Echo de notre page Facebook : octobre 2022

30 octobre 2022

Dans l’évangile de ce jour : Zachée 19, 1-10 :

Jésus n’appuie pas son dire sur le principe qu’il est venu pour sauver tous les hommes, mais sur ce qu’il est venu pour sauver ce qui était perdu.

Ce récit évangélique se distingue des autres manifestations de la charité de Jésus envers les pécheurs par la condescendance encourageante du Maître

Jésus n’appuie son dire sur le principe qu’il est venu pour sauver tous les hommes, mais sur ce qu’il est venu pour sauver ce qui était perdu. C’est la mise en action des paraboles du ch. XV.

Dans les termes il n’y a rien de plus que de la curiosité, mais une curiosité mise en éveil par le bruit des miracles. Zachée voulait savoir comment était un homme qui avait la réputation de Jésus.

Il suffisait d’un peu d’avance pour grimper sur les branches basses d’un sycomore. […] Dans un pareil ébranlement du populaire, Zachée ne compromettait pas sa dignité. On devait plutôt applaudir la dextérité du petit homme. Un grand n’aurait pas grimpé si vite.

Sans doute Jésus aurait pu entendre parler de Zachée, demander son nom etc., mais le sens paraît bien être que le Maître a connu par sa science à lui le nom de l’hôte que son Père lui destine. Zachée doit descendre bien vite, pour le recevoir le jour même ; il aura le temps de le voir.

[…] Cette fois ce ne sont pas comme précédemment (v, 30 ; XV 2) les Pharisiens qui murmurent ; c’est la foule, et le détail a son intérêt. Ce n’est pas par un sentiment de jalousie puisque ceux de la foule ne pouvaient avoir tant de prétention ; on trouve mauvais qu’au lieu de descendre chez une personne de piété et de doctrine, Jésus demande l’hospitalité à un pécheur, puisque c’est un terme presque synonyme de celui de publicain (cf. encore VII, 34).

[Zachée] est simplement debout parce qu’il reçoit le Christ entrant chez lui, et il ne veut pas lui laisser la pensée pénible qu’il est auprès d’un homme sans probité. Ce qu’il a peut-être été, il ne veut plus l’être. Il y a plus, connaissant par la voix publique la doctrine du Sauveur sur les richesses, ou s’y conformant d’instinct par un mouvement intérieur, il fait un nouvel usage de sa fortune. Lui prêter qu’il a l’habitude déjà de donner la moitié de ses biens aux pauvres, serait transformer le publicain en Pharisien. C’est désormais, et par suite de la démarche de Jésus, que son cœur touché de reconnaissance et de repentir accomplit ce sacrifice. Cette première part n’est nullement présentée comme une restitution ; c’est la part des pauvres, un sage emploi des bien de ce monde (XVI, 9). Zachée n’a même pas la conscience d’avoir fait tort […], mais d’après le v. 10 on ne peut le tenir pour très scrupuleux. […] Zachée s’engage à réparer, et qu’il traite comme des « furta manifesta », punis par la loi romaine de l’amende du quadruple. […] Zachée fait donc les choses largement.

Le discours de Jésus s’adresse à tous les assistants. […] Il y est question non pas seulement de Zachée, mais de toute sa maison qui entre par sa décision dans une nouvelle voie, celle du salut, ou de la vie éternelle, promise aux pieux enfants d’Abraham.

Jésus en effet n’appuie pas son dire sur le principe qu’il est venu pour sauver tous les hommes, mais sur ce qu’il est venu pour sauver ce qui était perdu. C’est la mise en action des paraboles du chapitre XV.

Zachée, même s’il ne quitte pas son office était désormais un fidèle du Seigneur. Les Clémentines en font un compagnon de saint Pierre qui l’aurait établi évêque de Césarée, où il aurait eu pour successeur Cornelius, d’après les Constitutions apostoliques (VII, 46). D’après Clément d’Alexandrie, quelques-uns le nommaient Matthias. La France lui a rendu un culte spécial à Rocamadour (Lot) ; voir « Acta Sanctorum » au 23 août.

(Marie-Joseph Lagrange o.p., L’Évangile selon saint Luc, Gabalda, 1941.)

Illustrations : Zachée, descends vite ! et La Vierge noire de Rocamadour (12e)

26 octobre 2022

Appel à la Pénitence

« Et on viendra de l’orient et du couchant, et du nord et du midi, pour s’asseoir à table dans le royaume de Dieu. Et voici que [quelques-uns] des derniers seront les premiers, et que des premiers seront les derniers. » (Évangile de saint Luc 13, 29-30)

En effet, aux patriarches viennent se joindre des personnes appelées de tous les points cardinaux, qui ne sont point nécessairement ou seulement des Juifs dispersés (Is XLIII, 6 ss.), mais aussi les gentils comme dans Mt 7, 29.  Comment entreront-ils, puisque la porte est fermée ? Luc est plus attentif à conserver le texte de la parole de Dieu qu’à narrer avec l’aisance d’un inventeur. Il a pu supposer que la porte s’ouvrira à ces personnes, car la parabole ne met pas tant en lumière la nécessiter d’arriver avant le moment fatal, que de se présenter de façon à être admis. Aussi bien ce menu détail disparaît dans la solennité de la dernière mise en scène.

C’est une sorte de proverbe, dont l’application peut changer selon les circonstances. Dans Mc X, 31 et Mt XIX, 30, il s’agit de l’ordre du rang, dans Mt XX, 16, de l’ordre du temps.

Ici la situation est retournée en ce sens que d’ordinaire les premiers entrent et les derniers non ; ici il y a des derniers qui entrent, des premiers qui ont le lot réservé d’ordinaire aux derniers. […] Les catégories ne sont donc pas absolues, la règle ne s’applique pas à tous les individus, et en effet les patriarches venus les premiers sont demeurés tels. L’opposition est entre les Juifs contemporains et les gentils, car si ces deux groupes sont substitués par la pensée aux termes vagues de la parabole, il est clair que les Juifs étaient les premiers par l’appel de Dieu, par opposition aux gentils.

Si l’on cherchait une application aux circonstances de l’Église primitive, on aurait la perspective d’un royaume de Dieu d’où les Juifs s’étaient exclus par leur infidélité, tandis que les gentils y entraient de toute part. Dans cette voie on en viendrait à trouver une allusion à la résurrection du Christ. Mais ce serait transformer insensiblement le sens de tout ce passage et l’altérer par trop de précision, car il ne serait plus possible de trouver les patriarches et les prophètes dans l’Église chrétienne, où les Juifs ne demandaient pas à entrer. La véritable perspective est celle du jugement dernier, qui condamne les impénitents et admet au royaume de Dieu des hommes dignes d’être associés aux patriarches et aux prophètes, quelle que soit leur origine. Avis aux Juifs qui se croient et sont en quelque façon les premiers, de ne pas se réduire à n’être plus que les derniers, ceux auxquels d’ordinaire on ferme la porte. Si les images ne sont pas rigides, le sens est très clair, et la leçon redoutable. À la question sur le nombre de ceux qui peuvent se perdre, fussent-ils parmi mes compatriotes et mes familiers. Si l’inconnu était un pharisien, Jésus retourne contre ses Maîtres leur tableau des fins dernières : In mundo futuro mensam ingentem vobis sternam, quod gentes videbunt et pudefient (Schoettgen, hor. heb. p. 86, cité par Pl.) D’ailleurs plusieurs docteurs avaient des vues plus larges sur le salut des gentils.

(Marie-Joseph Lagrange o.p. L’Évangile selon saint Luc, Lecoffre-Gabalda, Paris, 1941. pp. 391-392.)

25 octobre 2022

Blog de Guy Musy

Le secret d’une vie. Le P. Lagrange. Augustin Laffay 09/01/21

https://dominicains.ch/blog-du-frere-guy-musy/marie-joseph-lagrange-350591

25 octobre 2022

Dans l’évangile de ce jour, Jésus disait : « À quoi le règne de Dieu est-il comparable, à quoi vais-je le comparer ? Il est comparable à une graine de moutarde qu’un homme a prise et jetée dans son jardin. Elle a poussé, elle est devenue un arbre, et les oiseaux du ciel ont fait leur nid dans ses branches. » Il dit encore : « À quoi pourrai-je comparer le règne de Dieu ? Il est comparable au levain qu’une femme a enfoui dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que toute la pâte ait levé. » (Luc 13, 18-21)

Le grain de sénevé : [le sénevé ou brassica nigra peut mesurer jusqu’à deux mètres de hauteur.] Les chardonnerets surtout, qui paraissent être très friands des grains de sénevé, viennent en foule se percher sur les branches de cet arbre » […], la pointe de la parabole est dans le contraste entre les humbles débuts et l’extension future du règne […]. Le règne de Dieu est encore petit, mais il deviendra grand. La graine, plantée dans le jardin du semeur, est peut-être allégorique pour indiquer la parole dans la Terre du peuple de Dieu. Peut-être aussi Luc a-t-il pensé que les oiseaux figuraient les gentils ? D’ailleurs la comparaison était traditionnelle (Ez 31, 6) pour un grand empire, qui abrite beaucoup de monde (Ez 17, 23 ; Dn 4, 9. 18).

Le levain […] L’allégorie consisterait à regarder les trois mesures de farine comme trois provinces de Palestine, ou comme trois parties du monde. Ce serait encore de l’allégorie de comparer le levain à la foi semée dans l’esprit de l’homme et dans ses trois puissances, ou la femme à l’Église etc. […] Jésus a parlé du feu qu’il est venu jeter sur la terre : tout indique que le levain signifie son action par la parole et par les miracles. Et c’est sans doute le sens du grain de sénevé. Pourquoi le Sauveur ne se serait-il pas occupé du développement sur la terre de la semence qu’il avait jetée ? […] On peut seulement dire que le contexte accentue dans le sénevé et le levain le caractère de grâce offerte, dont Jésus affirme, en face de l’aveuglement d’Israël, qu’elle fera son effet. (Marie-Joseph Lagrange o.p., Évangile selon saint Luc, Lecoffre-Gabalda, 1941, pp. 385-387)

25 octobre 2022

La mission dominicaine au cœur d’un Brésil encore inconnu

Dans son Journal spirituel, le P. Lagrange écrit : « Départ du P. Vilanova et du P. Carrérot pour le Brésil ». C’était le 20 septembre 1887. Ils étaient tous deux frères dominicains de la province de Toulouse.

Mais qui était le P. Carrérot ? Le P. Dominique Carrérot (1863-1933), fut un compagnon de noviciat du P. Lagrange, : « Il était parmi nous, et aussi attaché qu’aucun autre à la prière, cet héroïque père Gil Vilanova, l’explorateur intrépide des forêts du Brésil, poursuivant vainement les Indiens pour les amener à la foi, ou pour endurer de leurs mains le martyre. Et quand il les eut enfin atteints, il sut les grouper, véritable fondateur d’une bourgade nouvelle Conceiçâo, la petite cité de l’Immaculée-Conception… C’est aussi de Salamanque que sortit le futur évêque de la Mission dont la figure ouverte, presque avec des traits d’enfant, ne révélait pas alors l’indomptable énergie, et aussi leurs collaborateurs, les pères Blatgé, Wolztyniack, Llech, dont la vie entière, s’est passée au Brésil, le père Hyacinthe Lacomme qui, durant plusieurs années, a dirigé la mission. Le père Hilarion Tapie était à Salamanque professeur de philosophie et sous-maître des novices. Lui aussi se rendit au Brésil comme visiteur et en rapporta un livre fort agréable sur la vie des colons et des indigènes. Durant plusieurs années, et dans des temps très difficiles, il assura la direction de la Province et sut sauvegarder une existence alors très précaire. » (L’Écriture en Église. Souvenirs de Salamanque, Cerf, 1990.)

A l’occasion du centenaire de l’ordination épiscopale de Mgr Carrérot dans son homélie du 11 octobre 2012, Fr. Timothée Lagabrielle retrace le parcours de ce frère parti, en 1887, avec le P. Sébastien Thomas pour une mission dominicaine au cœur du Brésil inconnu

« Aujourd’hui, j’aimerais nous emmener faire un petit voyage dans le temps et revenir 100 ans en arrière, en 1912.

Nous sommes alors dans une époque troublée : notre église de la rue Espinasse est encore sous scellés depuis les expulsions de 1903, des ouvrages du Père Lagrange sont interdits dans les séminaires et au milieu de ces évènements difficiles, notre Province de Toulouse a aussi vécu une belle page d’histoire puisque c’est à ce moment, le jeudi 10 octobre 1912 … c’était hier ! – qu’a eu lieu dans la cathédrale Saint-Étienne, l’ordination épiscopale du fr. Dominique Carrérot.  C’est à propos de cette belle figure que je voudrais dire quelques mots.

Mgr Carrérot a été un ouvrier de la première heure : né à Pamiers en 1863, il entre à 14 ans à l’école apostolique que nos frères tenaient à Mazères. Là, comme tant d’autres jeunes garçons, sa ferveur va être habilement cultivée pour qu’il porte un beau fruit de grâce.

En 1880 il rentre au noviciat à Saint-Maximin mais les lois antireligieuses entraînent l’exil de la communauté et c’est à Salamanque qu’il va suivre toutes ses études jusqu’à l’ordination presbytérale.

Sitôt l’ordination reçue, il est envoyé au Brésil où il participe à la fondation de la troisième maison de la mission, à Porto Nacional. Dès son arrivée au Brésil il aura donc connu la vie la plus difficile : au cœur de la brousse et dans une communauté en formation.

En 1900, il quitte Porto Nacional pour aller encore plus avant dans les terres et rejoindre le père Gil Villanova à Conceição do Araguaya, l’embryon de ville qu’il a fondée en vue de l’évangélisation des Indiens. Fr. Dominique sera le compagnon puis le successeur de Frai Gil. Il va voir mourir tour à tour les trois frères qui l’avaient devancé à Conceição do-Araguaya. Aucun d’ailleurs ne mourra dans son lit, puisqu’ils seront emportés par les fièvres ou les eaux du Tocantins lors de tournées apostoliques.

En 1911, fr. Dominique est élu Délégué au chapitre provincial. Il quitte donc les rives de l’Araguaia, traverse la moitié du Brésil seul en pleine saison des pluies et rejoint la France qu’il n’a pas revue depuis 15 ans.

C’est là qu’il aura la surprise d’apprendre sa nomination comme premier prélat de Conceição. Son ordination épiscopale faisait de lui l’évêque d’un diocèse grand comme la France et pourvu en tout et pour tout de quatre prêtres (l’évêque y compris), tous Dominicains.

Au moment où les fêtes de son sacre battaient leur plein et où le Père Tapie, notre provincial, promenait fièrement « son » évêque dans une tournée de conférences, fr. Dominique ne pensait qu’à rentrer dans son couvent pour y reprendre la tâche apostolique avec encore plus de ferveur. Dans son discours après l’ordination, il mentionnera avec beaucoup de chaleur ses compagnons « encore à la peine, travaillant avec modestie et silence et qui ne se doutent guère de ce qui se passe [alors à Toulouse] « , ce qui est vrai puisque les nouvelles mettent environ trois mois à arriver à Concéição où on n’apprendra la nomination qu’un mois après son sacre !

De retour au Brésil, Mgr Carrérot continuera à travailler à l’évangélisation des Indiens et des autres habitants de son immense diocèse. En 1920, il quitte Conceição pour devenir le premier évêque de Porto Nacional où il poursuivra la même activité jusqu’à sa mort des suites d’une insolation lors d’une randonnée apostolique en 1933.

Le Père Audrin qui a passé de nombreuses années à ses côtés le décrivait par deux qualités : humilité et volonté.

Mgr Carrérot était humble, toujours prêt à obéir et à servir chacun, surtout les plus petits. Devenu évêque, il continuera simplement à suivre la vie des frères dans le couvent dominicain. Humble aussi parce qu’il se défiait de lui-même et était toujours insatisfait de ses œuvres.

Mais il a aussi été plein d’énergie et de volonté quand il le fallait, notamment, pour entreprendre ses nombreuses tournées apostoliques dans la brousse. Comme Notre Père S. Dominique, il savait aussi demeurer ferme dans les décisions qu’il prenait après un long temps de discernement.

Avec Mgr Carrérot, nous revivons les plus belles pages de l’âge apostolique quand nous le voyions accomplir par barque ou à dos de cheval de longues tournées pour visiter toutes les communautés chrétiennes de ses immenses diocèses, endurant pluie, chaleur, maladie, et toutes sortes de privations.

Que son souvenir et son exemple nous stimule encore ! Et confions à son intercession les diocèses de Conceição et Porto Nacional et leurs pasteurs.

Photo tiré du livre de R. Tournier, o.p., Plages lointaines de l’Araguaya, Missions dominicaines, 1934.

23 octobre 2022

La Prière, un cœur à cœur avec Dieu

Ainsi que le publicain dans l’Évangile de ce dimanche, « dans ses écrits, le père Lagrange nous dévoile sa relation avec Dieu dans la prière souvent à la suite des enseignements reçus au cours de retraites spirituelles. C’est à juste titre que le cardinal Carlo Maria Martini, jésuite, archevêque de Milan, parlait de « la prière de feu » du fondateur de l’École biblique de Jérusalem qui avait marqué les débuts de ses études d’exégèse. Le Journal laisse transparaître ce cœur à cœur avec Dieu qui fut la racine, le moteur et le but de la recherche biblique du « nouveau saint Jérôme » comme aiment l’appeler les biblistes et théologiens qui voient en lui un « docteur » que l’Église écoute et vénère. » (Journal spirituel du P. Lagrange, Avant-propos Manuel Rivero, o.p., Cerf, 2014)

« Je suis dans les choses spirituelles comme un pauvre idiot qui vient chaque jour présenter son écuelle pour avoir sa soupe : je dois tendre à Dieu mon écuelle avec confiance. La confiance ! Elle renferme toutes les qualités de la prière ; c’est elle surtout que Jésus nous recommande dans l’Évangile. C’est de confiance qu’on manque le plus parce qu’on ne sent pas toujours l’effet sensible de la prière. Et encore, quand prie-t-on avec courage, sans en sentir l’effet ! La fin de la prière vient mieux que le commencement, dit l’Esprit Saint. Il faut envisager avec courage les commencements de la prière, qui souvent ne sont pas sans amertume. L’aridité vient, ou de la fatigue, il n’y a qu’à se résigner ; ou de la tiédeur, il faut prier, crier, supplier ; ou d’une épreuve de la bonté divine, il faut en rendre grâce, et se rappeler toujours que la prière est invincible, que la prière est la voie royale du salut et le plus sûr moyen de glorifier Dieu comme Dieu. » M.-J. Lagrange, Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 7.)

22 octobre 2022

Bienheureuse Vierge Marie. Magnificat !

« La communication de Marie avec Dieu est le secret du Roi qu’il garde pour Lui seul.

Nous devons cependant penser qu’il en est d’elle comme de Jésus : au seuil de la vie divine du Sauveur, même dans son âme humaine, nous nous tenons prosternés en silence. Mais quand il a parlé, puisque ce fut toujours dans l’intérêt de nos âmes, nous écoutons sa voix, nous essayons de la comprendre. De même pour Marie dans son rang d’associée à l’œuvre de son Fils.

Ses paroles, celle du Magnificat surtout, sont comme une aurore de l’Évangile. Elles nous laissent apercevoir ce que fut la préparation dirigée par l’Esprit Saint en vue d’elle-même, et aussi des bons Israélites qui devaient suivre le Sauveur.

Trop souvent notre attention se détourne de ces âmes d’élite, parce que nos informations sont courtes. Ce qui nous émeut, c’est de voir le peuple d’Israël, le peuple de Dieu, sous la pression de ses chefs et dans son ensemble, méconnaître le Sauveur, le Messie qui lui avait été envoyé. Nous cherchons les causes de ce résultat lamentable d’une pédagogie que nous confessons divine. Elles ne peuvent être que dans l’aveuglement et l’obstination du peuple. Mais alors Dieu n’avait donc pas pris les bons moyens ? Sa révélation contenue dans l’Écriture n’était donc pas assez claire ? Il ne s’est donc trouvé personne pour justifier Dieu au chétif tribunal des humains ?

Assurément si, puisque son œuvre s’est faite. Mais elle ne s’est pas faite en dehors d’Israël. Le peuple chrétien est, d’après saint Paul, le véritable dépositaire des promesses faites à Abraham dans la personne de son fils, Isaac, figure de l’héritier de la promesse, le Christ et ceux de ses frères qui ont cru en Lui. Les premiers furent les apôtres, tous israélites, même saint Paul. Ce sont eux qui ont reçu cette lumière et qui l’ont transmise, qui ont été embrasés de cette charité pour tous les hommes et qui l’ont communiquée ? Au-dessus d’eux, avant eux, unie à Jésus, Marie est non le type, mais la vraie mère de ces âmes saintes, de cette élite exquise, que la révélation et la grâce avaient préparée, à laquelle il fut donné de la comprendre et de la suivre par une volonté droite et une fidélité inaltérée. C’est en Marie, à Nazareth, dans ces journées qui n’étaient remplies de rien, que cette harmonie s’était réalisée, que cette grande aurore avait brillé. » (Marie-Joseph Lagrange. L’Évangile en Église, Marie à Nazareth, Cerf, 1990, pp. 150-151.)

Photo : Franz Anton Maulbertsch, Visitation of Virgin Mary (detail), Cathedral Vác, Hungary, 1771-1772

 

18 octobre 2022

Saint Luc (Evangéliste)

 

Dès le commencement ! Quel témoin a connu le commencement de l’évangile dont Jésus Christ était le sujet ? Une seule personne, Marie sa mère, dont Dieu a voulu avoir le consentement, avant de réaliser l’œuvre de la bonne nouvelle. Et lorsque Luc souligne, par deux fois (Lc 2, 19 ; 2, 51), que Marie conservait dans son cœur tout cela, paroles et faits, selon le sens compréhensif du terme hébreu, n’est-ce pas une manière délicate de nous dire qu’il reproduit les confidences de Marie, peut-être déjà écrites par un très ancien ami parmi les âmes choisies de Nazareth ou de l’entourage de Zacharie ?

C’est donc à saint Luc et par lui à Marie, que les âmes dominicaines doivent les cinq mystères joyeux qu’elles s’attachent à contempler. Une fois entrées en communication avec cet écrivain si éclairé sur ces mystères elles reconnaîtront dans le troisième évangile les mêmes touches émues et délicates qui attendrissent le cœur et le remplissent d’une immense espérance dans son Sauveur. (Marie-Joseph Lagrange, o.p., L’Écriture en Église, « Comment lire la sainte Écriture ? », « Lectio Divina » 142, Cerf, 1990, p. 195.)

 

13 octobre 2022

Le père Lagrange, un des pionniers de l’exégèse historico-critique.

Dies diem docet (Psaume 19, 2).

En 1991, Jean-Georges Heintz*, dans sa « Chronique d’Ancien Testament. Ancien Orient et Israël antique : des textes sémitiques aux traditions prophétiques en période d’exil », rappelait que « les perspectives ouvertes par les publications récentes nous avaient incité à souhaiter une approche plus systématique, en même temps que plus originale, de la cohérence narrative des cycles historiques, ainsi que de la densité thématique et de la signification métaphorique des oracles prophétiques ».

Et, en conclusion de son important article, J.-G. Heintz notait : « malgré la richesse des plus récentes perspectives de recherche ici évoquées, le meilleur « sommaire » s’en trouve sans doute déjà dans « le discours prononcé le 15 novembre 1980 pour l’inauguration de l’École biblique de Jérusalem », par le P. Lagrange.

Voici un extrait de son exorde, donné dans le cadre de l’ancien abattoir – réhabilité ! – de la ville, la première salle de cours de la célèbre institution qui a su heureusement conserver l’esprit de cette « kénose » primitive :

« Il y a en histoire, en philologie, en archéologie, en morale, des problèmes qui ne seront pas de longtemps résolus, et qui nous touchent de si près que leur intérêt ne faiblit pas. Dieu a donné dans la Bible un travail interminable à l’intelligence humaine et, remarquez-le bien, il lui a ouvert un champ indéfini de progrès dans la vérité ». (cf. aussi M.-J. Lagrange, L’Écriture en Église, in coll. « Lectio Divina », Vol. 142. Paris, Éd. du Cerf, 1990, p. 104.)

Dans cette perspective, … Dies diem docet ! (Jean-Georges Heintz)

(Enseignement au jour le jour.)

* Jean-Georges Heintz (1939-), docteur ès sciences religieuses, professeur émérite d’Ancien Testament à l’université de Strasbourg.

11 octobre 2022

Saint Jean XXIII, le 11 octobre 1962, Jean XXIII ouvrait solennellement le concile Vatican II

Le P. Lagrange, précurseur du concile Vatican II

Une façon de saisir l’actualité du P. Lagrange aujourd’hui est de relire le Message du dernier synode sur la Parole de Dieu, qui s’est tenu à Rome du 5 au 26 octobre 2008. À titre d’exemple, on peut faire ressortir deux points particulièrement importants de cet examen. D’abord, on observe que le synode est animé par un souci constant d’éviter l’écueil du fondamentalisme. Il propose un voyage spirituel qui, partant de l’éternité et de l’infinité de Dieu, nous conduit « jusqu’à nos maisons et le long des rues de nos cités » ; avant tout, il réaffirme clairement que Jésus Christ est la Parole de Dieu faite chair, homme et histoire (I, 3). Le P. Lagrange ne disait pas autre chose.

