation à accepter le joug du Christ

Mt 11. 28 Venez à moi, vous tous qui êtes las et trop chargés : et je vous donnerai le repos. 29 Prenez sur vous mon joug, et recevez mes leçons, car je suis doux et humble de cœur. 30 Et vous trouverez du repos pour vos âmes. Car mon joug [est] bénin, et mon fardeau est léger. »

Père Lagrange : C’est à ces petits que Jésus adressa ensuite cet appel, nouveau pour un chef d’école : Recevez mes leçons, non pas parce que je suis plus instruit que vous, mais parce que je suis doux et humble de cœur. Instruit il l’était, et seul instruit du plus insondable des mystères ; mais, si Dieu révèle ses secrets aux humbles, convenait-il qu’il leur donnât pour maître un savant orgueilleux ? C’est par sa modestie et sa douceur qu’il prépare les esprits à recevoir sa doctrine. Elle demeure un joug et un fardeau, car elle n’est pas un vain jeu de l’esprit, elle tend à la pratique, à la réforme des mœurs, à la pénitence, à l’abnégation : déjà il l’a affirmé avec force. Mais son joug est bénin, son fardeau léger ; et ceux qui sont las de s’efforcer en vain à la pratique des observances meurtrissantes et lourdes, imposées par les sages et les habiles, trouveront auprès du maître doux et humble – le repos.

 

6 juillet 2023

Témoignage

Pour mieux connaître la vie et l’œuvre du P. Lagrange et son chemin vers la sainteté, voici un nouveau compte rendu de l’ouvrage du regretté P. Bernard Montagnes, o.p., archiviste de la province dominicaines de Toulouse, docteur en philosophie et docteur en histoire. À lire.

Bernard Montagnes, o. p. (1924-2018), Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique (coll. Histoire. Biographie). Paris, Cerf, 2004, 624 p. 23,5 x 14,5. 49 euros. ISBN 2-204-07228-1.

Revue Théologique de Louvain  Année 2007 / 38-2 /pp. 247-248.

Préparée par vingt années d’études et la publication de nombreux articles, cette biographie critique est la bienvenue et nul ne pouvait mieux la réaliser que le père Montagnes. Elle offre une vue d’ensemble de la vie du père Lagrange et permet de mieux saisir l’ambiance de l’époque à travers la lecture de nombreuses écrites par l’éminent bibliste ou qui lui ont été adressées. Après un cursus complet de droit, M.-J. Lagrange a poursuivi des études théologiques dans l’Ordre dominicain (Toulouse et Salamanque), puis de langues orientales à Paris et à Vienne. En 1890 – il a trente-cinq ans –, ses supérieurs l’envoient à Jérusalem où il créera une École pratique d’études bibliques qui deviendra la célèbre École biblique et archéologique française. Il lance aussi la Revue biblique en 1892 et la collection des Études bibliques en 1900. Si l’on sait aujourd’hui l’importance de ces fondations, il est intéressant de voir combien les débuts ont été difficiles au plan matériel, mais surtout au plan des objections soulevées avec passion par les nombreux opposants à l’étude critique de la Bible, objections relayées par les autorités ecclésiastiques de l’époque. Les critiques les plus virulentes sont venues de certains jésuites, comme A. Delattre apprécié de Pie X ou encore L. Fonck qui souhaitait la disparition de l’École biblique au profit de l’Institut biblique de Rome créé en 1909 et confié à la Compagnie. Mais ils ne sont pas seuls. Outre les controverses avec les Franciscains de la Custodie, le père Lagrange connaîtra de nombreux déboires avec la censure de son ordre. Ainsi son commentaire de la Genèse ne sera jamais publié. Toutefois rien ne parviendra à le détourner des études bibliques. Exégète remarquable, il n’était pas moins un grand spirituel et un religieux d’une fidélité jamais démentie à son Ordre et à l’Église. C’est ce que synthétise le dernier chapitre du livre intitulé « le profil humain et spirituel du père Lagrange », précédant une liste bibliographique et un index de personnalité intellectuelle et spirituelle hors du commun qui eut à travailler dans une ambiance détestable.

Camille Focant (1945-). Prêtre du diocèse de Namur. Théologien catholique belge

 

3 juillet 2023

Un livre à lire absolument

Témoignage-Recension du livre de Louis-Hugues VINCENT. Le père Marie-Joseph Lagrange. Sa vie et son œuvre. Paris, Éditions Parole et Silence, 2013, 670 p.

La biographie que le père Louis-Hugues Vincent a consacrée au père Marie-Joseph Lagrange (1855-1938), fondateur de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem et de la Revue biblique, a mis du temps à paraître. En effet, l’auteur la termina en 1951 et elle ne fut publiée… qu’en 2013, cinquante-trois ans après sa mort ! C’est que les autorités dominicaines craignaient que cette publication ne provoquât des polémiques qui porteraient préjudice à l’École biblique. Il faut dire que les querelles qui avaient dressé l’Institut biblique de Rome contre l’École biblique des Dominicains avaient été rudes et qu’on craignit longtemps pour la survie de cette dernière.

Le père Louis-Hugues Vincent (1872-1960), dominicain spécialiste de l’archéologie palestinienne, auteur de nombreux livres et articles, a passé une grande partie de sa vie à Jérusalem. Il vivait au couvent Saint-Étienne, auprès du père Lagrange dont il fut l’un des plus proches collaborateurs et qu’il considérait comme un maître auquel il devait tout « dans l’ordre intellectuel, moral et religieux » (p. 15). Malgré cela, dans le livre qu’il lui a consacré il ne voulait pas faire œuvre apologétique (ce qu’il n’a peut-être pas tout à fait réussi) et il s’est gardé d’apporter des appréciations personnelles.

Dans l’avant-propos, daté du 15 novembre 1951, le père Vincent spécifie que l’ouvrage « n’est pas une biographie composée suivant les règles du genre » (p. 15). C’est vrai. Au niveau formel, on peut relever qu’il n’y a ni introduction ni conclusion et que l’ouvrage est composé de huit chapitres qui ne comportent aucune sous-partie. Quant au fond, l’enquête fut minimale, les sources sont peu nombreuses et les références laissent à désirer. L’auteur, qui l’assume, a composé son livre essentiellement à partir de ses souvenirs du père Lagrange, personnage avec lequel il vécut dans une étroite intimité pendant quarante-six ans. Pourtant, cet ouvrage est plus qu’un livre de souvenirs. Il s’agit d’un témoignage qui, selon les mots du rédacteur, « se restreint […] à l’expérience acquise de son œuvre scientifique en une vie permanente dans son sillage » (p. 19). Néanmoins, le père Vincent a pu profiter de la Revue biblique, de quelques papiers que lui a légués le père Lagrange, ainsi que de deux documents écrits par ce dernier : 1) ses Notes intimes dans lesquelles il consignait le cheminement de sa vie intérieure, que l’auteur, par pudeur, a utilisées sans les exploiter ; 2) ses Souvenirs, écrits sur l’insistance de ses disciples, à la condition « que son récit demeurerait strictement un document de famille » (p. 18). De plus, les liens amicaux du père Vincent avec le père Lagrange l’ont mis en relation avec la famille de son maître. Il a pu y quérir les confidences de ses proches sur son enfance et sa jeunesse. Notons que la première partie de la vie de l’exégète est traitée rapidement, puisque l’auteur ne consacre que vingt-neuf pages à ses trente-cinq premières années. Il s’en justifie ainsi : « J’ai trop souvent entendu mon maître taxer de stérilité la part excessive attachée souvent dans les biographies à la description anecdotique méticuleuse des années initiales, pour m’y aventurer à son propos » (p. 16). Certes, mais lorsqu’elle est bien faite, la présentation des premières années d’un homme peut être extrêmement importante pour mieux le connaître et pour comprendre certaines de ses réactions.

Dans cet ouvrage, le but du père Vincent était de montrer le lien intime entre la vie et l’œuvre du père Lagrange. Cet objectif est atteint, car la coordination entre la vie et l’œuvre de l’exégète et théologien dominicain est bien mise en évidence, et l’on voit très bien la cohérence de son œuvre malgré la variété des sujets qu’il a abordés tout au long de sa vie. À ce propos, soulignons que la production scientifique du père Lagrange est présentée d’une façon tout à fait compréhensible pour les non-spécialistes. Néanmoins, il faut ajouter que le lecteur se retrouve, tout au long de la biographie, face à une énumération chronologique un peu fastidieuse des écrits du père Lagrange. De plus, ils sont traités avec une importance très variable, selon une logique qui peut parfois laisser perplexe : quelques-uns sont abordés assez longuement tandis que d’autres sont seulement mentionnés. L’auteur s’en explique en spécifiant qu’il devait « s’efforcer de présenter la production scientifique sous une forme aisément intelligible au lecteur le moins spécialisé » (p. 21). Cet argument nous semble peu convaincant pour justifier, par exemple, que le père Vincent s’attarde davantage sur un compte rendu fait par le père Lagrange que sur un livre qu’il a lui-même écrit. Néanmoins, cet ouvrage nous permet d’appréhender les positions doctrinales du père Lagrange et son rôle dans l’évolution du mouvement biblique. On y découvre aussi un homme d’une scrupuleuse soumission à Rome et à ses supérieurs au milieu des controverses délicates auxquelles il fut mêlé, ainsi qu’un religieux dont la vie fut gouvernée par son idéal de sainteté.

L’ouvrage est complété par quelques annexes, par une petite bibliographie, par une carte de la Palestine au temps de Jésus, ainsi que par un index des noms de personnes. On y trouve également une prière pour la glorification du père Marie-Joseph Lagrange, dont l’enquête canonique a été ouverte officiellement par Mgr Joseph Madec, alors évêque de Fréjus-Toulon (diocèse dans lequel est mort le père Lagrange), par décret du 15 décembre 1987.

Pour conclure, cet ouvrage, rédigé par l’un de ses plus proches disciples, est un témoignage important sur le père Lagrange et son œuvre. Pour ceux qui voudraient approfondir la question, on peut renvoyer au livre de Bernard Montagnes, Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique (Paris, Cerf, 2005, 624 p.).

Philippe ROY-LYSENCOURT (1981-), docteur en Histoire et docteur en Sciences des religions.

Institut d’Étude du Christianisme, Strasbourg  https://www.erudit.org/fr/revues/ltp/2016-v72-n3-ltp03113/1040370ar.pdf

Lettre aux amis du 28 mars 2023 par Fr. Manuel Rivero, o. p.

Saint-Denis (La Réunion), le 28 mars 2023.

Chers amis du serviteur de Dieu, le frère Marie-Joseph Lagrange O.P.,

Merci pour votre prière au Vivant et pour vos dons qui soutiennent la cause de béatification du fondateur de l’École biblique de Jérusalem.

De nombreuses grâces sont répandues dans les cœurs de ceux qui comptent sur l’intercession du père Lagrange : lumière de la foi, réconciliations, communion avec les défunts, fidélité dans l’amour, droiture et courage dans la vie sociale …

N’hésitez pas à confier les malades de votre entourage à son intercession. La béatification passe par la reconnaissance d’un miracle.

Merci aussi pour les cotisations à l’association. Vous pouvez proposer à d’autres personnes d’y adhérer.

La pandémie nous a empêché l’organisation d’événements en présentiel. J’espère que ce n’est que partie remise et dès que le ciel de la santé publique « s’éclaircira » nous mettrons sur pied le colloque prévu à Saint-Maximin (Var), lieu du noviciat en 1879 et de l’exode vers le Père du père Lagrange en 1938.

À La Réunion, nous avons accueilli pendant une semaine les reliques de sainte Marie-Madeleine qui sont habituellement à la Sainte-Baume, ce qui a représenté un événement heureux et fort dans notre diocèse : célébrations dans les paroisses (cathédrale, Petite-Ile, Saint-Benoît, Saint-Gilles), dans des établissements catholiques d’enseignement et dans des monastères (Carmélites et Dominicaines). De nombreuses confessions ont eu lieu pendant ces temps de prière et de prédication. Des adultes, des jeunes et des enfants ont témoigné des grâces reçues pendant ces temps de prière.

Le père Marie-Joseph Lagrange O.P., fondateur de l’École biblique de Jérusalem, était marqué par la figure de sainte Marie-Madeleine. C’est pourquoi il enfouit le 5 juin 1891 une médaille de cette sainte dans les fondations de l’École. Il voulut orienter ainsi le travail de l’exégèse biblique dans le sens de la contemplation et de l’apostolat pour le salut des âmes.

Dans son Journal spirituel, le père Lagrange cite à plusieurs reprises sainte Marie-Madeleine : « Permettez-moi, ô Jésus, de me tenir constamment au pied de la Croix avec votre Mère Immaculée, sainte Marie-Madeleine et saint Jean[1] » ; « me considérer auprès de mes frères comme sainte Marie-Madeleine aux pieds de Marie Immaculée[2] ».

Tout au long de sa vie dominicaine, le père Lagrange s’est évertué à défendre l’honneur de l’Église et à promouvoir la vérité évangélique qui rend libre.

Ses commentaires bibliques scientifiques ont toujours eu pour finalité le salut des âmes par la foi. Aussi achève-t-il son commentaire sur la femme pécheresse chez un Pharisien en le reliant au « mot qui vient sur les lèvres du prêtre après l’absolution sacramentelle[3] » : « Ta foi t’a sauvée ; va en paix » (Lc 7,50).

En vous souhaitant une belle Semaine sainte, je vous confie à l’intercession du père Lagrange avec vos familles du Ciel et de la terre.

Fr. Manuel Rivero O.P.

Vice-postulateur de la cause de béatification du père Lagrange O.P.

[1] Marie-Joseph Lagrange, des Frères prêcheurs, Journal spirituel 1879-1932, Avant-propos de Fr. Manuel Rivero O.P., Paris, Cerf, 2014. P. 58. 7 mars 1880.

[2] Marie-Joseph Lagrange, des Frères prêcheurs, Journal spirituel 1879-1932, Avant-propos de Fr. Manuel Rivero O.P., Paris, Cerf, 2014. P. 63. 3 avril 1880.

[3] Marie-Joseph Lagrange, Évangile selon saint Luc, Paris, J. Gabalda, éditeur, 1927.P. 233.

 

Bulletin d’adhésion 2023+RIB-Association des amis du père Lagrange, O.P.

Écho de notre page Facebook : juin 2023

 

28 juin 2023

Saint Pierre et  saint Paul

Pierre, le fondateur de la catéchèse

Le premier maître de cette catéchèse fut naturellement celui qui avait été associé de plus près à l’œuvre du Maître, le compagnon de ses courses, le chef incontesté de ses disciples, Simon-Pierre. Il prononça le premier discours de catéchèse, le premier évangile, dont il avait fixé le point de départ au baptême de Jean et le terme à l’ascension de Jésus dans le ciel (Actes 1, 22 et 2, 22 et suivants). Marie-Joseph Lagrange. L’Évangile de Jésus-Christ.

Paul, la doctrine de l’Évangile

« Si quelqu’un a soif, qu’il vienne vers moi et qu’il boive, celui qui croit en moi. Comme a dit l’Écriture : des fleuves d’eau vive couleront de son sein. » (Jean 7, 37 s.)

Allusion énigmatique, claire pour qui eût compris, comme fera saint Paul (1 Corinthiens 10, 4), que le Christ était figuré par la Pierre d’où était sortie dans le désert une eau miraculeuse, car ce miracle devait se renouveler dans l’ordre spirituel aux jours du salut messianique, comme avait dit Isaïe : « Dites : Iahvé a racheté son serviteur Jacob… Il a fait couler l’eau du rocher, et les eaux se sont répandues. » (Isaïe 48, 20 s.) La traduction grecque ajoutait : « Et mon peuple boira. » Marie-Joseph Lagrange. L’Évangile de Jésus-Christ.

27 juin 2023

Pour une approche des écrits du P. Marie-Joseph Lagrange des frères Prêcheurs, voici un premier compte rendu :

Le Livre des Juges, Paris, Lecoffre, 1903, par Samuel Vanderstuyf, Persée. Échos d’Orient, tome 6, n° 39, pp 156-157.

Après avoir fondé successivement l’École pratique d’études bibliques de Jérusalem et la Revue biblique internationale, le R. P. Lagrange a lancé en 1900 l’idée d’un nouveau commentaire complet de l’Écriture Sainte. Comme de juste, il a voulu apporter le premier sa contribution à la réalisation de cette idée et il nous offre aujourd’hui le premier volume de la série : le livre des Juges. L’ouvrage, examiné par deux Dominicains lecteurs en théologie, a reçu l’imprimatur du Maître général de l’Ordre et du cardinal archevêque de Paris. L’introduction traite les sujets ordinaires en ces sortes de matières : unité canonique du livre, sa division, critique textuelle, critique littéraire, critique historique, chronologie, tradition exégétique. Vient ensuite le commentaire proprement dit. L’auteur traduit et commente l’hébreu, corrigé en maint endroit par la critique textuelle ; mais il prend un soin très méticuleux et d’expliquer de relever et d’expliquer les leçons divergentes des LXX et de la Vulgate, et il s’en sert très judicieusement pour améliorer le texte massorétique.

Ceux qui désirent de bonne foi approfondir les problèmes scripturaires n’auront qu’à se louer d’entreprendre l’étude d’un ouvrage, où l’habile exégète qu’est le P. Lagrange expose le résultat de ses recherches personnelles sur un des points les plus délicats de la littérature biblique. Si l’on est étonné à la lecture du nouveau commentaire, ce ne sera pas par les idées très orthodoxes qui y sont émises, mais par la somme de travail que représente un ouvrage de ce genre. En effet, le volume, qui n’est pas mince, ne nous sert pas de ces gravures explicatives ( ?) ou ces culs-de-lampe dont sont farcis plus d’un commentaire en vogue ; il ne nous accable pas à tout propos de banales précisions littéraires ; il nous offre simplement une masse de remarques sur le vocabulaire hébreu, la syntaxe, la géographie, l’histoire, la concordance et l’appréciation des faits, la critique textuelle, la distinction et l’âge présumé des différentes sources, l’époque probable de la rédaction inspirée, etc. Tout cela du reste est présenté dans une langue claire et sans prétention, relevée de temps en temps par une pointe de fine ironie bien française. On goûte un charme sévère mais réel à suivre le commentateur et de reconstitution des documents primitifs. Sur cette question purement littéraire, il est souvent de l’avis des critiques avancés ; mais à l’occasion il sait lestement prendre parti contre eux, et les arguments qu’il leur oppose m’ont paru avoir une valeur singulièrement plus probante que les bons mots dédaigneux qui semblent à plusieurs tenir lieu de tout. J’ajoute que si le texte offre une difficulté quelconque, on peut être sûr à l’avance qu’elle sera abordée loyalement, non évitée : chacun peut se payer le plaisir d’en faire la preuve.

Le volume fait bien inaugurer de ceux qui suivront : il fait honneur à la France, à l’Ordre de Saint-Dominique et à l’Église. C’est dire qu’après nous être délecté nous-même et avoir beaucoup appris dans les 400 pages qui le composent, nous souhaitons la même jouissance et le même profit à tous ceux que n’effraye pas une étude austère mais féconde en résultats.

24 juin 2023

Nativité de saint Jean-Baptiste, le Précurseur

On demandait par signes au père comment il voulait l’appeler. Il se fit donner une tablette sur laquelle il écrivit : « Jean est son nom ». Et tout le monde en fut étonné. À l’instant même, sa bouche s’ouvrit, sa langue se délia : il parlait et bénissait Dieu (Luc 1, 62-64).

Élisabeth prend la parole sans avoir été interrogée. Elle veut que l’enfant soit nommé Jean, pour obéir à l’indication de l’ange, v. 13. D’après l’opinion ancienne la plus commune, elle est inspirée par le Saint-Esprit. On ne peut affirmer que ce soit la pensée de l’auteur. Zacharie est muet, mais il n’est pas nécessaire qu’il ait écrit sur une tablette tout le récit de l’apparition, il suffisait qu’il eût indiqué déjà le nom de l’enfant. En fait, on ne cède pas au désir de la mère, ce qui prouve que l’ancienne coutume n’avait pas disparu. On fait des signes à Zacharie pour qu’il tranche la question du nom de l’enfant. Zacharie a écrit avec fermeté « Jean est son nom », ce qui renfermait une adhésion à l’ordre de l’ange (v. 13). Les Pères ont vu là un acte de foi dont Zacharie est récompensé en recouvrant la parole.

(Extrait de Marie-Joseph Lagrange, o. p. L’Évangile selon saint Luc, Lecoffre-Gabalda. 1941.)

20 juin 2023

Tout est réciproque dans l’amour, donner et recevoir. On aime à recevoir parce qu’on voit ainsi la bonté de celui qui nous aime, et qu’il nous aime. Mais on aime encore mieux donner, surtout quand l’être qu’on aime est faible, souffrant, insulté, et c’est pourquoi la Passion du Sauveur qui se continue est le grand aliment de notre amour. […]

Allons de grâce, compassion et don de soi-même ou plutôt don de Dieu […].

(P. Lagrange, o. p. Journal spirituel)

 

18 juin 2023

Nous sommes plus sensibles à nos malheurs physiques ou moraux qu’à nos misères surnaturelles. D’ailleurs, même arrivé à la charité, il ne faut pas cesser les œuvres de compassion : ceci en vue des âmes auxquelles on a affaire. Il ne faut pas ne voir que le zèle. St Ambroise a eu ces deux mouvements vis-à-vis de l’âme de St Augustin : il eut compassion de ce grand génie, il l’aime de zèle, mais il ne lui fait sentir que son amour de compassion : Et eum coepi amare non tanquam doctorem veri, sed tanquam hominem benignum in me (Et j’ai commencé à l’aimer non en tant que docteur enseignant le vrai, mais en tant qu’homme bienveillant à mon égard). Il ne faut pas expliquer la charité de Dieu, mais la faire comprendre en la montrant. Le tout est de faire voir à une âme que Dieu est bon pour elle, qu’il l’a aimée. Quand on aura dit de vous, qu’il est bon, profondément bon, et quand vous aurez dit, nemo bonus, nisi solus Deus (Nul n’est bon que Dieu seul-Luc 18, 19)vous gagnerez cette âme. (P. Lagrange. Journal spirituel)

17 juin 2023

 

Pureté, humilité, obéissance ! Quelle occasion d’user d’une permission, d’une dispense présumée ; quelle raison de ne pas s’humilier pour ne pas humilier Dieu !

Et pour récompense, ô Divine Mère, un glaive dans le cœur. Voudrais-je ne pas imiter ma Mère Immaculée ? Ô mon Dieu que puis-je donner que mon cœur, et que peut pour vous un cœur qui n’est pas brisé comme le Cœur Immaculé de Marie. (Marie-Joseph Lagrange. Journal spirituel)

 

 

13 juin 2023

Saint Dominique, Fra Angelico, Couvent St-Marc, Florence

 

Est-ce une distraction, ou une preuve que la prière est utile même pour les lumières temporelles. Il faut toujours recommander à Dieu même les choses d’ici-bas pour avoir la lumière. (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel)

 

 

 

 

 

 

 

11 juin 2023   

Le Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Christ

Dans la nuit, à l’adoration, N.S. m’a donné un grand sentiment de paix par la confiance qu’il règle tout, dispose tout et m’a pris par la main pour me sauver. Abandon à sa Volonté sainte… par Marie. (Journal spirituel du P. Lagrange. Vendredi saint 15 avril 1892)

 

 

10 juin 2023

Aujourd’hui, jour anniversaire de la « naissance au ciel » du P. Marie-Joseph Lagrange, o. p. En communion de prière avec Fr. Manuel Rivero, o.p. au cours de la célébration de la messe pour la cause du père Lagrange auquel nous confions à son intercession nos demandes de grâces.

http://www.mj-lagrange.org

« Vierge Marie, je vous offre de nouveau tout mon être et toutes ses opérations : conduisez-nous au Cœur de Jésus. » (P. Lagrange, Journal spirituel)

 

 

 

3 juin 2023

Anniversaire de la naissance au ciel du pape Jean XXIII 3 juin 1963

Saint Jean XXIII, un pape d’obéissance et de paix.

L’obéissance, l’une des vertus cardinales du P. Lagrange, fils d’obéissance ou « la précipitation-Lagrange »

Préambule :

Si saint Thomas étudie l’obéissance dans le traité de la justice, c’est qu’à ses yeux l’obéissance n’est pas, premièrement et de soi, une vertu de « discipline personnelle », une vertu de renoncement et d’ascèse ; son but premier, commun à ses diverses réalisations, n’est pas de « briser la volonté propre » et d’y faire renoncer ; l’obéissance est d’abord une vertu du type général de la justice, une redevance à autrui, au même sens que les vertus de vénération. Elle a pour rôle d’insérer l’individu dans la collaboration à un ordre qui le dépasse. (R. P. M.-M. Labourdette, o. p. « La vertu d’obéissance selon saint Thomas ». Revue Thomiste, octobre-décembre 1957, pp. 626-656.)

Sur les nombreuses méditations relevées dans le Journal spirituel du P Lagrange. :

« Quand le P. Lagrange reçoit un laconique message de la curie généralice le convoquant de toute urgence à Rome, en taisant d’ailleurs dans quel but, avec la promptitude habituelle de son obéissance, qu’on appelait familièrement d’ordinaire : « la précipitation-Lagrange », quelques heures après la réception du message il était en route. (Louis-Hugues Vincent, Le père Marie-Joseph Lagrange. Sa vie et son œuvre, Parole et Silence, 2013, p. 380.)

Saint Joseph, exemple de l'obéissance silencieuse

Saint Joseph, exemple de l’obéissance silencieuse

« L’obéissance est l’union la plus complète, celle de ma volonté à la volonté divine elle-même ; pour la pratiquer, j’ai une règle bien simple, un critérium bien sûr et bien sensible : toute action, toute parole, toute pensée qu’approuverait le Rév. P. maître est selon l’obéissance, – secus, non ! Si je ne puis guère hésiter sur l’application, ma conscience est un guide assuré. » (Journal spirituel, 5 juin 1880, Cerf, 2014, p. 73.)

« Obéissance. – Je vois mieux que jamais que l’obéissance à la direction est la voie de salut, je le vois sensiblement ; cependant je n’ai plus l’obéissance aussi minutieuse, ce qui est un grand mal ; c’est supprimer la meilleure mortification. » (Journal spirituel, 30 janvier 1881, Cerf, 2014, p. 121.)

« Une seule chose me reste dans ce doute : me conformer à l’obéissance… mais amoureusement. » (Journal spirituel, 26 septembre 1924, Cerf, 2014, p. 425.)

Saint Jean XXIII, un pape d’obéissance et de paix

Jean XXIII, malgré son court pontificat de 1958 à 1963, marque les esprits. Derrière ses traits d’humour et son affabilité, sa bonté est foncièrement évangélique. Elle s’accompagne aussi d’intelligence, comme en témoignent ses habiles capacités diplomatiques. Aussi bien avant qu’après son élection pontificale, Jean XXIII œuvre pour la paix. Il a l’audace et l’initiative extraordinaire de convoquer le concile Vatican II, l’événement ecclésial le plus important du XXe siècle.

Les raisons d’y croire

La convocation du concile Vatican II (1962-1965) est d’un courage fou et d’une inspiration surnaturelle : il s’agit de réunir plus de 2 500 évêques provenant du monde entier, y compris de Chine et du bloc communiste, réaliser un vaste aggiornamento et « rénover » l’Église. Même si Jean XXIII ne voit pas les conclusions du concile, l’héritage qu’il laisse est immense.

Jean XXIII est un artisan de paix hors du commun. Il fait usage de ses compétences diplomatiques afin d’apaiser plusieurs situations extrêmement difficiles (tensions religieuses dans les Balkans, épuration en France de l’après-guerre, crise des missiles de Cuba, etc.). Il organise en Turquie le sauvetage de plusieurs dizaines de milliers de Juifs fuyant l’Holocauste.

Jean XXIII est convaincu que, « L’Église ne doit pas s’occuper des catholiques, mais du monde », car Dieu propose son salut à tout homme. Cette dimension universelle est déjà dans les Écritures, mais Jean XXIII la rappelle à un moment opportun et agit selon ce principe de façon exemplaire.

Le discours à la lune prononcé spontanément par Jean XXIII le 11 octobre 1962 est historique. Attiré par les prières d’une foule immense rassemblée place Saint-Pierre, le Pape sort sur son balcon pour une allocution émouvante d’une humanité profonde.

Les Carnets que Jean XXIII a tenus tout au long de sa vie retracent la vie de cet homme qui fut un grand spirituel en même temps qu’un homme d’Église ouvert au monde. On y voit l’évolution d’une âme, attachée d’abord à travailler à sa propre perfection, s’étendant ensuite, sans négliger ce premier soin, aux dimensions du monde entier.  Auteur : Solveig Parent.  Source : 1000 raisons de croire (Marie de Nazareth).

Où en est la question de l’alphabet ? Marie-Joseph Lagrange des frères Prêcheurs

Écrits de circonstances

Où en est la question de l’Alphabet ?

In Revue des sciences philosophiques et théologiques

Le Saulchoir, Kain, Belgique, Première Année, 1907, pp. 281-294

La question de l’origine de l’alphabet, qui passait pour résolue, il y a quelques années, est de nouveau agitée. On peut dire qu’au lieu d’avancer, elle recule. Il faut donc y revenir, non point pour la trancher, mais pour indiquer où en est ce difficile problème. Dans cette Revue, on s’occupe surtout des idées, mais peut-on y être indifférent à l’origine de leur véhicule ordinaire ? Il ne s’agit point ici d’ailleurs d’une invention purement matérielle, mais de la plus intellectuelle de toutes, l’expression des idées par la combinaison de quelques signes.

Au début, il importe de poser quelques notions générales, faute de termes conventionnels bien choisis, et admis de tous.

L’écriture peut évoluer de deux façons, dans sa forme purement matérielle, ou dans la valeur de ses signes, et cette double évolution ne suit pas toujours ni même ordinairement une marche parallèle.

Si l’on s’en tient à la forme extérieure de l’écriture, on doit placer tout au début la pictographie. C’est la représentation des objets, aussi exacte qu’on peut l’attendre de peuples plus ou moins doués de sens artistique. De toute façon c’est l’objet lui-même que le scribe se propose de reproduire, et, quand il a réussi, on le reconnaît sans aucune peine.

Au temps, l’usage de l’écriture étant devenu plus fréquent, on ne se pique plus de tant d’exactitude. Il suffit que le signe soit reconnu. On le trace dès lors en quelques traits, suffisants pour fixer son individualité et le distinguer des autres. C’est encore une pictographie, mais artificielle et conventionnelle. Pour prendre un exemple, c’est le stade des hiéroglyphes égyptiens et de quelques signes babyloniens très archaïques[1].

Nous descendons encore dans le temps. Soit qu’il emploie de préférence le calame, comme les Égyptiens, pour écrire à l’encre sur du papyrus, ou le poinçon triangulaire pour pénétrer dans l’argile, comme les riverains anciens du golfe Persique, le scribe en arrive à négliger la forme des caractères. À ce moment, ils ont une valeur propre qui n’a plus, assez souvent, qu’un rapport éloigné avec l’objet qu’ils peignaient d’abord au naturel. En tout cas, il faut faire vite ; les contours sont ramenés à quelques traits, ou à quelques creux emportés dans l’argile crue. C’est le système hiératique égyptien et le cunéiforme babylonien[2].

Les Babyloniens ont plus ou moins diversifié leurs signes, mais la nature de leurs instruments ne leur permettait pas de simplifier davantage. Chez les Égyptiens, le stade dit démotique ne contient plus guère que des lignes où il serait impossible de reconnaître directement les objets. Cette écriture a un aspect encore plus linéaire que la précédente. On voit que si les catégories manquent, c’est qu’il faudrait en faire plusieurs pour chaque écriture.

Les choses se compliquent encore si l’on suppose le cas d’un emprunt. Un peuple peut emprunter à un autre son écriture au moment où la ressemblance avec les objets primitifs a déjà disparu. Il prendrait alors les caractères tels quels, sans aucun souci de leurs débuts pictographiques ; mais ne pourrait-il pas arriver qu’une

Écriture pictographique. Civilisation mésopotamienne d’Uruk III.Fin du IVe millénaire av. J-C

fois en possession de ces signes, il leur trouve des ressemblances, plus ou moins fictives, avec des objets naturels, et qu’il donne aux signes le nom de ces objets ?

Mais les signes, quelle que soit leur forme, ne constituent pas une écriture. Il en faut venir maintenant à leur emploi combiné pour exprimer une pensée, reconnaissable à une autre personne du même milieu social, qui sache lire.

L’écriture, disions-nous a dû commencer par la pictographie, simple représentation d’un objet par le dessin, destinée à en rappeler le souvenir. Plusieurs signes groupés formaient du moins une association d’images. Or l’image appelle l’idée. Si le nom d’un objet matériel signifiait en même temps autre chose, par exemple un terme abstrait, la représentation pouvait servir à deux fins, puisqu’en prononçant le nom de l’objet matériel, on évoquait aussi l’idée de l’autre. C’est ainsi que nuter, en égyptien, signifiant hache, et dieu, le signe de la hache, lorsqu’on le prononçait en le regardant, a pu désigner le dieu pour celui qui écoutait. De plus, lorsque le nom de l’objet était monosyllabique, il était assez naturel de le faire servir pour sa valeur syllabique ; deux mots d’une syllabe faisaient ainsi un mot de deux syllabes. L’écriture était dès lors créée : une suite d’objets prononcés devenue une suite de syllabes formant des mots complets. Ces signes n’avaient plus désormais leur valeur idéographique, comme évoquant des objets, mais une valeur phonétique, comme évoquant des sons. Les Chaldéo-babyloniens ont connu ce genre d’écriture dès la plus haute antiquité. Leur écriture est syllabique. Elle n’est pas allée plus loin dans la décomposition des sons, avec cette particularité que certaines consonnes étant devenues chez eux de pures voyelles formant à elles seules une syllabe, les voyelles se sont trouvées représentées chez eux à l’état isolé. La voyelle figurait ici comme syllabe, parce qu’elle pouvait se prononcer seule ; les consonnes, ne pouvant se prononcer seules, mais n’ont jamais été isolées.

Les Égyptiens étaient arrivés aussi de très bonne heure à l’écriture syllabique ; mais de plus, et aussi loin que nous puissions remonter, ils avaient isolé toutes les consonnes[3]. Certains signes ne se lisaient plus nécessairement avec telle voyelle ; ils ne valaient plus que comme le premier mouvement d’une articulation. Mais comme les consonnes faibles ou semi-voyelles avaient encore conservé leur caractère de consonnes au moment où a été créée cette écriture[4], on n’a point eu l’idée d’isoler les voyelles.

Le principe de l’alphabet était posé, il existait virtuellement en Égypte. Les Égyptiens n’ont point opéré de sélection entre les diverses fonctions de leurs signes. Ils ont continué à employer concurremment ceux qui figuraient des objets, ceux qui marquaient des syllabes, ceux qui représentaient des consonnes, ceux qui expliquaient par le dessin la nature de l’objet écrit.

Pour combiner, à propos de ces deux systèmes d’écriture certainement antérieurs à l’alphabet et du moins voisins de son lieu d’origine, la double évolution que nous avons d’abord distinguée, on dira que le babylonien s’est arrêté au stade syllabique et à la forme cunéiforme, c’est-à-dire très conventionnelle, ne permettant plus, dans la plupart des cas, de reconnaître l’objet primitif sans une étude très attentive, tandis que l’Égyptien est arrivé à l’écriture la plus cursive et à la précision des consonnes isolées. Toutefois, ces deux mouvements, avons-nous dit, ne sont point toujours parallèles. Les hiéroglyphes contiennent déjà des consonnes.

Ce n’est point ici le lieu d’étudier en détail les écritures de l’Asie antérieure, de l’Égypte ou de la mer Égée. Chaque découverte en augmente le nombre. Aux écritures égyptiennes et assyro-babyloniennes, maintenant parfaitement connues, sont venues se joindre l’écriture hétéenne, qui n’est point encore déchiffrée, et d’où dérive peut-être l’écriture chypriote, qui a été lue et qui exprime un dialecte grec, puis l’écriture égéenne ou crétoise, pictographique et linéaire, trouvée surtout par M. Evans au palais de Cnossos, en Crète. La plus étrange de ces antiques graphies est peut-être celle dont M. Flinders Petrie a reconnu plusieurs vestiges en Égypte et même au Sinaï. Ces signes remontent à l’antiquité la plus reculée, et M. Petrie n’hésite pas à conclure à une véritable écriture antérieure à l’an 5 000 avant J.-C. Il prononce même le nom d’alphabet, mais sans doute dans un sens large[5].

Il régnait donc une extraordinaire variété d’écritures dans le bassin oriental de la méditerranée quand surgit l’alphabet. Cette admirable découverte est un tel progrès dans l’histoire de l’écriture qu’il n’est pas étonnant qu’elle ait été précédée de nombreux tâtonnements. On n’en est pas moins surpris de la voir apparaître un certain jour, parfaitement et définitivement constituée, du moins pour ce qui regarde les consonnes. Son unité est remarquable. À prendre les choses à la rigueur et d’une façon très concrète, il existe autant d’alphabets que d’inscriptions, mais, de proche en proche, on peut aboutir à la forme la plus anciennement connue de l’alphabet qui ne doit pas différer beaucoup de sa forme primitive.

Cette forme primitive peut être dite sémitique par opposition aux alphabets grecs et italiotes. Les Grecs savaient qu’ils avaient emprunté l’alphabet aux Sémites, disons avec eux aux Phéniciens.

L’identité des formes ne peut être mise en doute. Or le nom même d’alphabet est caractéristique. Les noms des lettres grecques sont les noms sémitiques de ces lettres. Les inscriptions grecques ne datent guère que du VIIIe siècle au plus[6], et celle d’Hiram est très probablement plus ancienne. Il est très naturel que les Grecs, trouvant dans l’alphabet sémitique des signes superflus pour leur langue, s’en soient servi pour rendre les voyelles ; tandis que les Sémites, trouvant les voyelles écrites, auraient dû les conserver, sauf à compléter leur alphabet.

L’origine sémitique de l’alphabet grec est donc jusqu’à ce jour l’opinion unanime des savants[7].

Au sein du monde sémitique, la forme des Sémites du Nord est plus ancienne que celle du Sud de l’Arabie, dite minéo-sabéenne ou himyarite. Quelle que soit la date des plus vieilles inscriptions minéennes qui ne peuvent guère remonter plus haut que le VIIe siècle av. J.-C.[8], l’écriture, très monumentale et très ornementée, n’a rien de primitif. Elle dérive bien plutôt du premier alphabet cananéen. Il serait impossible d’expliquer comment les formes brisées et aiguës du cananéen sont sorties de cette écriture simple et majestueuse, tandis que le goût de la symétrie, le désir d’une écriture droite et ferme ont pu conduire le cananéen dans cette voie, assez semblable à celle du grec pour l’aspect solide des lettres, bien assises sur leurs bases[9].

Tous les alphabets connus découlent donc d’une seule souche, qui a servi tout d’abord à écrire deux dialectes sémitiques, le cananéen et l’araméen, mais cet alphabet lui-même n’a pu être inventé d’un seul coup, par une intuition de génie ; selon le cours ordinaire des choses, il doit se rattacher à une écriture antérieure ; on a cherché cette origine ou ce contact en Crète, en Babylonie, en Égypte, à Chypre.

Mais avant de traiter cette question d’emprunt, il est nécessaire de constater la nature de l’alphabet sémitique, afin de mesurer, s’il est possible, la part d’originalité qui lui est propre.

Comme on sait, cet alphabet ne comprend que les consonnes.

De plus, deux phénomènes paraissent aujourd’hui universellement reconnus.

1) Toutes les lettres de l’alphabet sémitique ne sont pas primitives ; en d’autres termes, il s’est augmenté par une transformation opérée sur certaines lettres. Certains sons peu différents sont en effet exprimés par des caractères assez semblables dont l’un semble avoir été complété pour exprimer le son plus fort.

Par exemple  qui rend le Khet, est  qui rend le , avec une barre à gauche ; Θ pour tet est le signe de de tawentouré d’un cercle ; cela est d’autant plus manifeste que la forme du taw étant un peu différente dans les trois plus anciennes inscriptions[10], c’est le taw de chacune qui est entouré d’un cercle pour dire tet.  pour samech est différencié de  (zain)[11] par l’addition d’une barre. Peut-être aussi  pour sadé est-il différencié de (sin) par l’addition d’une barre à gauche[12].

2) On ne peut prouver que tous les caractères, ni même seulement les primitifs, représentent des objets naturels, mais il existe une ressemblance avérée pour un certain nombre d’entre eux, dans lesquels le nom coïncide exactement avec la chose figurée. Ce sont   aleph (protome de) « bœuf », waw, « crochet »,   lamed, « aiguillon »,   mem « eau »,  aïn, « œil »,  resch, « tête »,   sin, « dent », x (Mésa) ou + (Hiram) taw, « signe », auxquels on peut joindre sans trop d’hésitation   daleth, « porte »,  guimel, (bosse de) « chameau »,  beth, « maison », et  nun, « poisson »[13].

De ces faits nous pouvons du moins conclure : 1) que l’alphabet sémitique n’a point été emprunté tout fait à un système déjà existant, puisqu’il a été complété intérieurement ; 2) qu’il a actuellement pour principe l’acrophonie, c’est-à-dire que chaque lettre est la première du mot qui exprime l’objet représenté.

Et à ces deux conclusions, nous serions bien tenté d’en ajouter une troisième : 3) l’alphabet sémitique, du moins dans ses éléments primitifs, est une imitation d’objets naturels. Il est à la fois linéaire par son aspect et hiéroglyphique dans l’intention de ses auteurs. Soit par défaut de sens artistique, soit par inexpérience, ils ont tracé de rudes croquis au moyen de simples traits.

Il semble d’ailleurs que la première et la troisième conclusion se confirment mutuellement : les lettres qui paraissent secondaires par leur forme sont précisément celles qui ressemblent le moins à des objets naturels et dont les noms sont le plus difficile à expliquer. N’est-ce pas la preuve de leur origine secondaire ? D’autre part, on reconnaît pour ces lettres secondaires que la ressemblance avec des objets naturels n’a pas été cherchée après coup, et coûte que coûte, ce qui conduit à prendre au sérieux la ressemblance des lettres primitives.

Cependant, avant de tirer une conclusion définitive, il est nécessaire de faire une sorte de contre-épreuve.

Nous avons le devoir d’examiner certaines éventualités qui pourraient annuler la valeur de nos déductions.

Il est possible que les signes aient été créés pour représenter des choses, par hiéroglyphisme direct, assez maladroit pour aboutir du premier coup à l’apparence linéaire ; – mais il est concevable aussi qu’ayant été empruntés à un autre alphabet déjà évolué, on leur ait cherché – et en pareil cas on trouve toujours – une ressemblance avec des objets naturels, ce qui eût conduit assez naturellement à rapprocher la forme empruntée des objets eux-mêmes. Dans cette seconde hypothèse, les noms des signes leur seraient bien postérieurs, et on ne pourrait savoir si la ressemblance que nous croyons constater a été perçue par les inventeurs de l’alphabet.

D’autre part, si les Sémites cananéens ont complété leur alphabet, renonçant, pour certains signes du moins, à l’imitation directe de la nature, c’est peut-être aussi parce qu’ils ont emprunté leur alphabet à un système non sémitique ; dès lors, il fallait ajouter les lettres manquantes, et, comme on ne créait pas, on s’est contenté de différencier ; c’est ainsi que les Arabes du Sud qui possédaient plus de lettres que ceux du Nord ont complété leur alphabet par différenciation.

Nous ne pouvons donc repousser a priori l’hypothèse de l’emprunt ; il faut examiner les faits qui sont à notre portée. Si les lettres sémitiques ressemblent vraiment aux signes d’une autre écriture antérieure, la question sera tranchée dans le sens de l’emprunt. Sinon, elle restera ouverte de ce côté à cause des découvertes possibles, mais, en attendant, nous nous en tiendrons aux conclusions suggérées par le caractère même de l’alphabet.

Quelle écriture a pu servir de point de départ ? L’origine crétoise est une hypothèse séduisante[14] ; la forme des lettres offre de grandes analogies. De plus, le nombre relativement restreint des signes crétois linéaires suggère une sélection de signes. Les Phéniciens ont pu accentuer cette sélection et emprunter l’idée de l’alphabet soit aux Égéens directement, soit aux Philistins, qui sont d’origine égéenne, pour le transmettre ensuite simplifié aux Grecs. Cette évolution serait conforme à celle de l’art. L’ancienne civilisation crétoise ne devait rien qu’à l’Égypte, et s’était montrée fort originale dans ses imitations ; elle avait rayonné très loin en Égypte et surtout en Asie. Plus tard, l’art grec naquit, non sans quelques influences égyptiennes ou orientales, dont les Phéniciens furent, le plus souvent, les entremetteurs. C’est précisément un système soutenu dans l’antiquité, tel que le rapporte Diodore[15] : « Le père des Muses (le Zeus crétois) leur accorde l’invention des lettres et la composition des vers, nommée poésie. Quant à ceux qui disent que les Syriens ont inventé les lettres et que les Phéniciens les ont transmises aux Grecs après les avoir apprises d’eux – à savoir les compagnons de Cadmus arrivés en Europe, d’où le nom de lettres phéniciennes qui leur est donné par les Grecs –, on répond que les Phéniciens ne les ont pas inventées de toutes pièces, mais qu’ils ont simplement transformé la forme des lettres. » Ainsi les partisans de l’origine crétoise de l’alphabet ne niaient point l’origine phénicienne de l’alphabet grec ; ils prétendaient remonter plus haut et remplacer une soi-disant origine syrienne par une origine crétoise.

Cette explication, avons-nous dit, est une hypothèse séduisante. Elle ne sera rien de plus tant que la valeur des signes crétois ne sera pas connue. M. Evans les croit syllabiques, ce qui reculerait le contact. Les objets imités, en Crète et dans l’alphabet sémitique, ne se ressemblent guère.

Enfin il serait bien étrange, si l’alphabet crétois a pu envahir le monde sémitique, qu’il ne se soit pas perpétué en Crète même, et que, au Ve siècle avant notre ère, on se soit servi de l’alphabet ionien pour écrire une langue encore inconnue, mais qui a toute chance d’être dérivée de la langue ancienne du pays[16].

Toutefois, s’il fallait incliner dans ce sens, il n’y aurait pas lieu d’attribuer une influence spéciale aux Philistins, qui sont promptement devenus cananéens de civilisation, qui ne semblent avoir joué aucun rôle civilisateur, et dont le rayon d’action doit avoir été très restreint. L’expansion de l’art égéen avant l’an 1500 (av. J.-C.) expliquerait la pénétration de l’écriture créto-égéenne en Asie beaucoup mieux que la colonisation des Philistins[17].

L’origine syrienne ou plutôt assyrienne, elle aussi renouvelée des Grecs, a été soutenue de nouveau de nos jours[18]. On a supposé un emprunt aux signes archaïques[19] ; mais pourquoi s’inspirer de signes hors d’usage ? Quand les Perses ont adapté à leur langue l’écriture babylonienne, ils l’ont prise sous sa forme cunéiforme courante. Il y a bien entre quelques signes cunéiformes et les lettres phéniciennes quelques ressemblances, mais les signes qui se rapprochent le plus ont des valeurs très différentes[20].