En fait, l’orientation préconisée en exégèse par le P. Lagrange n’a été avalisée qu’après sa mort par le pape Pie XII, dans l’encyclique Divino afflante Spiritu, en 1943. Elle fut plus tard confirmée par le concile Vatican II, et le synode ne fait que reprendre cet enseignement. La Bible est chair, dit le synode, « elle exprime dans des langues particulières, dans des formes littéraires et historiques, dans des conceptions liées à une culture antique, elle conserve la mémoire d’événements souvent tragiques. […] Elle nécessite une analyse historique et littéraire, qui s’actualise à travers les diverses méthodes et approches offertes par l’exégèse biblique » (II, 5).

De plus, le synode encourage ouvertement une forme de dialogue œcuménique dont le P. Lagrange, avec ses limites, qui étaient réelles, fut à sa manière un précurseur. Ce deuxième point est lié au premier dans la mesure où il s’agit de regrouper toutes les forces s’opposant à un fondamentalisme qui nie l’incarnation. Confronté à la réalité d’un monde sécularisé, le synode rappelle que « dans la maison de la Parole, nous rencontrons aussi les frères et sœurs des autres Églises et communautés ecclésiales », et il conclut : « Ce lien doit toujours être renforcé par […] le dialogue exégétique, l’étude et la confrontation des différentes interprétations des Écritures » (III, 10).

(Un extrait de la recension de Pierre Gendron de l’ouvrage de Bernard Montagnes OP, Marie-Joseph Lagrange, Une biographie critique, Cerf, 2004. Source : Spiritualité 2000. Livre du mois : Décembre 2008. Responsable de la chronique : Jacques Sylvestre OP.)

Voir le texte entier https://www.mj-lagrange.org/?p=12312

Témoignage du P. Jacques Loew, dominicain

Étudiant Vatican II dans ses textes, j’ai été à nouveau saisi, ressaisi par la hauteur, et la largeur, et la profondeur du Mystère de notre foi, selon les mots de saint Paul. Nous avons là le pain quotidien de notre joie. Et j’ai parfois envie, sur chacune des colonnes de l’édifice de Vatican II, d’écrire le nom de ceux qui ont préparé ces grandeurs : un père Lagrange pour la Bible, un chanoine Cardijn pour l’apostolat, les grands liturgistes allemands et français des années 1930-1960.

(Jacques Loew. Le bonheur d’être homme. Entretiens avec Dominique Xardel, coll. « Les entretiens », éd. Centurion, 1988, Paris, p. 174.)

 

10 octobre 2022 – Jour-anniversaire

Comme chaque mois, le 10, https://www.mj-lagrange.org, la messe est célébrée pour le père Lagrange et pour ceux qui se confient à son intercession. Nous sommes nombreux à intervenir sur le site Facebook ce jour-là, (500 en juillet, 1050 en septembre) mais nous sommes peu nombreux à nous manifester pour préciser, par écrit, à manuel.rivero@free.fr nos demandes d’intentions ou de grâces reçues. Or cela est très important pour conforter le dossier du Postulateur Fr. Massimo Mancini o.p. à Rome.

Lors des « Journées Lagrange » à Rome, les 23 et 24 octobre 2015, la figure du P. Lagrange, ce pionnier de l’interprétation de la Bible, était considérée dans l’histoire comme un modèle dans l’harmonie de la foi et de la raison, de la culture et de la foi. Au terme de cette journée, lors de son homélie, Mgr Louis Bruguès, o.p., bibliothécaire et archiviste du Vatican, a relié la figure du père Lagrange à l’aventure de la foi et de la présence de Dieu célébrée dans la messe. Ce moment n’est-il pas le plus favorable pour nous exprimer ?

8 octobre 2022

La foi de Marie demeure un modèle et une référence pour le P. Marie-Joseph Lagrange o.p. :

« Si Jésus sur la Croix a dû subir l’abandon de son Père, pourquoi l’âme de Marie n’aurait-elle pas connu des épreuves mystérieuses qui la plongeaient dans une sorte d’obscurité ? Peut-être ? Cependant Luc n’aurait pas écrit cette phrase, si l’on n’en avait recueilli l’expression de la bouche de Marie. Au moment où la Mère de Jésus rappelait aux premiers chrétiens les souvenirs qu’elle avait conservés dans son cœur, elle pouvait bien dire que dans ces premiers et heureux temps elle n’avait pas compris tout ce que comportaient la nature et la mission de son Fils. Pourquoi avait-il dû se séparer d’eux pour être chez son Père ? Première douleur imposée à la Mère, qui en présageait bien d’autres. » Un extrait du Journal spirituel mentionné dans : Le père Lagrange et la Vierge Marie. Méditations des mystères du Rosaire, Cerf, 2012, p. 38.)

Marie, Reine de la Paix, priez pour nous !

7 octobre 2022

Fête de la Bienheureuse Vierge Marie du Rosaire

Dans une conférence donnée aux laïcs dominicains et publiée à Saint-Maximin, le frère Lagrange définissait ainsi la prière du Rosaire la reliant à la lecture de la Bible dans une dialectique féconde, un renvoi permanent de la prière du Rosaire à la Bible et de l’étude de la Bible ou de la lectio divina à la prière du Rosaire :

« Le révélateur de la foi, la source de la grâce, c’est Jésus, mais on a recours pour s’unir à lui à l’intercession de sa très Sainte Mère. Vous entendez bien que c’est là tout le Rosaire. Le Rosaire est un résumé de l’Évangile, nous orientant vers la fin que nous font espérer l’Incarnation et la Passion de Notre-Seigneur Jésus Christ. (…) Mais alors le Rosaire supplée à la lecture de l’Écriture, et la rend inutile ? Disons plutôt qu’il la fait désirer, qu’il nous la rend même nécessaire, si nous voulons réellement avoir devant les yeux les mystères que nous devons méditer. » (M.-J. LAGRANGE, « Comment lire la sainte Écriture », « La Vie dominicaine », n°2, Saint-Maximin, 1936.)

6 octobre 2022

La vertu d’humilité du P. Lagrange dans son Journal spirituel

« Une humilité spéculative n’est pas difficile, les lumières de la raison suffisent. Dieu nous a donné l’être, l’intelligence, la volonté, la santé. Nous savons que nous n’avons pas à nous en glorifier. La vanité du cent-garde est puérile. Qui n’a vu maints enfants pleurer d’être petits ? Dieu nous a donné ces choses et nous les conserve, d’une façon positive, il entretient le flambeau de l’intelligence. On le sait, et cette humilité spéculative est facile, les philosophes y arrivent : misère de l’homme. L’humilité de N. S. est autre, c’est un acte de la vie. […] L’humble de cœur désire être aux yeux des hommes ce qu’il est aux yeux de Dieu. […] Il faut épouser l’humilité comme saint François a épousé la pauvreté, par un vrai mariage mystique. » Journal spirituel, 21 février 1879, Cerf, 2014, p. 15.

« Humilité, esprit de prière, s’humilier en tout ; la vraie humilité est magnanime, elle s’appuie sur l’amour de Dieu pour nous ; devenir enfant. » Journal spirituel, 16 mars 1880, Cerf, 2014, p.60.

« Humilité, douceur, charité, prière continuelle : se laisser guider par Marie. » Journal spirituel, 1er juin 1880, Cerf, 2014, p. 71.

« Ô mon Jésus, donnez-moi pour ceinture la chasteté angélique, pour souliers une humilité profonde, pour manteau nuptial la charité, pour couronne la dévotion à votre Mère, pour dot la vraie pauvreté et votre Croix. Ô Jésus, mon fiancé ! Mon grand Dieu, vous avez voulu me faire miséricorde ! Donnez-moi aussi, car je n’ai rien, la prière continuelle pour robe. » Journal spirituel, 26 septembre 1880, Cerf, 2014, p. 89.

« Ô combien grande devrait être mon humilité ! Et ma reconnaissance envers Jésus qui m’a pris du sein de la dégradation la plus complète pour me régénérer dans son sang et me faire vivre d’une vie nouvelle. » Journal spirituel, 19 avril 1882, Pâques, Cerf, 2014, p. 89.

« Il faut constater en moi ce défaut des vieillards : l’irascibilité. On se croit intelligent, et la comparaison poursuivie durant ma longue vie enracine ce contentement de soi. On a incontestablement acquis de l’expérience. Alors on juge avec dureté : c’est idiot, quel crétin ! Défaut où les jeunes ne tombent pas de la même manière : leur présomption est moins obstinée.

Il faut lutter, se montrer doux, et surtout l’être. D’autre part la vie, en effet, enseigne l’indulgence ; surtout une vie comme la mienne.

Que serais-je, ô mon Jésus, si vous n’aviez pas pris le soin de m’humilier ! » Journal spirituel, 15 juillet 1922, Cerf, 2014, p. 419.

1er octobre 2022

Belle fête de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus en ce 1er octobre 2022.
Le père Marie-Joseph Lagrange (+1938) et sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face (+1897)
Fr. Manuel Rivero O.P., vice-postulateur de la cause de béatification du père Marie-Joseph Lagrange, dominicain.
Dans son Journal spirituel , le père Lagrange cite à deux reprises sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. La première fois, le 30 septembre 1924, alors que Thérèse vient d’être béatifiée par le pape Pie XI l’année précédente, pour lui confier une intention de prière : « Bienheureuse Thérèse de l’Enfant-Jésus, je vous recommande instamment cette bonne Madame Cauvin… Vous voulez passer votre ciel à faire du bien : assistez cette pauvre femme, si abandonnée… ».
L’année suivante, le 16 octobre 1925, Thérèse a été canonisée peu avant par le même pape Pie XI, le père Lagrange écrit : « Lu la vie de sainte Thérèse de Lisieux par elle-même. Première impression étrange. Elle parle tant d’elle, de ses goûts, des signes qu’elle a demandés et obtenus, de sa sainteté… avec tant de fleurettes, de jouets. On se sent si loin de saint Augustin ou de sainte Thérèse d’Avila… Mais le sens de tout cela est ama et fac quod vis. Dans l’immense clarté d’amour divin où elle vivait, elle se voyait si peu de chose qu’elle pouvait parler d’elle sans le moindre amour-propre. Admirable leçon qu’elle donne plus que tout autre saint, avec un abandon d’enfant gâtée… ».
Il faudrait évoquer aussi les commentaires du frère dominicain Ceslas Lavergne à la synopse des quatre évangiles qui date de 1927, dont la traduction du grec relève du père Lagrange. Les trois premiers évangiles, Matthieu, Marc et Luc, sont appelés synoptiques car leurs ressemblances facilitent leur présentation en colonnes parallèles qu’il est possible de regarder « d’un coup d’œil », ensemble. Le père Lagrange avait composé une synopse en langue grecque des trois évangiles synoptiques plus celui de saint Jean. Son disciple et ami, le père C. Lavergne a publié la traduction française de la synopse grecque des quatre évangiles du père Lagrange en reprenant les traductions et certains commentaires des quatre évangiles du fondateur de l’École biblique de Jérusalem.
La synopse du père Lagrange a été la première à placer saint Luc suivi de saint Marc et de saint Matthieu, en raison de la valeur historique de saint Luc et de sa juste chronologie. Dans l’avertissement qui ouvre son ouvrage, le père C. Lavergne explique la méthode utilisée : « Enfin, mon cher maître, m’ayant encouragé à appuyer discrètement sur la note de piété, j’ai eu recours à sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Dans un temps où l’Évangile n’occupe pas la place qui lui est due dans les lectures et les méditations des chrétiens, n’est-il pas admirable que cette chère petite sainte, qui paraît si uniquement envahie du pur amour de Dieu, se soit si visiblement complue à cette divine lecture. C’est elle-même qui nous l’a dit : ‘ Puisque Jésus est remonté au ciel, je ne puis le suivre qu’aux traces qu’il a laissées. Ah ! Que ces traces sont lumineuses ! Qu’elles sont divinement embaumées ! Je n’ai qu’à jeter les yeux sur le saint Évangile : aussitôt je respire le parfum de la vie de Jésus et je sais de quel côté courir ’ . ‘Et elle ajoutait : ‘C’est par-dessus tout l’Évangile qui m’entretient pendant mes oraisons ; là je puise tout ce qui est nécessaire à ma pauvre petite âme. J’y découvre toujours de nouvelles lumières, des sens cachés et mystérieux’. »
C’est ainsi que sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus qui ne disposait pas d’une synopse évangélique copiait dans sa cellule du carmel de Lisieux les passages concordants des évangiles et de la Bible remarquant les ressemblances et les divergences des traductions. Elle aurait aimé pouvoir étudier le grec et l’hébreu pour lire les Écritures dans leur langue originale.
Au terme et sommet de sa vie, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus avait écrit : « Pour moi, je ne trouve plus rien dans les livres, si ce n’est dans l’Évangile. Ce livre-là me suffit ». Qu’il est beau de retrouver la même expérience mystique fondée sur la révélation évangélique chez le père Lagrange, bibliste, et chez la carmélite, docteur de l’Église. Le père Ceslas Lavergne enrichit la présentation de l’Ascension de Jésus au Ciel en citant sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus : « C’est toi, qui remontant vers l’inaccessible lumière, restes caché dans notre vallée de larmes sous l’apparence d’une blanche hostie, et cela pour me nourrir de ta propre substance, Ô Jésus ! laisse-moi te dire que ton amour va jusqu’à la folie … ». Le cardinal Joseph Ratzinger, le 21 septembre 1993, dans le document issu de la Commission biblique pontificale sur l’Interprétation de la Bible dans l’Église, avant de devenir pape en 2005, a mis en valeur l’apport des exégètes à l’interprétation de la Bible. Il a cité le père Lagrange : « Bien que leurs travaux n’aient pas toujours obtenu les encouragements qu’on leur donne maintenant, les exégètes qui mettent leur savoir au service de l’Église se trouvent situés dans une riche tradition, qui s’étend depuis les premiers siècles, avec Origène et Jérôme, jusqu’aux temps plus récents, avec le Père Lagrange et d’autres, et se prolonge jusqu’à nos jours. En particulier, la recherche du sens littéral de l’Écriture, sur lequel on insiste tant désormais, requiert les efforts conjugués de ceux qui ont des compétences en matière de langues anciennes, d’histoire et de culture, de critique textuelle et d’analyse des formes littéraires, et qui savent utiliser les méthodes de la critique scientifique. En plus de cette attention au texte dans son contexte historique originel, l’Église compte sur des exégètes animés par le même Esprit qui a inspiré l’Écriture, pour assurer « qu’un aussi grand nombre que possible de serviteurs de la Parole de Dieu soient en mesure de procurer effectivement au peuple de Dieu l’aliment des Écritures » (Divino Afflante Spiritu, 24 ; 53-55 ; EB 551,567 ; Dei Verbum. 23 ; Paul VI, Sedula Cura 19711). Un sujet de satisfaction est fourni à notre époque, par le nombre croissant de femmes exégètes qui apportent, plus d’une fois, dans l’interprétation de l’Écriture, des vues pénétrantes nouvelles et remettent en lumière des aspects qui étaient tombés dans l’oubli. »
Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus n’a pas été une exégète professionnelle et scientifique. Néanmoins elle a apporté à l’interprétation des évangiles son expérience de Dieu nourrie de la méditation de la Bible. Le pape Benoît XVI dans l’Exhortation apostolique post-synodale Verbum Domini, publiée en 2010, a mis en lumière la contribution des saints à l’interprétation de l’Écriture. Il n’a pas hésité à souligner le rôle de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, « qui découvre l’Amour comme sa vocation personnelle en scrutant les Écritures, en particulier les chapitres 12 et 13 de la première Lettre aux Corinthiens ; c’est la même sainte qui décrit la fascination qu’exercent les Écritures : ‘ Je n’ai qu’à jeter les yeux sur le saint Évangile, aussitôt je respire les parfums de la vie de Jésus et je sais de quel côté courir (Histoire d’une âme, Ms C, f.35 verso)’ . » (n° 48).
Saint-Denis (La Réunion), le 8 septembre 2021, en la fête de la Nativité de la Vierge Marie.
Neuvaine 2021 à sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face (+30 septembre 1897)
Premier jour
« Je veux passer mon Ciel à faire du bien sur la terre. Après ma mort, je ferai tomber une pluie de roses. » (sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus)
Partie vers le Seigneur, sainte Thérèse ne disparaît pas. Son intercession auprès du seul Sauveur Jésus-Christ, nous attire une pluie de grâces symbolisées par les pétales des roses. Le chrétien, disciple de Jésus, ne peut pas dire « c’est fini » ou « c’est trop tard ». Dans la lumière du Christ ressuscité, ce n’est jamais fini et ce n’est jamais trop tard. Demandons au Seigneur par l’intercession de sainte Thérèse la grâce de l’espérance.
Deuxième jour
« J’allais derrière mon lit dans un espace vide qui s’y trouvait et qu’il m’était facile de fermer avec le rideau … et, là, je pensais. Je comprends maintenant que je faisais oraison sans le savoir et que déjà le bon Dieu m’instruisait en secret. » ; « Quelquefois j’essayais de pêcher avec ma petite ligne, mais je préférais aller m’asseoir seule sur l’herbe fleurie : alors, mes pensées étaient bien profondes et, sans savoir ce que c’était de méditer, mon âme se plongeait dans une réelle oraison. (…) La terre me semblait un lieu d’exil, et je rêvais le Ciel. » (sainte Thérèse)
L’oraison est le cœur à cœur avec Dieu. En silence, nous écoutons Dieu qui parle à notre âme. L’oraison est un mot d’origine latine qui veut dire « bouche ». Faire oraison équivaut à partager le souffle de Dieu, le bouche à bouche avec Dieu où nous recevons l’Esprit Saint. Véritable conversation avec Dieu, la prière représente une promenade avec Dieu dans le Paradis.
Demandons au Seigneur par l’intercession de sainte Thérèse la grâce de l’oraison qui nous unit à Dieu.
Troisième jour
« Jésus a mis devant mes yeux le livre de la nature et j’ai compris que toutes les fleurs qu’Il a créées sont belles, que l’éclat de la rose et la blancheur du lys n’enlèvent pas le parfum de la petite violette ou la simplicité ravissante de la pâquerette … J’ai compris que si toutes les petites fleurs voulaient être des roses, la nature perdrait sa parure printanière, les champs ne seraient plus émaillés de fleurettes … Ainsi en est-il dans le monde des âmes qui est le jardin de Jésus. » (Sainte Thérèse)
« Chacun va à Dieu par un chemin virginal », a écrit le poète espagnol Léon Felipe (+1968). Dieu aime l’unité mais pas l’uniformité.
Demandons au Seigneur par l’intercession de sainte Thérèse la grâce de respecter et d’apprécier l’altérité, la différence des personnalités et des chemins pour arriver à Dieu.
Quatrième jour
« En sortant du confessionnal, j’étais si contente et si légère que jamais je n’avais senti autant de joie dans mon âme. Depuis je retournai me confesser à toutes les grandes fêtes et c’était une vraie fête pour moi à chaque fois que j’y allais. » (Première confession de sainte Thérèse à sept ans)
Demandons au Seigneur, par l’intercession de sainte Thérèse la grâce de vivre le sacrement de la réconciliation.
Cinquième jour
Femme de miséricorde, sainte Thérèse intercède pour Pranzini, condamné à mort et exécuté le 31 août 1887. Juste avant sa mort, Pranzini saisit le crucifix présenté par l’aumônier. Thérèse y vit le fruit de sa prière. Elle appela ce condamné « son premier enfant ». Enfant de sa maternité spirituelle.
Demandons au Seigneur, par l’intercession de sainte Thérèse, la grâce de la miséricorde et de la prière pour les pécheurs.
Sixième jour
Elle avait déclaré au chanoine Delatroëtte qui lui demandait « Pourquoi êtes-vous venue au Carmel ? » : « Je suis venue pour sauver les âmes et surtout afin de prier pour les prêtres ».
Demandons au Seigneur, par l’intercession de sainte Thérèse, la grâce de vivre la miséricorde envers les prêtres et de prier pour eux.
Septième jour
En apprenant que son père est hospitalisé en psychiatrie, sainte Thérèse s’est exclamée : « Notre grande richesse ». Elle sait que cette maladie terrible demandera à la famille de s’unir davantage au Christ dans sa Passion. Il leur faudra davantage d’amour. Mais le Seigneur ne laisse pas les malades sans sa grâce.
Demandons au Seigneur, par l’intercession de sainte Thérèse, de discerner la présence du Christ Jésus dans les malades et de leur témoigner de notre foi et de notre solidarité dans la souffrance.
Huitième jour
Poème envoyé par sainte Thérèse à l’abbé Roulland parti missionnaire en Chine :
« Vivre d’amour, ce n’est pas sur la terre
Fixer sa tente au sommet du Thabor.
Avec Jésus, c’est gravir le Calvaire,
C’est regarder la Croix comme un trésor !
Au Ciel, je dois vivre de jouissance
Alors l’épreuve aura fui pour toujours
Mais exilée je veux dans la souffrance
Vivre d’amour. »
« À lui de traverser la terre,
De prêcher le nom de Jésus.
À moi, dans l’ombre et le mystère,
De pratiquer d’humbles vertus.
La souffrance, je la réclame,
J’aime et je désire la Croix …
Pour aider à sauver une âme
Je voudrais mourir mille fois. »
Poème envoyé le 16 juillet 1896, en la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel.
Demandons au Seigneur, par l’intercession de sainte Thérèse, copatronne des missions avec saint François-Xavier, la grâce de devenir disciples-missionnaires de Jésus ressuscité.
Neuvième jour
Malade, Thérèse, à l’infirmerie, chante les miséricordes du Seigneur à son égard. Elle avoue à mère Agnès : « Dites bien, ma Mère, que si j’avais commis tous les crimes possibles, j’aurais toujours la même confiance : je sens que toute cette multitude d’offenses serait comme une goutte d’eau jetée dans un brasier ardent. »
Demandons au Seigneur, par l’intercession de sainte Thérèse, la grâce d’une bonne mort dans la foi en sa miséricorde.

Écho de notre page Facebook : septembre 2022

25 septembre 2022

La parabole de Lazare et du mauvais riche (Luc 16, 19-31).

Extrait du commentaire par le P. Lagrange

Parabole ou histoire ? Quelques anciens Pères ont vu là le récit d’un fait arrivé, à cause du nom de Lazare : ordinairement les paraboles ne comportent pas de noms propres. (…)

Le pauvre mourut enfin, et fut emporté par les anges dans le sein d’Abraham, une place choisie auprès de l’ami de Dieu. Le riche fut enseveli, sûrement avec honneur, mais ce fut le dernier fruit qu’il tira de ses richesses. Il va sans dire qu’au séjour des morts il était dans les tortures. Au-dessus de cette zone les Juifs plaçaient une région lumineuse, d’où sortait une source claire. Le riche levant les yeux y vit Abraham, et Lazare dans son sein : « Père Abraham, aie pitié de moi, dis à Lazare qu’il trempe le bout de son doigt dans l’eau et qu’il vienne rafraîchir ma langue, car je souffre dans cette flamme ». Abraham le nomme encore son enfant, mais il ne peut rien pour lui. Le changement des conditions est irrévocable, nul n’est autorisé à franchir l’abîme qui sépare les justes et les méchants. Alors le riche, moins en damné ne respirant que la haine, qu’en homme qui comprend désormais ce qu’est lla sa souffrance et ce qu’exige la justice de Dieu, tel enfin que le comportait l’aménagement de la parabole, prends pitié de ses cinq frères, vivant comme il avait vécu, menacés des mêmes châtiments. Si Lazare ne peut descendre auprès de lui, qu’il se rende au moins sur la terre ; ses frères, prévenus de ce qui se passe dans l’autre monde, ne manqueront pas de se convertir. « Non, père Abraham, si quelqu’un d’entre les morts va vers eux, ils feront pénitence. » Abraham ne le pense pas : rien ne ferait fléchir leur volonté obstinée : « S’ils n’écoutent pas Moïse et les Prophètes, même si quelqu’un ressuscitait d’entre les morts ils ne seront pas persuadés ».

Ce motif étonne. Qui se rangerait à une parole venue d’outre-tombe ? Pourtant on voit dans un des chefs d’œuvre de l’esprit humain, Hamlet s’entretenir avec l’ombre de son père et mettre ensuite en doute sa propre immortalité. L’impression produite par une apparition serait sans doute plus vive, plus troublante que l’enseignement de la foi. Mais cet ébranlement de l’imagination passerait sans pénétrer l’âme aussi sûrement que la méditation répétée de la parabole de Dieu. D’ailleurs les Juifs ne soutaient pas du monde à venir, ni de la justice qui y est exercée par Dieu. L’objet de la parabole était le devoir des riches d’assister les pauvres. La vision d’un pauvre méprisé, venant rappeler aux riches leur devoir, risquait d’être raillée par de gais compagnons comme un scrupule chimérique. Enfin, de toute façon, l’homme est maître de ses actes ; si, croyant en la Révélation, il refuse de lui obéir, il ne se laissera pas guider plus docilement par l’apparition d’un mort. Et en effet la Loi et les Prophètes recommandaient la charité, et d’une façon péremptoire.