Jusqu’à ces derniers temps, on admettait plus communément[21] que l’alphabet sémitique était une transcription de certains signes égyptiens véritablement alphabétiques, c’est-à-dire ne valant que pour une consonne, quoique noyés dans l’ensemble des autres signes, idéographiques, phonétiques ou explicatifs. L’invention aurait consisté à isoler ces signes. La coïncidence est assurément très remarquable, surtout dans le système de M. Erman qui ne reconnaît dans ces alphabets égyptiens que des consonnes, du moins à une époque reculée. Mais la ressemblance avec les signes hiéroglyphes est nulle[22], et tous les rapprochements avec l’écriture hiératique n’aboutissent qu’à des analogies assez vagues[23]. On ne peut donc conclure à un emprunt direct, d’autant qu’il n’y avait aucune raison de ne point emprunter les lettres qui paraissent secondaires dans l’alphabet sémitique et qui figurent cependant dans l’égyptien.

Enfin, sans parler de M. Flinders Petrie qui cherche l’origine de l’écriture carienne (crétoise ?) et de l’écriture phénicienne dans un ensemble de signes fort mal définis, la dernière tentative, toute récente, s’est portée sur l’île de Chypre[24]. Le grec y a été écrit au moyen d’une écriture syllabique, dérivée peut-être d’une écriture d’Asie Mineure, avec un nombre de caractères assez restreints, car on ne disait que pa, pe, pi, po, pu, et non ap, ep, ip, op, up. De plus les voyelles, quand elles formaient à elles seules une syllabe, possédaient des signes particuliers. C’est ce syllabaire que M. Praetorius veut tirer de l’alphabet cananéen, ou plutôt d’un syllabaire antérieur qui aurait donné naissance aux deux. Cet appel à l’inconnu dispense M. Praetorius de fournir des rapprochements précis entre le syllabaire chypriote et l’alphabet. Encore ne s’en tient-il pas là. Il suppose, car c’est une pure supposition, quoi qu’il paraisse en être assez assuré, que l’alphabet cananéen lui-même n’était à l’origine qu’un syllabaire. Pour exprimer qa, qe, qi, qo, qu, les Chypriotes avaient cinq caractères ; les Cananéens n’en ont pris qu’un auquel on donnait toutes ces valeurs, et c’est l’interprétation même de cette écriture, comme expression des voyelles, qui aurait mis sur la voie de l’emploi des signes pour ne représenter que les consonnes, la valeur de consonne demeurant seule fixe dans un signe aussi équivoque ; le dernier pas n’aurait été franchi que par les Grecs. L’hypothèse est ingénieuse et de nature à faciliter le passage de la syllabe à la lettre ; mais est-ce bien le côté le plus difficile du problème, puisque les anciens Égyptiens l’avaient déjà résolu ? Quant aux rapprochements de M. Praetorius, ils sont plus que contestables. L’auteur se borne à trouver des répondants chypriotes – très éloignés ! – pour une dizaine de lettres, dont quelques-unes sont secondaires dans l’alphabet, comme le tet, et, chose assez étrange, il les trouve surtout dans les voyelles chypriotes.

Cet essai nous paraît trop malavisé pour qu’il soit à propos d’insister.

On le voit, l’hypothèse d’un emprunt demeure une pure hypothèse ; l’origine égyptienne, enseignée couramment il y a quelques années, perd chaque jour du terrain. Plus on découvre d’écritures plus on trouve de signes analogues à ceux de l’alphabet ; mais ils sont dispersés un peu partout, et personne ne songe à un syncrétisme qui aurait choisi vingt-deux lettres dans cinq ou six systèmes d’écriture.

Ceux qui, malgré tout, tiennent à l’emprunt, sont obligés de supposer que l’alphabet sémitique a évolué avant d’arriver à sa forme actuelle. Mais ce n’est pas à ses débuts qu’une écriture se modifie[25]. Entre Mésa et Hadad, éloignés par la distance et par le temps, il y a des différences de détail, mais non de celles qui accusent un développement marqué.

Si vraiment les Phéniciens ont emprunté l’alphabet aux Égyptiens, comme on l’admet encore assez généralement, comment se fait-il qu’il ne se trouve aucune trace de l’évolution postulée ? Ils ne se sont pas piqués d’exactitude dans la reproduction des écritures égyptiennes. Ils ont fabriqué et probablement vendu des scarabées et d’autres objets ornés de signes hiéroglyphiques qui ne sont guère plus du véritable égyptien que le chinois de nos porcelaines ou de nos boîtes de thé n’est du chinois. Mais du moins les signes sont égyptiens, et même lorsqu’ils sont mal rendus, ils n’évoluent pas du tout vers l’alphabet sémitique. Nous le voyons apparaître tout à coup, dans telle légende, avec des figures égyptiennes[26], et c’est bien lui ; il n’est pas du tout en devenir.

Au fond, si l’on tenait tant à un emprunt, c’est qu’il rentre mieux dans l’évolution naturelle des choses. L’alphabet n’exigera plus une sorte de prodige de génie ; il sera né sans effort des écritures antérieures ; il ne sera le fait de personne, ou plutôt le fait de tout le monde.

Mais aussi ne faut-il pas exagérer la part de l’invention. On comprend très bien qu’un Phénicien, connaissant la valeur des signes égyptiens, les ayant peut-être tracés lui-même pour écrire de l’égyptien, ait eu l’idée de les employer pour écrire sa propre langue, et qu’il ait eu l’inspiration de ne choisir pour cela que les plus simples, ceux qui représentaient des consonnes. Ne peut-on lui prêter encore l’intention, une fois le premier problème résolu, de trouver d’autres signes, qui paraîtraient moins étranges à son peuple, en lui représentant des objets naturels, très connus de lui par la familiarité de tous les jours ? Peut-être même était-il conduit à ce changement par un scrupule religieux. Aucune des consonnes égyptiennes n’a un cachet religieux, mais l’écriture dans son ensemble ne s’accordait pas avec les idées religieuses d’un non Égyptien, et peut-être encore notre grand homme a-t-il estimé naïvement, mais avec un instinct très sûr, qu’une langue différente se trouverait mieux d’une écriture spéciale[27] ?

Tout nous induit donc à penser que l’alphabet n’a pas été emprunté à une écriture de nous connue, mais nous ne prétendons pas que ces écritures aient été sans influence sur son invention. L’exemple de la Crète prouve à quel point les systèmes étaient multipliés ; manifestement, avant le quinzième siècle avant J.-C., il y avait presque une pullulation d’écritures. Celles qui existaient ont préparé la voie de celle qui a été définitive. Mais nous ne pouvons dire exactement comment.

À tout prendre, dans l’état actuel de nos connaissances, le point de contact le plus voisin est toujours l’Égypte, puisque c’est en Égypte seulement que l’alphabet existait virtuellement. Dans ce cas, l’inventeur serait, soit un Phénicien, soit, d’une façon plus générale, un Cananéen, plutôt qu’un Araméen. Il faudrait en dire autant si l’on penchait pour la Crète. Les Araméens ne seraient désignés que si le contact s’était fait par l’Assyrie, mais c’est l’hypothèse la moins probable.

C’est donc aux Cananéens qu’il convient de faire hommage de l’invention[28]. Rien dans l’alphabet ne fait allusion à la mer, mais rien ne décèle certainement la vie nomade. Les objets figurés sont de la vie de tout le monde.

À quelle époque faut-il placer cette admirable découverte ? Il semble bien que nous ayons un terme avant lequel on ne peut la supposer. C’est l’époque d’el-Amarna. Nous venons de dire que l’alphabet est l’œuvre des Cananéens. Or, vers 1400, on n’écrivait que babylonien au pays de Canaan, même en Phénicie. Sans doute la langue impliquait l’écriture, et puisque le babylonien était une sorte de langue universelle, l’écriture cunéiforme s’imposait. Mais les scribes cananéens ont glosé le babylonien de mots cananéens ; si l’écriture cananéenne avait existé, ne s’en seraient-ils pas servi, au moins dans ce cas ? C’est bien ce qu’ont fait les scribes de Ninive au VIIIe siècle ; quelques mots en araméen, langue et écriture, accompagnent les contrats en babylonien[29]. Comment se fait-il qu’aucun caractère, pas le moindre trait, n’indique la présence de l’alphabet, si simple dans ses procédés et dont on pouvait être fier ? La seule explication de cette abstention, c’est que l’alphabet n’existait pas.

En revanche, il existait certainement au Xe siècle av. J.-C., et probablement deux ou trois siècles plus tôt. Un intervalle de cinq siècles n’est pas de trop pour expliquer les déformations de l’écriture grecque qui a déjà employé les consonnes de Hiram que nous plaçons au Xe siècle, à Mésa au IXe et à Panammou au VIIIe, l’écriture est presque absolument la même. Il est probable qu’au début elle changea peu, soit qu’on écrivît moins, soit qu’on s’appliquât davantage à ne pas altérer des formes qui inspiraient plus de respect.

Nous pouvons nous demander en terminant quelle écriture a pu employer Moïse, vers l’an 1230 ?

Il est très improbable qu’il se soit servi de l’égyptien qui paraît n’avoir jamais été employé à écrire une langue sémitique ; ce serait contre sa nature. Il est peu probable qu’il ait écrit en cunéiformes. Les gloses cananéennes des lettres d’el-Amarna, écrites très imparfaitement en cunéiformes, prouvent que cette écriture n’avait pas été adaptée couramment et spécialement à cette langue, aussi toutes les lettres trouvées récemment en Palestine sont-elles écrites en babylonien, non en cananéen. Aussi bien les cunéiformes devaient être moins connus dans la terre de Gessen et au Sinaï qu’au pays de Canaan. Enfin, malgré les tentatives ingénieuses, on n’a pas pu prouver qu’aucun texte s’expliquât mieux par l’origine cunéiforme de l’écriture.

D’autre part, si l’alphabet cananéen existait alors, et son existence est vraisemblable, c’était l’instrument le plus simple. Il est donc probable que Moïse a écrit dans l’alphabet cananéen. On peut même ajouter, sans attacher aucune importance à ce rapprochement, que l’alphabet a été inventé par quelqu’un qui était dans la situation de Moïse. Il connaissait l’Égypte et probablement l’écriture égyptienne, et il voulait écrire dans une langue sémitique, qu’on ne pouvait écrire en cunéiforme, pour un peuple très simple, qui n’a jamais eu de grandes aptitudes pour le dessin. C’est sûrement d’une situation et d’un besoin semblables qu’est né l’alphabet.

Jérusalem.                                                              P. M. J. Lagrange

Transcription www.mj-lagrange.org

[1] On possède sur un cylindre découvert à Suse une ligne de ces hiéroglyphes qui précédèrent l’écriture cunéiforme ; cf. Mémoires de la délégation en Perse, t. II, p. 129.

[2] Les Babyloniens n’avaient pas perdu le souvenir du cachet primitif des cunéiformes ; il y avait même dans les bibliothèques assyriennes de véritables répertoires, dans lesquels le scribe pouvait s’instruire des formes originelles ; cf. de Morgan, Note, etc. (Recueil de travaux, XXVII, p. 234.)

[3] Voici la liste de ces signes, d’après Erman, Ägyptische Grammatik : b, p, f, m, n, r, h, h, ḫ, s, š, q, k, g, t, ṯ, d, ḏ, plus quatre signes équivalents à א, à י, à צ, à ו.

[4] Ce point n’est pas admis de tous les égyptologues ; en tous cas, d’après Erman lui-même, les signes équivalents à א et à ו ont été employés comme voyelles dès le Moyen Empire.

[5] Researches in Sinai, 1906 : « I am disposed to see in this one of the many alphabets which were in use in the Mediterranean lands long before the fixed alphabet selected by the Phœnicians. A mass of signs was used continuously from 6 000 or 7 000 B.C., until out of it was crystallized the alphabets of the Mediterranean – the Karians and Celtiberians preserving the greatest number of signs, the Semites and Phœnicians keeping fewer. » p. 131.

[6] M. Dussaud reconnaît que « les épigraphistes classiques n’admettent pas d’inscription grecque antérieure au VIIe siècle avant notre ère ». Journal asiatique, 1905, I, p. 360.

[7] Il ne faut pas confondre deux questions distinctes, celle de l’origine première de l’alphabet, et celle de l’origine des alphabets grecs. M. Dussaud, il est vrai, admet que « les alphabets grecs, considérés comme des survivances d’alphabets égéens plus anciens, expliquent parfaitement, grâce à leurs variétés, les alphabets phéniciens, sabéen et libyque. » (Journal as., l.l., p. 358) ; mais on pourrait à la rigueur supposer que les Phéniciens ont conçu leur alphabet d’après le type égéen pour le transmettre ensuite aux Hellènes ; cela paraît être l’opinion de MM. Evans et S. Reinach. M. Dussaud serait, à notre connaissance, le seul savant décidé à pousser plus loin les choses. On ne peut qu’attendre avec beaucoup d’intérêt son explication qui sera sans doute fort ingénieuse.

[8] Cf. RB., 1902, p. 256 et s. La controverse minéo-sabéo-biblique.

[9] C’est l’argument de M. Lidsbarski, dans Ephemeris für semitische Epigraphik, I, p. 109-136.

[10] Hiram (CIS, I, 5) ; Mésa et Hadad.

[11] C’est la forme de Zaïn dans l’inscription Hiram, la plus ancienne (CIS, I, 5).

[12] M. Lidzbarski propose encore très dubitativement  forme ancienne d’après les alphabets italiotes pour  (waw), d’où le iod se serait différencié par un crochet à droite ; les lettresמנר pourraient ainsi facilement procéder l’une de l’autre, de ר à מ, mais c’est probablement un simple hasard, car il est plus que probable qu’elles figurent toutes les trois des objets. Peut-être qof est-il différencié de aïn par une barre.

[13] M. Lidzbarski propose pour (illisible) רר, « sein de femme » ; mais le caractère n’a pas cette position dans les plus anciennes inscriptions. Daleth, quoiqu’il signifie « porte » et non « ouverture de porte », a pu se dire par abus de l’ouverture de la tente formée par le relèvement du tissu, d’où la forme triangulaire ; cf. aussi les ouvertures ogivales dans des constructions primitives, par exemple à Tirynthe ou à Mycènes (cf. Perrot et Chipiez, Histoire…, VI, pp. 313 et 507). Pour le qôf il propose ingénieusement (illisible) קשת, arc, mais cette forme ne se trouve que dans une seule inscription (Mésa). L’objection contre « poisson », que le poisson est toujours figuré horizontal dans l’écriture, est controuvée par le poisson debout sur une tablette pictographique de Knossos.

Dans un article plus récent, Die Namen der Alphabetbuchstaben, Ephemeris… II, p. 125-139, M. Lidzbarski rattache maintenant qof à קובע, casque. Il propose très justement de voir dans zaïn une branche zaith, d’après la prononciation zêta.

[14] On peut citer pour cette opinion, destinée probablement à gagner du terrain, M. Evans, M. S. Reinach, dans divers articles de revues, M. Dussaud, déjà cité.

[15] Diodore, V. 74.

[16] Cf. les études sur les trois inscriptions dites Étéocrétoises découvertes récemment en Crète dans The annual of the British School at Athens, VIII, p. 125-156 et X, p. 115-126.

[17] Quelques savants pensent même que l’écriture crétoise est originaire d’Asie Mineure ; cf. Maspero, Histoire…, II, p. 463. Cela paraît peu probable en raison de la continuité du développement crétois depuis l’époque néolithique.

[18] Surtout par M. Hommel, en plusieurs endroits, entre autres, dès 1885, dans Geschichte Babyloniens und Assyriens, p. 50 à 53 ; cf. en dernier lieu Grundriss…, p. 96 ss, où il trouve à l’alphabet un ordre astrologique.

[19] Delitzsch, Die Entstehung des ältesten Schriftsystems oder der Ursprung dem Keilschriftzeichen dargelegt, Leipzig, 1897, p. 221-231.

[20] Lidzbarski, l. l., p. 130 [la suite est difficilement lisible, se reporter à l’ouvrage original].

[21] Maspero, Histoire… II, p. 573 ss., surtout d’après de Rougé, Mémoire sur l’origine égyptienne de l’alphabet phénicien, Paris, 1874. – M. S. Reinach a d’abord admis cette démonstration ». Traité d’épigraphie grecque, p. 180 : « Le tableau ci-contre facilitera une comparaison, dont la légitimité s’impose au premier coup d’œil, entre l’hiératique égyptien et le plus ancien type de l’alphabet phénicien.

[22] Contre M. Halévy, Quelques observations sur l’origine de l’alphabet phénicien. Comptes rendus de l’Ac. des Insc. et B. L., t. 1 (1873), p. 21 ss. et depuis.

[23] C’est ce que M. Maspero, qui a cependant amélioré les comparaisons faites par M. de Rougé, est bien près de reconnaître : « Peut-être les analogies y ressortiraient-elles plus évidentes et plus nombreuses, si nous avions des inscriptions remontant aux temps les plus voisins de l’invention ; dans l’état actuel, les divergences s’y manifestent assez sensibles, pour que certains savants aient tenté d’en rechercher le prototype ailleurs… Il est malaisé de discerner le vrai… etc. (Histoire… , II, p. 571 ss).

[24] Über den Ursprung des kanaanäischen Alphabets, von Franz Praetorius, lithographie, Berlin, 1906.

[25] Argument mis en relief par M. Lidzbarski, Ephemeris, l. l., qui a modifié sa première manière de voir.

[26] Par exemple dans l’intaille reproduite dans Maspero, Histoire…, II, p. 573, d’après de Vogüé, Mélanges d’Arch. or., pl. I, p. 106-108.

[27] M. Lidzbarski, Ephemeris…, I, p. 134, conclut que l’alphabet est la création d’un homme de Canaan qui s’est appuyé sur l’écriture égyptienne dont il connaissait un peu le système, pas assez cependant pour lui emprunter quelques signes ; car, s’il l’avait bien connue, il aurait fait comme les Perses, par rapport à l’écriture babylonienne. Cet exemple ne suffit pas à régler tous les cas analogues.

[28] De toute façon, ce sont bien les Phéniciens qui ont transmis l’alphabet aux Grecs.

[29] CIS II, les premiers textes.

Écho de notre page Facebook : mai 2023

31 mai 2023

La Visitation de la Vierge Marie à sa cousine Élisabeth (Luc 1, 39-56)

Extrait de Le Père Lagrange et la Vierge Marie. Méditations des mystères du Rosaire à la lumière de la vie et des écrits du père Lagrange par Manuel Rivero o.p.

La Vierge Marie s’est mise ne route rapidement vers la maison de Zacharie et d’Élisabeth. Chaque phrase de l’Évangile sur la Vierge Marie est riche d’enseignements pour nous. Ici il nous est dit que la Vierge marcha vite. Ayant le Christ dans son cœur et dans son âme, Marie emprunte d’un pas joyeux les routes qui vont la conduire jusqu’au village de sa cousine à Aïn Karim, près de Jérusalem. La charité du Christ la presse. Élisabeth sera heureuse de recevoir l’aide de sa parente, fatiguée qu’elle est par la grossesse de Jean le Baptiste.

En arrivant, Marie a souhaité la paix : Shalom ! Car c’est ainsi que les Juifs se saluent en Israël.

Deux femmes enceintes se rencontrent et à travers elles leurs enfants : Jésus et Jean le Baptiste, le précurseur.

Selon le père Lagrange, Élisabeth a compris par le tressaillement de son enfant l’arrivée du Messie chez elle. Inspirée par le Saint-Esprit, remplie de joie, Élisabeth répond à la salutation de Marie en la reconnaissant comme la mère du Seigneur : « Et comment m’est-il donné que vienne à moi la mère de mon Seigneur ? Car, vois-tu, dès l’instant où ta salutation a frappé mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en mon sein. Oui, bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur ! » « Élisabeth s’incline devant Marie comme Jean le Baptiste le fera devant Jésus », commente le père Lagrange.

Le Magnificat de Marie plonge ses racines dans le cantique d’Anne, la prophétesse : « Les rassasiés s’embauchent pour du pain, mais les affamés cessent de travailler. La femme stérile enfante sept fois, mais la mère de nombreux enfants se flétrit. C’est Yahvé qui fait mourir et vivre, qui fait descendre au shéol et en remonter. C’est Yahvé qui appauvrit et qui enrichit, qui abaisse et aussi qui élève » (1 Samuel 2, 6-7).

En Israël comme dans les pays arabes, sous l’empire de la joie, les femmes improvisent un chant pour célébrer une victoire ou un événement heureux.

Mère de Samuel, Anne annonce l’onction du Messie et le salut d’Israël qui manifestent la bonté de Dieu dont la sagesse renverse les orgueilleux. Le chant d’Anne ne se réduit pas à l’exultation d’une femme stérile qui devient mère. Prophétesse, elle parle du cœur de Dieu qui brise l’arc des puissants et qui rend la force au Messie. Jésus, oint du Saint-Esprit, est ainsi annoncé dès l’Ancien Testament. Le cantique d’Anne préfigure le Magnificat de Marie.

Pour le père Lagrange : « ce qui est propre au Magnificat, c’est que cette fois les expressions ne sont pas trop fortes pour dire ce qui s’est opéré en Marie, et qu’elles paraissent à peine suffisantes pour exprimer l’humilité de celle qui glorifie le Seigneur. Pour que toute gloire Lui soit rendue, elle avoue sa bassesse, et cependant, répondant à la félicitation d’Élisabeth, elle avoue que toutes les générations la nommeront bienheureuse. Tandis que le chant d’Anne aurait pu être placé dans la bouche d’un héros, celui de Marie est bien celui de la mère de Jésus[1]. »

L’histoire témoigne de l’accomplissement du Magnificat. Toutes les générations proclament bienheureuse la Vierge Marie, la Mère de Jésus, la Mère de Dieu.

Après trois mois, Marie rentre chez elle pour ne pas provoquer « une curiosité indiscrète si loin de chez elle », précise le père Lagrange. Joseph, son époux, l’attend à Nazareth. Il partage avec elle le mystère de l’Incarnation en tant que père adoptif de Jésus.

Seigneur, par Marie, éveille dans le cœur des jeunes le désir de te suivre avec confiance.

Ouvrons la porte à Marie. Quand le Saint-Esprit voit Marie dans une âme, il s’y précipite…

Prier la Mère de Dieu pour qu’elle accompagne le Synode.

La requête du Souverain pontife : une prière à Marie pour accompagner la première étape de l’Assemblée ordinaire du Synode des évêques, prévue du 4 au 29 octobre au Vatican sur le thème « Pour une Église synodale : communion, participation et mission ». Le Pape François l’a formulée après la récitation du Regina Caeli ce dimanche, rappelant que mercredi prochain, 31 mai, à la fin du mois marial, dans les sanctuaires dédiés à la Mère de Dieu dans le monde entier, « des moments de prière sont prévus pour soutenir la préparation de l’assemblée d’octobre » et de la deuxième étape à l’automne 2024.

Lire la suite :

https://www.vaticannews.va/fr/pape/news/2023-05/le-31-mai-prier-marie-pour-qu-elle-accompagne-le-synode.html?fbclid=IwAR2reuINNY6AiTOr8USX6Lh5rTNawNZUb0zuuJjarkMdX02EydzUhIZB9fA

[1] M.-J. LAGRANGE, L’Évangile de Jésus-Christ avec la Synopse évangélique traduite par le P. C. LAVERGNE, o.p. Nouvelle édition, Paris, Librairie Lecoffre et J. Gabalda, éditeurs, 1954, p. 20.

29 mai 2023

Bienheureuse Vierge Marie, Mère de l’Église

Jésus voyant sa mère et tout près le disciple qu’il aimait, dit à sa Mère : « Femme, voilà ton fils. » Ensuite il dit au disciple : Voilà ta mère. » Et depuis ce moment le disciple la prit chez lui. (Jean XIX, 26-27)

Commentaire du P. Lagrange (extraits) : Il se passa alors la chose la plus simple et la plus touchante. Jésus sachant que sa Mère pourrait faire plus pour le disciple, que lui pour elle, la lui donne aussi pour Mère. Ordinairement, c’est une charge ; ici c’est un privilège : la Mère de Jésus sera pour le disciple une mère. Jean représentait ici tous les fidèles auxquels Marie a été dès lors donnée comme mère. La maternité spirituelle de Marie étant admise, le texte eût pu direde tout autre disciple ce qu’il dit de Jean. Chaque chrétien, se sachant fils de Marie, éprouve une consolation à penser qu’il est dans la même situation que Jean au pied de la Croix.

Notre piété envers Marie voit aussi dans l’attitude de celle qui se tenait debout au pied de la Croix un indice de la place qu’elle occupe dans notre rédemption. Elle compatissait aux souffrances de son Fils, mais aussi comme son Fils elle compatissait à nos maux ; elle souffrait avec lui, s’offrait avec lui, sans rien ajouter à ses mérites infinis, mais en y joignant les siens, en s’associant intimement à l’œuvre de celui qu’elle avait donné au monde pour le sauver, non moins participante de son œuvre à sa mort qu’à sa naissance. (L’Évangile selon saint Jean, Lecoffre-Gabalda, 1936)

PAROLES DU SAINT PÈRE

Dieu ne s’est pas passé de sa Mère : à plus forte raison en avons-nous besoin. Jésus lui-même nous l’a donnée, non pas à n’importe quel moment, mais de la croix ; il dit au disciple, à tout disciple : « Voici ta mère » (Jn 19, 27). La Vierge n’est pas optionnelle : elle doit être accueillie dans la vie. Elle est la Reine de la paix, qui vainc le mal et conduit sur les voies du bien, qui rétablit l’unité entre ses enfants, qui éduque à la compassion. Prends-nous par la main, Marie. Agrippés à toi nous passerons les virages les plus difficiles de l’histoire. Par la main, amène-nous à redécouvrir les liens qui nous unissent. Rassemble-nous tous sous ton manteau, dans la tendresse de l’amour vrai, où se reconstitue la famille humaine (Homélie Messe Mère de Dieu, 1er janvier 2019) (Vatican News, 29 mai 2023).

28 mai 2023

Solennité de Pentecôte (Jn 20, 19-23)

Apparition de Jésus aux disciples

Comme il était tard ce même jour, le premier de la semaine, et les portes étant fermées par crainte des Juifs là où étaient les disciples, Jésus vint et se tint au milieu d’eux et leur dit : « Paix à vous ! ». Et cela dit, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples se réjouirent donc en voyant le Seigneur. Il leur dit donc de nouveau : « Paix à vous ! Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie ». Et cela dit, il souffla sur eux et leur dit : « Recevez l’Esprit Saint ; ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis ; et ceux à qui vous les retiendrez, ils seront retenus ».

Enseignement du P. Lagrange : Le jour et le moment sont marqués, peut-être une heure très tardive, ce qui laisse aux disciples d’Emmaüs le temps de revenir à Jérusalem, même s’ils sont partis de l’Emmaüs qui devint Nicopolis, à 160 stades. Les portes étaient fermées, non que les Juifs n’eussent pu les forcer, mais pour éviter des importuns qui pouvaient être des espions. Ce détail est mentionné pour montrer que Jésus entra d’une façon surnaturelle. Il n’en usait point ainsi de son vivant : c’est donc que son corps ressuscité a acquis des propriétés surnaturelles, qui lui sont pour ainsi dire naturelles. ». – « La paix à vous » est bien cette fois la formule de salutation des Juifs, mais non cependant sans une certaine solennité ; de même en souhaitant la paix, Jésus la donne, comme il l’avait déjà donnée.

Jésus avait donc conservé sur son corps ressuscité la trace de ses blessures, comme de glorieuses cicatrices : non qu’il ne puisse apparaître autrement ; mais il les montre pour être reconnu comme le crucifié, et, sans se faire un mérite de ses souffrances auprès de ses disciples, il les rappelle néanmoins, soit pour exciter leur foi et leur amour, soit pour que la joie soit plus complète, tant de douleurs n’étant plus qu’un souvenir. Le ressuscité en use selon les dispositions de ceux auxquels il apparaît. Il avait dû modérer l’ardeur aimante de Magdeleine.

Jésus répète sa salutation, comme prélude d’un dernier acte avant de prendre congé, et parce que la paix est une disposition favorable à l’action divine.

Parlant de son Père (XVII, 18), il avait déjà regardé la mission des Disciples comme accomplie dans sa pensée. Il la leur intime maintenant dans les mêmes termes : comme il a été l’envoyé de son Père, ils seront ses envoyés : la résurrection dont ils sont les témoins sera sans doute la première bonne nouvelle qu’ils auront à annoncer au monde.

Jean a retenu un trait important de l’action du Christ ressuscité, le don d’un pouvoir spirituel spécial Il est clair d’abord qu’il ne donne pas naissance à l’Esprit Saint, dont l’A. T. connaissance l’existence et décrivait les attributs. Tout au plus peut-on dire que cette insufflation est un signe qu’il participe à la spiratio éternelle de l’Esprit Saint.

Ce que Jésus donne à ses apôtres est donc quelque chose de surnaturel que l’on doit rattacher à l’action de l’Esprit Saint, représenté dans l’A. T. surtout comme vivifiant, et que Jésus lui-même a désigné comme un Aide dans l’ordre de la vérité. Après la mission imposée au v. précédent, il semble bien que de doive être un pouvoir, plutôt qu’une disposition de l’esprit ou du cœur, mais on ne saurait que conclure, si des paroles jointes au geste ne donnaient l’explication. Ce pouvoir, en effet, est exprimé clairement (v. 23) ; c’est celui de remettre les péchés, et c’est aussi celui de les retenir. C’est le pouvoir déjà donné à Pierre et aux apôtres (Mt XVI, 19 ; XVIII, 18), qui est ici renouvelé expressément avec l’insufflation de l’Esprit, laquelle le confère définitivement. L’allusion à l’Esprit s’entend assez : remettre les péchés, c’est donner la vie spirituelle ; et cela ne doit pas se faire sans discernement, puisque dans certains cas les péchés sont retenus. Or cela ne saurait être par caprice, mais par suite d’un jugement porté sur les dispositions des hommes. Ceux qui prétendent que la théologie johannique ne comporte pas cette distinction (Bauer) prétendent sans doute la comprendre mieux que Jean lui-même. N’a-t-il pas d’ailleurs insisté sur la nécessité, pour ceux qui acceptent la doctrine, de pratiquer les commandements (XIV, 21) ? Quelques-uns pouvaient donc y manquer, d’où l’importance suprême de ce qu’on nommera le sacrement de pénitence avec l’Église.

(Marie-Joseph Lagrange, o. p. L’Évangile selon saint Jean, Lecoffre-Gabalda, 1936)

24 mai 2023

Le Christ prie pour ses disciples

« Je leur ai donné ta parole, et le monde les a haïs, parce qu’ils ne sont pas du monde, comme je ne suis pas du monde. Je ne prie pas pour que tu les enlèves du monde, Mais pour que tu les gardes du mal. Ils ne sont pas du monde, comme je ne suis pas du monde. Sanctifie-les dans la vérité : ta parole est vérité. Comme tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde ; et je me consacre moi-même pour eux, afin qu’ils soient eux aussi sanctifiés en vérité » (Jn 17, 14-19).

Le P. Lagrange développe : La pensée est claire. Jésus n’appartient pas au monde, il vient d’en haut : donc le monde le hait parce qu’il ne lui appartient pas, et qu’il a rendu témoignage contre ses œuvres (7, 7). De la même façon le monde a pris en haine ses disciples parce qu’ils ont reçu la parole qu’il leur a donnée, c’est-à-dire parce qu’ils se sont rangés à sa doctrine opposée à celle du monde, et que de la sorte ils ne sont pas du monde. Au v. 6 Jésus disait dans les mêmes termes qu’ils en étaient sortis. Il faut donc reconnaître que le « monde » doit être pris dans deux sens un peu différents. Tantôt c’est toute l’humanité, comme lorsque Jésus vient dans le monde (3, 17), tantôt c’est l’humanité hostile ou tout au moins qui ne comprend pas les choses d’en haut. De cette façon on peut être dans monde sans en être, c’est-à-dire sans en avoir l’esprit.

Jésus, continuant à parler à son Père, s’explique en faveur de ses disciples (cf. 11, 42). S’ils sortaient avec lui (14, 1) du monde d’une façon définitive, ils ne pourraient remplir leur mission : il suffit que le Père les préserve des mauvais éléments qui sont dans le monde et qui lui donnent son esprit propre, opposé à celui de Jésus. En effet, les hommes n’ont pas reçu Jésus parce que leurs œuvres étaient mauvaises (3, 19) et Jésus reproche au monde ses œuvres mauvaises (7, 7). Il serait donc très naturel qu’il priât le Père de préserver ses disciples de ce mal qui est dans le monde. Que le monde les haïsse et les persécute, cela ne les empêchera pas d’accomplir leur mission : l’unique nécessaire est de les préserver de la contagion du mal moral. Il s’agit là comme le résultat d’une méditation spéciale qui a montré à Jean l’influence du démon sur le monde, méditation qu’il ne faut point perdre de vue.

La répétition au v. 16 de l’affirmation que ni Jésus ni ses disciples ne sont du monde prépare la prière des vv. 17-19. Pour agir sur le monde, sans en être, c’est-à-dire en étant à l’abri de sa contagion, il faut que les disciples reçoivent une consécration qui achève leur séparation du monde en les rapprochant de Dieu. Déjà les disciples ayant reçu la parole ne sont plus du monde, mais ce n’est que l’aspect négatif : Jésus demande à Dieu de les faire participer en vertu de cette même parole à la perfection transcendante qui est l’aspect positif de sa sainteté. Et en même temps le caractère de la parole du Père se révèle : c’est la vérité. Mais tandis que le psalmiste distinguait la vérité et la justice, Jésus propose une sainteté qui est dans la vérité acceptée tout entière, et agissant dans les âmes. Le mot de consécration n’exprime pas assez le caractère intime du fait : les disciples ne sont pas seulement « consacrés » au service de la vérité, ils en sont pénétrés et transformés intérieurement.

On voit ici que cette sanctification préparait la mission des apôtres, mission analogue à celle du Fils : la liaison est tout à fait claire si l’on a présent ce qui a été dit (10, 36). Jean n’a pas oublié que la mission définitive sera donnée plus tard (20, 21), mais la mission était déjà au passé dans 4, 38.

Bossuet : « Il était donc saint, et consacré à Dieu, non seulement en qualité de pontife, mais encore en qualité de victime… C’est pour cela qu’il se sanctifie, qu’il s’offre, qu’il se consacre, comme une chose dédiée et sainte au Seigneur. Mais il ajoute ‘Je me sanctifie pour eux’, en parlant de ses apôtres, afin que participant par leur ministère à la grâce de son sacerdoce, ils entrent aussi en même temps dans son état de victime, et que n’ayant point par eux-mêmes la sainteté qu’il fallait pour être les envoyés et les ministres de Jésus Christ, ils la trouvassent en lui. » Ici Jésus se sanctifie en ce moment même, donc plutôt comme victime, puisqu’il va mourir, et que c’est pour d’autres. Mais le résultat n’est pas seulement un sacrifice en faveur des disciples, c’est un sacrifice qui les mettra dans ce même état (proportion gardée) de sanctification qui doit répondre à la sanctification de Jésus. La sanctification que Jésus leur obtient les substitue dans tout son rôle comme prêtres et victimes, dispensateurs de la grâce, et spécialement dans ce contexte, liens de l’unité.

(Extraits : L’Évangile selon saint Jean, Lecoffre-Gabalda, 1936).

23 mai 2023

Le Fils prie son Père de le glorifier (Jn 17, 1-11a)

Le Fils prie pour lui, mais la gloire qu’il demande au Père, il la lui a donnée, et sa propre gloire doit se résoudre en celle du Père ; c’est celle qu’il avait déjà et dans laquelle il ne fera que rentrer.

La prière succède aux discours, Ceux-ci terminés par l’ordre de sortir (14, 31), on pourrait encore concevoir la prière avant le départ ; ce qui fait l’effet d’avoir été ajouté, c’est donc plutôt 15-16 que ce chap. 17. Cependant la prière les yeux tournés vers le ciel semble bien indiquer qu’on est à l’air libre ; c’est plus naturel ; quoique cela puisse se concevoir dans

une salle (Ac 7, 55). Il faudrait supposer que Jésus s’est arrêté sur la route, pour une pause

P. Marie-Joseph Lagrange o.p. (1855-1938)

solennelle. Jésus a posé les bases de la glorification du Père, mais pour que cette gloire s’étende et s’affermisse, il faut que le Fils soit glorifié, car c’est pour sa victoire et par elle que l’on rendra gloire au Père.

Que le Fils doive, lui glorifié, glorifier le Père, cela est en harmonie avoir le pouvoir que le Père lui a donné, pouvoir comportant une mission. Le pouvoir s’étend sur toute chair, c’est-à-dire sur tous les hommes, manifestement dans le dessein de les sauver tous, puisqu’ils sont de son domaine. Il en est cependant qui lui sont spécialement donnés par le Père, et à ceux-là il confère la vie éternelle, ce qui est à la gloire de Dieu. Le Père donne tout au Fils, mais il faut que chacun croie pour avoir la vie éternelle. Ici la foi n’est pas exprimée, mais contenue dans le don spécial du Père qui les amène à suivre Jésus.

(Extraits. Marie-Joseph Lagrange, o.p. L’évangile selon saint Jean, Lecoffre-Gabalda, 1936.)

18 mai 2023

L’Ascension du Seigneur

Apparition aux Onze en Galilée. Mission des Apôtres

Or les onze disciples se rendirent en Galilée vers la montagne que Jésus leur avait désignée, et le voyant ils se prosternèrent, eux qui avaient douté. Et Jésus, s’approchant, leur parla, disant : « Toute puissance m’a été donnée dans le ciel et sur la terre. Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, leur apprenant à pratiquer tout ce que je vous ai commandé. Et voici que je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. (Mt 18, 16-20)

Enseignement du P. Lagrange :

Les Onze connaissaient le chemin de Galilée, mais quelle est cette montagne ? Voyant Jésus, les Onze se prosternent, ce qui suppose qu’ils reconnaissent leur Maître, qu’ils vénèrent davantage depuis sa résurrection. La résurrection sans séparer complètement le Christ de ses disciples, l’a cependant investi d’une puissance qu’il possédait déjà, mais qui était comme voilée. Ce qui résulte déjà du contexte, – que la mission des Apôtres dérive du pouvoir du Christ. Elle sera donc universelle comme ce pouvoir. Matthieu n’a pas hésité à attribuer au Christ cet ordre du baptême. D’où serait venu, sinon du Christ, un précepte aussi rigoureusement et universellement pratiqué, et pourquoi ne l’aurait-il pas intimé au moment assigné par Matthieu ? Celui qui après un premier enseignement est devenu disciple confesse le Père, le Fils et le Saint-Esprit, et s’initie à leur culte par une véritable union, agréée par eux du fait que leur nom est prononcé.

Après le baptême, l’enseignement pratique. Jésus-Christ établit en quelques mots une institution fondamentale, ignorée de l’antiquité jusqu’alors, la prédication à la fois religieuse et morale des préceptes. Ces préceptes sont ceux du Christ, puisqu’il a promulgué de nouveau la loi morale sous une forme plus parfaite. Aussi le Christ promet-il à ses apôtres une assistance spéciale. Elle est nommée une présence, c’est-à-dire spirituelle, car ces paroles ne peuvent signifier qu’un adieu.

Ces dernières paroles du Seigneur sont consolantes, surtout pour nous qui pouvons constater l’accomplissement miraculeux de tout ce petit discours. Les mots pressés sont chargés de sens : les Apôtres reçoivent une mission qui s’étend à toutes les nations ; elle tient en trois offices, qui n’ont jamais cessé d’être remplis. L’affirmation de la puissance accordée au ressuscité se vérifie par l’assistance qu’il a donnée, ou plutôt par cette présence dont tous les fidèles sont pénétrés.

(Extrait de Marie-Joseph Lagrange, O. P. Évangile de Saint Matthieu. « coll. Études bibliques » Lecoffre Gabalda, 1941.)

13 mai 2023

Fête de Notre-Dame de Fatima

Souvenons de notre saint pape Jean-Paul II, victime d’un grave attentat le 13 mai 1981, il demanda à placer la balle qui avait traversé son corps dans la couronne de Notre-Dame-de-Fatima, en signe de reconnaissance.

Quel est le message de Fatima ?

Les apparitions de la Vierge ont été précédées des apparitions d’un ange qui apparut à trois petits bergers : Lucie, François et Jacinthe, qui leur fit répéter cette prière : « Mon Dieu, je crois en vous, je vous adore, j’espère en vous, et je vous aime. Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas ».

Il leur demanda aussi d’offrir au Seigneur des prières et des sacrifices tout en évoquant la miséricorde des cœurs de Jésus et de Marie à leur égard.

Le 13 mai 1917, c’est Notre-Dame qui leur apparaît, vêtue de blanc, plus brillante que le soleil. Elle leur demande de se rendre à Cova da Iria six mois de suite le 13 de chaque mois à la même heure. Notre Dame les exhorte à prier : « Réciter le chapelet tous les jours pour obtenir la paix pour le monde et la fin de la guerre ».

Le 13 juin 1917, Notre-Dame révèle aux enfants que Jésus veut établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Ce Cœur de Marie est entouré d’épines, symbole des péchés des hommes.

Le 13 juillet 1917, Notre-Dame demande la consécration de la Russie à son Cœur Immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis. Elle donne aussi une nouvelle prière à ajouter dans le chapelet : « Ô mon Jésus, pardonnez-nous, préservez-nous du feu de l’enfer ; emmenez au Paradis toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus besoin ».

Le 13 octobre 1917, un samedi, Notre-Dame demande la construction d’une chapelle en son honneur en disant : « Je suis Notre-Dame du Rosaire ». Elle veut que le chapelet soit prié tous les jours. Ce jour-là eut lieu le miracle du soleil annoncé quatre mois auparavant. Le soleil tourna trois fois sur lui-même lançant de tous côtés des faisceaux de lumière.

Quels enseignements pouvons-nous retenir cent ans après ces apparitions ?

Tout d’abord, Notre-Dame nous renvoie à la conversion et à la prière pour les pécheurs. Jésus a intercédé sur la croix pour les pécheurs. Saint Dominique s’exclamait dans sa prière : « Seigneur, que vont devenir les pécheurs ? » Les enfants de Fatima vont prier le chapelet pour le pardon des pécheurs. Les apparitions mariales n’apportent rien de nouveau à la Révélation divine. Dieu le Père nous a tout dit dans son Fils Jésus. La Révélation est close et le salut nous a été acquis par la mort et la résurrection de Jésus. Nous n’avons pas à courir derrière de nouvelles révélations comme si l’Évangile ne suffisait pas. Ce serait un manque de foi et un péché.

Encore une fois, comme à Lourdes en 1858, la Vierge Marie a choisi des enfants pauvres comme témoins et missionnaires. Les apparitions de Fatima nous font prendre conscience de l’importance des enfants, disciples-missionnaires de Jésus-Christ. Les parents disent souvent : « Nous voulons que nos enfants ne manquent de rien ». Mais ils oublient parfois l’essentiel : la transmission de l’Évangile de Jésus, la prière et le souci des pécheurs et des pauvres. Les familles sont appelées à vivre une conversion dans leurs mentalités, leurs propos et leurs pratiques. Les enfants sont aimés de Dieu, choisis par la Vierge et envoyés comme des missionnaires en donnant un témoignage de prière et de sacrifice.

D’ailleurs, l’idée de sacrifice a pratiquement disparu de l’éducation des enfants. Les pédagogies sont orientées vers les activités ludiques et variées alors que l’existence humaine demeure marquée par la souffrance et le manque. L’enfant ne pourra pas faire face aux épreuves de la vie sans esprit de foi, de prière et de sacrifice.

Quand nous lisons la vie des saints, une flamme d’amour divine jaillit dans nos cœurs qui nous rend heureux tout en restant tenaillés par les douleurs et contrariétés du quotidien. Dans la vie des saints, les sacrifices rythment les jours et les nuits. Les enfants de Fatima se privaient de ce qu’ils chérissaient non pas par masochisme mais pour l’amour de Dieu et des pécheurs, pour raboter leur ego insolant et se donner au service des pauvres. Ils se privaient de manger des figues et des raisins appétissants. Surtout, ils portaient dans la foi moqueries, mépris, punitions, prison et maladie. François est mort à l’âge de 10 ans, le 4 avril 1919. Jacinthe est partie vers le père le 20 février 1920 à l’âge de neuf ans.

Puissions-nous ouvrir notre cœur aux grâces que Dieu veut répandre sur son Église.

Puissions-nous favoriser la catéchèse et la prière du chapelet des enfants en leur faisant découvrir Jésus avec sa Mère, la Vierge Marie, au rythme paisible des grains du chapelet qui à l’image de l’arrosage goutte à goutte de nos jardins vient imbiber nos âmes de l’eau vive de l’Esprit-Saint !

Le père Lagrange, dominicain, fondateur de l’École biblique de Jérusalem, disait un jour à l’un de ces frères : « Le Rosaire, quand on s’en occupe, il réussit toujours ». Occupons-nous du Rosaire des enfants de manière à ce qu’ils réussissent non seulement dans la vie mais surtout leur vie, une vie de foi et d’amour.

Prions pour la Paix dans le monde, pour l’Ukraine et pour la Russie.

Fr. Manuel Rivero O.P.

Cathédrale de Saint-Denis (La Réunion).

 

12 mai 2023

En juillet 1922, le P. Lagrange écrit dans son Journal :

Ave Maria !

Je pense qu’après mon baptême, le 12 mai 1855, on m’a conduit à l’autel de Marie, on a lu, en mettant l’étole au-dessus de moi, l’évangile In principio (Jean : Au commencement …) Si, dès lors, vous m’aviez imposé ce travail, fait cet honneur, car vous savez que je m’en juge indigne. Non, non, je ne demande pas, je ne désire pas des grâces extraordinaires, mais bien cette grâce tout à fait extraordinaire d’être conduit par vous, mon Jésus, puisque vous seul pouvez m’apprendre à vous aimer… la seule chose… propter me, propter me faciam, ut non blasphemer… laude mea infrenabo te ne intereas… Ego Dominus deus tuus docens te utilia, gubernans te in via qua ambulas… Is[a.e]. XLVIII (C’est pour moi, pour moi que j’agirai, pour que je ne sois pas blasphémé. Pour ma gloire, je te dompterai pour que tu ne te perdes… Je suis le Seigneur, ton Dieu, t’enseignant ce qui est utile, te gouvernant sur la voie que tu empruntes…’d’après Isaïe 48, 11.17’)

10 mai 2023  

Le 10 mars 1938, au couvent royal de Saint-Maximin, dans la cellule du père Lacordaire, au terme d’une vie laborieuse, le P. Lagrange s’éteignait à la suite d’une mauvaise grippe qui s’était aggravée en congestion pulmonaire. Il revenait d’une série de causeries données aux jeunes universitaires de Montpellier. Jusqu’à la fin de sa vie, le P. Lagrange a poursuivi son service d’Église : faire connaître et aimer la Parole de Dieu.