Ainsi Jésus enseignait en Israël, tantôt avertissant ceux qui voulaient le suivre de la nécessité d’un détachement qu’il savait leur rendre facile, tantôt répondant à la mauvaise humeur des pharisiens. Parfois aussi il prenait à part des disciples qui lui étaient attachés, surtout les Apôtres, pour les instruire de leurs rapports entre eux ou avec Dieu.

Une petite parabole a trait à l’humilité.

Retrouver le texte entier dans L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, éd. Artège, 2017, pp. 415-418.

15 septembre 2022

Témoignage

Homélie prononcée le dimanche 18 novembre 1990 par le père Jean-Luc Vesco, o.p.

Messe du 33ème dimanche du temps ordinaire (Année A) célébrée depuis Bourg-en-Bresse (Ain)

Supplément à la Revue « Jour du Seigneur » n° 45

Proverbes XXXI, 10-13, 19-20, 30-31 ; I Thessaloniciens V, 1-6 ; Matthieu XXV, 14-30

Étrange parabole où il est dit : « à tout homme qui a on donnera encore mais à celui qui n’a pas on retirera même ce qu’il a ». Étrange maître aussi cet homme rude qui moissonne où il n’a pas semé et qui ramasse où il n’a pas répandu. Étrange parabole des talents. Que peut-elle signifier ?

Comme toute parabole, la parabole des talents a une pointe, c’est-à-dire qu’elle met l’accent sur une leçon précise que Jésus veut donner et qu’il nous faut comprendre. L’essentiel, nous dit-on, est de faire fructifier les talents reçus. Il ne faut surtout pas les laisser dormir, il ne faut surtout pas les cacher, il ne faut surtout pas les enfouir. Ce que nous avons reçu doit porter du fruit, la parabole insiste là-dessus. Nous avons tous reçu quelques talents, cinq, deux, un, peu importe le nombre. L’essentiel est de les faire fructifier.

P. Lagrange au Caire

L’actualité nous invite aujourd’hui à évoquer un homme qui sut faire fructifier les talents qu’il avait reçus, d’une manière exceptionnelle. Cet homme c’est le père Marie-Joseph LAGRANGE, dominicain, né ici à Bourg-en-Bresse, baptisé dans cette église et qui fonda il y a juste cent ans l’École biblique et archéologique française de Jérusalem.

Cet homme avait reçu entre autres dons, deux talents principaux : une vive intelligence et un très esprit de foi. Il les mit tous les deux au service de la Bible et il les fit fructifier. Il conçut le projet nouveau pour son époque et quelque peu suspect, d’étudier l’Écriture sainte avec tous les moyens dont on peut disposer.

Il aborda la Bible, l’un des plus vieux livres de l’humanité, comme tout autre livre. Il le passa au crible de la critique, en précisa le temps et la géographie, la langue et la mentalité, la façon de parler et d’écrire l’histoire. Il se pencha sur son berceau, l’Orient dont il entreprit de mieux connaître les habitudes et les façons de vivre si différentes des nôtres. Par l’archéologie, il ressuscita des monuments anciens qui se mirent à parler Bible un travail interminable à l’intelligence humaine et qu’il lui a ouvert un champ indéfini de progrès dans la vérité, LAGRANGE voulait que le savant catholique n’enfouisse pas ses talents mais qu’il acquière autant de compétence que les autres savants pour ne pas être disqualifié sur le plan scientifique.

LAGRANGE sut aussi reconnaître la Bible comme un livre divin. Il y découvrit la manière dont Dieu révèle sa Parole, à un peuple d’abord puis à l’humanité. Il sut lire la Bible en Église, dans la foi. Il croyait fermement que l’homme, la Vérité de Dieu, et comment s’est passée la rencontre des deux, longue histoire d’amour où Dieu découvre l’homme, où l’homme reconnaît son Dieu, de façon progressive, avec des réussites, des échecs et des tâtonnements, comme dans tout amour, avant de parvenir à un sommet, le Christ, qui dit enfin jusqu’où va l’Amour quand il est infini.

LAGRANGE admettait sans hésiter que Dieu a confié à la Bible une communauté vivante, l’Église. Sans cesse mêlée à l’histoire du monde, l’Église a pour fonction d’actualiser la Parole de Dieu et de la confronter à une société en perpétuelle évolution. Elle porte la responsabilité d’un message de salut offert à tous les hommes. LAGRANGE a été accusé de se montrer trop critique, il a été calomnié, réduit au silence, exilé. On lui demanda même un moment d’enfouir son talent. Mais il tint bon, convaincu que la recherche de la vérité ne doit jamais avoir peur de ce qu’elle va découvrir. LAGRANGE n’eut pas peur. Et l’Église aujourd’hui désire en faire un SAINT.

À nous aussi, frères et sœurs, la Parole de Dieu a été confiée, comme un talent, pour qu’elle fructifie. Nous ne serons pas tous exégète ou savant mais nous avons reçu chacun quelques talents et cette faim et soif d’une Parole qui fait vivre. Ne l’enfouissons pas ! Nos contemporains attendent eux aussi, une parole de vérité et de miséricorde, de justice et de paix, de réconfort. À nous de l’étudier, de l’annoncer et de la faire fructifier « dans toutes les nations à commencer par Jérusalem ». Jérusalem où le père LAGRANGE a voulu établir son École. Jérusalem aujourd’hui si meurtrie, où demeure caché depuis bien trop longtemps le message de paix. « Jérusalem, pour l’amour de mes frères et de mes amis, Chrétiens, Musulmans, Juifs, laisse-moi dire paix sur toi. »

15 septembre 2022 – Notre-Dame des Douleurs

Le P. Lagrange en créant l’École biblique de Jérusalem, puis deux ans après une Revue trimestrielle, la célèbre Revue biblique et un peu plus tard une collection de livres : Les Études bibliques, faisait remporter à l’Église la victoire sur le terrain même de la science. « Madame Sainte Marie a donné la victoire à son chevalier. » (P. Lagrange)

Une victoire suppose un combat, un combat, à son tour, des armes. Quelles étaient celles du P. Lagrange ? Un travail assidu, et le Rosaire, diront tous ceux qui l’ont connu, et en réalité, elles ne faisaient qu’un. Cette victoire … ce fut au prix de sa souffrance que le P. Lagrange l’acheta, et bien peu ont communié aussi réellement que lui au Mystère de Notre-Dame des Sept-Douleurs.

(extrait d’un texte du fr. Marie-Réginald Loew, o.p., disciple du père Lagrange, paru dans la Revue du Rosaire, n° 10-11, octobre-novembre 1939.)

Photo : Marie au pied de la Croix (détail by Rogier van der Weyden (c.1457 – c.1460).

14 septembre 2022 – L’entretien de Jésus avec Nicodème

Nicodème signifie « peuple vainqueur ». C’était un pharisien, notable juif, « maître en Israël ». Aujourd’hui Nicodème consulte Jésus de nuit, Jean 3, 1-10. Dans Jean 7, 50 s, il prend discrètement sa défense devant les membres du Sanhédrin et participe à son ensevelissement dans Jean 19, 39. (Dictionnaire des noms propres de la Bible, Cerf, 2002.)

L’Évangile d’aujourd’hui, commenté par le P. Lagrange (Jean 3, 13-17) :

Il suffit à Jésus de faire entrevoir à Nicodème le sort qui attend le Fils de l’homme, c’est-dire le révélateur qu’il est lui-même : il doit être élevé, et l’on pourrait croire que cette élévation le ramène au ciel d’où il est descendu. Mais non, il sera élevé comme le serpent d’airain dans le désert, attaché à un poteau : « et quiconque aura été mordu (par un serpent) et le regardera, conservera la vie (Nb 31, 8) ». Pourvu qu’il mette sa confiance en Dieu qui a voulu opérer sa guérison par ce signe. De même, lorsque le Fils de l’homme aura été élevé de cette manière, ce qu’on devait comprendre du supplice de la croix, ceux qui croiront en lui auront la vie éternelle.

Jésus a donc révélé à Nicodème les étapes encore inconnues de la vie surnaturelle. La naissance par le baptême et l’Esprit, la foi en celui qui est venu d’en haut, révélateur rédempteur, conduisant à la vie auprès de Dieu. Ce n’était là cependant qu’un premier germe jeté dans l’esprit d’un docteur. Puisqu’il était éclairé, de demander de nouvelles explications.

Nicodème se tut. Peut-être l’aurore pointait déjà, et il ne voulait pas être vu. Tout porte à croire que cette nuit fut pour lui le commencement de la lumière.

(L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, pp. 116-117.)

Photo : Jésus avec Nicodème par Crijn Hendricksz Volmarijn (1601, Rotterdam-1645, Rotterdam)

Dominique Ponneau commente le tableau de Crijn Hendricksz Volmarijn.

Le pharisien Nicodème est venu rencontrer Jésus. Il est venu de nuit. Par peur de son entourage, dit-on souvent. Peut-être. N’empêche qu’il est venu voir Jésus. Qu’il est présent à l’obscurité des débuts de son ministère, comme il sera présent…au tombeau… Peut-être vient-il de nuit par désir de lumière en celui qui, à la fin de leur entretien, lui dira : « Celui qui agit dans la vérité vient dans la lumière ». Nicodème vient, de nuit, à la lumière, parce qu’il agit dans la vérité. Il a devant lui, grand ouvert, le livre des Écritures, qu’en docteur d’Israël il scrute avec droiture, exigence, profondeur. Ce livre est tout resplendissant de la lumière qu’il contient. Jésus a, lui aussi, devant lui, le livre resplendissant. Mais ce livre est fermé. C’est que la Parole du livre, le resplendissement de la Parole du livre, c’est lui-même. Et c’est ce que, dans la nuit, ses mains, que regarde attentivement Nicodème, expliquent à celui-ci.

Entre Nicodème et Jésus brille d’une même lumière le candélabre des deux Testaments. Nicodème n’a plus besoin d’en contempler le reflet dans ses bésicles qu’il tient de sa main gauche. Sa main droite, posée sur son cœur, l’atteste, aussi gravement, aussi humblement que son regard : il accueille pleinement le langage spirituel que lui tient celui que remplit l’Esprit-Saint, l’Esprit du Père. Biblia n°34

Aujourd’hui 14 septembre : Fête de La Croix glorieuse. Quelle est son histoire ? http://nominis.cef.fr/…/Exaltation-de-la-sainte-Croix.html

10 septembre 2022 Jour-anniversaire de la « naissance au ciel » du père Marie-Joseph Lagrange o.p.

Ce jour, la messe de fr. Manuel Rivero o.p. est célébrée à l’intention des demandes de grâces confiées à l’intercession du P. Lagrange par nos amis de l’association et pour la prochaine béatification de ce grand serviteur de Dieu. www.mj-lagrange.org

Prière

Père saint, tu as mis en ton serviteur le frère Marie-Joseph Lagrange, le désir de la vérité et un goût passionné pour la Parole de Dieu. À la lumière de la Loi de Moïse, des Prophètes et des Psaumes, il a scruté le mystère de Jésus Christ et son cœur est devenu brûlant. Avec la Vierge Marie, il a médité l’Évangile dans la prière du rosaire. Il a voué son existence à l’étude scientifique de la Bible dans l’harmonie évangélique de la foi et de la raison afin de sauver les âmes perturbées par la critique scientifique.

Ceux qui l’ont connu ont témoigné de sa foi rayonnante et de son exemplaire obéissance dans les épreuves.

Nous te prions, Père, de hâter le jour où l’Église reconnaîtra publiquement la sainteté de sa vie, afin que son exemple bienfaisant entraîne nos frères à croire en la Parole de Dieu.

Que l’intercession du frère Marie-Joseph Lagrange nous obtienne les grâces dont nous avons besoin, et en particulier : (préciser laquelle).

Nous te le demandons, Père, au nom de ton Fils Jésus Christ, dans la communion du Saint-Esprit, un seul Dieu vivant pour les siècles des siècles. Amen.

Envoyez vos demandes de grâces et celles obtenues à Fr. Manuel Rivero o.p., vice-postulateur :  manuel.rivero@free.fr

08 septembre 2022 : Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie

Dans son article « Marie à Nazareth » paru dans L’Écriture en Église, Cerf, 1990, le père Lagrange fait référence à la Bulle Ineffabilis du Bienheureux pape Pie IX pour la définition et la proclamation du dogme de l’Immaculée Conception, le 8 décembre 1854 :

« Marie, dès le premier instant de sa Conception, était enrichie d’une grâce plus haute que celle des Séraphins… et c’est cette grâce qui habitait l’âme de cette enfant, gracieuse, mais vouée à l’obscurité ; de si grands dons dans une vie si ordinaire, disons si vulgaire. »

Voici le très beau texte du paragraphe de la Bulle Ineffabilis Deus : 8. Les expressions d’universelle et suréminente sainteté.

Viennent enfin les plus nobles et les plus belles expressions par lesquelles, en parlant de la Vierge, ils ont attesté que, dans sa Conception, la nature avait fait place à la grâce et s’était arrêtée tremblante devant elle, n’osant aller plus loin. Il fallait, disent-ils, avant que la Vierge Mère de Dieu fût conçue par Anne, sa mère, que la grâce eût fait son œuvre et donné son fruit ; il fallait que Celle qui devait concevoir le premier-né de toute créature fût elle-même conçue première-née. Ils ont attesté que la chair reçue d’Adam par la Vierge n’avait pas contracté les souillures d’Adam, et que pour cette raison la Vierge Bienheureuse était un tabernacle créé par Dieu lui-même, formé par le Saint-Esprit, d’un travail aussi beau que la pourpre, et sur lequel ce nouveau Béséléel (Exode XXXI, 2) s’était plu à répandre l’or et les plus riches broderies ; qu’elle devait être célébrée comme Celle qui avait été la première œuvre propre de Dieu, comme Celle qui avait échappé aux traits de feu du malin ennemi, et qui, belle par nature, ignorant absolument toute souillure, avait paru dans le monde, par sa Conception Immaculée, comme l’éclatante aurore qui jette de tous côtés ses rayons. Il ne convenait pas, en effet, que ce vase d’élection subît le commun outrage, puisqu’il était si différent des autres, et n’avait avec eux de commun que la nature, non la faute ; bien plus, comme le Fils unique a dans le ciel un Père, que les séraphins proclament trois fois saint, il convenait absolument qu’il eût sur la terre une Mère en qui l’éclat de sa sainteté n’eût jamais été flétri. Et cette doctrine a tellement rempli l’esprit et le cœur des Anciens et des Pères que, par un langage étonnant et singulier, qui a prévalu parmi eux, ils ont très souvent appelé la Mère de Dieu Immaculée et parfaitement immaculée, innocente et très innocente, irréprochable et absolument irréprochable, sainte et tout à fait étrangère à toute souillure de péché, toute pure et toute chaste, le modèle et pour ainsi dire la forme même de la pureté et de l’innocence, plus belle et plus gracieuse que la beauté et la grâce même, plus sainte que la sainteté, seule sainte et très pure d’âme et de corps, telle enfin qu’elle a surpassé toute intégrité, toute virginité, et que seule devenue tout entière le domicile et le sanctuaire de toutes les grâces de l’Esprit Saint, elle est, à l’exception de Dieu seul, supérieure à tous les êtres, plus belle, plus noble, plus sainte, par sa grâce native, que les chérubins eux-mêmes, que les séraphins et toute l’armée des anges, si excellente, en un mot, que pour la louer, les louanges du ciel et celles de la terre sont également impuissantes. Personne, au reste, n’ignore que tout ce langage a passé, comme de lui-même, dans les monuments de la liturgie sacrée et dans les offices de l’Église, qu’on l’y rencontre à chaque pas et qu’il y domine ; puisque la Mère de Dieu y est invoquée et louée, comme une colombe unique de pureté et de beauté ; comme une rose toujours belle, toujours fleurie, absolument pure, toujours immaculée et toujours sainte, toujours heureuse, et qu’elle y est célébrée comme l’innocence qui n’a jamais été blessée ; enfin, comme une autre Eve, qui a enfanté l’Emmanuel.

Photo : Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie par un artiste ukrainien inconnu.

2 septembre 2022 : Celui qui me soumet au jugement, c’est le Seigneur (Co 4, 4)

Un esprit superbe qui s’arroge le droit de tout critiquer : appliquer ici la grande parole : « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugé » ; non seulement à l’extérieur, mais à l’intérieur, ne jugez pas. Ne jugez pas parce que vous n’avez pas reçu le pouvoir de juger, c’est usurper sur les fonctions de N.S. : – ne jugez pas parce que vous ne connaissez pas la cause : delicta quis intellegit (1) ; quoi de plus relatif qu’une action, de plus embrouillé qu’une vie humaine ? – ne jugez pas, surtout en religion, parce que vous jugeriez ou des supérieurs, ou des frères : tout jugement, émanant de celui qui n’a pas autorité pour juger est une faute d’orgueil positive. (Marie Joseph Lagrange o. p., Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 40.)

(1) Mais qui s’avise de ses faux pas ? (Psaume 19 (18) 13).

 

 

Écho de notre page Facebook : août 2022

30 août 2022

Pensée du jour

Ô très douce Marie, ma Mère, grâces vous soient rendues : il me semble que vous m’avez rendu la paix du noviciat simple, un peu de détachement et un désir ardent de travailler pour votre gloire, d’aimer Jésus seul. Et pourtant je suis vraiment plus faible et plus engourdi que jamais : seule votre grâce Immaculée peut vivifier ces désirs de mort qui tendent toujours à la vanité. Vous avez été si bonne de me faire religieux ! Je suis venu pour vous, « Ave Maria ! » Je resterai pour vous si vous m’en faites la grâce : mais ne permettez pas que tout cela n’aboutisse qu’à une vie naturelle et scientifique ! Ce serait trop misérable ! Enflammez-moi de votre esprit : je me donne à vous, pour être votre chose et votre instrument. Gardez tous mes frères, donnez-nous l’amour de Jésus : qu’un souffle nouveau nous embrase, et soyez éternellement bénie !

(Marie-Joseph Lagrange, o. p., Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 168.)

 

24 août 2022

Jésus rentre en Galilée. La conversation entre Jésus et Nathanaël.

Jésus vit Nathanaël venant à lui. Il dit à son sujet : « Voici un véritable Israélite, en qui il n’y a pas d’artifice ! » Nathanaël lui dit : « D’où me connais-tu ? » Jésus lui répondit : « Avant que Philippe t’appelât, quand tu étais sous le figuier, je t’ai vu ». » Nathanaël lui répondit : « Rabbi, tu es le fils de Dieu, tu es le roi d’Israël ! » Jésus lui répondit : « Parce que je t’ai dit : Je t’ai vu au-dessous du figuier, tu crois ? Tu verras de plus grandes choses que celles-là. » Et il lui dit : « En vérité, en vérité, je vous le dis : vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu montant et descendant au-dessus du Fils de l’homme. » (Jn 1, 47-51.)

Dans son commentaire du verset 51, le père Lagrange écrit : Au pays d’Israël, on savait qu’à Béthel, Jacob avait vu en songe une échelle suspendue au ciel, le long de laquelle les anges montaient et descendaient (Gn 28, 10-17). C’était un gage pour le voyageur, obligé de quitter la terre promise, que Dieu serait avec lui : « Car je ne t’abandonnerai point que je n’aie fait ce que je t’ai dit. »

Ce que Dieu avait promis au patriarche, Jésus affirmait qu’il le tiendrait pour lui, et avec tant d’évidence que les disciples, en voyant ses œuvres, devaient être convaincus de sa mission, non point sous l’impression passagère d’une surprise mais par l’évidence des faits surnaturels.

Cette conversation avait donc une grande portée, et l’on comprend que l’évangéliste en ait fait le point de départ d’une période de trois jours avec laquelle on se trouva à Cana, au pays de Nathanaël

(Note : Jean ne nomme jamais Barthélemy, que les synoptiques associent toujours à Philippe. Il est très vraisemblable que le même personnage portait les deux noms. Ichodad (vers 850) le tient pour assuré.) (Marie-Joseph Lagrange o. p., L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, p. 107.)

Photo : Le Songe de Jacob par Jose de Ribera (17e)

 

21 août 2022

« Et on viendra de l’orient et du couchant, et du nord et du midi, pour s’asseoir à table dans le royaume de Dieu. Et voici que quelques-uns des derniers seront les premiers, et que des premiers seront les derniers. » (Luc 13, 29-30)

Commentaires du P. Lagrange : Juifs réprouvés, Gentils sauvés.

29) En effet, aux patriarches viennent se joindre des personnes appelées de tous les points cardinaux, qui ne sont point nécessairement ou seulement des Juifs dispersés (Is, 53, 5 ss), mais aussi les gentils comme dans Matthieu. Comment entreront-ils, puisque la porte est fermée ? Luc est plus attentif à conserver le texte de la parole de Dieu qu’à narrer avec l’aisance d’un inventeur. Il a pu supposer que la porte s’ouvrira à ces personnes, car la parabole ne met pas tant en lumière la nécessité d’arriver avant le moment fatal, que de présenter de façon à être admis. Aussi bien ce menu détail disparaît dans la solennité de la dernière scène.

30) C’est une sorte de proverbe, dont l’application peut changer selon les circonstances. Dans Mc 10, 31 et Mt 19, 20, il s’agit de l’ordre du rang, dans Mt 20, 16, de l’ordre du temps.

Ici la question est retournée en ce sens que d’ordinaire les premiers entrent et les derniers non ; ici il y a des derniers qui entrent, des premiers qui ont le lot réservé d’ordinaire aux derniers. D’ailleurs il n’y a d’article. Les catégories ne sont donc pas absolues, la règle ne s’applique pas à tous les individus, et en effet les patriarches venus les premiers sont demeurés tels. L’opposition est entre les Juifs contemporains et les gentils, car si ces deux groupes sont substitués par la pensée aux termes vagues de la parabole, il est clair que les Juifs étaient les premiers par l’appel de Dieu, par opposition aux gentils.

Si l’on cherchait une application aux circonstances de l’Église primitive, on aurait la perspective d’un royaume de Dieu d’où les Juifs s’étaient exclus par leur infidélité, tandis que les gentils y entraient de toute part. Dans cette voie on en viendrait à trouver dans v. 25 une allusion à la résurrection du Christ. Mais ce serait transformer insensiblement le sens de tout ce passage et l’altérer par trop de précision, car il ne serait plus possible de trouver les patriarches et les prophètes dans l’Église chrétienne, où les Juifs ne demandaient pas à entrer. La véritable perspective est celle du jugement dernier, qui condamne les impénitents et admet au royaume de Dieu des hommes dignes d’être associés aux patriarches et aux prophètes, quelle que soit leur origine. Avis aux Juifs qui se croient et sont en quelque façon les premiers, de ne pas se réduire à n’être plus que les derniers, ceux auxquels d’ordinaire on ferme la porte. Si les images ne sont pas rigides, le sens est très clair, et la leçon redoutable. À la question sur le nombre de ceux qui seront sauvés, Jésus répond : Efforcez-vous de n’être pas parmi ceux qui peuvent se perdre, dussent-ils parmi mes compatriotes et mes familiers.

(Marie-Joseph Lagrange, o. p. L’Évangile selon saint Luc. Lecoffre-Gabalda, 1941, pp. 387-392.)

Photo : Jugement dernier (détail) Fra Angelico. La ronde des élus.

15 août 2022

Belle fête de l’Assomption de la Vierge Marie

Magnificat !

La dévotion à Marie, dont le père Lagrange évoque volontiers les fêtes à chaque tournant important de sa vie, est une manifestation frappante de cette piété d’enfant, qui semblerait même puérile si elle n’était associée chez lui à une foi très adulte, dans un bel équilibre qui fait toute la richesse de son âme (Souvenirs personnels, préface de P. Benoit, O. P., Cerf, 1967, p. 15.)

La Vierge Marie, l’Immaculée Conception, occupe une place privilégiée dans la vie du père Lagrange. Ses feuilles manuscrites commencent toujours par la prière « Ave Maria » en haut de la page, signe de la présence de la Mère de Dieu dans son âme. (Manuel Rivero, O. P. Avant-propos dans l’édition du Journal spirituel, Cerf. 2014.

Aujourd’hui, dans l’évangile de saint Luc, v. 48) Marie accepte les louanges des générations à l’œuvre de Dieu en elle. Ce qui la remplit de joie est donc bien ce à quoi Élisabeth a fait allusion, la conception du Seigneur. C’est le thème du cantique, indiqué avec une extrême délicatesse, mais indiqué. […] v. 49) Marie ne prononce plus le nom de Dieu, mais donne une haute idée de sa nature et de son action. […] Le puissant est dit saint, parce qu’il est objet de crainte et de respect. L’idée de sainteté, dans le sens de Majesté suprême et redoutable est caractéristique des religions sémitiques. […] Plus haute est l’idée de Dieu, puis elle reconnaît son absolue perfection morale ; nouvelle raison pour que son nom soit révéré. Marie prélude à la première demande du Pater. V. 50) Cf. psaume (102, 17) indique bien la suite des idées dans le Magnificat. C’est parce que Dieu est puissant et dépasse l’homme de son infini qu’il éprouve pour lui de la pitié ou de la miséricorde. Ce sentiment s’exerce sur ceux qui le craignent, c’est-à-dire le reconnaissent et le servent. Cette crainte, en effet, n’exclut pas le sentiment filial ; même psaume, v. 13 : « comme un père a pitié de ses fils, le Seigneur aura pitié de ceux qui le craignent » ; cf. encore v. 11. On put donc nommer ceux qui s’attachaient au culte de Dieu, même s’ils n’étaient que prosélytes. V. 51-53) Les aoristes sont expliqués de plusieurs manières : 1) ils signifient ce que Dieu a fait dans le passé ; 2) ce qu’il fera dans l’avenir, au moment de la grande transformation messianique ; 3) ce qu’il a coutume de faire ; 4) ce qu’il a commencé en Marie selon son plan. […] Ce que Dieu fait d’ordinaire, il l’a fait spécialement dans la circonstance présente dont Marie comprend qu’elle est le début du règne de Dieu. […] v. 54-55) Ce qui suit est évidemment messianique de l’aveu de tous, et se rattache pour le rythme à ce qui précède. […] v. 56) On objecte la charité : aussi Marie reste-t-elle aussi longtemps que ses services sont utiles ; elle se retire lorsque d’autres doivent venir en aide à Élisabeth. […] [Dans le Magnificat] tout y coule de source, et l’Église admirera toujours le sentiment religieux de l’humble servante qui ne voit que Dieu dans la gloire qui l’attend. Elle a compris la bonté de Dieu pour les petits, et sa compassion pour les pauvres. Ce seront les sentiments de Jésus. (Marie-Joseph Lagrange, O. P. L’Évangile selon saint Luc, 1, 39-56. Lecoffre-Gabalda, 1941, pp. 41-54.)