Chaque mois, le 10, nous faisons mémoire de ce grand serviteur de Dieu au cours d’une messe célébrée par Fr. Manuel Rivero o.p. Président de l’Association des Amis du père Lagrange.

N’hésitons pas à confier à l’intercession du P. Lagrange la grâce dont nous avons besoin. Il ne manque plus qu’un miracle pour que la cause du P. Lagrange avance.

Avec toute la famille dominicaine, nous souhaitons que notre prière soit entendue !

https://www.mj-lagrange.org

Prière FR-GB-ES

8 mai 2023

« Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime ; or celui qui m’aime sera aimé de mon Père, et je me manifesterai à lui. » (Jn 14, 21)

Jésus annonce de nouveau qu’il se manifestera, mais cette expression toute générale est bien au-dessous de ce qui vient d’être dit (Jn 14, 1-20). Le but du verset est donc plutôt d’indiquer à quelle condition se fera cette manifestation, de même qu’au v. 15 l’observation des commandements était une condition préalable à l’envoi de l’autre Paraclet. Plus encore qu’au v. 15 on a l’impression que ce verset est adressé presque autant aux disciples de l’avenir qu’à ceux-ci qui écoutaient alors ; il n’est pas douteux que ceux-ci aimaient leur Maître, tandis qu’il indique ici à quoi l’on reconnaîtra qu’on l’aime véritablement.

Au v. 15 c’était : si vous m’aimez, vous en ferez la preuve ; ici, c’est : ceux qui donneront cette preuve aimeront vraiment. Jésus parle comme législateur et comme la fin de ceux qui pratiquent ses commandements, c’est-à-dire le bien ; qu’il faut d’abord connaître les commandements et les embrasser par l’acte de foi chrétienne et ensuite les mettre en pratique, sans quoi le premier acte ne serait qu’un leurre.

(Extrait : Marie-Joseph Lagrange, o.p. L’Évangile selon saint Jean, Gabalda, 1936, p. 386.)

7 mai 2023

« J’ai toujours mis mon recours en Marie… »
(P. Marie-Joseph Lagrange, septembre 1912.)

« La prière ! Cesser de prier, c’est la ruine… 
Prier par Jésus et en Jésus, c’est le secret, prier par Marie…
L’Amour s’est déversé sur elle et que ne fait-on pas pour ceux qu’on aime…
Toute ma vie est là.
La réflexion est impuissante, tout élan, toute énergie sombre.
Un regard de Marie et tout renaît…
Quelle expérience et quelle leçon, quelle manifestation du surnaturel. Marie est le Signe ! »

(P. Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, 24 septembre 1898, Notre-Dame de la Merci.)

Votre intention confiée à l’intercession de la Vierge Marie et du père Lagrange,

Grâces reçues par l’intercession du père Lagrange, écrivez à : mailto:manuel.rivero@free.fr

 

5 mai 2023

Marie-Joseph Lagrange, o.p. Journal spirituel, Cerf, 2014.

Ave Maria !

Au noviciat de Saint-Maximin de 1879 à 1880

 

1° idée claire de l’Ordre pendant l’Inviolata, à Autun le jour de l’Immaculée Conception. (D’après une lettre de l’abbé Auduc, en 1870, le jour de l’Annonciation.)

2° Après la première communion des enfants du petit séminaire, le jour de la Très Sainte Trinité en 1872. – Très évident sentiment sous le cloître. – J’avais même fait le vœu, complètement oublié depuis, d’entrer dans cet Ordre.

Photo : Vierge Marie (Corse)

https://www.youtube.com/watch?v=gRMuqI9RrT8

 

3 mai 2023

Évangile selon saint Jean, chap. 14, verset 8.

Philippe lui dit : « Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit ». (Jn 14,8)

Le père Lagrange explique cette phrase :

Voir le Père dans le Fils, c’était croire que le Fils avait la nature divine, ce n’était pas jouir directement de la vue du Père. Cette vue, tout Israélite savait qu’elle avait été accordée, dans une certaine mesure, du moins à Moïse (Ex 23, 18 ss.) et Isaïe (6, 1). Si Jésus accordait la même faveur à ses disciples, il ne leur resterait rien à désirer. C’eût été, pensait Philippe, la confirmation de leur foi, la satisfaction de leurs espérances, la consolation pour le temps qui suivrait la séparation. Philippe donc sait bien qu’il a vu Jésus et il croit le connaître. Mais il n’a pas compris qu’en voyant Jésus il voyait Dieu par la foi, ou du moins il ne se contente pas de cette vue et voudrait une vue directe de Dieu. Il parle au nom des disciples. Aussi Jésus répondra d’abord à lui, puis étendra sa réponse à tous.

(Marie-Joseph Lagrange, o. p. Gabalda, 1936)

1er mai 2023

Saint Joseph, artisan

Le 1er mai, saint Joseph, le père adoptif de Jésus, est célébré dans sa facette de professionnel responsable et compétent, au service de sa famille et du bien commun.

L’Évangile l’appelle « homme « juste » », c’est-à-dire un homme juif qui connaissait la Loi de Moïse et qui la mettait en pratique. En unissant la foi et la science, la prière et le travail, saint Joseph a goûté l’union à Dieu en partageant les expériences heureuses et douloureuses d’Israël. Chaque samedi, il se rendait à la synagogue de Nazareth pour célébrer la Loi proclamée en hébreu et commentée en langue araméenne, sa langue maternelle. Combien de fois, Jésus, adolescent, l’a écouté avec un cœur brûlant.

Sanctifier la famille

Homme d’action, saint Joseph accomplit la volonté de Dieu. Silencieux, il médite dans la lumière de la foi les paroles de l’Ange du Seigneur qui l’exhorte à assumer sa responsabilité d’époux et de père adoptif de l’enfant que Marie porte en son sein par l’action de l’Esprit Saint. Homme fort, orienté vers l’avenir, il change son fusil d’épaule. La mission que Dieu lui confie dépasse celle des prophètes et des chefs de son Peuple. Il doit accompagner, protéger et éduquer Jésus « qui sauvera son peuple de ses péchés » (Mt 1,21).

Avec son épouse, Marie, Joseph s’engage dans le service du salut de l’humanité par l’Incarnation du Verbe. Gardien du mystère de la maternité divine de Marie, partageant la même foi, Joseph fait preuve d’amour, de prudence et d’endurance.

Pour le père Marie-Joseph Lagrange (+1938), fondateur de l’École biblique de Jérusalem, « Dieu le Père avait encore versé beaucoup de joie dans l’âme de Jésus par l’amour de sa Mère ». Il me semble que les chrétiens peuvent en dire la même chose au sujet de saint Joseph. Par l’amour de son père adoptif, l’âme de Jésus a été imprégnée de la joie de Dieu le Père.

Sanctifier le travail, se sanctifier dans le travail, témoigner par le travail

Artisan charpentier-maçon, saint Joseph s’est sanctifié dans son atelier au service des clients qui avaient besoin d’une maison, d’une armoire, d’une table ou d’une chaise. Ses journées comportaient des hauts et des bas, des réussites commerciales et des heures de soucis économiques pour nourrir sa famille. Il a sanctifié la création l’imprégnant de son intelligence, de son amour et de sa prière. Ceux qui le fréquentaient dans les relations professionnelles ont été attirés vers Dieu par son témoignage.

Saint Josemaría Escrivá de Balaguer (+1975) a excellé dans la mise en valeur de la sainteté vécue au travail quotidien : « « Dieu vous appelle à le servir dans et à partir des tâches civiles, matérielles, séculières de la vie humaine : c’est dans un laboratoire, dans la salle d’opération d’un hôpital, dans une chaire d’université, à l’usine, à l’atelier, aux champs, dans le foyer familial et au sein de l’immense panorama du travail. C’est là que Dieu nous attend chaque jour : il y a quelque chose de divin qui se cache dans les situations les plus ordinaires et c’est à chacun d’entre vous qu’il appartient de le découvrir » ».

La foi vivante de saint Joseph représente un antidote contre « un catholicisme zombie »(1) qui n’aurait qu’une influence indirecte et vague sur les réalités familiales, économiques et politiques.

L’exemple de saint Joseph invite à commencer par la conversion personnelle avant de vouloir changer le monde, car la tentation est grande pour chacun d’aspirer à transformer la société mais sans vouloir se mettre en cause.

Saint Joseph a accepté de changer son projet de vie pour faire la volonté de Dieu. Il l’a fait avec réalisme, de manière intégrale, spirituelle et matérielle. Son travail et la transmission de son savoir-faire font partie du Salut de l’humanité par Jésus le Christ, ouvrier lui-même.

Voir l’étude d’Hervé Le Bras et d’Emmanuel Todd dans Le Mystère français (2013) qui évoquent un « catholicisme zombie » qui continuerait de marquer les relations sociales à l’image des zombies qui ont cessé d’exister.

(Extraits de « Saint Joseph ouvrier, antidote d’un catholicisme zombie » » par Fr. Manuel Rivero, o. p.) www.mj-lagrange.org

Voir aussi : https://www.vaticannews.va/fr/saint-du-jour/05/01/saint-joseph-artisan–epoux-de-la-vierge-marie–protecteur-des-t.html?fbclid=IwAR3wsPCqARa9v5bt1N7XDxgVTy6GDUZx5bZF28XG5ABlRvhOEizXOc1k9nQ

 

Interview de Fr. Manuel Rivero, o.p. Vice-postulateur de la cause de béatification du P. Lagrange par Véronique Alzieu de RCF

RCF : Le père Marie-Joseph Lagrange, le fondateur de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem ; Pâques 2023 et la Semaine sainte à Jérusalem

 

https://www.rcf.fr/vie-spirituelle/paques-2023-et-la-semaine-sainte-a-jerusalem?episode=360097

Écho de notre page Facebook : avril 2023

 

30 avril2023

Journée mondiale de prière pour les vocations

L’histoire d’une vocation

Comment devient-on le père Lagrange ?

Depuis que j’avais lu la Vie de S. Dominique par Lacordaire, je ne me couchais jamais sans un « Souvenez-vous » et « S. Dominique, priez pour moi ». J’avais même en secret le vœu d’entrer dans l’Ordre, mais ce dernier souvenir s’était échappé complètement de ma mémoire. […] Or il arriva, au mois de mai de cette année 1877, que Dieu me toucha la cœur… Un jour un ami me dit qu’il y avait chez moi une dépêche… Je rentrai aussitôt : cette dépêche m’annonçait de mauvaises nouvelles de ma famille. Désolé, j’entrai à Saint-Sulpice, jusqu’au fond, aux pieds de Marie… Que se passa-t-il ? Quelques jours après, j’achetais un chapelet… Puis je rentrai à Bourg le jour de Ste Marie-Madeleine, j’écrivais à un ami : « Il me vient des pensées de religiosité » … Au 15 août, j’allai me confesser comme la première fois à la Visitation ; et tout stupéfait de mon audace, je confiai au confesseur le désir de me faire prêtre ! Il en fut moins surpris que je craignais, se souvenant des pieux désirs de mon enfance, que j’avais manifestés à ma mère la première fois que je la vis après ma première communion. – S’il m’était permis de sonder les desseins de Dieu, il me semble que cette conversion, due sans doute aux prières des âmes généreuse qui priaient pour moi, comme ma cousine Marie du Saint-Sacrement, fut aussi en partie une récompense de la démarche qui me fit sans hésiter quitter la faculté de l’État pour m’inscrire à l’Université catholique aussitôt ouverte… Heureusement cette université avait des étudiants meilleurs que moi… […]

J’étais décidé à quitter le monde. Comment avertir mes parents ? […] Mes parents acceptèrent l’appel de Dieu. […] Avant la fête de l’Assomption, j’avais fait trois jours de retraite à la chartreuse de Sélignac. Le P. Doussot y était encore, il m’engagea à voir la province de Toulouse. Je pris rendez-vous avec l’abbé Castellan : le 8 septembre, j’étais à Saint-Maximin, le soir à la Sainte-Baume. J’étais ravi : entrer dans un Ordre dont les saints ont été si purs m’effrayait : Ste Marie-Madeleine m’encourageait doucement. À Marseille, le P. Cormier me permit de suivre la retraite : je revins donc à Saint-Maximin. La retraite terminée, je revins dire adieu à mes parents : ils étaient tristes ; mon père était déjà en proie à une sourde persécution comme clérical… Je confiais tout à la Vierge noire, au Cœur Immaculé de Marie, dans mon dernier passage furtif à l’église. Le matin du Rosaire, j’étais à Marseille avec mon cousin Langeron, dans cette même église du Rosaire, le soir à Saint-Maximin. Le lendemain 6 octobre, je prenais l’habit ; j’avais stipulé de ne plus faire de retraite ; on me donna le nom de Marie-Joseph.

Le reste figure dans ce cahier (Journal spirituel), grâces sans nombres, grâces de choix, et toujours par Marie ; et, dans les plus mauvais moments, son visage me rassérène. Emissiones tuae paradisus ; et malgré ma tiédeur actuelle, inguérissable mal d’après les saints, j’espère en Marie, Marie me sauvera. C’est à elle que je dois d’avoir connu, après six mois de noviciat, jour pour jour, la présence de Dieu dans l’âme et, à la première retraite du P. Colchen, la présence de Jésus-Christ en nous. Qu’ai-je fait de tant de dons…

(Bernard Montagnes. Extraits de Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique. Cerf histoire, Biographie, 2004, pp. 45-49.)

Prière de saint Jean-Paul VI pour les vocations

Ô Jésus, divin Pasteur des âmes, qui as appelé les Apôtres à être des pêcheurs d’hommes, attire de nouveau à toi les âmes ardentes et généreuses des jeunes, pour en faire tes disciples et tes ministres ; fais-les participer à ta soif de Rédemption universelle, […] ouvre-leur les horizons du monde entier, […] afin que, répondant à ton appel, ils prolongent ta mission ici-bas, construisent ton Corps mystique, qui est l’Église, et soient « sel de la terre », « lumière du monde » (Mt 5, 13).

Que la Vierge Marie vous accompagne et vous protège. Avec ma bénédiction

https://www.vatican.va/content/francesco/fr/messages/vocations/documents/20230430-messaggio-60-gm-vocazioni.html

29 avril 2023

Sainte Catherine de Sienne, tertiaire dominicaine. Docteur de l’Église et copatronne de l’Europe.

Dans son Journal spirituel, le P. Lagrange consacre le mois d’avril à honorer Ste Catherine de Sienne, pour lui demander la dévotion à Jésus Crucifié, à Marie très Sainte, à l’Église.

BENOÎT XVI. AUDIENCE GÉNÉRALE. Salle Paul VI

Mercredi 24 novembre 2010

Catherine de Sienne

Chers frères et sœurs,

Je voudrais aujourd’hui vous parler d’une femme qui a eu un rôle éminent dans l’histoire de l’Église. Il s’agit de sainte Catherine de Sienne. Le siècle auquel elle vécut — le XIVe — fut une époque tourmentée pour la vie de l’Église et de tout le tissu social en Italie et en Europe. Toutefois, même dans les moments de grandes difficultés, le Seigneur ne cesse de bénir son peuple, suscitant des saints et des saintes qui secouent les esprits et les cœurs provoquant la conversion et le renouveau. Catherine est l’une de celles-ci et, aujourd’hui encore, elle nous parle et nous incite à marcher avec courage vers la sainteté pour être toujours plus pleinement disciples du Seigneur.

Née à Sienne, en 1347, au sein d’une famille très nombreuse, elle mourut dans sa ville natale en 1380. A l’âge de 16 ans, poussée par une vision de saint Dominique, elle entra dans le Tiers Ordre dominicain, dans la branche féminine dite des Mantellate. En demeurant dans sa famille, elle confirma le vœu de virginité qu’elle avait fait en privé alors qu’elle était encore adolescente, et se consacra à la prière, à la pénitence et aux œuvres de charité, surtout au bénéfice des malades.

Lorsque la renommée de sa sainteté se diffusa, elle fut protagoniste d’une intense activité de conseil spirituel à l’égard de toutes les catégories de personnes : nobles et hommes politiques, artistes et personnes du peuple, personnes consacrées, ecclésiastiques, y compris le Pape Grégoire XI qui à cette époque, résidait à Avignon, et que Catherine exhorta de façon énergique et efficace à revenir à Rome. Elle voyagea beaucoup pour solliciter la réforme intérieure de l’Église et pour favoriser la paix entre les États : c’est pour cette raison également, que le vénérable Jean-Paul II voulut la déclarer copatronne de l’Europe : pour que le Vieux continent n’oublie jamais les racines chrétiennes qui sont à la base de son chemin et continue de puiser à l’Évangile les valeurs fondamentales qui assurent la justice et la concorde.

Catherine souffrit beaucoup, comme de nombreux saints. Certains pensèrent même qu’il fallait se méfier d’elle, au point qu’en 1374, six ans avant sa mort, le chapitre général des Dominicains la convoqua à Florence pour l’interroger. Ils mirent à ses côtés un frère cultivé et humble, Raymond de Capoue, futur maître général de l’Ordre. Devenu son confesseur et également son « fils spirituel », il écrivit une première biographie complète de la sainte. Elle fut canonisée en 1461.

La doctrine de Catherine, qui apprit à lire au prix de nombreuses difficultés et à écrire à l’âge adulte, est contenue dans le Dialogue de la Divine Providence, ou Livre de la Divine Doctrine, chef d’œuvre de la littérature spirituelle, dans ses Lettres, et dans le recueil de Prières. Son enseignement contient une telle richesse qu’en 1970, le Serviteur de Dieu Paul VI, la déclara Docteur de l’Église, titre qui s’ajoutait à celui de copatronne de la ville de Rome, par volonté du bienheureux Pie IX, et de patronne d’Italie, selon la décision du vénérable Pie XII.

Dans une vision qui ne s’effaça plus jamais du cœur et de l’esprit de Catherine, la Vierge la présenta à Jésus, qui lui donna un anneau splendide, en lui disant : « Moi, ton créateur et sauveur, je t’épouse dans la foi, que tu conserveras toujours pure jusqu’à ce que tu célèbres avec moi tes noces éternelles » (Raymond de Capoue, Sainte Catherine de Sienne, Legenda maior, n. 115, Sienne, 1998). Cet anneau ne demeura visible qu’à elle seule. Dans cet épisode extraordinaire, nous percevons le sens vital de la religiosité de Catherine et de toute spiritualité authentique : le christocentrisme. Le Christ est pour elle comme l’époux, avec lequel existe un rapport d’intimité, de communion et de fidélité ; il est le bien-aimé au-delà de tout autre bien.

Cette union profonde avec le Seigneur est illustrée par un autre épisode de la vie de cette éminente mystique : l’échange du cœur. Selon Raymond de Capoue, qui transmit les confidences reçues de Catherine, le Seigneur Jésus lui apparut tenant dans la main un cœur humain rouge resplendissant, lui ouvrit la poitrine, l’y introduisit et dit : « Ma très chère petite fille, de même qu’un jour j’ai pris le cœur que tu m’offrais, voici à présent que je te donne le mien, et désormais, il prendra la place qu’occupait le tien » (ibid.). Catherine a vécu véritablement les paroles de saint Paul : « Ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi » (Ga 2, 20).

Comme la sainte de Sienne, chaque croyant ressent le besoin de s’uniformiser aux sentiments du Cœur du Christ pour aimer Dieu et son prochain, comme le Christ lui-même aime. Et nous pouvons tous laisser notre cœur se transformer et apprendre à aimer comme le Christ, dans une familiarité avec Lui nourrie par la prière, par la méditation sur la Parole de Dieu et par les Sacrements, en particulier en recevant fréquemment et avec dévotion la sainte communion. Catherine appartient elle aussi à ce groupe de saints eucharistiques, avec lesquels j’ai voulu conclure mon Exhortation apostolique Sacramentum caritatis (cf. n. 94). Chers frères et sœurs, l’Eucharistie est un don d’amour extraordinaire que Dieu nous renouvelle sans cesse pour nourrir notre chemin de foi, renforcer notre espérance, enflammer notre charité, pour nous rendre toujours plus semblables à Lui.

Autour d’une personnalité aussi forte et authentique commença à se constituer une véritable famille spirituelle. Il s’agissait de personnes fascinées par l’autorité morale de cette jeune femme dont la vie atteignait un niveau très élevé, et parfois impressionnées également par les phénomènes mystiques auxquels elles assistaient, comme les extases fréquentes. Beaucoup de gens se mirent à son service et considérèrent surtout comme un privilège d’être guidées spirituellement par Catherine. Ils l’appelaient « maman », car en tant que fils spirituels, ils puisaient en elle la nourriture de l’esprit.

Aujourd’hui aussi l’Église tire un grand bénéfice de l’exercice de la maternité spirituelle de nombreuses femmes, consacrées et laïques, qui nourrissent dans les âmes la pensée pour Dieu, qui renforcent la foi des personnes et qui orientent la vie chrétienne vers des sommets toujours plus élevés. « Je vous dis et je vous appelle mon fils — écrit Catherine en s’adressant à l’un de ses fils spirituels Giovanni Sabbatini —, dans la mesure où je vous mets au monde par des prières incessantes et mon désir auprès de Dieu, comme une mère met son fils au monde » (Recueil de lettres, Lettre n. 141: A dom Giovanni de’ Sabbatini). Elle avait l’habitude de s’adresser au frère dominicain Bartolomeo de Dominici par ces mots : « Bien-aimé et très cher frère et fils dans le doux Christ Jésus ».

Un autre trait de la spiritualité de Catherine est lié au don des larmes. Celles-ci expriment une extrême et profonde sensibilité, la capacité à s’émouvoir et à éprouver de la tendresse. De nombreux saints ont eu le don des larmes, renouvelant l’émotion de Jésus lui-même, qui n’a pas retenu et caché ses pleurs devant le sépulcre de son ami Lazare et la douleur de Marie et de Marthe, et à la vue de Jérusalem, au cours de ses derniers jours terrestres. Selon Catherine, les larmes des saints se mélangent au Sang du Christ, dont elle a parlé avec un ton vibrant et des images symboliques très efficaces : « Rappelez-vous du Christ crucifié, Dieu et homme (…) Donnez-vous pour objet le Christ crucifié, cachez-vous dans les plaies du Christ crucifié, noyez-vous dans le sang du Christ crucifié » (Recueil de lettres, Lettre n. 21; A une personne que l’on ne nomme pas).

Nous pouvons ici comprendre pourquoi Catherine, bien que consciente des fautes humaines des prêtres, ait toujours éprouvé un très grand respect pour eux : ces derniers dispensent, à travers les sacrements et la Parole, la force salvifique du Sang du Christ. La sainte de Sienne a toujours invité les saints ministres, et également le Pape, qu’elle appelait « doux Christ de la terre », à être fidèles à leurs responsabilités, toujours et seulement animée par son amour profond et constant pour l’Église. Avant de mourir, elle dit : « Alors que je quitte mon corps, moi en vérité j’ai consommé et donné ma vie dans l’Église et pour la Sainte Église, ce qui m’est une grâce très particulière » (Raymond de Capoue, Sainte Catherine de Sienne, Legenda maior, n. 363).

Nous apprenons donc de sainte Catherine la science la plus sublime : connaître et aimer Jésus Christ et son Église. Dans le Dialogue de la Divine Providence celle-ci, à travers une image singulière, décrit le Christ comme un pont lancé entre le ciel et la terre. Celui-ci est formé de trois marches constituées par les pieds, par le côté et par la bouche de Jésus. En s’élevant grâce à ces marches, l’âme passe à travers les trois étapes de chaque voie de sanctification : le détachement du péché, la pratique de la vertu et de l’amour, l’union douce et affectueuse avec Dieu.

Chers frères et sœurs, apprenons de sainte Catherine à aimer avec courage, de manière intense et sincère, le Christ et l’Église. Faisons donc nôtres les paroles de sainte Catherine que nous lisons dans le Dialogue de la Divine Providence, en conclusion du chapitre qui parle du Christ-pont : « Par miséricorde, tu nous as lavés dans le Sang, par miséricorde, tu voulus converser avec les créatures. Ô fou d’amour ! Il ne t’a pas suffi de t’incarner, mais tu voulus aussi mourir ! (…) Ô miséricorde ! Mon cœur étouffe en pensant à toi : car où que je me tourne, je ne trouve que miséricorde » (chap. 30). Merci.

* * *

Chers amis, puisse sainte Catherine de Sienne nous apprendre ainsi la science la plus sublime : aimer avec courage intensément et sincèrement Jésus Christ et aimer l’Église ! Je salue cordialement les pèlerins francophones : bon séjour à tous !

 © Copyright 2010 – Libreria Editrice Vaticana

Photo : Sainte Catherine de Sienne a la vision du Cœur de Jésus par Cozzarelli Guidoccio (1450-1517)

28 avril 2023

Deuxième discours : révélation de l’eucharistie.

Ce jour, dans l’évangile de Jean 6 du verset 52 au verset 59,

Ce que Jésus avait dit à la troisième personne, il se l’attribue ouvertement parce que Jésus est descendu du ciel ; ne pas mourir est expliqué positivement de la vie spirituelle, germe d’immortalité bienheureuse.

C’est qu’en effet la manducation du pain de vie, considérée jusqu’à présent d’une façon abstraite, est présentée maintenant comme un don formellement promis pour l’avenir. L’allusion à l’eucharistie est évidente, et ne peut être méconnue par personne, sauf par les protestants à méconnaître la clarté des termes. […] Jean a exprimé ainsi l’efficacité salutaire de la mort. Le pain donne la vie à chacun, c’est l’immolation de la chair qui donne la vie au monde […] Au lieu de retirer sa proposition ou de l’expliquer symboliquement, Jésus la maintient littéralement en ajoutant le sang, comme condition expresse de la vie éternelle. Le « fils de l’homme », non pas comme un titre messianique glorieux, mais pour insister sur sa nature humaine – Les termes sont absolus ; l’église grecque en a conclu qu’il fallait donner l’eucharistie aux enfants, et Augustin le juge bon. L’Église latine attend l’âge du discernement ; elle peut s’appuyer sur une raison très forte : Jésus rappelle que la première démarche auprès de lui se fait par la loi (35.45.47). De cette insistance que Jean n’a pas exprimée à propos de la régénération, on peut conclure avec Thomas que l’eucharistie exigence la révérence et la dévotion qui supposent une certaine perception intellectuelle de la nourriture surnaturelle.

La même chose est répétée positivement, avec le mot mâcher » « croquer » non pas pour varier le style, mais pour couper court à toute échappatoire vers le sens symbolique.

La manducation donne la vie par l’union à Jésus n’est pas sans portée. On dirait que celui qui mange le corps a d’abord Jésus en soi, et cependant c’est lui qui demeure en Jésus, comme dans une plénitude infinie, et c’est par condescendance que Jésus demeure dans sa pauvre maison. […] La manducation donne la vie et en même temps produit l’union. [Ce discours] à la synagogue prouve que Jean veut situer clairement son importance suprême, et prononcé avec solennité. On ne peut savoir combien de personnes pouvait contenir l’ancienne synagogue de Capharnaüm. Celle du IIe siècle, dont on connaît très bien le dessin et l’architecture intérieure, pouvait tenir environ 750 personnes, tant au rez-de-chaussée, que dans les galeries, c’est-à-dire au maximum.

Jean ne dit pas l’impression faite par le discours sur les Juifs. On savait déjà qu’elle était défavorable (52). L’enthousiasme est tout à fait tombé. La mission du Sauveur en Galilée se termine dans l’indifférence. […] Mais plusieurs disciples eux-mêmes se retirent, tandis que les Douze restent fidèles, en attendant la trahison de l’un d’eux.

(Marie-Joseph Lagrange des frères Prêcheurs, L’Évangile selon Saint Jean, Gabalda, 1936.)

26 avril 2023  

« Telle est la volonté de mon Père : que celui qui voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. (36) Mais je vous l’ai déjà dit : vous avez vu, et pourtant vous ne croyez pas. » (Jn 6, 40.)

Le P. Lagrange propose à notre réflexion ce verset 40 de l’Évangile de ce jour : Les Juifs savaient bien que pour avoir la vie éternelle il faut croire en Dieu, aller à Dieu : ce que Jésus leur enseigne c’est que le Père veut qu’on passe par le Fils. Encore n’est-ce pas tout ce que ce petit morceau a en vue : c’est une invitation très tendre du Fils, qui se rattache au v. 35 : Celui qui croit n’aura jamais soif. Pourquoi ? Parce que le Père se propose son salut, le donne au Fils dans cette intention, et que le Fils fait tout ce que désire le Père pour le sauver, jusques, et y compris, la résurrection.

Insistance sur la volonté du Père : tous ceux qui voient le Fils, qui le considèrent attentivement et croient ont d’abord en eux la vie spirituelle qui est la vie éternelle, et ensuite le Fils les ressuscitera. Ils sont orientés par le Père vers la vie éternelle, et le Fils exécutera sa volonté. Il n’est pas dit qu’il n’arrivera à personne de perdre la foi, mais seulement quel est le résultat de la foi d’après les desseins du Père et sous l’action du Fils ; ce qui est surtout enseigné, c’est la parfaite conformité de la volonté du Fils avec celle du Père dans l’œuvre du salut des hommes. Rien de plus propre que ces paroles si bienveillantes à décider des Juifs à confier à Jésus leurs destinées éternelles sans s’écarter d’une ligne de la foi qui les rattachait au Père. C’était une manière de leur expliquer en clair ce qu’il était comme pain descendu du ciel. Il faut convenir que le v. 36 serait beaucoup mieux placé après le v. 40.

(Marie-Joseph Lagrange des frères Prêcheurs. L’Évangile selon Saint Jean, Gabalda, 1936.)

Photo : Comme ces pèlerins d’il y a deux mille ans, les hommes de notre époque, parfois inconsciemment, demandent aux croyants d’aujourd’hui non seulement de « parler » du Christ, mais en un sens de le leur faire « voir ». L’Église n’a-t-elle pas reçu la mission de faire briller la lumière du Christ à chaque époque de l’histoire, d’en faire resplendir le visage également aux générations du nouveau millénaire ? (Saint Jean-Paul II 1920-2005 Novo Millennio Ineunte n° 16-17.)

25 avril 2023

Saint Marc, évangéliste

Le Nouveau Testament parle d’un personnage nommé tantôt Jean (Ac 13,5), tantôt Jean surnommé Marc (Ac 12,12), tantôt Marc (Ac 15,39). Il est d’usage de se demander si Jean Marc et Marc sont le même personnage. Dans ces termes la question est mal posée, car on pourrait croire que Jean Marc a été précisément nommé d’un double nom pour être distingué de Marc tout court. En réalité le composé Jean Marc ne se rencontre nulle part. Il a seulement existé dans la compagnie des Apôtres un juif nommé Jean, de son nom d’Israélite, et surnommé Marc, d’un nom romain. Peu de personnes doutent encore que ce soit le même personnage que Marc. Dans les Actes, quand il est Jean, on voit très bien que c’est le même qui a aussi le nom de Marc, et que c’est le même qui est nommé Marc tout court. Dans les épîtres de saint Paul, il est seulement nommé Marc, mais il est dit cousin de Barnabé ; or les Actes prouvent précisément l’union intime de Barnabé avec Jean, surnommé Marc, et avec Marc. On sait que très souvent les Juifs prenaient un nom grec. Jean avait donc adopté comme nom courant un prænomen latin, déjà répandu dans le monde oriental sous la forme grecque. Ce nom de Marcos est d’ailleurs trop rare chez les Juifs pour qu’on puisse aisément supposer plusieurs Marc dans l’Évangile. La seule raison de supposer deux Marc, ce ne sont pas les textes du N. T., c’est la difficulté d’attribuer à la même personne tout ce que raconte la tradition, et, pensait-on, d’en faire à la fois un disciple de saint Pierre et de saint Paul. Le fait étant avéré, il vaudrait mieux renoncer à certaines données traditionnelles si elles étaient par trop invraisemblables, et reconnaître que saint Pierre et saint Paul s’entendaient mieux sur la doctrine qu’on ne l’a imaginé de nos jours.

Conclusion : La tradition attribue le second évangile à Jean surnommé Marc, Juif de Jérusalem, disciple de s. Paul et de s. Pierre. Il l’aurait écrit d’après la catéchèse de s. Pierre, sans se soucier d’un ordre assuré, dans le but de suppléer au témoignage oral de l’Apôtre, et très probablement à Rome, après la mort des deux grands Apôtres. […] Si l’on considère que Marc, informé par le principal témoin de la vie publique de Jésus, évidemment sincère comme rapporteur des faits, n’est influencé par aucune théologie spéciale, on tiendra son évangile, même au simple point de vue scientifique, pour un document d’une gravité hors de pair, qui nous donne une connaissance très incomplète, mais certaine, des faits et des paroles de Jésus.

(Marie-Joseph Lagrange, o. p. L’Évangile selon saint Marc. Coll. Études bibliques, Lecoffre-Gabalda, Paris, 1911, pp. XVII-XVIII-CLI.)

23 avril 2023

La route vers Emmaüs (Saint Luc 24, 13-35)

Homélie de Fr. Pavel Syssoev, o.p.

DÉCEVANT. Dieu peut-il être décevant ?

« Non-non, bien sûr que non, Dieu comble toujours le cœur de l’homme… » Ne nous dépêchons pas trop vite avec cette réponse. Il se trouve que la rencontre avec le Ressuscité, une vraie rencontre – et vous serez d’accord avec moi qu’une vraie rencontre avec le Ressuscité ne va pas de soi – devient possible pour les disciples dès le moment où ils disent leur profonde déception.

Ils s’éloignent de Jérusalem, le visage morne, en ruminant leur amertume des espoirs déçus. Ils attendaient de Jésus, ce prophète puissant par ses actes et par ses paroles, l’accomplissement de leurs rêves, de leur foi la plus légitime et la plus biblique, osons-le dire. « Nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël ». Luc, en écrivant cette scène, place dans leur bouche les paroles mêmes qui inaugurait son Évangile. Souvenez-vous, Siméon et Anne évangélisaient ceux qui attendait à Jérusalem la délivrance d’Israël. Zacharie, le père du Baptiste, chantait le salut qui arrachait Israël à la main de tous ses oppresseurs. La Vierge elle-même dans son Magnificat exaltait celui qui relevait Israël, son serviteur. L’espoir des disciples est donc plus que fondé et voilà qu’ils s’en vont déçus. En matière de relèvement on a vu mieux qu’un cadavre suspendu du supplicié. Un Messie décevant. Un Dieu décevant. Une histoire décevante.

Nous-mêmes, à combien de reprises n’avons-nous pas été confrontés à la déception devant les choix de Dieu ? Il serait beaucoup trop simple de dire que nos attentes étaient superficielles : les disciples sont déçus non seulement en ce qu’ils désiraient, eux, mais aussi en ce que Dieu leur promettait.

Et Dieu épouse leur marche qui les éloigne de Jérusalem. Il les écoute, les interroge. Il les laisse advenir jusqu’au terme de leur récit. « A vrai dire les femmes de notre groupe nous ont remplis de stupeur… ». Leur histoire ne s’arrête donc pas à Golgotha, à la mise au tombeau. Les femmes leurs annoncent la bonne nouvelle, mais elle est incroyable. Comme illisible à leurs yeux. Indéchiffrable.

Jésus leur impose alors une longue leçon de l’Écriture. De l’Écriture et de son interprétation. Il montre, pas à pas, texte après texte que l’Écriture le concerne. Que ce qu’ils ont vécu s’éclaire par cette parole et que la parole de l’Écriture a pris chair en ce qu’ils ont vécu. En ce qu’ils vivent. Leur déception se change en attente.

Devant toute crise que nous traversons : celle de notre Église, celle de nos vies, celle de nos sociétés, nous abondons en paroles. Nous avons des vues et des solutions. Nous avons des reproches – souvent fondés ; nous avons des projets de rafistolages – souvent inconsistants. Il faut parvenir au bout de souffle dans nos paroles pour entendre – enfin – la Parole venue d’ailleurs. Il nous faut entrer dans ce grand silence où l’Écriture s’impose à nous. Lentement, lourdement. Massivement. Pas à pas elle éclaire ce que nous sommes. Elle façonne ce que nous sommes. Elle nous ouvre notre intelligence et réchauffe notre cœur.

Mes amis, quelle place l’Écriture occupe-t-elle dans notre vie ? La lisons-nous ? La lisons-nous pour elle-même ? Ou tâchons-nous de nous emparer d’elle pour la plier à nos vues, pour illustrer ce que nous avons déjà décidé ? Dans nos choix, dans nos doutes, dans nos rêves, cette Parole résonne-t-elle ? Nous ouvre-t-elle une route ?

Mais ce n’est pas tout. L’ultime réponse et l’ultime remède à notre déception – le pain rompu et partagé. L’Eucharistie, Jésus donné, portant Jésus insaisissable. Il disparait à leurs yeux. Mais il leur donne la force de revenir à Jérusalem. C’est là, où ils raconteront ce qui s’est passé sur la route que le Christ se rendra présent au milieu d’eux. À leur tour, ils racontaient ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain. Comme ils en parlaient encore, lui-même fut présent au milieu d’eux, et leur dit : « La paix soit avec vous ! »

La déception se transforme en joie de la rencontre avec le Ressuscité là où la communauté de témoins le célèbre. Ensemble, ils ont tout quitté pour le suivre, Jésus. Ensemble ils ont appris à ses côtés, ensemble ils ont marché avec lui sur les routes. Ensemble ils ont été ébranlés dans la Passion. Là où le pasteur a été frappé, les brebis se sont dispensées. De nouveau, ils se rassemblent. Car Jésus a pu rejoindre chacun d’eux. Un tel – dans la course vers le tombeau vide. Tel autre – sur la route d’Emmaüs. Telle autre – dans ce jardin du premier jour de la semaine. Les voilà ensemble.

La joie éclot là où la communauté vit. L’unité du Corps de l’Église : ceux qui sont touchés par le Ressuscité, ceux qui se reconnaissent, ceux qui se servent mutuellement, ceux qui vivent de cette expérience commune – là Israël est délivré, là, le Royaume advient.

Décevant et admirable. Dieu est décevant quand nous le ramenons à nous. Dieu est admirable quand il nous ramène à lui. Où le fait-il ? Dans cette communauté qui proclame sa foi dans la résurrection.

Fr. Pavel Syssoev, op

Dominicains de Marseille PRAEDICATIO – DOMINICAINS Groupe Mission Marseille

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Image :

Copie de l’œuvre La route vers Emmaüs de Duccio di Buoninsegna par Nicolas Lokhoff (1872 – 1948).

 

23 avril 2023 

Troisième Dimanche de Pâques

Fruits de la Ste Communion. Le Corps très-pur de N.S. amortit la concupiscence, purifie notre corps, efface les traces du péché. – Son âme donne à notre intelligence la certitude de la foi, à notre volonté le désir ardent de la perfection. – Sa Divinité, la persévérance dans la grâce, la contemplation de l’amour. Nous sommes vains et superficiels devant cette grande réalité de l’amour divin. (M.-J. Lagrange, o.p. Journal spirituel, Cerf, 2014.)

Mystère glorieux : la Résurrection de Jésus

Les deux disciples d’Emmaüs (Luc 24, 18-35)

commenté à la lumière de la vie et de l’œuvre du Père Lagrange

Fr. Manuel Rivero o. p.

Vice-postulateur de la Cause du P. Lagrange

  « Et voici que, ce même jour (le premier de la semaine), deux d’entre eux faisaient route vers un village du nom d’Emmaüs, distant de Jérusalem de soixante stades, et ils conversaient entre eux de tout ce qui était arrivé. Et il advint, comme ils conversaient et discutaient ensemble, que Jésus en personne s’approcha, et il faisait route avec eux ; mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître.

Il leur dit : « Quels sont donc ces propos que vous échangez en marchant ? » Et ils s’arrêtèrent, le visage sombre. Prenant la parole, l’un d’eux, nommé Cléophas, lui dit : « Tu es bien le seul habitant de Jérusalem à ignorer ce qui y est arrivé ces jours-ci » – « Quoi donc ? » leur dit-il. Ils lui dirent : « Ce qui concerne Jésus le Nazarénien, qui s’est montré un prophète puissant en œuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple, comment nos grands prêtres et nos chefs l’ont livré pour être condamné à mort et l’ont crucifié. Nous espérions, nous, que c’était lui qui allait délivrer Israël ; mais avec tout cela, voilà le troisième jour depuis que ces choses sont arrivées ! Quelques femmes qui sont des nôtres nous ont, il est vrai, stupéfiés. S’étant rendues de grand matin au tombeau et n’ayant pas trouvé son corps, elles sont revenues nous dire qu’elles ont même eu la vision d’anges qui le disent vivant. Quelques-uns des nôtres sont allés au tombeau et ont trouvé les choses tout comme les femmes avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont pas vu ! »

Alors il leur dit : « Ô cœurs sans intelligence, lents à croire à tout ce qu’ont annoncé les Prophètes ! Ne fallait-il pas que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans sa gloire ? »

Et, commençant par Moïse et parcourant tous les Prophètes, il leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait.

Quand ils furent près du village où ils se rendaient, il fit semblant d’aller plus loin. Mais ils le pressèrent en disant : « Reste avec nous, car le soir tombe et le jour déjà touche à son terme. » Il entra donc pour rester avec eux. Et il advint, comme il était à table avec eux, qu’il prit le pain, dit la bénédiction, puis le rompit et le leur donna. Leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent… mais il avait disparu de devant eux. Et ils se dirent l’un à l’autre : « Notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, quand il nous expliquait les Écritures ? »

À cette heure même, ils partirent et s’en retournèrent à Jérusalem. Ils trouvèrent réunis les Onze et leurs compagnons, qui dirent : « C’est bien vrai ! le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon ! » Et eux de raconter ce qui s’était passé en chemin, et comment ils l’avaient reconnu à la fraction du pain. »

Le père Lagrange commente cette apparition aux disciples d’Emmaüs à la lumière de la foi pascale. Il a vécu la profonde et douloureuse crise moderniste qui analysait les textes bibliques selon les seuls critères de la raison. Scientifique, esprit critique, mais surtout homme de foi en la Parole divine révélée, le père Lagrange rejette l’hypothèse fantaisiste d’Ernest Renan (1823-1892), écrivain et historien français, qui perdit la foi chrétienne et qui montrait dans un de ses ouvrages « les deux disciples soupant avec un juif pieux et versé dans les Écritures, qu’ils avaient rencontré sur leur chemin, puis oubliant sa présence et s’imaginant que Jésus est là qui rompt le pain, et se persuadant enfin, parce que leur compagnon s’est éclipsé pendant leur rêverie, que l’étranger et Jésus ne faisaient qu’un ». (M.-J. Lagrange, Évangile selon saint Luc, troisième édition, Paris, Librairie Victor Lecoffre, J. Gabalda, éditeurs, 1927, p. 610.)

Passionné pour la culture grecque depuis son adolescence, le père Lagrange met en parallèle la démarche de Socrate (470-399 av. J.-C.) qui interrogeait tout en enseignant et qui par sa maïeutique parvenait à faire découvrir à ses interlocuteurs ce qu’ils paraissaient ignorer.

Le verbe utilisé par saint Luc pour décrire la conversation de Jésus avec les deux disciples est « omileo » qui a donné en français « homélie ». Mot grec qui veut dire « converser ». Jésus établit le dialogue avec Cléophas et son compagnon. Il aime poser des questions. Par cette démarche dialectique, Jésus éveille la mémoire et l’intelligence. Le pape Paul VI, dans son encyclique Ecclesiam suam rendue publique en 1964, écrivait que « l’Église se fait conversation ». Le christianisme exalte la valeur de la parole et de la conversation. Par le dialogue Dieu rejoint l’homme et l’homme parvient au mystère de Dieu.

Sur la route d’Emmaüs, le Ressuscité s’entretient avec deux hommes découragés et tristes. Leur cœur a été plongé dans les ténèbres le Vendredi saint. Ils pensaient que leur maître allait délivrer Israël à la manière d’un puissant militaire capable d’expulser de la Terre sainte les légions romaines avec leurs dieux païens. Ils s’attendaient à un Messie triomphant qui attirerait toutes les nations à Jérusalem, centre du monde.

Le messianisme de Jésus avait été annoncé par le prophète Isaïe : « Ce sont nos souffrances qu’il portait et nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous le considérions comme puni, frappé par Dieu et humilié. Mais lui, il a été transpercé à cause de nos crimes, écrasé à cause de nos fautes. Le châtiment qui nous rend la paix est sur lui, et dans ses blessures nous trouvons la guérison » (Isaïe 53, 4-5). Pour le père Lagrange, Jésus est bien le Messie, Serviteur souffrant. Il éclaire son commentaire biblique par l’enseignement de sainte Catherine de Sienne (1347-1380), la grande mystique dominicaine, qui s’élevait contre ceux qui ne voulaient que la gloire sans les souffrances. Elle nommait cette pensée la religion du Père, religion naturelle fondée sur Dieu créateur, par rapport à celle du Fils, Messie qui est entré à travers la croix et la mort dans la gloire du Père.

En commentant la Loi, les Prophètes et les Psaumes, Jésus ouvre les yeux des disciples à l’intelligence des Écritures au moment du partage du pain. Pour le père Lagrange, il ne s’agit pas d’une célébration de l’Eucharistie : « Plusieurs ont pensé que leur cœur fut surtout embrasé parce qu’ils mangèrent un pain devenu le corps du Seigneur. Mais rien ne prouve que le Christ ait prononcé une seconde fois les paroles de la consécration. Il ne prendra avec ses apôtres qu’une nourriture ordinaire. Pourquoi ce privilège accordé à ces deux, qui, n’étant pas les Douze, n’étaient pas initiés au geste de Jésus à la Cène ? » (M.-J. Lagrange, L’Évangile de Jésus-Christ avec la Synopse évangélique traduite par le P. C. Lavergne o.p., nouvelle édition, Paris, Librairie Lecoffre, J. Gabalda, éditeurs, 1954, p. 654.)

Le cœur des disciples est devenu tout brûlant par l’intelligence des Écritures. Jésus est l’exégète du Père, qui en expliquant le sens des prophéties de l’Ancien Testament a ouvert les yeux de l’esprit à la Révélation divine. « Ignorer les Écritures c’est ignorer le Christ », enseignait saint Jérôme ( 347-420 ap. J.-C.). Le père Lagrange, appelé « le nouveau saint Jérôme », nous conduit au Verbe de Dieu, source de Vie, feu d’Amour.

Prions pour ceux qui n’arrivent pas à croire.

Prions pour ceux qui n’ont jamais reçu l’annonce de l’Évangile ni la catéchèse des mystères de Dieu.

(Extrait du livre : Le père Lagrange et la Vierge Marie. Méditations des mystères du Rosaire par Manuel Rivero, o.p. Cerf, 2012)

20 avril 2023

Dominicains –  Province de Toulouse

Le Maître de l’Ordre frère Gérard TIMONER III a choisi comme son socius (assistant) pour l’Europe et le Canada le frère Pavel Syssoev.
Il assumera cette charge dans un an, à partir du printemps 2024.
Tous nos vœux à notre frère qui quittera alors Marseille pour la maison généralice de Sainte Sabine à Rome. Avec un pincement au cœur de le voir s’éloigner (un peu) du territoire de la Province, notre prière accompagne fr. Pavel dans sa nouvelle et belle mission au service de l’Ordre et de notre Prédication.