10 août 2022

Vous souvenez-vous ? C’est le jour-anniversaire de la mort du P. Lagrange (10 mars 1938), ce grand Serviteur de Dieu auquel nous demandons son intercession et celle de la Vierge Marie pour nos intentions de prière portées par Fr. Manuel Rivero, O. P. au cours de la célébration de l’eucharistie. Prions également pour que la cause de béatification du P. Lagrange introduite à Rome aboutisse favorablement. La réputation de sainteté du P. Lagrange est celle d’un docteur dont le rayonnement spirituel s’exerce de manière plus discrète mais non moins fervente sur ses disciples et sur ses lecteurs.

N’hésitez pas à demander régulièrement des grâces, comme l’indique la prière. À nous informer des grâces reçues. À nous donner vos témoignages. Si vous vous êtes inscrit(e) sur ce site, c’est parce que vous vous intéressez à la vie et à l’Œuvre immense de ce grand savant et de ce grand spirituel qui a donné à l’École biblique et archéologique française de Jérusalem l’élan de renommée internationale dont elle bénéficie aujourd’hui. Pour plus de détails : www.mj-lagrange.orget http://www.ebaf.edu/

Au fil des lectures … Le rayonnement du père Lagrange

Dans un ouvrage, très intéressant, bien documenté, Françoise Hildesheimer (1949-), archiviste et historienne française, propose à ses lecteurs une vision inédite de l’histoire de l’Église catholique de France. Françoise Hildesheimer est la fille d’Ernest Hildesheimer, célèbre archiviste et historien de Nice et de la Côte d’Azur.

Françoise Hildesheimer : Une brève Histoire de l’Église. Le cas français (IVe-XXIe siècles), format Kindle, Champs Histoire, 2019.

Chapitre IX – Modernistarum callidissimum artificium (1), p. 257, § Roma locuta… causa non finita, Mme Hildesheimer écrit :

« Aux crises scientifiques et politiques font suite des controverses théologiques, et l’Église se voit une fois encore obligée de se remettre en question. Ainsi les études bibliques échappent-elles au naufrage avec Albert Lagrange (1855-1938) (2), fondateur d’une école d’Écriture sainte au couvent dominicain de Saint-Étienne à Jérusalem en 1889 : l’École pratique des hautes études bibliques. Animé par le constat d’infériorité intellectuelle des études catholiques face aux travaux de protestants allemands et voulant donner à la foi une assise solide, il y promeut enfin une étude croyante, scientifique et ecclésiale de la Bible. Lors du congrès scientifique international catholique tenu à Fribourg en 1897, il pose les principes d’une herméneutique théologique de la Bible, distinguant le plan divin du salut révélé par la Bible, et l’historicité du récit biblique qui relève d’autres critères de lecture. Toutefois, la question de l’authenticité mosaïque du Pentateuque est pour lui source de problèmes et il devra renoncer à publier sur ce thème (Rome lui interdit de faire paraître ses travaux sur la Genèse). Par ailleurs, l’École pratique des hautes études bibliques, un temps fermée, est concurrencée par l’Institut biblique pontifical de Rome créé par le pape et confié aux jésuites en 1909. Mais la qualité de ses travaux aboutit en 1920 à sa reconnaissance par l’Académie des inscriptions et belles-lettres sous le nom d’École biblique et archéologique française (3). »

Notes

(1) La très grande tromperie des modernistes – Encyclique Pascendi, 1907.

(2) Bernard Montagnes, Le Père Lagrange (1855-1938). L’exégèse catholique dans la crise moderniste, Cerf, 1995 ; Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique, Cerf, 2005.

(3) Le 30 septembre 1943, par l’encyclique Divino afflante Spiritu, Pie XII, consacrant la méthode ainsi développée, reconnaîtra la valeur de l’exégèse scientifique pour l’interprétation des livres saints. De 1948 à 1954 paraîtra la Bible de Jérusalem (version unifiée en 1956). En 1965 enfin, avec la constitution Dei Verbum, le concile Vatican II élargira la perspective en déclarant l’accès à l’Écriture largement ouvert à tout chrétien et en légitimant la critique exégétique.

Écho de notre page Facebook : juillet 2022

31 juillet 2022

Les biens de la terre et la vie de l’âme

« Or, Dieu lui dit : Insensé ! cette nuit, on te redemande ton âme ; et ce que tu as préparé, à qui ira-t-il ? Ainsi en est-il de celui qui thésaurise pour lui-même, et n’est pas riche en vue de Dieu (Luc 12, 20-21) ».

P. Lagrange : L’appel de Dieu fait partie de la parabole. La voix retentit dans la nuit (cf. Job 4, 12), au moment où les impressions sont les plus fortes et où rien n’en distrait. Le sujet est un pluriel indéterminé (cf. Ez 3,25) ; ils ne sont ni des brigands, ni des anges, mais ceux que cela regarde dans l’occasion v. 11, 48 ; 6, 38 ; 23, 31, et en définitive les exécuteurs des volontés de Dieu qui seul a le droit de « redemander » l’âme ; cf. Sg 15, 8, de l’homme auquel on redemande la dette de son âme. L’âme n’est pas la vie, mais, comme précédemment, le principe de la vie. Seulement il se trouve qu’elle n’est pas destinée seulement à jouir : elle a été donnée par Dieu pour un autre usage, il la redemande, sûrement pour exiger des comptes (v. 5). – Les derniers mots ne sont pas le point le plus douloureux, mais justifient leur ironie. L’insensé n’a seulement pas pourvu à sa succession, et d’ailleurs qu’importe ? ce qu’il a préparé ne sera pas pour lui.

Voilà à qui ressemble et dans quel cas se met celui qui… le premier terme est clair : celui qui acquiert la richesse pour en jouir sans plus. Le second terme est compris de bien des manières : celui qui use bien de ses richesses au service de Dieu, ou bien : celui qui est riche de biens spirituels, de richesses préparées auprès de Dieu ; ou qui fait en aumônes un emploi salutaire de ses biens. Il semble que la conclusion ne dépasse pas la parabole, par conséquent n’enseigne rien sur le bon emploi des richesses. L’essentiel est de ne pas imiter, l’insensé qui y mettait tout son espoir comme si Dieu n’existait pas, et, si l’on est riche, qu’on soit riche en regardant Dieu comme sa fin. (L’Évangile selon saint Jean, Lecoffre-Gabalda, 1941, pp. 359-360.)

Photo : Parabole de l’homme riche (1627) Rembrandt

 

25 juillet 2022

Quelle doit être l’ambition de ceux qui veulent à régner avec Jésus

« Quant à mon calice, vous le boirez ». ( Matthieu 20, 23)

« Vous ne savez pas ce que vous me demandez. » N’avaient-ils donc pas entendu ou n’avaient-ils pas compris ce qu’il venait de leur dire, qu’il n’entrerait lui-même dans la gloire qu’après avoir souffert ? Était-il décent de solliciter des places à ses côtés dans la gloire, sans être disposé à partager son lot, même dans la mort ? Ces souffrances et cette mort, il les compare à un calice amer qu’il faut boire et encore à une eau profonde dans laquelle il doit être plongé (être baptisé, c’est-à-dire plongé dans le malheur, est une expression usitée par les écrivains profanes ; le dernier trait n’est que dans Marc, mais il est sûrement authentique). Les deux frères n’écoutent que leur cœur : « Nous le pouvons ». Jésus accepte cette assurance de leur fidélité : Le calice que je dois boire, vous le boirez ; et le baptême dont je dois être baptisé », vous en serez baptisés. » De cette endurance ils seront sûrement récompensés. Mais le Fils de Dieu, dans son rôle de Messie, n’a pas à distribuer les places à sa droite et à sa gauche ; cela appartient au Père. Les deux frères ne se distinguaient sans doute pas clairement le royaume que le Messie allait fonder sur la terre, qui était spécialement son royaume (Mt 13, 41), et le royaume des élus, qui était celui de son Père. Leur pensée se portait sur la gloire. Or, la gloire, c’était la béatitude auprès de Dieu, où Jésus régnerait aussi, mais dont les degrés étaient assignés par un décret éternel. La prétention des deux frères était donc déclinée, sans être ni agréée, ni repoussée, car les desseins du Père ne doivent pas être dévoilés. Mais leur destinée terrestre était prédite : ils seraient associés aux souffrances de leur maître. Dans quelle mesure ? Ce point devint clair pour Jacques, l’aîné, qu’Hérode Agrippa fit décapiter (Ac 12, 2) quelques années après la mort de Jésus, en l’an 44. Mais la tradition ancienne tenait pour certain que Jean avait terminé sa vie par une mort naturelle ? Cependant, relégué à Patmos, il avait souffert pour son maître une peine très dure. Tertullien crut pouvoir ajouter qu’il avait été plongé, sur l’ordre de Domitien, dans une cuve d’huile bouillante. D’autres lui firent boire, sans fâcheuses conséquences, un calice empoisonné. Même à défaut de ces traditions, la métaphore du calice et du baptême n’est pas tellement précise qu’elle ne puisse s’entendre d’une longue vie d’apostolat, par conséquent de labeurs, de souffrances et de persécutions.

[…] Les dix autres apôtres n’entendirent pas la prédication de Jésus d’une façon si tragique. Et ils furent beaucoup moins frappés de la fidélité courageuse des deux fils de Zébédée que de leur ambition. Au lieu de les plaindre, ils s’indignèrent, tant leur imagination se portait aisément vers la gloire du Messie que vers ses souffrances. La mère des fils de Zébédée aurait souhaité un entretien confidentiel ; mais les autres, placés à quelque distance, avaient tout entendu. Jésus les fait approcher pour donner à tous la leçon que méritait leur tendance commune à l’ambition, et que rendait encore plus opportune leur inintelligence obstinée de son rôle comme Messie. (Marie-Joseph Lagrange. L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique. Artège, 2017, p.452-453.)

Photo : La requête de la mère des fils de Zébédée à Jésus. (auteur inconnu)

 

19 juillet 2022

« Qui est ma mère et qui sont mes frères ? Et étendant la main sur ses disciples, Jésus dit : « Voici ma mère et mes frères. Car quiconque fait la volonté de mon père qui est aux cieux, c’est lui qui est mon frère, et ma sœur, et ma mère ! » (Matthieu 12, 48-50.)

Enseignement : Cette réponse contient donc un point essentiel de la doctrine ; elle indique le caractère de la prédication de Jésus, l’appel le plus cordial aux bonnes volontés, avec l’assurance de rencontrer en échange dans son Cœur ce que les affections humaines ont de plus tendre. Cela est mis en pleine lumière. D’autres considérations demeurent dans l’ombre. Les devoirs sacrés de la famille ne sont pas niés. Jésus ne renie pas sa Mère. On voit seulement qu’il attache plus de prix à ses sentiments envers Dieu qu’aux soins dont elle a bercé son enfance. L’Église, en mettant Marie à la tête de la nouvelle famille spirituelle de Jésus, très au-dessus de tous les saints, a interprété sa pensée. (Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, pp. 192-193.)

 

16 juillet 2022

Au fil des lectures … Le rayonnement du P. Lagrange

Françoise Hildesheimer : Une brève Histoire de l’Église. Le cas français (IVe-XXIe siècles),

format Kindle, Champs Histoire, 2019.

Dans cet ouvrage, très intéressant, bien documenté, Françoise Hildesheimer (1949-), archiviste et historienne française, propose à ses lecteurs une vision inédite de l’histoire de l’Église catholique de France. Françoise Hildesheimer est la fille d’Ernest Hildesheimer, célèbre archiviste et historien de Nice et de la Côte d’Azur.

Chapitre IX – Modernistarum callidissimum artificium (1), p. 257, § Roma locuta… causa non finita, Mme Hildesheimer écrit :

« Aux crises scientifiques et politiques font suite des controverses théologiques, et l’Église se voit une fois encore obligée de se remettre en question. Ainsi les études bibliques échappent-elles au naufrage avec Albert Lagrange (1855-1938) (2), fondateur d’une école d’Écriture sainte au couvent dominicain de Saint-Étienne à Jérusalem en 1889 : l’École pratique des hautes études bibliques. Animé par le constat d’infériorité intellectuelle des études catholiques face aux travaux de protestants allemands et voulant donner à la foi une assise solide, il y promeut enfin une étude croyante, scientifique et ecclésiale de la Bible. Lors du congrès scientifique international catholique tenu à Fribourg en 1897, il pose les principes d’une herméneutique théologique de la Bible, distinguant le plan divin du salut révélé par la Bible, et l’historicité du récit biblique qui relève d’autres critères de lecture. Toutefois, la question de l’authenticité mosaïque du Pentateuque est pour lui source de problèmes et il devra renoncer à publier sur ce thème (Rome lui interdit de faire paraître ses travaux sur la Genèse). Par ailleurs, l’École pratique des hautes études bibliques, un temps fermée, est concurrencée par l’Institut biblique pontifical de Rome créé par le pape et confié aux jésuites en 1909. Mais la qualité de ses travaux aboutit en 1920 à sa reconnaissance par l’Académie des inscriptions et belles-lettres sous le nom d’École biblique et archéologique française (3). »

Notes

(1) La très grande tromperie des modernistes – Encyclique Pascendi, 1907.

(2) Bernard Montagnes, Le Père Lagrange (1855-1938). L’exégèse catholique dans la crise moderniste, Cerf, 1995 ; Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique, Cerf, 2005.

(3) Le 30 septembre 1943, par l’encyclique Divino afflante Spiritu, Pie XII, consacrant la méthode ainsi développée, reconnaîtra la valeur de l’exégèse scientifique pour l’interprétation des livres saints. De 1948 à 1954 paraîtra la Bible de Jérusalem (version unifiée en 1956). En 1965 enfin, avec la constitution Dei Verbum, le concile Vatican II élargira la perspective en déclarant l’accès à l’Écriture largement ouvert à tout chrétien et en légitimant la critique exégétique.

 

14 juillet 2022

Voici un message de frère Manuel Rivero o.p., président de l’association des amis du père Lagrange et vice-postulateur de la cause de béatification du serviteur de Dieu Marie-Joseph Lagrange o.p. :

Bonjour,

Chaque trois ans le Chapitre général de l’Ordre des prêcheurs réunit les frères délégués des provinces dominicaines pour actualiser les lois et étudier les questions posées par l’annonce de l’Evangile.

En 2019, j’ai eu la joie de participer au chapitre général du Vietnam comme traducteur. Cette année ce sera le Mexique s’il plaît à Dieu. Septième chapitre général, un comme définiteur à Rome en 2010 et six comme traducteur (Avila, Bologne, Providence (USA), Croatie, Vietnam et Mexique).

Le départ pour Mexico est prévu le jeudi 14 juillet ; le chapitre commence le samedi 16 juillet en la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel ; la clôture est prévue pour la fête de saint Dominique le 8 août dans la basilique de Notre-Dame de Guadeloupe (Mexico). Je pense être de retour à La Réunion le vendredi 12 août.

Je vais faire une pose à Paris, au couvent de l’Annonciation, demain et mercredi 13 juillet, avant de reprendre le vol pour le Mexique le 14 juillet.

En vous gardant dans ma prière au Christ Sauveur, je me confie à la vôtre. Fr. Manuel.

Photo : Logo du Chapitre Général de Tultenango (Mexico) :

The Dominican friars will celebrate their General Chapter of Definitors in Tultenango, Mexico, from 16 July to 8 August 2022.

The graphic representation designed to accompany the activities of the General Chapter Tultenango 2022, aims to highlight the term ”origin” in two aspects:

The idea is to represent the beginning and development of the Dominican Friars, through the integration of St. Dominic of Caleruega (their founder) with the cross on the shield as a symbol of development.

Origin as provenance. We have incorporated Mexican motifs to personalise the graphics

of this edition, taking up elements of the Piedra del Sol.

Saint Dominic of Caleruega: founder of the Order of Preachers

Pre-Hispanic motifs: from the Piedra del Sol (Aztec Sun Stone)

Pre-Hispanic Greca: the triangles symbolise stability (pyramid) and because they are the origin of the arrow, they also represent direction.

The circles have many interpretations. In our case their outline symbolizes continuity.

 

Dimanche 10 juillet 2022 – Jour-anniversaire du dies natalis du père Marie-Joseph Lagrange O. P.

En communion avec le frère Manuel Rivero O.P., nous prions pour la béatification du père Lagrange, confions à son intercession nos demandes de grâces. www.mj-lagrange.org et prions les uns pour les autres.

L’enseignement de ce dimanche évoque la parabole du bon Samaritain :

« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain comme toi-même. » « Mais, qui est mon prochain ? » (Luc 10, 27 ; 29)

– Posée spéculativement et à propos de la Loi, la question : qui est mon prochain ? semble dire : envers qui suis-je tenu à observer le précepte ? C’était provoquer une discussion délicate, où la raison pouvait objecter des difficultés plus ou moins plausibles, s’il s’agit d’un ennemi, s’il attaque les armes à la main, etc. Jésus transporte la question dans le domaine des faits. Elle est tranchée par la miséricorde d’un Samaritain envers un homme qui souffre et dont il ne s’informe pas. Et il se trouve que cette solution du cœur résout tous les cas théoriques. C’est de cette façon que pendant la guerre les femmes de France ont su quel était leur prochain. Il ne convient sans doute pas d’exiger de qui donne de si hautes leçons de les présenter dans le cadre scolaire des demandes et des réponses.

La réponse était dictée par la question ; elle est naturelle. La recommandation de Jésus est très générale ; il ne dit pas : même un ennemi peut être le prochain, ni tous les hommes sont ton prochain. Mais : Sois charitable envers tous ceux qui ont besoin de ton secours. Dans les sens allégoriques des anciens : Le Christ est le bon Samaritain. (extrait des commentaires de Marie-Joseph Lagrange O. P., L’Évangile selon saint Luc, Lecoffre-Gabalda-5° édition éd., 1941, pp. 311-316)

4 juillet 2022

La Bible de Jérusalem telle que nous la connaissons aujourd’hui a fait l’objet d’un travail incommensurable. Le père Lagrange y a joué un rôle majeur, par ses recherches, par ses études, poursuivi par toute une équipe de biblistes, jusqu’en 1948, date de la première édition.

1913 – Dans son Journal spirituel, le père Lagrange mentionne : « Départ pour Marseille, et de Marseille le 4 juillet à 11 heures. À Jérusalem, je travaille aussitôt à un gros article sur Le Nouveau Testament de Soden, à S. Justin. Ave Maria. »

L’article sur le Nouveau Testament de Soden [Hermann (1852-1914)] se retrouve, pour une première partie, dans la Revue biblique, octobre 2013, pp. 481-524, et dans celle de 1920, pp. 321-359.

Le premier article est intitulé : Une nouvelle édition du Nouveau Testament. Les premières lignes montrent combien cet ouvrage est important :

P. Marie-Joseph Lagrange o.p. (1855-1938)

– « Il a été donné à M. le baron von Soden d’achever l’œuvre ardue à laquelle il a travaillé durant seize ans, et il a eu aussi la joie d’en faire hommage à Mademoiselle Élise Koenigs,dont le dévouement généreux n’a cessé de lui venir en aide.

La Revue (1904 ; 594-598 ; 1907, 282-286 ; 1908, 299 ; 1910, 605-607) a indiqué les premières assises du monument qui est aujourd’hui terminé. C’était une suite d’études sur presque tous les points critiques textuelle du N. T. Le volume de 2203 pages qui les contient, dans le texte le plus fin et le plus dru, avec des raffinements de concision, offrira longtemps des matériaux et des sujets de travail. […] Nous ne pouvons-nous dérober au devoir de présenter à nos lecteurs cet admirable ouvrage. La tâche est délicate puisqu’il ne nous a pas été possible de pénétrer dans les détours d’une construction forcément très compliquée. C’est pour ainsi dire du dehors que nous voudrions en apprécier les grandes lignes. Encore nous bornerons-nous à ce qui regarde les évangiles. Après avoir élevé ce monument, la critique textuelle, si elle reprend une tâche jamais terminée, sera peut-être contrainte de diviser encore plus le travail et à étudier presque chaque livre du N. T. en particulier. »

Le deuxième article de l’édition de la Revue de 1920 est intitulé : L’Ancienne version syriaque des évangiles. Les premières lignes confirment :

– « Le Nouveau Testament de M. von Soden n’est pas une édition de tout repos. Les partisans du texte de Hort et Wescott apprécient le concours qu’il apporte en somme à l’édition anglaise. Mais un amateur rigoureux des précisions comme M. Hoskier déclare que c’est à pleurer. Et en Allemagne même, M. Lietzmann regarde avec compassion son compatriote comme une victime des préjugés. Ce qui renaît c’est la grave question du texte dit occidental. Soden ne l’a pas mieux traité que Hort. On le lui reproche et la déception est grande, au lendemain du jour où Blass avait en quelque sorte canonisé ce texte – du moins pour les ouvrages de Luc – puisqu’il ne serait autre qu’une recension émanée de la plume de Luc. […] Cependant, – quoiqu’on pense du système de von Soden – il est incontestable que depuis ses travaux et ceux de son équipe, on peut serrer la question de plus près. »

Écho de notre page Facebook : juin 2022

30 juin 2022

Les saints premiers martyrs de l’Église de Rome

« Ô saints martyrs, colonnes inébranlables de notre foi, donnez-nous votre courage généreux : vous avez aimé Jésus-Christ et vous êtes morts pour lui ; votre amour l’a vengé des calomnies absurdes des païens, de la lâcheté des tièdes ; vous êtes jusqu’à la fin des temps notre modèle et notre soutien. » (Prière du SDD Marie-Joseph Lagrange o.p. Journal spirituel, Cerf, 2014.

« Afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a le pouvoir, sur la terre, de pardonner les péchés (Mt 9, 6) ».

Père Lagrange : Mais que signifie donc ce terme de Fils de l’homme, et pourquoi Jésus se l’appliquait-il ? Ce problème est aujourd’hui encore très agité dans les écoles : comment les pharisiens l’aurait-il résolu ? Quelques-uns d’entre eux, les plus doctes, ont pu se souvenir de la vision de Daniel et de cet être céleste, semblable à un fils d’homme, qui venait sur des nuées (Dn 7, 13). Mais qu’avait de commun cette apparition avec Jésus de Nazareth ? Ce n’était pas non plus celle du messie, puisque l’apparence humaine de Daniel venait du ciel, et que le Messie devait naître de David, en véritable fils de l’homme. Or c’est précisément ce qu’il eût fallu concilier, et les pharisiens ne lisaient pas dans leurs livres le secret de cette énigme. Jésus devait la résoudre dans sa personne, mais il jugeait prudent de préparer les esprits. Ce n’était pas recourir à l’équivoque que de choisir l’expression marquant énergiquement la nature humaine qu’il avait revêtue dans sa réalité, et qu’un jour, au jour de sa comparution devant le Sanhédrin, il révélerait comme le terme que Daniel avait employé pour manifester son origine céleste. Le mot de Messie y était moins propre, car il excitait les espérances de libération mêlées à des désirs moins purs de domination, de tueries et de pillage ; il risquait de faire littéralement tourner les têtes. Il fallait d’abord vider ce titre royal – que Jésus ne devait pas abdiquer – de son sens profane, l’épurer, le spiritualiser et en même temps l’étendre à l’humanité tout entière. Le Fils de l’homme a été le terme choisi par Jésus pour amener les Juifs à la notion du salut universel, le même pour tous, annoncé par leurs Écritures. (L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, (extrait) Artège-Lethielleux, 2017, pp. 151-152)

Photo : Christ bénissant par Biagio di Antonio Tucci (15e)

 

29 juin 2022

Saint Pierre et saint Paul

<< Dimanche à Rome, dans la basilique Saint Pierre et en présence de Dieu, il se livrait à la prière pour la protection et l’expansion de l’Ordre. Il contempla dans une vision imaginaire que les glorieux Pierre et Paul approchaient soudain. Le premier, c’est-à-dire Pierre, lui remettait le bâton, Paul un livre, et ils complètent le geste en disant: Allez, prêchez, car vous avez été choisi par Dieu pour ce ministère.
Aussitôt, au même instant, il semblait contempler ses enfants dispersés dans le monde entier, marchant deux par deux et prêchant la Parole de Dieu aux gens>>.
Saints Pierre et Paul continuez à prier pour nous !
fr. Manuel Rivero o.p.
Photo de Marcela De Fina (Josefina)

 

 

27 juin 2022
Saint Cyrille d’Alexandrie et la basilique Saint Étienne de Jérusalem
L’actuelle basilique Saint-Étienne est édifiée sur le site d’une grande église byzantine dont la cérémonie de dédicace fut présidée en l’an 439 par l’illustre patriarche d’Alexandrie St Cyrille. On rapporte qu’à cette occasion y furent transférées les reliques d’Étienne, le premier martyr du christianisme
Le lieu est pétri d’une histoire qui ne fut pas épargnée par la violence. La basilique byzantine fut détruite par les Perses en 614. Une petite chapelle fut alors érigée qui desservit par la suite une léproserie. Les Croisés la restaurèrent en 1099. Mais en 1187 ils la démolirent, pour empêcher les armées de Saladin de s’en servir comme ouvrage militaire durant leur siège de la Ville Sainte.
Vers la fin du 19e siècle, les Frères prêcheurs ont la volonté de rétablir une maison dominicaine dans la Ville Sainte. Une basilique est reconstruite et consacrée le 13 mai 1900. Référence pour les biblistes du monde entier, Le père Marie-Joseph Lagrange qui fonda l’École Biblique et Archéologique Française en 1890 repose depuis 1938 dans le chœur de cette basilique.
Fr. Manuel Rivero o.p.
Photo : Saint Cyrille d’Alexandre-mosaïque à Notre-Dame de Fourvière-Lyon-Concile d’Éphèse (détail)

Belle fête du Cœur Immaculé de Marie

Samedi le 25 juin 2022

Souvenons de notre saint pape Jean-Paul II, victime d’un grave attentat le 13 mai 1981, il demanda à placer la balle qui avait traversé son corps dans la couronne de Notre-Dame-de-Fatima, en signe de reconnaissance.