20 avril 2023

30 avril 2023 : Dimanche des Vocations.
Voici donc une neuvaine à commencer demain pour de nombreuses vocations dominicaines (frères, soeurs, laïcs). Merci pour vos prières !
Signe de croix.
Ô Seigneur Pasteur fidèle,
Toi qui connais ton troupeau :
Nous te prions pour les vocations dans ton Église,
spécialement dans l’Ordre des Prêcheurs.
Par l’intercession de saint Dominique, donne-nous beaucoup de frères prêtres zélés pour le ministère de la parole et la dispensation des mystères.
Par l’intercession de saint Martin de Porrès, donne-nous beaucoup de frères coopérateurs heureux de se donner à toi dans la simplicité du service.
Par l’intercession de sainte Marguerite de Hongrie, donne-nous beaucoup de sœurs moniales heureuses de se consacrer pour te bénir, te louer et te prêcher.
Par l’intercession de sainte Catherine de Sienne et du bienheureux Pier-Giorgio Frassati, donne-nous beaucoup de laïcs dominicains et des sœurs apostoliques envoyés dans le monde pour annoncer ton Nom.
Soutiens les frères, les soeurs, et tous les baptisés dans le Christ,
spécialement ceux qui suivent les traces de saint Dominique,
afin qu’ils accomplissent fidèlement leur mission au service de l’Evangile.
Amen !
Notre Père, Je vous salue Marie, Gloire au Père

20 avril 2023

Centre spirituel et pastoral Mont Thabor

LES JOURNEES SPIRITUELLES DU CENTRE SPIRITUEL ET PASTORAL DU MON THABOR:
Une journée pour se ressourcer dans le silence et la prière, pour trouver Dieu et se retrouver soi-même, reprendre des forces, partager, nourrir sa foi et repartir…
Une halte indispensable pour garder Dieu au cœur de nos vies bousculées.
Une halte autour de conférences, de temps de prière commune et personnelle, de silence, et de la célébration de l’eucharistie.
Vous pouvez transférer largement cette invitation à tous vos amis, ….
Dans l’espoir de vous retrouver nombreux.
La Communauté de sœurs Carmélites Missionnaires: Soeurs Candelas, Marilu, Miriam et leur diacre aumônier Jean Lafont vous accueilleront.

 

 

20 avril 2023

« Celui qui vient d’en haut est au-dessus de tous ! Celui qui est de la terre appartient à la terre et parle [à la façon] de la terre. Celui qui vient du ciel témoigne de ce qu’il a vu et entendu. Et personne n’accepte son témoignage. Celui qui a accepté son témoignage a signé de son sceau que Dieu est véridique ! Car celui que Dieu a envoyé dit les paroles de Dieu, car ce n’est pas avec mesure qu’il donne l’Esprit ! Le Père aime le Fils ! Et il a tout remis dans sa main Celui qui croit au Fils a la vie éternelle ; celui qui refuse de croire au Fils ne verra pas la vie ; mais la colère de Dieu reste [suspendue]sur lui. » (Jn 3, 31-35)

Manifestement l’évangéliste a compris que l’entretien de Jésus avec Nicodème soude le Nouveau Testament à l’Ancien par la doctrine de l’Esprit.

L’Évangile de Jésus Christ. P. M.-J. Lagrange, o. p. avec la synopse évangélique grecque traduite par le P. Lavergne, o. p., Éd. Artège, 2017)

Dans l’opinion où le Fils a reçu l’Esprit, quel est le contexte ? D’après les anciens, après avoir montré dans le Christ le serviteur, Jean relève la dignité du Fils. Maldonat : Jean indique la raison pour laquelle le Père a donné l’Esprit. Mais on peut aussi bien dire que le Fils donne l’Esprit parce que le Père a tout remis entre ses mains ; il est l’unique dépositaire du salut auprès des hommes, de tout ce qui concerne le salut de l’humanité.

(L’Évangile selon Saint Jean. P. M.-J. Lagrange, o. p.., Éd. Gabalda, 1941)

19 avril 2023
Couvent Saint-Dominique Haïti
Chers amis,
je vous partage ce très beau dessin de saint Dominique réalisé par notre ami de la paroisse Chevelin Pierre. Ce dessin est fait entièrement à base de café et légèrement colorié avec de l’aquarelle. Merci à notre artiste de nous permettre de le publier sur cette page.

 

 

18 avril 2023

Nicodème et la nouvelle naissance de l’Esprit.

« De même que Moïse a élevé le serpent dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit ait en lui la vie éternelle. » (Jn 3, 14-15)

Jésus n’a pas établi si fortement sa qualité de révélateur pour s’en tenir à ce qu’il a dit à Nicodème du baptême. C’est le premier objet de l’enseignement pour qui désire entrer dans le royaume de Dieu, si ce n’est qu’on s’y unit à la mort du Christ pour effacer le péché ? Jésus touche donc au fond de la doctrine du salut, sans aborder les choses dans leur état céleste, et cela est amené très naturellement : après l’Incarnation suggérée par la notion du Fils de l’homme venu du ciel, son rôle comme rédempteur. L’allusion au serpent d’airain (Nb 21, 8-9) est très claire, Jean n’emploie jamais ce mot que pour signifier l’exaltation de la Passion (8, 28 ; 12, 32-34). Rêver qu’on dansait en étant élevé, c’était un pronostic de crucifixion. Il est possible qu’il ait choisi ce mot à cause de son sens exalter – non parce que l’exaltation du Christ a suivi sa passion, car la gloire n’est pas ici dans la perspective – mais parce que la Croix était déjà pour Jésus une exaltation ; il y devait être élevé comme sauveur, afin que chacun puisse élever aussi les yeux vers lui par la foi (Ga 3, 1) ; déjà le serpent d’airain était un symbole (Sg 15, 6) ; Jésus sera la réalité. En effet les Hébreux qui se tournaient vers le serpent n’étaient pas guéris par lui, mais par Dieu (Sg 16, 7), tandis qu’ici la foi devra procurer en lui la vie éternelle. Tout cela est encore au futur, c’est un décret divin qui ne manquera pas d’être exécuté ; la pensée de Jean est clairement de placer le v. 14 dans la bouche de Jésus. L’entretien avec Nicodème se termine ici.

(Marie-Joseph Lagrange, o.p. Extraits de L’Évangile selon saint Jean. Ed. Gabalda. 1941.)

Photo : Holbein 1536.

16 avril 2023
Bon dimanche de la Divine Miséricorde. Avec ma prière à la messe en la cathédrale de Saint-Denis de La Réunion.
Fr. Manuel Rivero, o.p.
11 avril 2023
L’équipe RCF vient de rentrer après une Semaine sainte exceptionnelle en direct de #Jérusalem, où nous avons eu la joie d’être accueillis par l‘École Biblique et Archéologique Française.
(Re)découvrez cette école hors norme qui réunit des grands noms de l’archéologie et des études bibliques en réécoutant l’émission : https://bit.ly/43lQjRt

16 avril 2023 

La miséricorde et le père Lagrange

Fondateur de l’École biblique de Jérusalem

Fr. Manuel Rivero o.p.

Vice-postulateur de la cause de béatification du père Lagrange

Un an avant de devenir novice dominicain au couvent royal de Saint-Maximin (Var), Albert Lagrange, séminariste à Issy-les-Moulineaux en 1879, écrit dans son Journal, des réflexions sur le premier mot de la vie dominicaine prononcé par le postulant au jour de sa prise d’habit, les bras en croix, en réponse à la question du prieur provincial « Que demandez-vous ? » : « La miséricorde de Dieu et la vôtre. »

La miséricorde de Jésus, des fidèles et du prêtre.

Exemples de miséricorde dans les derniers moments de la vie de Jésus

Le lavement de pieds. Servir avec amour
Jun Jamosmos (21e)

La dernière Cène respire ces sentiments de miséricorde : il sent combien ses disciples sont encore mal formés ; il leur lave les pieds, leur promet d’exaucer leurs prières, de leur envoyer l’Esprit consolateur, la force, il leur lègue la paix, leur annonce sa Résurrection, leur donne rendez-vous en Galilée.

La souffrance, si atroce qu’elle soit, ne le rend pas égoïste : il appelle Judas son ami, il guérit Malchus, il convertit St Pierre par un regard, il paraît miséricordieux pour Pilate. Sur la Croix, il prie pour ses bourreaux, il a un mot pour la Ste Vierge et pour St Jean. Après sa Résurrection, il est plein de condescendance pour ses disciples, peu affermis dans la foi.

Enseignements

N.S. est bien aussi le docteur de la miséricorde. Diliges proximum tuum tanquam teipsum (aime ton prochain comme toi-même). St Luc ; le Samaritain qui recueille le malheureux. Le prêtre a l’habitude de gouverner les âmes, de les dominer : souvent il perd ainsi les sentiments de miséricorde et de tendresse. Il est toujours en contact avec les misères, il risque de s’y habituer et d’y devenir indifférent. – Mt 25 (Cf. Évangile selon saint Matthieu 25, 45 : « En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous ne l’avez pas fait à l’un de ces petits, à moi non plus vous ne l’avez pas fait. ».) La miséricorde est le critérium du dernier jugement. Ceux qui cherchent dans la vie le dévouement pour soulager les autres ne sombreront jamais. Ceux qui cherchent la science, la gloire, même avec des vues élevées, peuvent sombrer, ceux-là non. Nous aimons à croire que les hommes miséricordieux seront sauvés, nous espérons que, s’ils sont incroyants, Dieu leur fera la grâce finale.

Discours sur la montagne. 8e béatitude : beati misericordes (Évangile selon saint Matthieu 5, 7 : « Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. »).

Estote perfecti (« Soyez parfaits. »). St Luc dit : Estote misericordes (« Soyez miséricordieux. »). Il prêche la miséricorde aux pécheurs. »

(Journal spirituel d’Albert Lagrange, séminariste à Issy-les-Moulineaux, le 25 avril 1879).

Marie-Joseph LAGRANGE, Journal spirituel, Premier cahier ; transcrit par le frère Renaud Escande, révisé par le frère Bernard Montagnes.

16 avril 2023

Dimanche de la Miséricorde : la miséricorde de Dieu « ne nous laisse jamais seul.

Pape François. Audience générale du 12 avril 2023.

En rappelant que le dimanche prochain l’Église célébrera « le Dimanche de la Miséricorde », le pape François a invité à penser « à la miséricorde de Dieu qui nous accueille toujours, nous accompagne toujours, ne nous laisse jamais seuls ».

C’est ce que le pape a dit au terme de l’audience générale de ce mercredi 12 avril 2023, Place Saint-Pierre.

Lors de ses salutations aux fidèles polonais, le pape François a rappelé que « le Dimanche de la Miséricorde Divine » a été « établi par saint Jean-Paul II comme l’a voulu le Seigneur Jésus par l’intermédiaire de sainte Faustine Kowalska, il y a près d’un siècle ».

« Aujourd’hui que le monde est de plus en plus éprouvé par les guerres et s’éloigne de Dieu, nous avons encore plus besoin de la Miséricorde du Père », a poursuivi le pape. « Élevons donc notre prière au Christ : ‘Pour ta douloureuse Passion, aie pitié de nous et du monde entier’ ».

Le Christ a demandé l’institution de Dimanche de la Miséricorde à sainte Faustine Kowalska (1905-1938), religieuse de Notre-Dame de la Miséricorde et mystique polonaise, le 22 février 1931 : « Ce dimanche doit être la Fête de la Miséricorde » (Petit Journal 49).

Il a été institué par le pape Jean-Paul II le 30 avril 2000, jour de la canonisation de sainte Faustine, à Rome, par ces paroles : « Désormais, le deuxième dimanche de Pâques, dans toute l’Église, prendra le nom de “Dimanche de la Miséricorde Divine ” ».

Marina Droujinina. https://fr.zenit.org/2023/04/12/dimanche-de-la-misericorde-la-misericorde-de-dieu-ne-nous-laisse-jamais-seuls/

C’est le dimanche de la miséricorde. Accueillons le pardon de Dieu, faisons confiance en sa miséricorde qui n’a pas de limite. Alors nous pourrons faire miséricorde, nous pardonner à nous-mêmes nos mesquineries et nos méchancetés, notre manque de charité. Nous pourrons aussi pardonner à ceux qui nous ont blessés, humiliés, spoliés. Nous ne pourrons pas continuer à vivre sans cette miséricorde qui peut tout réparer.

https://dimanche.retraitedanslaville.org/meditation/647

Photo 1 : La imagen de Jesús Misericordioso es muy conocida en el mundo entero pues son varios los pintores que han plasmado con sus pinceles el mandato divino, siendo el primero de ellos, el artista polaco Eugenio Kazimirowski quien materializó una obra con un significado sin igual y de la que te hablaremos seguidamente.

L’image de Jésus Miséricordieux est bien connue dans le monde entier car il y a plusieurs peintres qui ont reproduit avec leurs pinceaux le mandat divin, le premier d’entre eux, l’artiste polonais Eugenio Kazimirowski qui a matérialisé une œuvre avec une signification inégalée.

https://divinamisericordia2204.wordpress.com/2020/07/18/primera-imagen-de-la-divina-misericordia/

Photo 2 : Jésus, j’ai confiance en Toi. « Les rayons signifient le sang et l’eau qui ont jailli des profondeurs de ma miséricorde lorsque mon cœur fut ouvert par la lance sur la croix. Les rayons blancs représentent l’eau qui purifie les âmes, les rouges symbolisent le sang qui est la vie des âmes… Heureux celui qui vivra à l’ombre de ces rayons. Je promets que l’âme qui honorera cette image ne sera pas perdue. » Telle est l’explication que Jésus donna à sœur Faustine au cours de sa vision.

https://fr.aleteia.org/2017/04/23/sainte-faustine-secretaire-de-la-misericorde-divine/

16 avril 2023 

Manuel Gonzalo Rivero

 

Bon dimanche de la Divine Miséricorde. Avec ma prière à la messe en la cathédrale de Saint-Denis de La Réunion.

 

 

 

 

 

 

15 avril 2023

RCF Radio 11 avril 2023 Retour sur la Semaine sainte

L’équipe RCF vient de rentrer après une Semaine sainte exceptionnelle en direct de #Jérusalem, où nous avons eu la joie d’être accueillis par l‘École Biblique et Archéologique Française.

(Re)découvrez cette école hors norme qui réunit des grands noms de l’archéologie et des études bibliques en réécoutant l’émission : https://bit.ly/43lQjRt

École Biblique et Archéologique Française, Véronique Alzieu, Dominicains – Province de France

15 avril 2023
École Biblique et Archéologique Française
Ne manquez pas le replay de la conférence du frère Olivier Catel sur le thème « Eucharistie & Seder Pascal ».
A retrouver en replay sur notre chaîne yotube !

 

Mercredi 12 avril 2023

Les disciples d’Emmaüs à Jérusalem

Lc 24. 33 Et se levant à l’heure même, ils retournèrent à Jérusalem. Et ils trouvèrent réunis les Onze et leurs compagnons 34 qui [leur] dirent : « Le Seigneur est vraiment ressuscité, et il est apparu à Simon. » 35 Et eux-mêmes racontèrent ce qui [s’était passé] dans le chemin et comment il avait été reconnu par eux à la fraction du pain.

Il semble que les deux disciples, d’abord saisis, puis transportés de joie, ne prirent même pas le temps de terminer leur repas. Il fallait au plus tôt annoncer la bonne nouvelle.

Un nouvel évangile commençait. Revenus à Jérusalem ils trouvèrent réunis les onze Apôtres, avec quelques compagnons, en proie eux aussi à une vive émotion. Sans laisser aux deux arrivants le temps de parler, on leur expliqua la raison de cette réunion extraordinaire à une heure tardive : « Le Seigneur est vraiment ressuscité, et il a apparu à Simon. » Le chef des Apôtres, Simon-Pierre, devant être le premier des disciples à voir leur commun Maître. Saint Paul l’a noté aussi (1), et c’était déjà une preuve que son reniement lui était pardonné, sa situation maintenue et consacrée. Cléopas et son compagnon dirent ce qu’ils avaient vu, et comment ils avaient reconnu le Seigneur à la fraction du pain (2).

(1) 1 Co 15, 5 « Il apparut à Pierre, et ensuite aux Douze », terme consacré pour le conseil des Apôtres. Luc qui est historien a écrit « onze » à cause de Judas, rayé des cadres, sans s’occuper de Thomas qui manquait par hasard.

(2) Sur la fractio panis, cf. v. 30. On ne peut nier que ce terme n’ait ici quelque chose de mystérieux. En tout cas on ne saurait l’expliquer comme notre locution vulgaire : casser une croûte ».

(L’Évangile de Jésus Christ. P. M.-J. Lagrange, o. p. avec la synopse évangélique grecque traduite par le P. Lavergne, o. p., Éd. Artège, 2017 et L’Évangile selon saint Luc, Gabada, 1941.)

Note complémentaire dans le très beau livre : Dictionnaire Jésus – École biblique de Jérusalem. Renaud Silly o.p. Éd. Bouquins, 2021, p. 396 :

  1. Le nom “Fraction du pain” vient du rite propre au repas juif utilisé par Jésus lorsqu’il bénit et distribue le pain en maître de table lors de la multiplication des pains ou de la Cène (Mt 14,19). Ce geste permet aux disciples de le reconnaître après sa résurrection (Lc 24, 30-35). L’expression désigne les assemblées eucharistiques des premiers chrétiens (Ac 2,42). Le symbolisme du pain divisé et partagé exprime le fait que ceux qui mangent à l’unique pain rompu, le Christ, entrent en communion avec lui et ne forment plus qu’un seul corps en lui. La métaphore implicite dans le verbe klaein (« fracturer », « briser » Mt 26,26 ; 1 Co 22,24) connote la mort violente et le sacrifice sanglant. (…)

Photo : Les disciples d’Emmaüs – La fraction du pain. Jacob Andries Beschey (1710-1786)

10 avril 2023

 

Après la grande fête de la Résurrection du Seigneur, Alléluia ! Comme chaque mois, nous fêtons le jour-anniversaire du départ au ciel du serviteur de Dieu Fr. Marie-Joseph Lagrange, o.p. Par son intercession nous lui confions les grâces dont nous avons besoin. Si nous pensons avoir bénéficié de grâces par son intercession, n’oublions pas de le signaler à manuelrivero921881772@gmail.com. ou manuel.rivero@free.fr Aucun miracle n’a été encore reconnu pour que son culte soit autorisé et il en faut un pour que le P. Lagrange soit déclaré bienheureux. Des images avec la prière peuvent vous être envoyées. Par courriel : pere.marie.joseph.lagrange@gmail.com  ou manuel.rivero@free.fr 

9 avril 2023

: Regina Cœli, laetare, alleluia.

: Quia quem meruisti portare, alleluia.

: Resurrexit, sicut dixit, alleluia.

: Ora pro nobis Deum, alleluia.

: Gaude et laetare Virgo Maria, alleluia.

: Quia surrexit Dominus vere, alleluia.

:

Deus, qui per resurrectionem Filii Tui, Domini Nostri Iesu Christi, mundum laetificare dignatus es: praesta, quaesumus; ut, per Eius Genetricem Virginem Mariam, perpetuae capiamus gaudia vitae. Per eundem Christum Dominum Nostrum. Amen.

Gloria Patri, et Filio, et Spiritui Sancto. Sicut erat in principio, et nunc et semper, et in saecula saeculorum. Amen. (3 veces)

#ReginaCoeli#Pascua

9 avril 2023   

Apparition de Jésus ressuscité à sa mère

 

À l’exemple de saint Vincent Ferrier, de saint Ignace de Loyola et du saint pape Jean-Paul II, le père Lagrange croit que Jésus est apparu en premier à la Vierge Marie : « La piété des enfants de l’Église tient pour assuré que le Christ ressuscité apparut d’abord à sa très sainte Mère. Elle l’a nourri de son lait, elle a guidé son enfance, elle l’a comme présenté au monde aux noces de Cana, pour ne reparaître guère qu’auprès de sa croix. Mais Jésus a consacré à elle seule avec Joseph trente ans de sa vie cachée : comment n’aurait-elle pas eu pour elle seule le premier instant de sa vie cachée en Dieu ? Cela n’intéressait pas la promulgation de l’Évangile ; Marie appartient à un ordre transcendant où elle est associée comme Mère à la Paternité du Père sur Jésus ».

 

Dessin réalisé par un détenu de la prison de Domenjod (La Réunion).

9 avril 2023

Il est vraiment ressuscité ! 

Il est vraiment ressuscité ! Pourquoi chercher parmi les morts ?
Il est vivant comme il l’a promis ! Alléluia ! Alléluia !

Les évangélistes n’ont pas essayé de dire le tressaillement le tressaillement de la chair livide et meurtrie, s’animant au souffle de l’âme, ce corps humain qui avait contraint le Fils de Dieu à la souffrance, transfiguré par la gloire dans la béatitude, la voix du Père prononçant dans son jour éternel : « Tu es mon Fils, je t’ai engendré aujourd’hui », Jésus Christ remerciant son Père de lui avoir donné les nations en héritage. Toutes choses ineffables demeurées cachées dans le secret de Dieu.

L’Évangile de Jésus Christ. P. M.-J. Lagrange, o. p. avec la synopse évangélique grecque traduite par le P. Lavergne, o. p., Éd. Artège, 2017)

8 avril 2023 

Bon triduum pascal. Fr. Manuel

 

Interview de Fr. Manuel Rivero, o.p. Vice-postulateur de la cause de béatification du P. Lagrange par Véronique Alzieu de RCF

RCF : Le père Marie-Joseph Lagrange, le fondateur de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem ; Pâques 2023 et la Semaine sainte à Jérusalem

https://www.rcf.fr/vie-spirituelle/paques-2023-et-la-semaine-sainte-a-jerusalem?episode=360097

 

 

 

8 avril 2023

Samedi saint

Le tombeau trouvé vide

« Un grand silence règne aujourd’hui sur la terre, un grand silence et une grande solitude. »

Un grand silence parce que le Roi dort. La terre a tremblé et s’est calmée parce que Dieu s’est endormi dans la chair […] et qu’il est allé réveiller ceux qui dormaient depuis des siècles. »

Serait-ce donc le silence de l’attente et non le mutisme du désespoir ?

(Deuxième Nocturne – Sermon de saint Épiphane (évêque) – Lectionnaire patristique dominicain – Jean René Bouchet – Paris – éd. du Cerf – 1994.)

Elles entrèrent dans le tombeau et ne trouvèrent pas le corps. […] Alors, elles avisent un jeune homme assis à leur droite, sur la banquette, revêtu d’un habit blanc. Effrayées, elles baissèrent les yeux à terre. Le jeune homme dit : « Ne soyez pas dans cette stupeur. Vous cherchez Jésus de Nazareth le crucifié ; il est ressuscité, il n’est pas ici. Voici la place où on l’avait déposé. Mais, allez, dites à ses disciples et à Pierre qu’il vous précède en Galilée ; là vous le verrez, comme il vous l’a dit. »

(L’Évangile de Jésus Christ. P. M.-J. Lagrange, o. p. avec la synopse évangélique grecque traduite par le P. Lavergne, o. p., Éd. Artège, 2017)

7 avril 2023

Les Sept paroles de Jésus en croix avec les mots du P. Lagrange

Vendredi de la Semaine sainte

La 7e parole (Pater, in manus tuas…)

Puis d’une voix forte, Jésus dit : « Père ! Je remets mon esprit entre tes mains !  (Luc 23, 46a) » Ayant donc montré par ce grand cri qu’il rendait librement son esprit à son Père, Jésus expira.

« Ayez pitié de nous, très doux Jésus, qui dans votre clémence avez souffert pour nous. »

 

 

 

 

Les Sept paroles de Jésus en croix avec les mots du P. Lagrange

 

Vendredi de la Semaine sainte

La 6e parole (Consummatum est)

« Tout est consommé », en bon ouvrier qui a fini sa tâche (Jean 19,3a).

 

 

 

6 avril 2023

Les Sept paroles de Jésus en croix avec les mots du P. Lagrange

Jeudi de la Semaine sainte

 

La 5e parole (Sitio)

Jésus cependant laissa entendre : « J’ai soif. »

[…] En disant : « J’ai soif », Jésus avait accompli une parole d’un psaume sur le juste souffrant (Psaume 68, 22). Désormais il avait bu le calice jusqu’à la dernière goutte.

Ps. 68,22. Pour nourriture ils m’ont donné du poison, dans ma soif ils m’abreuvaient de vinaigre.

 

 

 

6 avril 2023

Les Sept paroles de Jésus en croix avec les mots du P. Lagrange

Jeudi de la Semaine sainte

La 4e parole (Eloï)

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Durant trois heures, une obscurité opaque s’étendit sur le pays. Le soleil était voilé. L’atmosphère était lourde. Jésus garda le silence jusqu’à la neuvième heure. Il souffrait. Rejeté par les chefs de la nation comme blasphémateur et livré à des étrangers, traité par les Romains comme un malfaiteur, conspué par la populace, raillé par un bandit, abandonné par les siens, il ne lui restait plus qu’une peine à endurer dans son âme, la plus cruelle de toutes, l’abandon de son Père. Nous devons le croire, puisque deux évangélistes l’ont dit. Ils l’ont dit, et c’est sans doute la preuve la plus indiscutable de leur véracité. Les ennemis de Jésus venaient de l’insulter dans sa confiance en son Dieu : Non, qu’il se détrompe, Dieu l’a abandonné ! Les chrétiens devaient tenir cette insulte pour un blasphème envers l’objet de leur culte, Jésus Christ, Fils de Dieu. Alors pourquoi avouer que c’était vrai ? Pourquoi le faire avouer par Jésus lui-même criant dans sa détresse : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » […]

Le mystère subsiste pour nous. Même au moment où l’âme de Jésus allait quitter son corps, nous ne devons pas supposer une sorte de dédoublement de sa personnalité. C’est toujours le Fils de Dieu qui parle. Mais la voix humaine exprime le sentiment de son humanité, de son âme désolée comme si Dieu se retirait d’elle. Désolation plus entière que celle de Gethsémani, puisque Jésus ne dit plus « mon Père », mais seulement « mon Dieu », Eloï, Eloï. Comme toutes ses autres douleurs, celle-là aussi devait être acceptée pour nous : c’est le refuge des grandes âmes dans les dernières épreuves qui les purifient. […] Chargé sur son gibet de tous les péchés du monde, Jésus était devenu malédiction [Ga 3, 13]. Mais il nous délivrait de la malédiction en la prenant sur lui, et la désolation éclatait en joie dans les derniers versets du psaume dont il prononçait les premiers mots [Ps 22 (Vg 21), 1. Le psaume est en hébreu comme tous les autres, mais Jésus l’a prononcé en araméen.]. Les afflictions du juste, le véritable Messie, aboutissent à la gloire de Dieu. Le psaume reproduisait à l’avance le défi ironique des docteurs : « Qu’il s’abandonne à Iahvé ! Qu’il le sauve ! » Et en effet, l’abandonné s’abandonne ; il sait qu’à ce prix toutes les extrémités de la terre se tourneront vers Dieu, et toutes les familles des nations se prosterneront devant sa face [Ps 22, 28, peut-être Luc et Jean écrivant surtout pour les Gentils convertis ont-ils omis cette parole parce qu’elle est une citation qu’il fallait entendre comme telle.].

Parmi ceux qui étaient présents, les docteurs seuls comprirent que Jésus citait un psaume. D’autres, plus simples, n’entendant guère que les premiers mots, s’imaginèrent que Jésus appelait Élie. Ils y virent la dernière hallucination de cette tête que la torture achevait d’égarer. Car Élie, tout le monde le savait chez les Juifs, reviendrait pour manifester le Messie, mais il n’irait pas le chercher sur une croix !

5 avril 2023

Les Sept paroles de Jésus en croix avec les mots du P. Lagrange

Mercredi de la Semaine sainte

La 3e parole (Hodie)


« En vérité, je te le dis, aujourd’hui, tu seras avec moi, dans le Paradis. » (Lc 23, 43)

Cependant l’autre larron, moins endurci, rentrait en lui-même au moment de paraître devant Dieu. Il se rendait justice : sa peine était méritée. Et ce même instinct de grâce, si sûr, lui faisait comprendre aussi que Jésus était innocent. Peut-être autrefois avait-il entendu son compagnon de supplice, alors suivi de la foule, parler du royaume de Dieu qu’il devait inaugurer comme Messie. Les prêtres venaient encore de reconnaître ses miracles. Et cependant ce Jésus se taisait. C’est qu’il attendait son heure qui sûrement sonnerait, après ces souffrances dont il avait aussi parlé. Et s’efforçant de tourner la tête, le larron articula doucement : « Jésus, souviens-toi de moi lorsque tu viendras dans l’éclat de ton règne. » Admirable acte d’une foi que Jésus veut éclairer davantage, en tournant toutes les pensées du pécheur repentant vers son accès si prochain auprès de Dieu : « En vérité, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le Paradis (Luc 23, 43). » Le bon larron, qui était juif, avait sûrement entendu parler du Paradis.

Le bon larron, qui était juif, avait sûrement entendu parler du Paradis. Transposant dans le monde d’en haut le Paradis terrestre, les docteurs en faisaient un lieu agréable où les âmes attendaient le dernier jugement. Et, en effet, Jésus devait se trouver avec le larron pardonné parmi les justes de l’Ancien Testament dans le lieu que les chrétiens nomment les limbes. Selon les Psaumes de Salomon, les saints eux-mêmes sont le Paradis de Dieu et les arbres de vie [Psaumes de Salomon 14, 3]. Compagnon de Jésus sur la Croix, l’heureux larron sera désormais sous sa sauvegarde auprès de Dieu. Et c’est ainsi que sur la Croix le Sauveur servait bien réellement les autres.

L’Évangile de Jésus Christ. P. M.-J. Lagrange, o. p. avec la synopse évangélique grecque traduite par le P. Lavergne, o. p., Éd. Artège, 2017)

4 avril 2023

Les Sept paroles de Jésus en croix avec les mots du P. Lagrange

Mardi de la Semaine sainte

La 2e parole (Mulier…) « Femme, voilà ton fils… »

Or, près de la croix de Jésus, se tenaient sa Mère, et la sœur de sa Mère, Marie, la [femme] de Clopas, et Marie de Magdala. 26Jésus donc, voyant sa Mère et, tout près, le disciple qu’il préférait, dit à sa Mère : « Femme, voilà ton fils… » 27Ensuite, il dit au disciple : « Voilà ta mère… » Et depuis cette heure-là, le disciple la prit chez lui (Jean 19, 25-27).

Le calice de la Rédemption fut amer pour Jésus. Ses souffrances sur la croix étaient atroces. Son cœur était meurtri par l’abandon de ses disciples, le mépris des chefs des Juifs, la lourde indifférence du grand nombre. Jusque-là, même dans ce mystère douloureux, le Père avait encore versé beaucoup de joie dans l’âme de Jésus par l’amour de sa Mère. Elle était là, pâtissant avec lui, augmentant ainsi sa torture et pourtant le consolant dans l’abandonnement des autres. Avec elle sa sœur, peut-être sa cousine, qui était la mère de Jacques et de José, puis Marie, femme de Clopas, Marie de Magdala, enfin le disciple bien-aimé. […] Jésus donc, voyant sa Mère et tout près le disciple qu’il aimait, dit à sa Mère : « Femme, voilà votre Fils. » Ce terme de femme sonne plus doucement aux oreilles d’un Oriental qu’aux nôtres, nous l’avons déjà vu [les noces de Cana]. Et Jésus, se séparant de sa Mère, ne veut plus lui donner ce nom très doux. Cela aussi fait partie de son sacrifice. Sa pensée est de la confier à celui qu’il aime le mieux, par qui elle sera le mieux comprise quand elle parlera de son vrai Fils. Étant très jeune, son affection sera à la fois plus respectueuse et plus tendre. Il devra donc la regarder vraiment comme sa mère : « Voilà ta mère. » Et depuis ce moment le disciple la prit chez lui. Quelle union entre eux fut créée par cette parole et par ce souvenir ! Tous les chrétiens, devenus frères de Jésus par le baptême, sont donc aussi fils de Marie. Ils s’approchent de la Croix, s’entendent dire cette parole : Voilà votre Mère ! Et ils savent, et ils éprouvent que Marie les traite vraiment comme des fils.

L’Évangile de Jésus Christ. P. M.-J. Lagrange, o. p. avec la synopse évangélique grecque traduite par le P. Lavergne, o. p., Éd. Artège, 2017, p. 609.)

 

3 avril 2023
Lundi de la Semaine sainte
Première des Sept paroles de Jésus en Croix : Le Pater

Lc 23. 34a. Or Jésus disait : « Père ! pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. »

Le premier mot de Jésus sur la croix fut une parole de pardon : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » Les Juifs croyaient savoir, mais ils étaient aveuglés par l’orgueil, racine de leur haine, et cet aveuglement étant volontaire dans son principe, ils avaient grand besoin de pardon. Jésus leur accorde le sien et implore son Père pour eux en montant sur la croix, puisqu’il est venu souffrir pour obtenir la grâce des pécheurs.

Il faut surtout se souvenir que la charité couvre la multitude des péchés : « Avant tout, conservez entre vous une grande charité, car la charité couvre une multitude de péchés. (1ère Épître de Pierre, 4, 8.) »

L’Évangile de Jésus Christ. P. M.-J. Lagrange, o. p. avec la synopse évangélique grecque traduite par le P. Lavergne, o. p., Éd. Artège, 2017 et L’Évangile selon saint Luc. P. M.-J. Lagrange, Lecoffre, 1941.

 

 

1er avril 2023

« Jésus-Christ s’est fait pauvre pour nous enrichir par sa pauvreté »
Récollection aux Équipes Notre-Dame de La Réunion
Carmel des Avirons, les 25-26 février 2023.
Fr. Manuel Rivero O.P., conseiller spirituel du secteur La Réunion.

Les Équipes Notre-Dame soutiennent les couples dans leur désir de mieux communiquer grâce aux réunions mensuelles de partage et de formation ainsi que par la pédagogie spirituelle de l’oraison, le cœur à cœur avec Dieu dans le silence, la prière et le devoir de s’asseoir.

Le devoir de s’asseoir
Ce devoir de s’asseoir que l’on pourrait aussi appeler « plaisir de s’asseoir » représente un apport original pour la croissance de l’amour conjugal. En quoi consiste-t-il ? Il s’agit d’un rendez-vous que le couple prend afin de se rendre disponible de manière réciproque dans un climat de prière, de calme et d’exigeante vérité. D’aucuns déclarent a priori qu’ils communiquent déjà beaucoup et qu’ils se voient tout le temps. À quoi bon ajouter un rendez-vous qui pourrait sembler artificiel ? En réalité, dans toutes les relations humaines il y a des non-dits, ces pensées que l’on garde en soi de peur de provoquer un conflit. Ces pensées cachées, fermées, fermentent petit à petit et elles peuvent tourner au « cancer » ou à « la gangrène ». Ces cellules infectieuses grandissent et finissent par rendre malade la relation du couple. Le malaise intérieur se manifeste aussi dans la violence verbale ou physique. Il convient d’arrêter la maladie en ses débuts. Le devoir de s’asseoir (DSA) permet l’expression et la libération de l’agressivité qui peut couver en chacun ; il freine la violence qui provient de la frustration. Ce qui était négatif dans le silence intérieur peut devenir énergie positive par l’écoute, la compréhension et la réconciliation.
Au cours du devoir de s’asseoir on ne coupe pas la parole au conjoint qui s’exprime et on lui dit « merci » pour avoir partagé ce qu’il pensait même si cette pensée peut être erronée ou douloureuse à entendre. Habituellement trois questions scandent l’échange : est-ce que ça va ? ; est-ce que quelque chose te dérange ? ; y a-t-il quelque chose que tu aimerais ?. Plus les couples partagent en profondeur dans la bienveillance et la miséricorde et plus ils ont envie de mettre en commun davantage de sentiments et d’idées.

Communiquer à partir des fragilités et des pauvretés.
Habituellement les conjoints pensent que le partage des forces et des réussites apportera bonheur et estime réciproque. Ce n’est pas faux. Mais l’expérience montre que c’est dans la reconnaissance de ses propres faiblesses que la rencontre devient plus sincère et bienfaisante.
Ceux qui fréquentent des personnes handicapées avouent que ces personnes pauvres en pouvoir et en réussite sociale leur font du bien. Il en va de même dans la rencontre avec des personnes détenues en prison. Ils n’ont à offrir qu’eux-mêmes avec la grandeur de leur dignité humaine sacrée. En laissant tomber les masques, la personne manifeste son besoin d’aide et sa vulnérabilité. « Heureux ceux qui ont une âme de pauvre » (Mt 5,3), enseigne Jésus dans les béatitudes. D’ailleurs, c’est la première des béatitudes qui figure comme le fondement du projet chrétien de réussite, non pas de la réussite « dans la vie » mais de « la réussite de la vie ». En effet, les pauvres ne seront plus pauvres. Dieu comble leur manque : « le Royaume des cieux est à eux » (Mt 5,3).
Si le mariage unit des forces il n’en demeure pas moins l’union de deux solitudes et de deux pauvretés. Chaque conjoint porte en lui une solitude infinie, espace d’accueil de Dieu et pour les autres. Plutôt qu’un vide, la solitude peut devenir la demeure intérieure riche en hospitalité et en échange. Il importe de reconnaître sa propre fragilité et d’accepter avec amour la fragilité de l’autre.
Dieu a choisi de se révéler et de nous sauver en s’abaissant et en se dépouillant de la gloire qui était la sienne dès avant la fondation du monde. La science divine de la communication se trouve cachée en Jésus-Christ qui aurait pu nous sauver du haut du Ciel et dans sa toute-puissance mais qui a préféré le dépouillement et l’humilité jusqu’à l’humiliation et la douleur de la croix : « S’étant comporté comme un homme, il s’humilia plus encore, obéissant jusqu’à la mort, et à la mort sur une croix ! » (Ph 2,8).
Le couple chrétien devient disciple de Jésus en s’unissant aux sentiments du fils de Marie dans la méditation du Chemin de croix. Les récits de la Passion de Jésus représentent non pas un échec mais l’art d’aimer du Fils de Dieu fait homme.
Saint Paul le dit dans sa lettre aux chrétiens de Corinthe : « Jésus-Christ s’est fait pauvre pour nous enrichir par sa pauvreté » (2 Cor 8,9). Formule paradoxale ! Dans la logique humaine, la pauvreté ne peut pas enrichir. Pourtant dans la sagesse de Dieu le partage de la pauvreté enrichit le cœur et l’âme de l’amour de Dieu et de l’amour humain, amours inséparables dans la personne de Jésus-Christ, Fils de Dieu fait homme. « Il n’y a qu’un amour », s’exclamait saint Augustin. L’amour de Dieu répandu dans le cœur des fidèles (cf. Rm 5,5) devient la force d’aimer les autres et soi-même. Le symbole du triangle équilatéral, où Dieu figure au sommet tandis que l’homme et la femme représentent les côtés, permet de visualiser ce qui se passe dans les âmes : plus les conjoints montent vers Dieu par la foi, la prière et la charité plus ils se rapprochent l’un de l’autre et non seulement de Dieu. Le mystère de l’amour chrétien abolit les séparations et il fait disparaître les compartiments étanches : l’oratoire et le laboratoire, l’église et l’entreprise, la foi et la raison, le quotidien du profane et le sacré dans les temples. « Dieu est dans les marmites », enseignait sainte Thérèse d’Avila. Dieu est partout. Pour le croyant, la vie ordinaire devient sacrement de la rencontre avec Dieu : « Voir Dieu en toutes choses et toute chose en Dieu », selon la spiritualité de saint Ignace de Loyola.
Les conjoints remettent souvent le devoir de s’asseoir à plus tard afin d’éviter des conflits ou la honte d’avoir à reconnaître leurs torts. Jésus a aimé les hommes alors qu’ils étaient coupables. Dans la lumière de l’amour de Jésus pour chacun, le rendez-vous des conjoints dépasse la peur du jugement pour partager la vulnérabilité et la pauvreté de chacun dans une démarche de miséricorde réciproque.
Lors de mon séjour en Haïti, à l’occasion d’une session de l’école des parents, un couple avait témoigné sur la communication conjugale en disant : « Dans le mariage, il est impossible de durer sans prononcer deux phrases : « Tu m’as fait mal » et « je te prie de m’excuser ». La souffrance doit être exprimée et le pardon accordé. Sans la verbalisation des sentiments douloureux l’agressivité, voire la haine grandissent jour et nuit. Sans les excuses pour les manques d’attention ou sans la demande de pardon pour les fautes commises, la confiance disparaît et les blessures restent ouvertes. L’envie de tout arrêter jaillit. Le besoin de reconnaissance de la vérité et la soif d’une vie meilleure poussent à la fuite et à la rupture des engagements. Il n’y a de liberté que dans la vérité : « La vérité rend libre » (Jn 8, 32), enseigne Jésus dans l’Evangile. Sans l’aveu des fautes et sans le pardon, les conjoints se condamnent à porter des « sacs de ciments » sur leurs têtes. Ces « sacs de ciment » sont déposés à terre dans le dialogue et la miséricorde. La réconciliation affermit alors l’estime réciproque, la confiance en soi-même et elle ouvre un chemin de lumière pour l’avenir.

1er avril 2023 

Saint du jour :

Il fut un élève du P. Marie-Joseph Lagrange à l’École biblique de Jérusalem.

Nous fêtons le Bienheureux Giuseppe Girotti (+1945)
Dominicain martyr du nazisme
Après ses études à l’Ecole Biblique et Archéologique de Jérusalem,
il est professeur au séminaire de Turin.
À partir de 1943,
il dirige un réseau d’aide pour les Juifs.
Arrêté, malgré les interventions de son prieur,
il est déporté au camp de Dachau,
où il est un vrai soutien pour les autres internés.
Il y meurt de maladie à 40 ans.
Abbé Christian Venard. Monaco

Homélie pour le 10 mars 2023. 85 ans de la « pâque » du père Lagrange par Frère Manuel Rivero, o. p.

Saint-Denis de La Réunion

Introduction :

En ce 10 mars, nous faisons mémoire du départ vers le Ressuscité de deux grandes figures dominicaines : le bienheureux père Lataste, apôtre des prisons, qui en embrassant les reliques de sainte Marie Madeleine dans la basilique de Saint Maximin s’était exclamé : « Il est donc vrai que les plus grands pécheurs, les plus grandes pécheresses ont en eux ce qui fait les plus grands saints ».

Par ailleurs, il y a 85 ans, le 10 mars 1938, c’est le père Marie-Joseph Lagrange, dominicain, fondateur de l’École pratique d’études bibliques de Jérusalem, qui partait à la rencontre de Jésus Vivant au couvent de Saint Maximin, près de Toulon.

Nous confions à leur intercession et nous prions le Seigneur de canoniser le père Lataste et de béatifier le père Lagrange, en nous accordant le miracle nécessaire.

Prédication :

Êtes-vous d’accord avec le proverbe portugais « Dieu écrit droit avec des lignes courbes » ? L’histoire de Joseph, le fils de Jacob, vendu comme esclave par ses frères et devenu par la suite leur sauveur va dans ce sens. Saint Paul enseigne que « tout concourt au bien de ceux qui cherchent Dieu » (Rm 8, 28). Et saint Augustin d’ajouter avec l’audace de la foi évangélique : « même le péché ». Même le péché peut devenir chemin vers Dieu par la grâce du Christ Jésus.

Joseph annonce Jésus. C’est par la jalousie de ses frères qui le voyaient aimé de leur père Jacob et revêtu d’une tunique admirablement ornée que Joseph a subi la haine et la violence de ses propres frères. Il a été vendu pour vingt pièces d’argent ; Jésus le sera par Judas pour 30 pièces d’argent.

Esclave, condamné injustement en Égypte, Joseph remonte des ténèbres de la prison au poste de ministre des Finances. Jésus, le Fils du Très-haut deviendra le très-bas, condamné injustement au supplice de la croix et de la mort. Mais Dieu le Père élèvera son Fils Jésus dans la gloire de la résurrection.

Inspiré, Joseph annonça de manière prophétique l’arrivée des années fastes et des famines en Égypte.

Jésus, le plus grand des prophètes, a aussi annoncé le Vendredi Saint et la lumière pascale.

Joseph a pardonné le crime de ses frères et il les a tirés de la famine et de la peur de la mort.

Jésus a pardonné à ses propres bourreaux : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23, 34) et il leur a accordé la joie du salut.

Rejeté par ses frères, Joseph les rassemble. Jésus, « la pierre rejetée par les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle » (Mt 21,42), qui tient l’Église dans son unité.

L’œuvre de Dieu se fait dans la contradiction. En fondant l’École biblique de Jérusalem et en travaillant à l’interprétation croyante et rationnelle de la Bible, le père Lagrange a souffert aussi de la calomnie et de la diffamation. En 1912, il dut quitter Jérusalem, en exil en France pendant dix mois, sans cause explicite ni justifiée. Il reçut l’autorisation de retourner à Jérusalem en 1913 sans la moindre explication ou excuse. Heureusement que ces méthodes font partie en grande partie du passé.

Fidèle, dans la prière et le pardon, sans révolte ni amertume, comme un soldat vaillant, le père Lagrange a servi l’Église par le renouveau de l’exégèse. Il a relevé le défi du modernisme qui ne voyait dans la Bible qu’une œuvre littéraire sans contenu surnaturel.

Le cardinal de Milan, Carlo Maria Martini, voyait dans le père Lagrange un homme « à la prière de feu ». En effet, le Journal spirituel du père Lagrange apparaît dans l’histoire comme la nappe phréatique de la fondation de l’École biblique de Jérusalem. Le cœur à cœur avec Dieu dans la ferveur de la prière explique la beauté et la grandeur de son œuvre scientifique qui relie l’oratoire et le laboratoire, la foi et la raison dans l’harmonie d’un humanisme intégral.

À l’exemple du parcours de Joseph et de la vie de Jésus, l’existence et l’œuvre du père Lagrange ont connu des progrès : « Dieu nous a donné dans la Bible un champ infini de progrès dans la vérité », avait-il déclaré lors de l’inauguration de l’École biblique le 15 novembre 1890. Dans son commentaire à l’évangile selon saint Jean, il écrit : « La vérité, même religieuse, est toujours en marche, ce qui ne veut pas dire qu’elle cesse d’être ce qu’elle a été : elle se développe. Jésus voulait mettre en garde ses disciples contre une rigidité dans leur enseignement qui eût été en opposition avec tout le mouvement normal de l’humanité ».

Inspiré intérieurement par Dieu, Joseph avait dépassé la sagesse des Égyptiens. Jésus était la Sagesse de Dieu elle-même manifestée dans la chair : « folie pour les païens, scandale pour les juifs » (I Cor 1,23).

En ce Carême, puissions-nous imiter la fidélité de Jésus, de Joseph et du père Lagrange, pour découvrir que « tout concourt au bien de ceux qui cherchent Dieu » et que Dieu écrit droit dans nos vies avec des lignes courbes. « C’est là l’œuvre du Seigneur, merveille devant nos yeux » (Mt 21,42).