Quel est le message de Fatima ?

Les apparitions de la Vierge ont été précédées des apparitions d’un ange qui apparut à trois petits bergers : Lucie, François et Jacinthe, qui leur fit répéter cette prière : « Mon Dieu, je crois en vous, je vous adore, j’espère en vous, et je vous aime. Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas ».

Il leur demanda aussi d’offrir au Seigneur des prières et des sacrifices tout en évoquant la miséricorde des cœurs de Jésus et de Marie à leur égard.

Le 13 mai 1917, c’est Notre-Dame qui leur apparaît, vêtue de blanc, plus brillante que le soleil. Elle leur demande de se rendre à Cova da Iria, six mois de suite, le 13 de chaque mois à la même heure. Notre Dame les exhorte à prier : « Réciter le chapelet tous les jours pour obtenir la paix pour le monde et la fin de la guerre ».

Le 13 juin 1917, Notre-Dame révèle aux enfants que Jésus veut établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Ce Cœur de Marie est entouré d’épines, symbole des péchés des hommes.

Le 13 juillet 1917, Notre-Dame demande la consécration de la Russie à son Cœur Immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis. Elle donne aussi une nouvelle prière à ajouter dans le chapelet : « Ô mon Jésus, pardonnez-nous, préservez-nous du feu de l’enfer ; emmenez au Paradis toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus besoin ».

Le 13 octobre 1917, un samedi, Notre-Dame demande la construction d’une chapelle en son honneur en disant : « Je suis Notre-Dame du Rosaire ». Elle veut que le chapelet soit prié tous les jours. Ce jour-là eut lieu le miracle du soleil annoncé quatre mois auparavant. Le soleil tourna trois fois sur lui-même lançant de tous côtés des faisceaux de lumière.

Quels enseignements pouvons-nous retenir cent ans après ces apparitions ?

Tout d’abord, Notre-Dame nous renvoie à la conversion et à la prière pour les pécheurs. Jésus a intercédé sur la croix pour les pécheurs. Saint Dominique s’exclamait dans sa prière : « Seigneur, que vont devenir les pécheurs ? » Les enfants de Fatima vont prier le chapelet pour le pardon des pécheurs. Les apparitions mariales n’apportent rien de nouveau à la Révélation divine. Dieu le Père nous a tout dit dans son Fils Jésus. La Révélation est close et le salut nous a été acquis par la mort et la résurrection de Jésus. Nous n’avons pas à courir derrière de nouvelles révélations comme si l’Évangile ne suffisait pas. Ce serait un manque de foi et un péché.

Encore une fois, comme à Lourdes, en 1858, la Vierge Marie a choisi des enfants pauvres comme témoins et missionnaires. Les apparitions de Fatima nous font prendre conscience de l’importance des enfants, disciples-missionnaires de Jésus-Christ. Les parents disent souvent : « Nous voulons que nos enfants ne manquent de rien ». Mais ils oublient parfois l’essentiel : la transmission de l’Évangile de Jésus, la prière et le souci des pécheurs et des pauvres. Les familles sont appelées à vivre une conversion dans leurs mentalités, leurs propos et leurs pratiques. Les enfants sont aimés de Dieu, choisis par la Vierge et envoyés comme des missionnaires en donnant un témoignage de prière et de sacrifice.

D’ailleurs, l’idée de sacrifice a pratiquement disparu de l’éducation des enfants. Les pédagogies sont orientées vers les activités ludiques et variées alors que l’existence humaine demeure marquée par la souffrance et le manque. L’enfant ne pourra pas faire face aux épreuves de la vie sans esprit de foi, de prière et de sacrifice.

Quand nous lisons la vie des saints, une flamme d’amour divine jaillit dans nos cœurs qui nous rend heureux tout en restant tenaillés par les douleurs et contrariétés du quotidien. Dans la vie des saints, les sacrifices rythment les jours et les nuits. Les enfants de Fatima se privaient de ce qu’ils chérissaient non pas par masochisme mais pour l’amour de Dieu et des pécheurs, pour raboter leur ego insolant et se donner au service des pauvres. Ils se privaient de manger des figues et des raisins appétissants. Surtout, ils portaient dans la foi moqueries, mépris, punitions, prison et maladie. François est mort à l’âge de 10 ans, le 4 avril 1919. Jacinthe est partie vers le père le 20 février 1920 à l’âge de neuf ans.

Puissions-nous ouvrir notre cœur aux grâces que Dieu veut répandre sur son Église

Puissions-nous favoriser la catéchèse et la prière du chapelet des enfants en leur faisant découvrir Jésus avec sa Mère, la Vierge Marie, au rythme paisible des grains du chapelet qui à l’image de l’arrosage goutte à goutte de nos jardins vient imbiber nos âmes de l’eau vive de l’Esprit-Saint !

Le père Lagrange, dominicain, fondateur de l’École biblique de Jérusalem, disait un jour à l’un de ces frères : « Le Rosaire, quand on s’en occupe, il réussit toujours ». Occupons-nous du Rosaire des enfants de manière à ce qu’ils réussissent non seulement dans la vie mais surtout leur vie, une vie de foi et d’amour.

Prions pour la Paix dans le monde, pour l’Ukraine et pour la Russie.

Fr. Manuel Rivero O.P.

 

24 juin 2022

Le Cœur Sacré de Jésus symbole de l’amour divin

Mais Dieu prouve son amour pour nous en ce que, nous étant encore pécheurs, le Christ est mort pour nous. À plus forte raison donc, justifiés que nous sommes maintenant dans son sang, serons-nous sauvés par lui de la colère. En effet, si, étant ennemis, nous avons été réconciliés, nous serons sauvés dans sa vie, et non seulement réconciliés, mais nous glorifiant en Dieu par Notre-Seigneur Jésus Christ, par qui nous avons obtenu maintenant la réconciliation. (Rm 5, 8-11)

P. Lagrange : La mort du Christ pour des pécheurs prouve l’amour de Dieu pour nous. Cela suppose l’union de Dieu et du Christ, Dieu étant dans le Christ, se réconciliant le monde (2 Co v. 19). Paul met en relief la charité propre à Dieu, (…) qui dépasse si complètement ce qu’un homme pourrait faire, et qui s’exerce envers nous, pécheurs, et pour nous. Il semble que tout ce raisonnement table sur l’utilité générale. Mourir seulement pour sauver la vie d’une personne coupable pourrait être l’acte d’un amour aveuglé par la passion, car l’existence de cette personne ne sera pas utile à la cité. Cet acte irrationnel n’entre donc pas en ligne de compte. Tout ce que peut faire un homme sensé, c’est de mourir pour un citoyen vertueux, et par conséquent utile à sa patrie. Mais l’amour de Dieu peut se porter sur des pécheurs sans être aveugle, parce que le Christ en mourant pour eux leur rendra la justice. Cet amour est riche pour ne pas se préoccuper des qualités de ceux envers lesquels il s’exerce. (…) La justice est une qualité très réelle, acquise dans le sang du Christ. Quant au salut, au futur, c’est celui qui sera définitivement acquis au jour du jugement, en échappant à la colère (2, 5. 8). Le pécheur était certes plus loin de la justification que le justifié ne l’est du salut. Le premier don de Dieu est une garantie qu’à plus forte raison, nous ayant justifiés, il nous sauvera.

(Marie-Joseph Lagrange, Lettre de Saint Paul apôtre aux Romains, Études bibliques, Éd. Lecoffre-Gabalda, 4e mille, 1950, pp. 103-104.)

Photo : Le Sacré-Cœur de Jésus, mosaïque de Luc-Olivier Merson réalisée par l’Atelier Guilbert-Martin (1922), abside de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre.

23 juin 2022

Nativité de Saint Jean-Baptiste

Il y eut un homme, envoyé par Dieu ; son nom était Jean. Il était venu comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière, et préparer au Seigneur un peuple bien disposé. (Jn 1, 6-7)

Méditer avec le P. Lagrange : Jean n’était pas la lumière, mais il était venu pour rendre témoignage à la lumière ; son nom était Jean. Il fut si grand que quelques-uns se bornèrent à recueillir ses paroles sur un baptême de pénitence, oubliant qu’il avait annoncé le baptême par l’Esprit et montré du doigt le véritable envoyé de Dieu, celui qui était la lumière venue dans le monde, et que les siens, ceux de sa race et de son sang, ne voulurent point recevoir ni écouter, malgré le témoignage du Baptiste. Étant Fils de Dieu, il donna à ceux qui le reçurent, il donnera à ceux qui le recevront, de devenir enfants de Dieu, selon l’image de sa génération éternelle, qui n’a rien de commun avec celle que les hommes se proposent, désirent et réalisent ici-bas. Pour les unir à soi comme ses frères, le Verbe s’est fait chair, demeurant parmi nous sous une forme plus sensible que la nuée de Dieu descendue sur le tabernacle, avec une présence communicative de grâce et de vérité. (Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, pp. 672-673.

Bonne fête à tous les Jean de nos amis.

Illustration : Saint Jean Baptiste montrant le chemin vers la Lumière. Mattia Preti (17e)

 

21 juin 2022 : Saint Louis de Gonzague, jésuite

Dans son Journal spirituel, le Père Lagrange confie plusieurs fois à la protection de saint Louis de Gonzague, son frère Louis, et de tous ses proches portant le même prénom.

Louis de Gonzague (1591), un saint rayonnant de pureté, fils de la haute aristocratie italienne, décide à 17 ans de devenir jésuite, malgré l’opposition de son père. Louis a une vie spirituelle dépouillée, sereine et abandonnée à Dieu. Il décède à 23 ans, au service des pestiférés à Rome en 1591. Louis de Gonzague est le patron mondial de la jeunesse.

 

 

 

Dimanche 19 juin 2022 : Solennité du Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Christ

La multiplication des pains

« Or, ayant pris les cinq pains et les deux poissons, et élevé ses regards vers le ciel, il les bénit et les rompit, et il les donnait aux disciples pour être servis à la foule. Et tous mangèrent et furent rassasiés, et on emporta ce qu’ils avaient eu de trop : douze corbeilles de morceaux » (Luc 9, 16-17).

Un commentaire du père Lagrange : En multipliant les pains, Jésus préparait ses disciples à croire un jour que sa chair et son sang seraient par eux distribués aux fidèles sous la forme du pain, mais il n’a pas alors distribué des parcelles infimes pour faire désirer le rassasiement du règne de Dieu ; il a vraiment par compassion pourvu au besoin de la foule. (Marie-Joseph Lagrange o.p., L’Évangile de Saint Luc, Lecoffre-Gabalda, 1941, p. 264.)

Photo : La multiplication des pains par John August Swanson (1938-2021)

 

16 juin 2022

La prière

Jésus poursuivit sa route avec les disciples les plus intimes demeurés auprès de lui. À un moment, il s’arrêta pour prier. Les disciples se disaient : « Comme il prie ! » Et ils s’étonnaient qu’il ne leur eût point encore appris à prier, comme Jean avait fait pour ses disciples. Lorsque Jésus eut terminé, ils s’en plaignirent à lui, et il combla leur demande en leur enseignant le Notre Père.

Comme la charité doit être universelle, la prière est censée prononcée par tous les fidèles à la fois, s’adressant au seul vrai Dieu, qui est leur Père à tous.

La prière peut être une courte formule, pour rendre gloire à Dieu et implorer son secours tel qu’il est nécessaire à tous. (Marie-Joseph Lagrange o.p., L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017

« Habituons-nous, sans affecter une indifférence inhumaine, à voir les choses sub specie aeternitatis. « Tout commence ici-bas, mais tout finit ailleurs » a dit Victor Hugo, rarement si bien inspiré. Dieu supporte tant de choses dans ce bas monde, qu’on voit bien que ses vues sont ailleurs. La prière commencée dans l’angoisse, doit finir dans la paix. Loin de nuire à une action énergique pour lutter contre le mal sous toutes ses formes, cet abandon à Dieu nous donne le calme nécessaire pour agir efficacement » (P. Marie-Joseph Lagrange o.p., À son cousin Albert Férier, 2 novembre 1932).

12 juin 2022 : Solennité de la Sainte Trinité

Père Lagrange : L’Esprit est en ce moment auprès du Père, et c’est de là qu’il viendra, envoyé par le Fils quand celui-ci aura rejoint le Père (Jean 15, 26).

« L’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître », Jean 16, 15.

Et le père Lagrange de développer : Telle est l’unité du Père et du Fils qu’il faut maintenant le reconnaître : tout ce que l’Esprit a reçu du Père, il l’a aussi reçu du Fils, car le Fils a tout ce qu’a le Père. Ces mots sont ce que le N.T. contient de plus expressif sur l’unité de la nature et la distinction des Personnes dans la Trinité, et spécialement sur la procession (production) de l’Esprit-Saint.

(Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Saint Jean, Lecoffre-Gabalda, 1936, p. 423, p. 413.)

10 juin 2022 – Jour-Anniversaire

Le principe de la charité envers le prochain, c’est le Saint-Esprit, principe de tout amour surnaturel, de Dieu pour son Fils, de nous pour Dieu, pour les autres. La charité, le sommet de foi, le ciment de l’Église catholique, la marque distinctive des enfants de Dieu vient du Saint-Esprit. (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, Cerf, 2014.)

CHAQUE MOIS, LE 10, jour de la « naissance au ciel » du père Lagrange, UNE MESSE EST CÉLÉBRÉE par Fr. Manuel Rivero o.p., vice-postulateur et président de l’association, aux intentions de ceux qui se confient à l’intercession du père Marie-Joseph Lagrange, o.p. et pour sa prochaine béatification. Union de prières.

Prière pour la glorification du serviteur de Dieu Marie-Joseph Lagrange :

Père saint, tu as mis en ton serviteur le frère Marie-Joseph Lagrange, le désir de la vérité et un goût passionné pour la Parole de Dieu. À la lumière de la Loi de Moïse, des Prophètes et des Psaumes, il a scruté le mystère de Jésus Christ et son cœur est devenu brûlant. Avec la Vierge Marie, il a médité l’Évangile dans la prière du rosaire. Il a voué son existence à l’étude scientifique de la Bible dans l’harmonie évangélique de la foi et de la raison afin de sauver les âmes perturbées par la critique scientifique. Ceux qui l’ont connu ont témoigné de sa foi rayonnante et de son exemplaire obéissance dans les épreuves. Nous te prions, Père, de hâter le jour où l’Église reconnaîtra publiquement la sainteté de sa vie, afin que son exemple bienfaisant entraîne nos frères à croire en la Parole de Dieu. Que l’intercession du frère Marie-Joseph Lagrange nous obtienne les grâces dont nous avons besoin, et en particulier : (préciser laquelle). Nous te le demandons Père, au nom de ton Fils Jésus Christ, dans la communion du Saint-Esprit, un seul Dieu vivant pour les siècles des siècles. Amen.

CONFIEZ VOS INTENTIONS OU GRÂCES OBTENUES PAR L’INTERCESSION DU PÈRE LAGRANGE À : manuel.rivero@free.fr

6 juin 2022
Bonjour,

Belle fête de la Pentecôte en ce lundi où nous fêtons la Vierge Marie, Mère de l’Église.
Au terme des cours de théologie à l’UCM de Tananarive, j’ai vécu une bonne récollection sur le Saint-Esprit chez nos soeurs dominicaines d’Antsirabé avec des laïcs dominicains et des jeunes attirés par la vocation de frère prêcheur.
Viens Esprit Saint !
Fr. Manuel

La Vierge Marie, Mère de l’Église
Mémoire liturgique : lundi de Pentecôte, le 6 juin 2022.
Fr. Manuel Rivero O.P.

C’est le bienheureux pape Paul VI qui a tenu à vénérer la Vierge Marie sous le vocable de « Mère de l’Église » au cours du Concile Vatican II, le 21 novembre 1964, lors du discours d’approbation de la Constitution dogmatique sur l’Église « Lumen Gentium », tout en ne faisant pas partie de celle-ci. De son côté, le Catéchisme de l’Église catholique a intégré officiellement dans la foi catholique ce vocable riche en signification théologique, même s’il n’a pas été le résultat d’un vote lors de ce Concile. Le Catéchisme cite ce vocable dans le commentaire de l’article du Credo sur l’Église : « Je crois à la sainte Église catholique ». À la suite de « Lumen Gentium » au chapitre VIII qui situe la Vierge Marie dans le mystère du Christ et de l’Église, le Catéchisme reprend l’expression « Mère de l’Église » dans le contexte de la vie du Sauveur et au cœur de l’Église. Il convient de se souvenir qu’un certain nombre d’évêques conciliaires avaient souhaité un texte sur la Vierge Marie à part entière. Dans le souffle de l’Esprit, les pères conciliaires choisirent de présenter la Vierge Marie plongée dans le mystère du Christ et comme membre éminent de l’Église.

L’Église, Mère des chrétiens

Au cours des premiers siècles de l’histoire de l’Église, les grands théologiens sont africains. Les Pères de l’Église ont mis en lumière la maternité spirituelle de la Vierge Marie envers les chrétiens. C’est ainsi que saint Cyprien, évêque de Carthage, martyr en 258, déclarait : « On ne peut pas avoir Dieu pour père quand on n’a pas l’Église pour mère[1] ».

Plus tard, saint Augustin (+430) prêchera à ses fidèles : « Nul ne peut compter sur la grâce de Dieu son Père, s’il méprise l’Église sa mère[2] ».

Au VIIIe siècle, en Angleterre, saint Bède le Vénérable, écrira : « Toujours à nouveau l’Église engendre le Christ, chaque jour l’Église engendre l’Église[3] ». Par le sacrement du baptême, par la prédication et le témoignage, l’Église donne naissance au Christ dans le cœur des hommes. En engendrant le Christ, elle s’engendre elle-même.

L’Église, Corps du Christ

Saint Paul, célèbre le Christ « Tête du Corps, c’est-à-dire de l’Église » (Col 1,18). Dans son épître aux Colossiens, l’apôtre des nations appelle l’Église « Corps du Christ » (Col 1,24). L’image du corps humain avec la tête et ses membres correspond au Christ total, qui rassemble dans l’unité le Christ, sa Tête, et les chrétiens, ses membres. Dans son épître aux Corinthiens (1 Cor 12,12.27), saint Paul explique la dépendance des membres du même corps avec ses différentes fonctions, image qui s’applique à l’Église, « le Christ répandu et communiqué », selon la belle formule de Bossuet, où chaque baptisé participe à la vie du Fils de Dieu en tant que membre vivant de son Corps.

Le Christ ressuscité est devenu inséparable de son Église. L’Église n’existe qu’unie au Christ, sa Tête. Le Christ et l’Église forment le Christ total : sa Tête et ses membres. Inutile de parler du Christ sans son Église. Erreur que d’imaginer l’Église comme existant sans le Christ.

La Vierge Marie, Mère du Christ, Mère de l’Église

La foi de l’Église trouve sa naissance dans la Bible. La prière de l’Église manifeste aussi le projet de salut de Dieu pour l’humanité : « Lex orandi, lex credendi » (« La loi de la prière est la loi de la foi »). C’est pourquoi il convient de faire appel à la liturgie de l’Église pour comprendre le mystère de la Vierge Marie. À l’Annonciation, la Vierge Marie est devenue la Mère du Fils de Dieu fait homme, qui recevra le nom de Jésus. L’événement de l’Annonciation représente non seulement la nouveauté de l’Incarnation mais aussi le commencement de l’Église. La liturgie de cette fête appelée par certains Pères de l’Église « la fête de la racine », car cachée et fondatrice, exprime le mystère de l’accueil du Fils de Dieu « par la foi de Marie » et sa tendresse maternelle envers le corps de son fils Jésus (cf. Préface de la messe) tandis que la prière sur les offrandes met en lumière la naissance de l’Église, Corps du Christ : « L’Église n’oublie pas qu’elle a commencé le jour où ton Verbe s’est fait chair ».

Si Marie est mère de Jésus, elle est aussi la mère de l’Église. Étant la Mère de la Tête du Corps elle demeure aussi la Mère du reste du Corps, les membres unis au Christ par la foi et le baptême. S’il n’est pas possible de séparer la Tête du Corps ; il n’est pas possible non plus de séparer la maternité divine de Marie de sa maternité spirituelle envers le Corps de son Fils Jésus, l’Église.

Un théologien du XIIe siècle, Isaac de l’Étoile[4], moine cistercien, a su mettre en valeur l’union du Christ et de l’Église, la maternité de Marie envers le Christ et à l’égard de l’Église : « ʺCe que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare donc pas. Ce mystère est grand, je veux dire qu’il s’applique au Christ et à l’Église.ʺ Garde-toi bien de séparer la tête du corps ; n’empêche pas le Christ d’exister tout entier ; car le Christ n’existe nulle part tout entier sans l’Église, ni l’Église sans le Christ. Le Christ total, intégral, c’est la tête et le corps. [5] »

Dans un autre sermon sur l’Assomption, Isaac de l’Étoile élargit sa réflexion à l’union de Marie et de l’Église dont elle est la figure : « Les hommes, en eux-mêmes, par leur naissance selon la chair, sont une multitude ; mais par la seconde naissance, la naissance divine, ils ne sont avec lui qu’un seul. Le seul Christ, unique et total, c’est la tête et le corps.

Et ce Christ unique est le Fils d’un seul Dieu, dans le ciel et d’une seule mère sur la terre. Il y a beaucoup de fils, et il n’y a qu’un seul fils. Et de même que la tête et le corps sont un seul fils et plusieurs fils, de même Marie et l’Église, sont une seule mère et plusieurs mères, une seule vierge et plusieurs vierges. L’une et l’autre ont conçu du Saint-Esprit, sans attrait charnel (…) L’une a engendré, sans aucun péché, une tête pour le corps ; l’autre a fait naître, dans la rémission des péchés, un corps pour la tête. L’une et l’autre sont mères du Christ, mais aucune des deux ne l’enfante tout entier sans l’autre. Aussi c’est à juste titre que, dans les Écritures divinement inspirées, ce qui est dit en général de la vierge mère qu’est l’Église, s’applique en particulier à la Vierge Marie ; et ce qui est dit de la vierge mère qu’est Marie, en particulier, se comprend en général de la vierge mère qu’est l’Église.

De plus, chaque âme croyante est également, à sa manière propre, épouse du Verbe de Dieu, mère, fille et sœur du Christ, vierge et féconde. Ainsi donc c’est la Sagesse même de Dieu, le Verbe du Père, qui désigne à la fois l’Église au sens universel, Marie, dans un sens très spécial et chaque âme croyante en particulier.

C’est pourquoi l’Écriture dit : « Je demeurerai dans l’héritage du Seigneur ». L’héritage du Seigneur, dans sa totalité, c’est l’Église, c’est tout spécialement Marie, et c’est l’âme de chaque croyant en particulier. En la demeure du sein de Marie, le Christ est resté neuf mois ; en la demeure de la foi de l’Église, il restera jusqu’à la fin du monde ; et dans la connaissance et l’amour du croyant, pour les siècles des siècles[6] ».

Au XIIIe siècle, le grand théologien dominicain, saint Thomas d’Aquin voit dans les noces de Cana l’image de l’union mystique du Christ et de l’Église, union commencée à l’Annonciation : « Ces épousailles eurent leur commencement dans le sein de la Vierge, lorsque Dieu le Père unit la nature humaine à son Fils dans l’unité de la personne, en sorte que le lit nuptial de cette union fut le sein virginal … Ce mariage fut rendu public lorsque l’Église s’est unie au Verbe par la foi[7] ».

Le Docteur Angélique s’inspire de la pensée de saint Augustin pour qui le sein de la Vierge Marie est une chambre nuptiale où s’unissent dans la personne du Verbe la nature divine et la nature humaine. Pour saint Augustin, le corps de Jésus s’unit à l’Église formant ainsi « le Christ total, Tête et Corps[8] ».

L’Incarnation comporte une dimension ecclésiale. Marie a accueilli le Verbe au nom de l’humanité et pour l’humanité. Marie, nouvelle Ève, accomplit la prophétie du livre de la Genèse en écrasant la tête du serpent par sa foi (cf. Gn 3,15). Elle est aussi la femme de l’Apocalypse qui enfante une nouvelle humanité (cf. Ap 12).

La Constitution pastorale sur l’Église dans le monde de ce temps « Gaudium et spes » enseigne que « par son Incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme » (n°22,2). Par conséquent, la Vierge Marie est devenue aussi mère de cette humanité ce qui peut expliquer en partie la dévotion des croyants des religions non chrétiennes qui se rendent en pèlerinage dans les sanctuaires mariaux comme Lourdes ou Notre-Dame de la Garde à Marseille.

Vénérer la Vierge Marie

Plus récemment, le père Marie-Joseph Lagrange (1855-1938), dominicain, fondateur de l’École biblique de Jérusalem notait dans son Journal spirituel au cours de son noviciat au couvent royal de Saint-Maximin : « La bienheureuse Vierge Marie a détruit dans sa personne toutes les hérésies : elle est Mère de Dieu, donc, le Fils de Dieu, Jésus-Christ, n’est qu’une seule Personne, et il a deux natures puisqu’il est aussi vraiment son Fils, né de sa substance[9] ».

L’histoire de l’Église montre aussi comment la fréquentation de la Vierge Marie dans la prière loin d’éloigner les fidèles du Christ les a rapprochés avec justesse de leur mystère.

Aussi le Concile Vatican II exhorte-t-il les chrétiens à vénérer la Vierge Marie avec amour, en lui adressant des prières d’invocation et en cherchant à imiter sa foi[10].

Il arrive que des sociologues s’étonnent de l’impact de la spiritualité mariale auprès des chrétiens qui ont subi la violence, l’emprisonnement, la pauvreté et toutes sortes de persécutions. Avec la Vierge Marie, ils ont gardé la foi au Christ, le seul médiateur entre Dieu et les hommes.

Mère spirituelle des chrétiens, Mère de l’Église, la Vierge Marie, femme au regard pénétrant, active dans son amour, conduit au Christ comme elle l’a fait lors des noces de Cana : « Faites tout ce qu’il vous dira » (Jn 2,5).

 

[1] Saint Cyprien de Carthage : « Habere non potest Deum patrem qui ecclesiam non habet matrem », De catholica ecclesiae unitate, 6 (CSEL 3/1,214).
[2] Saint Augustin, Sermo 92 : De Alleluia (Miscellanea Agostiniana I, Rome, 1930, 332-333).
[3] Saint Bède, Expl. Apoc., 11,12 (PL 93, 166D)
[4] Isaac de l’Étoile (1100-1178), moine de Pontigny, puis abbé de l’Étoile en Poitou, ami de saint Thomas Becket.
[5] Sermon d’Isaac de l’Étoile. Liturgie des heures IV. Temps ordinaire. 23e semaine.
[6] Sermon d’Isaac de l’Étoile pour l’Assomption. Marie et l’Église. La liturgie des heures I. Avent – Noël. II Samedi de l’Avent.
[7] Saint Thomas d’Aquin, In Ioan. 1, n°338.
[8] Cf. Jean-Pierre TORRELL, Le Christ en ses mystères. La vie et l’œuvre de Jésus selon saint Thomas d’Aquin, tome I. Paris. Desclée. 1999.  PP. 76-77.
[9] Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel. Paris. Édition du Cerf. 2014. 16 novembre 1880. P. 104.
[10] Concile Vatican II. Lumen gentium. Chapitre VIII. « La bienheureuse Vierge Marie, Mère de Dieu, dans le mystère du Christ et de l’Église ». n°66-67

5 juin 2022 : Solennité de la Pentecôte

Promesse de la mission de l’Esprit Saint, esprit d’amour

« Demeurant auprès de vous, je vous ai dit ces choses ; mais le Défenseur, l’Esprit Saint que mon Père enverra en mon nom, celui-là vous enseignera tout et vous remettra dans l’esprit tout ce que vous ai dit (Jean 14, 25-26) ».

Dans son Évangile selon saint Jean, Lecoffre-Gabalda, 1936, p. 394, le père Lagrange commente ce texte :

  • La liaison avec ce qui précède se fait sur l’idée de la parole. Les commandements de Jésus étant caractérisé comme ses paroles, ces paroles se sont fondues dans l’unité de la doctrine. C’est cette doctrine qu’il a exprimée jusqu’à présent, pendant qu’il était sur la terre, demeurant ainsi auprès de ses disciples. Mais il va partir, et il a déjà désigné celui qui doit le remplacer.
  • C’est le Défenseur qui figure ici bien clairement dans l’office de maître de doctrine. Il sera envoyé par le Père, non plus à la prière du Fils, mais, ce qui est plus en situation, pour tenir la place du Fils. Le Paraclet, qualifié déjà esprit de vérité est ici l’Esprit Saint, terme connu par la Bible. Sa fonction ne sera pas seulement de rappeler les paroles de Jésus, puisque le terme emploie deux verbes : il enseignera et il rappellera. (…) Le nom même d’Esprit indique la nature de cet enseignement, par suggestion intérieure, plutôt que par la parole. C’est sur cette assistance que s’appuie l’Église quand elle propose la règle de foi soit d’après l’Écriture, soit d’après la Tradition.

Prière à l’Esprit Saint

« Esprit Saint, je Te demande le don de la Sagesse, pour une meilleure compréhension, de Toi et de Tes divines Perfections. 

Je Te demande le don de l’Intelligence, pour une meilleure compréhension de l’Esprit des Mystères de la sainte Foi. 

Donne-moi le don de Science, pour que je sache orienter ma vie selon les principes de cette Foi. 

Donne-moi le don de Conseil, afin qu’en toute chose je puisse chercher conseil auprès de Toi et le trouver toujours auprès de Toi. 

Donne-moi le don de Force pour qu’aucune peur ou considération terrestre ne puisse m’arracher à Toi. 

Donne-moi le don de Piété, afin que je puisse toujours servir ta Majesté divine avec amour filial. 

Donne- moi le don de Crainte de Dieu pour qu’aucune peur ou considération terrestre ne puisse m’arracher à Toi. » 

Ainsi soit-il.

Saint Jean-Paul II (1920-2005)

Photo : https://www.lejourduseigneur.com/faq/pourquoi-esprit-saint-symbole-colombe

Écho de notre page Facebook : mai 2022

31 mai 2022
Belle fête de la Visitation de la Vierge Marie à sa cousine Elisabeth. Magnificat!
Prions le Rosaire pour la Paix en communion avec le pape François.
Bonne fête aux Equipes du Rosaire. Le père Joseph Eyquem O.P., leur fondateur, voyait dans la Visitation la référence évangélique des Equipes du Rosaire.
Viens Esprit Saint !
Depuis Tananarive (Madagascar), avec ma prière. Fr. Manuel.
La Vierge Marie, Mère de l’Église
Mémoire liturgique : lundi de Pentecôte, le 6 juin 2022.
Fr. Manuel Rivero O.P.
C’est le bienheureux pape Paul VI qui a tenu à vénérer la Vierge Marie sous le vocable de « Mère de l’Église » au cours du Concile Vatican II, le 21 novembre 1964, lors du discours d’approbation de la Constitution dogmatique sur l’Église « Lumen Gentium », tout en ne faisant pas partie de celle-ci. De son côté, le Catéchisme de l’Église catholique a intégré officiellement dans la foi catholique ce vocable riche en signification théologique, même s’il n’a pas été le résultat d’un vote lors de ce Concile. Le Catéchisme cite ce vocable dans le commentaire de l’article du Credo sur l’Église : « Je crois à la sainte Église catholique ». À la suite de « Lumen Gentium » au chapitre VIII qui situe la Vierge Marie dans le mystère du Christ et de l’Église, le Catéchisme reprend l’expression « Mère de l’Église » dans le contexte de la vie du Sauveur et au cœur de l’Église. Il convient de se souvenir qu’un certain nombre d’évêques conciliaires avaient souhaité un texte sur la Vierge Marie à part entière. Dans le souffle de l’Esprit, les pères conciliaires choisirent de présenter la Vierge Marie plongée dans le mystère du Christ et comme membre éminent de l’Église.
L’Église, Mère des chrétiens
Au cours des premiers siècles de l’histoire de l’Église, les grands théologiens sont africains. Les Pères de l’Église ont mis en lumière la maternité spirituelle de la Vierge Marie envers les chrétiens. C’est ainsi que saint Cyprien, évêque de Carthage, martyr en 258, déclarait : « On ne peut pas avoir Dieu pour père quand on n’a pas l’Église pour mère ».
Plus tard, saint Augustin (+430) prêchera à ses fidèles : « Nul ne peut compter sur la grâce de Dieu son Père, s’il méprise l’Église sa mère ».
Au VIIIe siècle, en Angleterre, saint Bède le Vénérable, écrira : « Toujours à nouveau l’Église engendre le Christ, chaque jour l’Église engendre l’Église ». Par le sacrement du baptême, par la prédication et le témoignage, l’Église donne naissance au Christ dans le cœur des hommes. En engendrant le Christ, elle s’engendre elle-même.
Saint Paul, célèbre le Christ « Tête du Corps, c’est-à-dire de l’Église » (Col 1,18). Dans son épître aux Colossiens, l’apôtre des nations appelle l’Église « Corps du Christ » (Col 1,24). L’image du corps humain avec la tête et ses membres correspond au Christ total, qui rassemble dans l’unité le Christ, sa Tête, et les chrétiens, ses membres. Dans son épître aux Corinthiens (1 Cor 12,12.27), saint Paul explique la dépendance des membres du même corps avec ses différentes fonctions, image qui s’applique à l’Église, « le Christ répandu et communiqué », selon la belle formule de Bossuet, où chaque baptisé participe à la vie du Fils de Dieu en tant que membre vivant de son Corps.
Le Christ ressuscité est devenu inséparable de son Église. L’Église n’existe qu’unie au Christ, sa Tête. Le Christ et l’Église forment le Christ total : sa Tête et ses membres. Inutile de parler du Christ sans son Église. Erreur que d’imaginer l’Église comme existant sans le Christ.
La Vierge Marie, Mère du Christ, Mère de l’Église
La foi de l’Église trouve sa naissance dans la Bible. La prière de l’Église manifeste aussi le projet de salut de Dieu pour l’humanité : « Lex orandi, ex credendi » (« La loi de la prière est la loi de la foi »). C’est pourquoi il convient de faire appel à la liturgie de l’Église pour comprendre le mystère de la Vierge Marie. À l’Annonciation, la Vierge Marie est devenue la Mère du Fils de Dieu fait homme, qui recevra le nom de Jésus. L’événement de l’Annonciation représente non seulement la nouveauté de l’Incarnation mais aussi le commencement de l’Église. La liturgie de cette fête appelée par certains Pères de l’Église « la fête de la racine », car cachée et fondatrice, exprime le mystère de l’accueil du Fils de Dieu « par la foi de Marie » et sa tendresse maternelle envers le corps de son fils Jésus (cf. Préface de la messe) tandis que la prière sur les offrandes met en lumière la naissance de l’Église, Corps du Christ : « L’Église n’oublie pas qu’elle a commencé le jour où ton Verbe s’est fait chair ».
Si Marie est mère de Jésus, elle est aussi la mère de l’Église. Étant la Mère de la Tête du Corps elle demeure aussi la Mère du reste du Corps, les membres unis au Christ par la foi et le baptême. S’il n’est pas possible de séparer la Tête du Corps ; il n’est pas possible non plus de séparer la maternité divine de Marie de sa maternité spirituelle envers le Corps de son Fils Jésus, l’Église.
Un théologien du XIIe siècle, Isaac de l’Étoile , moine cistercien, a su mettre en valeur l’union du Christ et de l’Église, la maternité de Marie envers le Christ et à l’égard de l’Église : « ʺCe que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare donc pas. Ce mystère est grand, je veux dire qu’il s’applique au Christ et à l’Église.ʺ Garde-toi bien de séparer la tête du corps ; n’empêche pas le Christ d’exister tout entier ; car le Christ n’existe nulle part tout entier sans l’Église, ni l’Église sans le Christ. Le Christ total, intégral, c’est la tête et le corps. »
Dans un autre sermon sur l’Assomption, Isaac de l’Étoile élargit sa réflexion à l’union de Marie et de l’Église dont elle est la figure : « Les hommes, en eux-mêmes, par leur naissance selon la chair, sont une multitude ; mais par la seconde naissance, la naissance divine, ils ne sont avec lui qu’un seul. Le seul Christ, unique et total, c’est la tête et le corps.
Et ce Christ unique est le Fils d’un seul Dieu, dans le ciel et d’une seule mère sur la terre. Il y a beaucoup de fils, et il n’y a qu’un seul fils. Et de même que la tête et le corps sont un seul fils et plusieurs fils, de même Marie et l’Église, sont une seule mère et plusieurs mères, une seule vierge et plusieurs vierges. L’une et l’autre ont conçu du Saint-Esprit, sans attrait charnel (…) L’une a engendré, sans aucun péché, une tête pour le corps ; l’autre a fait naître, dans la rémission des péchés, un corps pour la tête. L’une et l’autre sont mères du Christ, mais aucune des deux ne l’enfante tout entier sans l’autre. Aussi c’est à juste titre que, dans les Écritures divinement inspirées, ce qui est dit en général de la vierge mère qu’est l’Église, s’applique en particulier à la Vierge Marie ; et ce qui est dit de la vierge mère qu’est Marie, en particulier, se comprend en général de la vierge mère qu’est l’Église.
De plus, chaque âme croyante est également, à sa manière propre, épouse du Verbe de Dieu, mère, fille et sœur du Christ, vierge et féconde. Ainsi donc c’est la Sagesse même de Dieu, le Verbe du Père, qui désigne à la fois l’Église au sens universel, Marie, dans un sens très spécial et chaque âme croyante en particulier.
C’est pourquoi l’Écriture dit : « Je demeurerai dans l’héritage du Seigneur ». L’héritage du Seigneur, dans sa totalité, c’est l’Église, c’est tout spécialement Marie, et c’est l’âme de chaque croyant en particulier. En la demeure du sein de Marie, le Christ est resté neuf mois ; en la demeure de la foi de l’Église, il restera jusqu’à la fin du monde ; et dans la connaissance et l’amour du croyant, pour les siècles des siècles ».
Au XIIIe siècle, le grand théologien dominicain, saint Thomas d’Aquin voit dans les noces de Cana l’image de l’union mystique du Christ et de l’Église, union commencée à l’Annonciation : « Ces épousailles eurent leur commencement dans le sein de la Vierge, lorsque Dieu le Père unit la nature humaine à son Fils dans l’unité de la personne, en sorte que le lit nuptial de cette union fut le sein virginal … Ce mariage fut rendu public lorsque l’Église s’est unie au Verbe par la foi ».
Le Docteur Angélique s’inspire de la pensée de saint Augustin pour qui le sein de la Vierge Marie est une chambre nuptiale où s’unissent dans la personne du Verbe la nature divine et la nature humaine. Pour saint Augustin, le corps de Jésus s’unit à l’Église formant ainsi « le Christ total, Tête et Corps ».
L’Incarnation comporte une dimension ecclésiale. Marie a accueilli le Verbe au nom de l’humanité et pour l’humanité. Marie, nouvelle Ève, accomplit la prophétie du livre de la Genèse en écrasant la tête du serpent par sa foi (cf. Gn 3,15). Elle est aussi la femme de l’Apocalypse qui enfante une nouvelle humanité (cf. Ap 12).
La Constitution pastorale sur l’Église dans le monde de ce temps « Gaudium et spes » enseigne que « par son Incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme » (n°22,2). Par conséquent, la Vierge Marie est devenue aussi mère de cette humanité ce qui peut expliquer en partie la dévotion des croyants des religions non chrétiennes qui se rendent en pèlerinage dans les sanctuaires mariaux comme Lourdes ou Notre-Dame de la Garde à Marseille.
Vénérer la Vierge Marie
Plus récemment, le père Marie-Joseph Lagrange (1855-1938), dominicain, fondateur de l’École biblique de Jérusalem notait dans son Journal spirituel au cours de son noviciat au couvent royal de Saint-Maximin : « La bienheureuse Vierge Marie a détruit dans sa personne toutes les hérésies : elle est Mère de Dieu, donc, le Fils de Dieu, Jésus-Christ, n’est qu’une seule Personne, et il a deux natures puisqu’il est aussi vraiment son Fils, né de sa substance ».
L’histoire de l’Église montre aussi comment la fréquentation de la Vierge Marie dans la prière loin d’éloigner les fidèles du Christ les a rapprochés avec justesse de leur mystère.
Aussi le Concile Vatican II exhorte-t-il les chrétiens à vénérer la Vierge Marie avec amour, en lui adressant des prières d’invocation et en cherchant à imiter sa foi .
Il arrive que des sociologues s’étonnent de l’impact de la spiritualité mariale auprès des chrétiens qui ont subi la violence, l’emprisonnement, la pauvreté et toutes sortes de persécutions. Avec la Vierge Marie, ils ont gardé la foi au Christ, le seul médiateur entre Dieu et les hommes.
Mère spirituelle des chrétiens, Mère de l’Église, la Vierge Marie, femme au regard pénétrant, active dans son amour, conduit au Christ comme elle l’a fait lors des noces de Cana : « Faites tout ce qu’il vous dira » (Jn 2,5).
Photos : chasuble du père Lacordaire O.P.

 

31 mai 2022

La Visitation de Marie à Élisabeth

En ces jours-là, Marie se mit en route et partit avec diligence pour la montagne, vers une ville de Judée. Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth. Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors Élisabeth fut remplie de l’Esprit Saint, et s’écria d’une voix forte : « Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni. D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? Car lorsque tes paroles de salutation sont parvenues à mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en moi. Heureuse celle qui a cru que s’accomplirait ce qui lui a été dit de la part du Seigneur » (Luc 1, 39-45).

Pour approfondir :

  • Et Marie répondit par les strophes du cantique que nous nommons le Marie s’est visiblement inspirée du cantique d’Anne (Premier livre de Samuel 2, 1 ss), c’est que dès les premiers mots, il s’élève fort au-dessus de la situation d’une femme stérile devenue mère ; elle chante magnifiquement la victoire du Dieu d’Israël, parce que l’arc des puissants est brisé : Iahvé fait mourir et il fait vivre, il jugera les extrémités de la terre. C’est seulement à cause de cet accent triomphal, du pressentiment messianique qui a soulevé l’esprit et le cœur de la prophétesse vers un avenir si haut, que le cantique d’Anne a pu fournir à Marie quelques pensées. Ce qui est propre au Magnificat, c’est que cette fois les expressions ne sont pas trop fortes pour dire ce qui s’est opéré en Marie, et qu’elles paraissent à peine suffisantes pour exprimer l’humilité de celle qui glorifie le Seigneur. Pour que toute gloire Lui soit rendue, elle avoue sa bassesse, et cependant, répondant à la félicitation d’Élisabeth, elle avoue que toutes les générations la nommeront bienheureuse. Tandis que le chant d’Anne aurait pu être placé dans la bouche d’un héros, celui de Marie est bien celui de la mère de Jésus. Le regard de Dieu, qui de sa part signifie bienveillance, s’étendra de la même façon sur ceux qui sont petits et connaissent leur misère, tandis que les puissants, les riches comblés, qui s’élèvent par orgueil dans les pensées de leur cœur, seront abaissés et demeureront vides. Et tandis que le regard d’Anne étend déjà la victoire de Dieu aux extrémités de la terre, Marie concentre sa louange sur la grande œuvre de miséricorde promise à Abraham et à sa race, à jamais.
  • Tout est donc en situation dans le Magnificat, même dans cette part indispensable d’honneur rendu aux attributs de Seigneur ; ce n’est point l’enthousiasme d’un disciple de Jésus, écrivant à la lumière de ses miracles, et, de sa résurrection, mais la joie discrète d’une fille de David, d’une fille d’Abraham, remontant le cours des âges pour y rencontrer la promesse, et qui la sait accomplie en elle, rayonnante déjà de l’auréole promise à son front de mère par l’acclamation suppliante de toutes les générations. Et en effet, toutes les générations accomplissent cette prophétie en la saluant Mère de Dieu. (Extrait du commentaire du P. Lagrange dans L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, pp. 51-52.)

Photo : La Visitation par Carl Heinrich Bloch (19e)

29 mai 2022

Afin que tous soient un

« Père ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi, et qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée parce que tu m’as aimé avant la fondation du monde.

Père juste, le monde ne t’a pas connu, mais moi je t’ai connu, et ceux-ci ont reconnu que tu m’as envoyé. Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître, pour que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux, et que moi aussi, je sois en eux (Jean 17, 24-26) ».

  • Que tous ceux qui souhaitent l’unité des chrétiens sentent leurs désirs s’enflammer en lisant cette parole : Je prie « afin que tous soient un, comme toi-même, ô Père, tu es en moi et moi en toi, afin qu’eux aussi soient en nous ». Cette unité, c’est la marque divine de la religion de Jésus : « de façon que le monde croie que tu m’as envoyé ». (extrait du commentaire du P. Marie Joseph Lagrange, o.p. L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, p. 568.)

26 mai 2022

L’Ascension du Seigneur

Jésus emmena ses disciples jusque vers Béthanie ; et, levant les mains, il les bénit. Or, tandis qu’il les bénissait, il se sépara d’eux et il était emporté au ciel. Et eux s’étant prosternés devant lui, retournèrent à Jérusalem avec une grande joie. Et ils étaient continuellement dans le Temple, bénissant Dieu (Luc 24, 50-53).

– Les Apôtres sortent, parce qu’ils étaient dans la ville, où ils vont retourner (v. 52). On n’est pas entré à Béthanie. L’ancienne tradition, supposant avec vraisemblance que Jésus avait continué de s’entretenir avec ses apôtres, situait ce suprême entretien à la grotte des discours eschatologiques, de sorte que l’église de l’Éléona était à la fois le mémorial des entretiens les plus importants et de l’Ascension (Vincent et Abel, Jérusalem nouvelle, ch. XIV). – Les mains élevées pour bénir, selon l’antique geste (Lévitique 9, 22 ; Genèse 48, 14).

Se prosterner devant le Maître glorifié après un dernier regard était dans les convenances. La joie, moins indiquée par la nature, procède déjà d’une impulsion de l’Esprit de Jésus ; ils voient son triomphe et ils attendent son secours.

La reconnaissance qui remplissait leur cœur s’épanchait dans le Temple, qui était pour eux comme pour tout Israël le lieu de la prière. Luc ne dit rien de l’avenir ; il y avait dans l’évangile assez de sujets de bénir Dieu. (Quelques extraits du commentaire du père Marie-Joseph Lagrange o.p. dans l’Évangile selon saint Luc, Lecoffre-Gabalda, 1941, pp. 616-617.

Illustration : Ascension. L’une des mosaïques de la chapelle des anges au Sanctuaire du Mont Sainte-Odile (Bas-Rhin), inspirée du Hortus Deliciarum : encyclopédie chrétienne, réalisée entre 1159 et 1175 par Herrade de Landsberg (aussi appelée Herrade de Hohenbourg), et ses moniales au couvent de Hohenbourg (mont Sainte-Odile), dont l’original a été détruit, ont été réalisées en 1947 par les céramistes Alphonse Gentil et François Eugène Bourdet.

Les anges annonçant le retour du Sauveur. https://www.mont-sainte-odile.com/2022/03/24/decouverte-chapelle/

22 mai 2022

Évangile de ce dimanche (Jean 14, 23-29) commenté par le père Marie-Joseph Lagrange o.p. L’Évangile selon saint Jean, Lecoffre-Gabalda, 1936.

(23) – Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole et mon Père l’aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure chez lui.

– La réponse n’est pas directe, mais c’est bien une réponse : c’est seulement dans le cas que j’avais dit que je me manifesterai, ce qui exclut le monde indifférent ou hostile. Mais il est dit de plus que le Père aussi viendra, ce qu’on pouvait supposer, puisque le Fils est si intimement uni au Père, et, ce qui est plus nouveau, cette venue sera une demeure. Dieu habitait dans Israël (Ex 14, 8, etc.) ; cette cohabitation, atténuée par la disparition de l’arche devait se reproduire (Za 2, 10), et s’était en fait réalisée dans l’Incarnation (1, 14). Une fois le Christ remonté vers son Père, tous deux viendront, mais seulement en chacun de ceux qui aiment le Fils et observent ses commandements. Cette demeure est intérieure, c’est seulement une formule conforme à la métaphore : on habite chez quelqu’un.

(24) Celui qui ne m’aime pas ne garde pas mes paroles ; et la parole que vous avez entendue n’est pas la mienne, mais celle du Père qui m’a envoyé.

– Le revers de la médaille. Ceux qui ne m’aiment pas sont aussi ceux qui ne gardent pas mes paroles, c’est-à-dire n’observent pas mes commandements. Ils n’observent donc pas non plus ceux du Père, car la parole de Jésus est celle de celui qui l’a envoyé, comme il l’a déjà dit plus d’une fois. Ce sont ceux-là qui figurent ici le monde. Le Père ne saurait les aimer : comment viendrait-il amicalement chez eux avec le Fils, comment le Fils se ferait-il connaître à eux comme un ami ?

(25-26) Demeurant auprès de vous, je vous ai dit ces choses ; mais le Défenseur, l’Esprit Saint que mon Père enverra en mon nom, celui-là vous enseignera tout et vous remettra dans l’esprit tout ce que je vous ai dit.

Nouvelle promesse de la mission de l’Esprit.

Les deux versets sont comme la conclusion de l’exhortation aux disciples touchant leur situation future, précédant les dernières paroles de consolation (27-31). C’est en même temps une allusion à l’enseignement que Jésus a donné jusqu’à présent, et qui sera continué par l’action du Paraclet déjà promis.

C’est le Défenseur qui figure ici bien clairement dans l’office de maître de doctrine. Il sera envoyé par le Père, non plus (16) à la prière du Fils, mais ce qui est plus en situation, pour tenir la place du Fils et parler en son nom ; comme le Fils est venu de la part du Père et pour parler en son nom, ainsi l’Esprit Saint parlera au nom du Fils. Le Paraclet, qualifié déjà esprit de vérité (17) est ici l’Esprit Saint (1, 33), terme connu par la Bible. Sa fonction ne sera pas seulement de rappeler les paroles de Jésus : il enseignera et il rappellera. C’est bien le même groupe de vérités que le Paraclet enseignera et rappellera. D’autre part, il faut admettre un nouvel enseignement qui complètera celui de Jésus (16, 12 s.), non par addition de vérités autres, mais par un développement où l’on reconnaîtra de quelque manière ce que Jésus avait déjà dit. Le nom même d’Esprit indique la nature de cet enseignement, par suggestion intérieure, plutôt que par la parole. C’est sur assistance que s’appuie l’Église quand elle propose la règle de foi soit d’après l’Écriture, soit d’après la Tradition. Aucun privilège n’est accordé ici à la parole écrite, et l’Église ne saurait errer puisqu’elle a pour maître l’Esprit Saint. Après la mort du dernier Apôtre, il n’y a plus eu dans l’Église de révélation officielle, destinée à toute l’Église ; mais entre l’Ascension et la mort du dernier Apôtre, l’Esprit Saint a sûrement révélé des vérités sinon entièrement nouvelles, du moins qu’on n’aurait pu sans cela dégager de la révélation faite par le Christ.

(27-29) Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; je ne vous la donne pas comme le monde la donne. Que votre cœur ne se trouble et ne s’effraye pas. Vous avez entendu que je vous ai dit : Je m’en vais et je viens à vous. Si vous m’aimiez vous vous réjouiriez parce que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi. Et maintenant je vous ai avertis, avant que cela n’arrive, afin que lorsque cela sera arrivé, vous croyiez.

Les adieux et les dernières paroles d’encouragement

C’est la conclusion du discours qui a commencé avec le chapitre ; elle est parallèle au début par l’invitation à ne pas se troubler par l’annonce du départ et la promesse du retour, surtout par l’appel de la foi. Il y a ici en plus le don de la paix, et même une invitation à la joie, par un contraste saisissant avec la pensée du sacrifice plus imminent ?

Le lien avec ce qui précède serait clair, si l’on pouvait identifier la paix du Christ avec son Esprit. Mais le don de l’Esprit était à venir ; la paix est déjà non seulement léguée mais donnée. Elle sera plus profonde plus tard, mais la forme du don (au présent) empêche de voir ici une suite très exacte de ce qui précède. C’est donc une idée nouvelle qui se présente pour terminer.

On n’a pas manqué de rappeler que depuis l’antiquité les Hébreux se quittaient en se souhaitant la paix. Ce serait le cas ici.

Dans la situation présente, les disciples risquaient de se troubler en perdant leur Maître ; avec lui ils étaient en paix avec Dieu, qu’il leur apprenait à aimer, en paix entre eux, parce que sa voix calmait leurs disputes ; ils ne craignaient pas leurs ennemis, étant confiants dans sa protection. C’est cette paix, la sienne, qu’il leur laisse, comme s’il était présent, par l’assistance qu’il leur a promise. C’est donc grâce à cette paix dont Jésus est la source qu’ils pourront reconnaître sa présence en eux. Jésus parle surtout de l’opposition entre la paix extérieure, la seule que le monde puisse donner quelquefois, et celle qui se maintient au dedans de l’âme, quoi qu’il en soit des périls et de la guerre qu’il faudra affronter, la paix de celui qui va être meurtri par le monde pour obéir à son Père, (semble indiquer un legs), dont par conséquent les disciples jouiront plus tard ; mais sa mort est imminente, et, si l’on peut dire, sa succession déjà ouverte. On conçoit qu’en promettant l’assistance on donne dès à présent l’assurance de la paix et la paix elle-même, disposition spirituelle qui se communique sans formalités. Et en effet les disciples ont besoin de cette paix dès à présent. Ce qui prouve que Jésus ne parle pas spécialement de la paix avec Dieu, par opposition au péché, mais d’une paix fondée sur le secours de Dieu, et affronte la guerre. La prédiction du retour devait encourager les disciples dans leur propre intérêt, puisqu’il allait leur préparer des places. Maintenant abordant un motif encore plus noble, il leur dit que si seulement ils avaient eu jusqu’à présent de l’affection pour lui, ils devraient se réjouir parce qu’il va vers le Père. Le reproche est de ceux que l’on fait aimablement pour amener la protestation : mais oui, je vous aime. Que Jésus vienne vers son Père, c’était assurément un sujet de joie pour lui et ce devrait en être un pour ses disciples. Mais il ajoute un trait spécial une raison de la joie de ce retour : c’est que son Père est plus grand que lui.

10 mai 2022 : jour-anniversaire de la naissance au Ciel du fr. Marie-Joseph Lagrange, o.p.

 

 

Nous sommes en communion avec fr. Manuel Rivero, o.p. qui célèbre la messe de ce jour aux intentions personnelles confiées par chaque adhérent à l’association et pour la béatification du P. Lagrange. Pour faire avancer sa cause, un miracle est attendu.

https://www.mj-lagrange.org

Illustration : Smolenskaya-La Vierge Marie, icône orthodoxe chrétienne.

 

 

7 mai 2022

Suivant la tradition, le mois de mai est consacré à Marie, mois de dévotion particulière pour demander à la Vierge Marie de porter nos prières à Dieu particulièrement aujourd’hui en ce temps incertain dû à la folie humaine.

Marie, reine de la pensée du P. Lagrange

Pour le père Lagrange, Marie était reine de sa pensée, c’est à toute occasion qu’il invoquait son secours, avec la tendresse et la confiance d’un fils, et qu’il se plaisait à lui consacrer ses travaux.

Sous le regard de Jésus et de Marie, la vie du père Lagrange trouvait force et lumière et cette grande paix surnaturelle qui, le rendant insensible aux remous de la vaine gloire ou des craintes puériles, lui faisait dominer toutes les situations dans une volonté de servir si habituelle qu’elle avait fini par régler les divers moments de sa journée.

Au moment de la crucifixion : « Notre piété envers Marie voit aussi, dans l’attitude de celle qui se tenait au pied de la croix, un indice de la place qu’elle occupe dans notre rédemption. Elle compatissait aux souffrances de son Fils, elle compatissait à nos maux ; elle souffrait avec lui, sans rien ajouter à ses mérites infinis, mais y joignant les siens ; en s’associant à l’œuvre de celui qu’elle avait donné au monde pour le sauver, non moins participante de son œuvre à sa mort qu’à sa naissance (cf. commentaire du P. Lagrange dans son Évangile selon saint Jean).

Ces quelques phrases se trouvent dans le livre du P. F.-M. Braun, o.p., L’Œuvre du père Lagrange, Imprimerie Saint-Paul, 1943.

Prière pour l’Ukraine

Dieu notre Père, Père de la famille humaine, daigne prendre en pitié le peuple ukrainien agressé sur sa propre terre, et délivre-le de ses ennemis. Donne-lui de retrouver sa juste autonomie dans ses frontières et de pouvoir décider par lui-même de son avenir.

Père, nous te prions pour son agresseur, et nous te demandons de venir toucher son cœur, pour que cessent les combats et qu’il quitte l’Ukraine.

Père, enlève aussi du cœur de tout être humain les germes de haine, de domination, de division, et l’esprit de vengeance ; mets-en chacun un esprit de respect, de paix, de pardon, un désir de réconciliation et de fraternité.

Père, tu as envoyé dans le monde ton Fils Jésus, le Prince de la paix, pour libérer l’humanité des forces du mal. Il a déclaré bienheureux les artisans de paix ; fais à ses disciples la grâce de l’amour désintéressé, de l’humilité, du courage, pour qu’ils soient promoteurs de la paix dans le monde.

Que la Vierge Marie, Reine de la paix, veille sur l’Ukraine et sur le monde entier !

+ Guy de Kerimel
Archevêque de Toulouse

Illustration : Hodegetria ou Notre Dame de Kiev, soutien des humbles. Icône dont l’auteur est inconnu.

Ukrainienne priant.

Écho de notre page Facebook : avril 2022

 

28 avril 2022

 

« L’humble, continuelle et fidèle prière. Cette prière est une mère, tout embrasée et enivrée du Précieux Sang ; elle nourrit les vertus sur son sein. » (Ste Catherine de Sienne. Lettres, Cartier, 2, 118.)

(Une des pensées de la sainte citée par le Serviteur de Dieu Fr. Marie-Joseph Lagrange o.p. dans son Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 83.)

Illustration : Ste Catherine de Sienne par Guidoccio Cozzarelli(1450-1517)-Ste Catherine change son cœur avec celui de Jésus-Pinacothèque nationale.

 

 

 

24 avril 2022

Dimanche de la Divine Miséricorde institué par Saint Jean Paul II en 2000

Christ est ressuscité, Alléluia !

Le huitième jour, soudain, Jésus se trouva de nouveau parmi ses Apôtres

Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, les portes étant fermées. Et il se tint au milieu et dit : « Paix à vous ! » Ensuite il dit à Thomas : « Donne ton doigt ici. Et vois mes mains. Et donne ta main ; et mets-la dans mon côté. Et ne sois pas incrédule, mais croyant. » Thomas répondit et lui dit : « Mon Seigneur ! et mon Dieu ! » Jésus lui dit : Parce que tu m’as vu, tu as cru ? Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru ». » (Jean 20, 26-29)

— Thomas laissa-t-il le Christ s’emparer de sa main et la conduire à la blessure de son côté, ou renonçant à sa logique, se rendit-il à l’évidence de ce qu’il voyait ? C’est à lui, l’incrédule, qu’échappa le premier acte de foi explicite en la divinité du Ressuscité. Il s’écria : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Et Jésus, avec un sourire de pardon : « Tu crois après avoir vu ? » Ce n’est pas étonnant, ni méritoire ! Heureux ceux qui croient sans avoir vu ! Et Thomas lui-même en était là. Il avait excédé en refusant de croire à la résurrection de son maître sur le témoignage de ses frères dont il connaissait la sincérité. C’est ce que Jésus fait ressortir doucement ; il a voulu voir de ses yeux le corps du ressuscité, et l’ayant vu, il n’avait plus à s’en rapporter à d’autres sur ce fait. Mais comme a très bien dit saint Grégoire, ayant vu l’humanité glorieuse, il a cru à la divinité, ce qui est le véritable acte de foi. Cet acte exigeait déjà, il exige encore, l’adhésion de l’intelligence à une vérité révélée par le Christ lui-même et par conséquent révélée par Dieu. Cette adhésion était plus facile aux Apôtres, parce que l’affirmation de Jésus était confirmée par sa résurrection. Mais ils étaient plus heureux de croire en sa divinité que d’avoir joui de la présence sensible de son humanité. Ce bonheur, prélude de la béatitude éternelle, est aussi le lot de ceux qui croient sans avoir goûté la même consolation. Ils doivent d’ailleurs se souvenir que Jésus leur a promis que sa présence intérieure ne leur ferait pas défaut, dans la compagnie du Père et de l’Esprit Saint, présence qui rend la foi plus facile et plus douce.

(Marie-Joseph Lagrange o.p. L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, extrait p. 639.)

20 avril 2021

L’apparition aux disciples d’Emmaous

« Reste avec nous, car le soir vient et le jour est déjà sur son déclin. » Et il entra avec eux. Et après s’être mis à table avec eux, prenant le pain, il bénit Dieu ; et l’ayant rompu, il le leur donnait. Les yeux s’ouvrirent : et ils le reconnurent. Et lui disparut d’auprès d’eux. Et ils se dirent l’un à l’autre : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait dans le chemin, tandis qu’il nous découvrait les Écritures ? » (Luc, 24, 29-32)

— On était arrivé près du village où se rendaient les deux disciples. Jésus allait droit devant lui, sans paraître remarquer qu’ils se disposaient à prendre un chemin amorcé sur la grande route. Mais les charitables pèlerins, ravis de cette exposition de l’Écriture qui leur ouvrait un monde nouveau, ne voulurent pas se séparer sitôt d’un tel compagnon. Ils avaient marché plus de trois heures, le jour déclinait. Pourquoi ne passerait-il pas la nuit dans leur demeure ? En pareil cas on insiste sur l’heure tardive : il devait cependant être au moins trois heures de l’après-midi. L’hôte introduit, on prépara le repas du soir. Étendu avec eux auprès de la table, Jésus, dont ils avaient reconnu l’autorité singulière, prit le pain, prononça une formule de bénédiction, le rompit et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent ; ils le reconnurent, mais il disparut. Et ils se dirent l’un à l’autre : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait dans le chemin, tandis qu’il nous découvrait les Écritures ? » Plusieurs ont pensé que leur cœur fut surtout embrasé parce qu’ils mangèrent un pain devenu le corps du Seigneur. Mais rien ne prouve que le Christ ait prononcé une seconde fois les paroles de la consécration. Il ne prendra avec ses apôtres qu’une nourriture ordinaire. Pourquoi ce privilège accordé à ces deux, qui, n’étant pas des Douze, n’étaient pas initiés au geste de Jésus à la Cène ? Si leurs yeux s’étaient ouverts à la manducation, saint Luc n’aurait pas dit qu’ils le reconnurent à la fraction du pain, par conséquent avant de manger. Ce terme ne doit pas être censé dès lors signifier l’eucharistie. (Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, p. 635-636)

Illustration : L’invitation des disciples d’Emmaüs par Duccio du Buoninsegna, 1255-1319.

La cène d’Emmaüs par Diego Velazquez, 1620.

17 avril 2022

Christ est ressuscité, Alleluia !

Le premier jour de la semaine, Marie de Magdala vient de bonne heure, quand il faisait encore nuit, vers le tombeau. Et elle voit la pierre enlevée du tombeau. Elle se met donc à courir et se rend auprès de Simon-Pierre et auprès de l’autre disciple que Jésus aimait et leur dit : « On a enlevé le Seigneur du tombeau ! et nous ne savons où on l’a mis. » Pierre sortit donc et aussi l’autre disciple. Et ils se rendaient au tombeau. Or tous deux couraient ensemble. Et l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau. Et se penchant il voit les bandelettes gisantes ; cependant, il n’entra pas. Arrive donc aussi Simon-Pierre, qui le suivait. Il entra dans le tombeau. Il contemple les bandelettes gisantes et le suaire qui était sur sa tête, non pas gisant avec des bandelettes mais roulé séparément dans un endroit. Alors donc l’autre disciple entra aussi, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Et il vit. Et il crut. – Car ils ne comprenaient pas encore par l’Écriture qu’il devait ressusciter des morts. (Jean 20, 1-9)

Madeleine avait précédé les apôtres, puisqu’il était encore presque nuit, quand elle s’aperçut que la pierre avait été enlevée, c’est-à-dire roulée, de façon que le tombeau était ouvert. Les gardes avaient disparu, mais elle ne s’en étonna pas, ignorant qu’on les avait placés là. Un regard furtif lui permit de constater que le corps avait disparu. Elle ne vit qu’un ange : Jésus s’était réservé de l’informer lui-même. Aussitôt dans son inquiétude extrême, craignant une profanation du corps adoré de Jésus, elle prit sa course et alla droit à Simon-Pierre et au disciple que Jésus aimait. Elle était hors d’elle-même, n’hésitant pas à conclure : « on a enlevé le Seigneur du tombeau, et nous ne savons pas où on l’a mis. » Pierre et Jean étaient probablement ensemble lorsque Marie de Magdala leur avait porté la fatale nouvelle

C’est ce point que saint Jean a raconté en détail, car il prit part à cette recherche anxieuse, se désignant lui-même comme cet « autre disciple que Jésus aimait ». Ils partirent aussitôt. Très affectés, tous deux couraient. Jean, plus jeune, courut plus vite que Pierre et arriva donc le premier. Cependant il n’entra pas, sûrement par égard pour son compagnon. Il se pencha seulement et vit au-delà de la petite antichambre les bandelettes gisantes. Pierre qui le suivait entra résolument jusque dans le tombeau. Il vit lui aussi et plus nettement les bandelettes, ce qui prouvait bien qu’on n’avait pas enlevé le corps, car on l’eût pris tel quel. Et, fait plus étonnant encore, le linge qu’on avait placé sur la tête n’était pas mêlé aux bandelettes en désordre ; il était roulé seul à part. L’autre disciple entra et vit la même chose. Tous deux gardèrent le silence, saisis et recueillis, et n’échangèrent pas leurs impressions. Saint Jean dit seulement que dès lors il crut que Jésus était ressuscité, et ce fut sûrement aussi la conviction de Pierre. Jusqu’à ce moment ils n’avaient pas compris, d’après l’Écriture, que le Christ devait ressusciter. Il l’avait cependant annoncé lui-même à tous ses Apôtres. Mais, l’événement leur paraissait improbable que seule l’évidence du fait eut le pouvoir de les convaincre, et il leur apparut alors que cette consécration suprême du Messie avait été prédite (cf. Isaïe 53,11).

(Marie-Joseph Lagrange o.p. L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, extrait, Artège, 2017.)

16 avril 2022

Le grand silence du Samedi saint

Jésus avait annoncé qu’il ressusciterait. Pour cela, ils (les grands prêtres et les Pharisiens) étaient bien tranquilles. Ce n’était pas à eux qu’on en ferait accroire. Mais le peuple est crédule. Jésus avait des partisans fermement convaincus de ses miracles, confiants dans ses promesses. […] Ce tombeau étant à Joseph avec le jardin, échappant à leur surveillance. Les disciples pouvaient s’y introduire durant la nuit, voler le corps, le faire disparaître, affirmer qu’il était vivant, caché quelque part, qu’il allait reparaître en Messie vainqueur de la mort, comme il l’avait annoncé. Il faut tout prévoir. Pilate en avait assez. Après des accusations en l’air, voici maintenant des sornettes ! À eux de s’arranger. On laissait à leur disposition quelques soldats qu’ils requéraient au besoin, comme lors de l’arrestation de Jésus. Il répondit donc sans s’émouvoir : « Vous avez une garde : allez, prenez vos sûretés comme vous savez faire : « Après leur acharnement de la veille, on pouvait s’en rapporter à eux.

Ils se chargèrent donc de tout, placèrent une garde, et apposèrent des sceaux sur la pierre qui fermait l’entrée. (Marie-Joseph Lagrange o.p., L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, extrait, p. 622)

Illustration : Le grand silence du Samedi saint (Holy Saturday)

15 avril 2022

Vendredi saint

Ô mon Jésus, vous êtes Dieu, mais si vous n’étiez pas l’Homme-Dieu, vous ne seriez pas le plus grand des hommes. Rien de plus humble que votre naissance, de plus vulgaire que votre vie d’ouvrier dans la pauvre maison de Nazareth ; vous venez, comme tout le monde, au baptême de Jean ; vous enseignez, mais dans un langage simple, avec des comparaisons basses et familières ; vous avez des disciples, mais aucun lettré parmi eux. Était-ce donc difficile d’entraîner quelques hommes ignorants ? La foule se presse autour de vous, mais quand elle vous a vu et entendu elle se retire ; vous triomphez à Jérusalem, mais monté sur une ânesse. Vous n’avez pas couru au-devant de la mort en la bravant comme certains héros fameux : vous êtes venu à Jérusalem pour la Pâque et vous vous êtes laissé prendre par la trahison d’un ami. Les Juifs ont si peu reconnu en vous la grandeur de leur Messie tant attendu, si ardemment aimé par avance, qu’ils vous ont livré aux Romains, tout en gardant pour eux la responsabilité du crime. Aucune parole éclatante retentissante ne vous a vengé de la sottise de vos accusateurs, de l’injustice de vos juges ; vous n’avez pas eu la force de porter la croix, vous vous êtes plaint doucement d’être abandonné de Dieu. — Vous êtes mort du plus affreux supplice, et le monde est sauvé, votre Règne demeure. — Ô mon Jésus, vous êtes Dieu.

(Marie-Joseph Lagrange o.p., Journal spirituel. À Saint-Étienne de Salamanque, p. 103)

14 avril 2022

Jeudi saint

Jésus reprend les disciples de leur ambition et leur lave les pieds

Or, avant la fête de Pâque, Jésus sachant que son heure était venue de passer de ce monde vers son Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’à la fin.

Et comme on avait commencé de souper – le diable ayant déjà mis dans le cœur de Judas Iscariote, fils de Simon, le dessein de le livrer – sachant que son Père lui avait tout mis entre les mains, et que c’est de Dieu qu’il est sorti et que c’est vers Dieu qu’il s’en va, il se lève de table, et quitte ses habits et, prenant un linge, il s’en ceignit ; ensuite, il jette de l’eau dans le bassin et se mit en devoir de laver les pieds de ses disciples et de les essuyer avec le linge dont il était ceint.

Il vient donc auprès de Simon-Pierre, qui lui dit : « Seigneur, c’est toi qui me laves les pieds ? » Jésus répondit et lui dit : « Ce que je fais, tu ne le sais pas maintenant, mais tu le comprendras après. » Pierre lui dit : « Non, tu ne me laveras pas les pieds, jamais. » Jésus lui répondit : « Si je ne te lave pas, tu n’as pas de part avec moi. » Simon-Pierre lui dit : « Seigneur, non seulement mes pieds, mais encore les mains, et la tête. » Jésus lui dit : « Celui qui a pris un bain n’a pas besoin de se laver, mais il est pur tout entier. Vous aussi, vous êtes purs, mais… pas tous. » Il savait, en effet, qui était le traître ; c’est pourquoi il a dit : Vous n’êtes pas tous purs.

Lors donc qu’il leur eût lavé les pieds, et qu’il eut repris ses habits et se fut remis à table, il leur dit : « Comprenez-vous ce que je vous ai fait ? Vous m’appeler « Maître » et « Seigneur » ; et vous dites bien, car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Car je vous ai donné un exemple, afin que vous agissiez vous aussi comme j’ai agi envers vous. » (Jean 13, 1-15)

  • L’intention principale de Jésus était de donner à ses disciples un exemple d’humilité qui fût une leçon éternelle dans son Église. Ce qui hausse cette basse fonction jusqu’à l’héroïsme, c’est que lui, sorti de Dieu, et allant à Dieu, savait que Judas Iscariote, fils de Simon, l’un des Douze, songeait en ce moment même à le livrer. Et il lui laverait les pieds comme aux autres. Aussi bien ce n’est pas Judas qui protesta ! Ce fut Pierre, étonné de voir Jésus se lever de table, quitter ses vêtements de dessus, se ceindre d’une sorte de serviette, jeter de l’eau dans le bassin aux ablutions, se mettre à genoux – comment aurait-il fait autrement ? – pour lui laver les pieds. Alors il fit mine de refuser, mais en termes très doux, et qui ont dût coûter à son caractère : « Seigneur, c’est vous qui me lavez les pieds ! » Jésus lui répondit du même ton : « Ce que je fais, tu ne le sais pas maintenant, mais tu le comprendras après. » Mais c’est dès maintenant que Pierre veut une explication de ce geste incompréhensible. Il n’y tient plus ; il éclate : « Non, vous ne me laverez pas les pieds, jamais ! » Il s’était mis, par son emportement, sur la voie de la désobéissance. Jésus devient plus sévère : « Si je ne te lave pas, tu n’auras point de part avec moi. » Le cœur aimant est effrayé, il est attendri, il cède, il s’échauffe et passe maintenant la mesure dans la soumission : « Seigneur, non seulement mes pieds, mais encore les mains et la tête ! » Le brave Simon-Pierre ! Judas, lui, ne bougeait pas, ne disait rien, craignant peut-être de se dénoncer lui-même, jugeant tout cela de très haut. Jésus pense à lui en répondant à Pierre : « Celui qui a pris un bain n’a pas besoin de se laver, car il est pur tout entier. Vous aussi vous êtes purs, mais non pas tous. » C’était dire assez clairement que Pierre n’avait en somme pas besoin d’une purification supplémentaire : lui et les autres étaient purs, sauf Judas, dont aucune lotion ne pouvait nettoyer le cœur. Ce que Jésus en avait fait, c’était donc seulement pour abaisser à jamais les sursauts de l’orgueil ou de la vanité chez les siens. C’est ce qu’il énonce clairement, sans faire aucune allusion à un état inférieur de pureté qu’il aurait ainsi rendu plus parfait : « Comprenez-vous ce que je vous ai fait ? Vous m’appelez Maître et Seigneur et vous dites bien ; car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et Maître, vous devez aussi vous laver les pieds les uns aux autres. » Les fidèles savent très bien que l’imitation de Jésus doit s’étendre à tous leurs actes, à toutes leurs pensées, à toute leur vie, et pourtant cet exemple particulier n’est point spécialement obligatoire. Cependant, pour honorer ce souvenir, les rois ont lavé les pieds des pauvres le jeudi saint, et les prélats de l’Église le font encore. Et qu’on n’allègue pas l’inconvenance de s’humilier devant un frère qui est peut-être un apostat dans son cœur. Jésus l’a fait à l’égard de Judas, et cependant il savait qu’il était déjà figuré dans l’Écriture : « Celui qui mange mon pain a levé contre moi son talon» (Ps 41 (Vulgate 40), 10.) Lorsqu’il prononça ces paroles, Jésus avait déjà repris sa place près de la table. (Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, extrait, p.542-543).

Illustration : Le lavement des pieds par Mariotto di Nardo 1385-1405-sacristie de la chapelle saint Nicolas-église santa Maria Novella-Florence (Italie).

 

13 avril 2022

Mercredi de la Semaine sainte

Jésus dénonce la trahison

Le soir venu, Jésus se trouvait à table avec les Douze. Et pendant qu’ils mangeaient, Jésus dit : « En vérité, je vous le dis que l’un d’entre vous me trahira ». Extrêmement attristés, les Douze commencèrent à lui demander chacun à son tour : « Serait-ce moi, Seigneur ? ». Jésus répondit : « Celui qui a mis la main avec moi dans le plat, celui-là me trahira. Le Fils de l’homme s’en va selon ce qui est écrit à son sujet ; mais malheur à cet homme, par qui est trahi le Fils de l’homme. Il eût mieux valu pour cet homme qu’il ne fût pas né. Prenant la Parole, Judas dit : « Serait-ce moi, Rabbi ? ». Jésus lui répondit : « C’est toi-même qui l’as dit ». (Matthieu 26, 21-25)

Jésus étant près de Judas put aisément lui porter une bouchée trempée jusque dans la bouche. Dernier signe de familiarité intime. Mais Judas s’obstine, et cet endurcissement à cette heure rend Satan maître de son âme ; il suivra ses suggestions jusqu’au bout. (Marie-Joseph Lagrange o.p., L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, extrait p. 546)

Illustration : La Dernière Cène. Trahison de Judas.

 

12 avril 2022

Mardi de la Semaine sainte

Jésus dit à Pierre : « Là où je vais, tu ne peux pas me suivre maintenant ; tu me suivras plus tard. » Pierre lui dit : « Seigneur, pourquoi ne puis-je pas te suivre à présent ? Je donnerai ma vie pour toi ! » Jésus réplique : « Tu donneras ta vie pour moi ? Amen, amen, je te le dis : le coq ne chantera pas avant que m’aies renié trois fois. » (Jean 13, 36-38)

Pierre était sincère, mais sa solidité devait être plus sûrement fondée sur son repentir que sur un dévouement empressé et présomptueux. Aussi Jésus : « En vérité, je te le dis : toi-même aujourd’hui, cette nuit, avant qu’un coq ait chanté deux fois, tu me renieras trois fois ». Il n’en répéta qu’avec plus de force : « Quand il me faudrait mourir avec vous, je ne vous renierai pas ! » L’affection, entraînée à s’affirmer plus ardente, peut seule faire pardonner un pareil démenti : cependant le Maître avait doit à un respect plus entier de sa parole. Les autres joignirent leurs protestations à celles de Pierre. Jésus avait parlé. Il ne répliqua pas, mais mit en garde les siens qui n’appréhendaient pas assez l’imminence du péril. (Marie-Joseph Lagrange. L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, extrait, p. 552.)

Illustration : Le Reniement de saint Pierre par Canavesio-ND des Fontaines. La Brigue (Alpes-Maritimes)

 

11 avril 2022

Lundi de la Semaine sainte

À la réflexion particulière de Judas Iscariote, après que Marie, la sœur de Marthe, eût versé sur les pieds de Jésus un parfum d’un nard authentique d’une grande valeur, Jésus dit à Judas : « Laisse-la observer cet usage en vue du jour de ma sépulture. Vous avez toujours des pauvres parmi vous ; mais moi, vous ne m’avez pas toujours.  Jean 12, 7-8. »

Pour cette fois, le Maître moins soucieux de secourir les pauvres que de défendre la noble femme contre un hypocrite : « Laisse-la » en paix, dit-il. Tu demandes pourquoi elle n’a pas vendu ce parfum ? C’était afin de le conserver pour le jour de ma sépulture. Et, en effet, son cœur attentif avait été touché d’un pressentiment auquel les autres demeuraient fermés ; elle avait oint d’avance le corps du Maître tant aimé. Et ce beau geste était si beau, étant inspiré par une lumière divine, que Jésus annonça solennellement : partout où sera prêché l’Évangile, dans le monde entier, on parlera aussi de ce qu’a fait cette femme, en mémoire d’elle. Prophétie réalisée dans toutes les chaires où l’on prêche la Passion.

Quant au pauvres, Jésus qui va mourir ne peut plus rien faire pour eux, mais il compte sur ses disciples. Il voudrait cependant émouvoir ces cœurs du tendre et douloureux sentiment de Marie : « Vous avez toujours les pauvres parmi vous ; mais moi, vous ne m’avez pas toujours. » (Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, extrait, p. 463.)

 

10 avril 2022

Dimanche des Rameaux et de la Passion

Entrée messianique à Jérusalem

« Et comme Jésus approchait déjà de la descente du mont des Oliviers, toute la troupe des disciples, transportés de joie, se prirent à louer Dieu d’une voix forte pour tous les miracles qu’ils avaient vus, disant ‘Béni celui qui vient, lui, le Roi, au nom du Seigneur ! Paix dans le ciel et gloire dans les hauteurs !’ Et quelques Pharisiens, mêlés à la foule, lui dirent : ‘Maître, mets tes disciples à la raison !’ Et Jésus répondit : ‘Je vous le dis : si ceux-ci se taisent, les pierres crieront.’ » (Luc 19, 37-40)

[Jésus] voyant devant lui, dans l’éclat encore récent de leurs grandes pierres blanches, les palais, les remparts, le Temple du Seigneur ruisselant d’or, toute cette sainte Sion où l’attendaient la haine et la perfidie, il pleura.

(Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège-Lethielleux, 2017, p. 468.)

Avec fr. Manuel Rivero, nous faisons mémoire du jour-anniversaire ou dies natalis de fr. Marie-Joseph Lagrange o.p. qui a accompli un immense travail afin que la Parole de Dieu soit accessible à tous. Confions -lui nos demandes de grâces et prions pour sa prochaine béatification.

4 avril 2022

5ème semaine de Carême

« Je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie. » (Jean 8, 12)

Cette lumière ne serait donc pas dans le disciple une connaissance stérile ; elle atteindrait le cœur, mettrait en branle la volonté, vive étincelle de vie morale et religieuse, rayon parti de Jésus pour dissiper les ténèbres dans lesquelles l’homme cherchait sa voie.

(Marie-Joseph Lagrange. L’Évangile de Jésus-Christ avec la synopse évangélique, Artège-Lethielleux, 2017, voir la suite p. 326 s.)

3 avril 2022
« Pris à leur propre piège ».
Homélie pour le cinquième dimanche de Carême 2022.
Saint-Denis (La Réunion), le 3 avril 2022.
Fr. Manuel Rivero O.P.
C’est trop facile ! Son mari pleure, cocu. Femme légère, elle donne un mauvais exemple. « Qui a bu boira ». Elle va recommencer. Enfin, pour une fois que l’on l’attrape sur le fait et que nous avons des preuves, il faut la punir sévèrement. La loi le dit clairement, elle est faite pour cela. Si l’on pardonne au méchant, il n’apprendra jamais la justice. Elle l’a cherché. Qu’elle assume !
Jésus enseigne dans le Temple de Jérusalem. Les scribes et les pharisiens, les mêmes qui le condamneront à mort sur la croix, lui amènent cette femme adultère, effrayée à l’idée de la condamnation, tête baissée, remplie de honte.
Voilà le grand prophète Jésus! Que va-t-il dire ? Que va-t-il faire ?
Ces scribes et ces pharisiens ressemblent aux journalistes qui pratiquent le dilemme : « Est-ce que vous êtes pour ou contre ? » Ce type de questions s’attend souvent à des réponses simplistes, superficielles qui ne vont pas au fond du problème car rarement la question de la finalité bénéficie d’une mise en lumière. Quel est le sens et la finalité de la Loi ? Quelle est la volonté de Dieu pour l’homme et la femme qui fautent ? Quelle est la lettre de la Loi et quel est son esprit, volonté du législateur, en l’occurrence Dieu ?
Ces scribes et ces pharisiens se réjouissent d’avoir trouvé l’occasion de prendre au piège Jésus. Est-il pour la Loi de Moïse ou contre la Loi de Moïse ? S’il est pour la Loi de Moïse, Jésus devra la déclarer coupable. S’il se manifeste opposé à la Loi de Moïse, Jésus sera considéré comme un mauvais juif, révolté contre la révélation divine.
Le voici face à une colle ! Comment va-t-il s’en sortir cet ami des pécheurs et des publicains ? Jésus, homme libre, fustige les politiques corrompus qu’il traite de « renards » (Lc 13,32) comme il l’a fait envers Hérode. Ce Jésus de Nazareth n’hésite pas à dénoncer les autorités religieuses, tatillonnes sur l’application des détails de la Loi mais à côté de l’essentiel, les traitant de « serpents et d’engeance de vipères » (Mt 23,33) : « Malheur à vous, scribes et Pharisiens hypocrites, qui acquittez la dîme de la menthe, du fenouil et du cumin, après avoir négligé les points les plus graves de la Loi, la justice, la miséricorde et la bonne foi ; c’est ceci qu’il fallait pratiquer, sans négliger cela. Guides aveugles, qui arrêtez au filtre le moustique et engloutissez le chameau » (Mt 23,23-24).
Mais Jésus ne répond pas à la question des scribes et des pharisiens. La naïveté ne représente pas une vertu dans l’Évangile. « Jamais un homme n’a parlé comme cet homme » (Jn 7,46), Jésus. À son tour, il va leur poser aussi une question sur leur vie morale et sur leur conscience. Le Psalmiste dans l’Ancien Testament priait ainsi : « Ils tendaient un filet sous mes pas, mon âme était courbée ; ils creusaient devant moi une trappe, ils sont tombés dedans. » (Ps 57, 7).
Les scribes et les pharisiens vont tomber dans leur propre piège, celui de l’accomplissement parfait de la Loi. Au nom de la Loi, ils condamnent. Au nom de la Loi, leur conscience les condamne : « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre » » (Jn 8, 7).
Jésus qui ne nous a pas laissé d’écrit écrivait sur le sable. Qu’a-t-il écrit ? Mystère ! Nous n’en savons rien. Ou plutôt nous ne connaissons pas le texte mais nous savons son contenu, son message, son esprit : « C’est la miséricorde que je veux, et non le sacrifice. Je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs » (Mt 9,13).
Saint Jean évangéliste précise que tous s’en allèrent, un par un, en commençant par les plus âgés. Qu’est-ce que cela veut dire ? Les plus âgés étaient-ils les plus grands pécheurs où leur âme était-elle la plus sensible envers leurs fautes ? Peu importe ! L’évangéliste saint Jean nous conduit à Jésus et à son regard miséricordieux posé sur cette femme dont nous ignorons le prénom car elle représente l’humanité pécheresse et coupable : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamné ? ». La femme adultère répond : « Personne, Seigneur. » Et Jésus fait du neuf dans sa vie : « Moi, non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »
Jésus n’est pas laxiste ni relativiste. Il ne dit pas ce que nous entendons tout le temps « ce n’est pas grave », « fais comme tu peux », « surtout ne culpabilise pas, sens-toi libre »… Jésus recrée le cœur de cette femme par son pardon. Devenue une création nouvelle par la rencontre avec Jésus, elle est envoyée : « Va ». Témoin de la grâce du pardon, cette femme relève la tête. Aimée de Dieu, elle prend un chemin de lumière, celui de la résurrection spirituelle. Elle est passée de la honte à la fierté d’être aimée de Dieu, de la mort du péché à la vie de la grâce, des ténèbres à la Lumière du Christ.
Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face reconnaissait son indignité et la grandeur de la miséricorde divine. Elle s’adressait à Dieu le Père en priant ainsi : « Au soir de cette vie, je paraîtrai devant vous les mains vides. (…) Je veux donc me revêtir de votre propre Justice, et recevoir de votre amour la possession éternelle de vous-même » .
« Si notre cœur nous condamne, Dieu est plus grand que notre cœur » (1 Jn 3,20).
« La miséricorde divine se moque du jugement » ( Jc 2,13).
Voilà notre Justice, notre Salut, notre Joie : l’amour de Jésus pour nous, plus fort que toutes les puissances de mort.
Amen !

Paru sur Zenit : Saint Joseph dans les commentaires évangéliques du père Lagrange par fr. Manuel Rivero, O. P.

Saint Joseph lui aussi a été « comblé de grâces »

Introduction
La méthodologie
La foi de Joseph
Joseph, homme juste
La mission de Joseph
Grandeur de la vocation de Joseph
Dévotion à saint Joseph

Icône de S. Joseph, par le fr. Paul Heymans Ocd, Capture @ Carmes-Paris.org

Est-il raisonnable de commenter abondamment la vie de saint Joseph alors que les évangiles n’en citent aucune parole ? Pourtant ce grand silencieux continue d’inspirer des millions de chrétiens qui trouvent en lui un modèle de foi et d’action.

La méthodologie

Ce que le Concile Vatican II déclare au sujet de la dévotion mariale peut s’appliquer aussi à saint Joseph : « La vraie dévotion procède de la vraie foi [1]». Et la foi trouve son origine de la Révélation divine dans la Bible. Aussi le chrétien se tourne-t-il vers les évangiles à l’heure de se prononcer sur la figure du père adoptif de Jésus. À ce propos je me souviens du témoignage d’une personne qui s’était attachée à la Vierge Marie après avoir lu des commentaires exégétiques rédigés par des biblistes protestants. Le mot ferveur évoque « le feu » de l’Esprit Saint et « les cœurs brûlants » des disciples d’Emmaüs illuminés par les explications catéchétiques de Jésus ressuscité à partir de la Loi, des Psaumes et des Prophètes qui avaient annoncé en figures le Messie (cf. Lc 24, 13s).

Le père Marie-Joseph Lagrange O.P. (+1938), fondateur de l’École biblique de Jérusalem a commenté les passages des évangiles qui concernent saint Joseph, notamment celui de sa paternité légale sur Jésus, en effectuant lui-même la traduction du grec[2].

Si le texte biblique devient un prétexte pour des élucubrations ou des projections personnelles, la dévotion perd ses racines et sa sève. Le père Lagrange étudie le texte dans son contexte en accord avec la méthode historico-critique qui le caractérise. Les passages évangéliques sur saint Joseph sont commentés à la lumière de l’Ancien Testament, avec l’étude des langues et des civilisations de la Bible et des cultures environnantes. Par ailleurs, le fondateur de l’École biblique de Jérusalem enrichit son approche de la vie et de la spiritualité de saint Joseph en reprenant les écrits des Pères de l’Église, latins et grecs, sans oublier l’importance des traductions. En effet, une traduction représente une interprétation du texte original pour le retranscrire dans une autre langue. Le père Lagrange qui connaît non seulement le latin, le grec et l’hébreu mais aussi l’araméen, l’arabe et d’autres langues anciennes, a vérifié les versions des passages évangéliques dans d’autres langues.

La foi de Joseph

C’est en étudiant de manière critique, c’est-à-dire scientifique, les textes évangéliques sur saint Joseph que le père Lagrange propose la véritable dévotion envers l’époux de Marie et le père adoptif de Jésus. L’exégèse conduit à la juste compréhension du mystère de saint Joseph en évitant des excès : « Nous concluons qu’on a exagéré de deux façons en prétendant pénétrer par l’exégèse dans les sentiments de Joseph. Il n’a pas manqué de Pères (Justin, Ambroise, Augustin, Chrysostome) ayant déduit du texte qu’il avait soupçonné Marie d’adultère. (…). D’autre part des écrivains anciens et de nombreux modernes ont interprété le v.18 comme si Joseph avait été instruit de l’opération du Saint- Esprit. Or si Joseph avait eu la fâcheuse opinion, le texte ne dirait pas qu’étant juste il n’a pas voulu révéler la situation de Marie, car la justice lui en faisait plutôt un devoir s’il croyait Marie coupable. Et s’il avait été au courant, l’ange ne le fixerait pas en lui apprenant que l’enfant est conçu du Saint-Esprit. Ces deux excès viennent de ce qu’on a voulu tirer du texte autre chose que ce qu’il dit, et on ne peut savoir cela même qu’en tenant compte du but de l’auteur et de l’esprit dans lequel il a écrit[3]. »

Le père Lagrange n’ignora pas l’humanité de Joseph : « Or le jour vint où Joseph s’aperçut que son accordée était enceinte. Qu’un premier mouvement de surprise et d’indignation se soit élevé dans son cœur, c’eût été bien naturel, mais il ne s’y arrêta pas [4].» Dans son expérience de la vie familiale, le père Lagrange relève aussi que ce sont les femmes qui perçoivent les signes de la grossesse chez les proches : « ‘ il se trouva’, ‘ il fut constaté’ ; le texte ne dit pas que ce fut par Joseph, (…), d’autant que Marie n’habitait pas chez lui, et que la grossesse dut être remarquée d’abord par les parents de Marie, par sa mère avant tous. Les femmes ne sont-elles pas les premières à saisir les symptômes chez d’autres femmes ? Mais Joseph devait être averti et il le fut. On s’étonne qu’il ne l’ait pas été par Marie. Dans l’intention de Mt. C’est parce qu’il devait être éclairé par un ange. Et puisque Dieu avait pris l’initiative, Marie devait lui laisser le soin de tout conduire [5]. »

L’Évangile parle « d’esprit saint » sans article : « L’Esprit Saint n’est donc pas personnifié ; c’est plutôt une expression pour marquer l’action divine qui donne la vie et qui féconde. Aussi bien la théologie attribue à Dieu et non à l’une des personnes divines les actions ad extra [6]. »

Joseph, homme juste

Mais à la suite de saint Jérôme (+420), exégète et traducteur de la Bible, il interprète les textes en accord avec la chasteté de Marie crue par Joseph, homme juste, dans son silence contemplatif du mystère de Dieu en son épouse.

C’est au nom de la justice que Joseph ne dénonce pas son épouse comme adultère : « Joseph était juste comme les Israélites soucieux de rendre à Dieu et au prochain ce qui leur était dû. » ; « il serait absurde de dire que c’est par justice qu’il ne l’a pas dénoncée – à moins que précisément il ne l’eût pas crue coupable ! », écrit le père Lagrange. Dans la Bible, « juste » ne veut pas dire « débonnaire » ou « arrangeant » mais ajusté à la volonté de Dieu manifestée dans la Loi de Moïse : « Matthieu. n’a pas écrit « étant juste et cependant ne voulant pas » comme il eût dû le faire pour exprimer l’opposition, mais « étant juste, et par conséquent ne voulant pas », comme a compris Ephrem (Moes,22) ».

C’est l’Ange apparu en songe à Joseph qui lui révèle le miracle de la conception virginale de Jésus en Marie par l’action de Dieu. Dans l’Évangile selon saint Luc, l’ange Gabriel demande le consentement de Marie qui s’exclamera : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon ta parole ! » (Lc 1,38). En revanche, dans l’Évangile selon saint Matthieu, Joseph joue un rôle de témoin. Il n’a pas à donner son accord mais il adhère à la mission que Dieu lui donne en tant que témoin de la maternité divine de Marie et de père adoptif de Jésus.

La mission de Joseph

Les deux évangélistes, Matthieu et Luc, ont agi en auteurs. Ils apportent deux théologies différentes et complémentaires. Saint Matthieu écrit du point de vue de Joseph, descendant du roi David, qui permet à Jésus d’être appelé « Messie » et « Fils de David » ; tandis que saint Luc écrit du point de vue de Marie. Pour saint Matthieu, c’est Joseph qui donne le prénom de « Jésus » à l’enfant alors que dans l’Évangile selon saint Luc, c’est Marie qui nomme son enfant « Jésus ». Et le père Lagrange de commenter : « Dans l’Ancien Testament, c’est tantôt le père, tantôt la mère, et il est naturel qu’ils se soient entendus ».

Éclairé par l’Ange, Joseph devient le témoin de la conception miraculeuse de Jésus. Saint Matthieu a présenté Joseph, homme juste qui vit de la foi en Dieu, comme le grand contemplatif et le gardien du secret de la maternité divine de son épouse. Conscient de la grandeur surnaturelle de l’événement, Joseph était prêt à se retirer : «Son attitude est déjà celle des disciples qui auront toujours besoin d’être rassurés en présence du surnaturel. Nous avons donc parfaitement le droit d’estimer avec Ephrem, Jérôme et tant de pieux auteurs, que Joseph n’a pas cessé de croire à l’innocence de sa très pure fiancée » ; « Joseph ne manifeste ni colère, ni reproches. La conclusion qui semblait s’imposer était combattue dans son esprit par ce qu’il avait compris de la pureté et de la fidélité de Marie. Au lieu de lui attribuer seulement un grossier bon sens, incapable de mettre les réalités spirituelles en balance avec celles de l’ordre matériel, un chrétien ne peut aborder le sanctuaire de ces âmes très pures sans le respect qu’exigent les principes mêmes de la foi, et la situation qui leur a été faite dans le mystère de l’Incarnation. Il faut accepter et appliquer dans toute son étendue le principe de Chrysostome : Joseph s’élève au-dessus de la loi ancienne, « car la grâce étant déjà présente, il devait apparaître des signes d’une conduite très élevée. De même que le soleil, encore qu’il ne montre pas ses rayons, éclaire déjà d’avance les régions de sa lumière, ainsi le Christ éclairait le monde dès le sein de sa mère », écrit le père Lagrange[7].

Saint Joseph est loin d’être un personnage triste et falot que certains ont cru percevoir en raison de son humilité et de son silence. Homme de foi et de prière, Joseph a été lui aussi « comblée de grâce » comme son épouse Marie. Dieu a répandu dans son cœur la grâce de la foi et de l’amour fidèle qui rend heureux et rayonnant comme Fra Angelico l’a montré dans sa fresque de l’adoration des Mages au couvent saint Marc de Florence. Saint Joseph n’est pas un homme ténébreux mais un serviteur lumineux du mystère de Dieu. Il a reçu la lumière du Verbe fait chair à travers son épouse, Marie. Son fils Jésus lui a obéit. Son épouse Marie l’a mis en valeur devant Jésus le citant en premier comme le montrent ses paroles lors du recouvrement de leur enfant au Temple de Jérusalem : « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois ! ton père et moi, nous te cherchons, angoissés. » (Lc 2, 48).

Grandeur de la vocation de Joseph

En parlant de son Père céleste, Jésus n’amoindrissait point la dignité de son père adoptif ; tout au contraire, il la magnifiait comme étant une participation originale de grande valeur à la paternité divine. En aimant son épouse Marie, devenue « épouse du Saint-Esprit »[8], Joseph ne perdait pas son statut d’époux mais il jouissait d’une union exceptionnelle en beauté et en solidité avec Dieu et avec son épouse. C’est Jésus, venu unir Dieu et l’humanité en sa personne, qui a accompli cette communion bienheureuse de Marie et de Joseph par l’Esprit Saint ainsi que leur participation à l’amour de son Père.

Dévotion à saint Joseph

Le père Marie-Joseph Lagrange avait reçu le prénom d’Albert à son baptême, lors de son entrée dans l’Ordre des prêcheurs au couvent royal de Saint-Maximin (Var) le 6 octobre 1879, le bienheureux père Cormier, prieur provincial, lui a donné un nouveau prénom religieux « Marie-Joseph ». Le père Lagrange a toujours manifesté une grande ferveur envers ses nouveaux patrons dans la vie religieuse comme le montre son Journal spirituel où il confie à saint Joseph « l’esprit de prière continuelle »[9]et l’esprit religieux par l’accomplissement parfait des trois vœux »[10].

Appelé « le nouveau saint Jérôme » pour sa science biblique et « le mystique de la Bible » pour sa vision surnaturelle, le père Lagrange réconcilie dans son enseignement la foi et la science, la Révélation et la raison.

Saint-Denis (La Réunion), le 26 janvier 2022.

NOTES

[1] Concile Vatican II. « Lumen gentium », n°67.

[2] Mt 1, 18s selon la traduction du grec par le père Lagrange : « Or la génération du Christ était telle : sa mère Marie ayant été fiancée à Joseph, avant qu’ils eussent habité ensemble elle se trouva enceinte par la vertu de l’Esprit Saint. 19 Joseph, son mari, étant juste et ne voulant pas l’exposer au décri public, forma le dessein de la répudier secrètement. 20 Comme il était dans cette pensée, voici qu’un ange du Seigneur lui apparut en songe, disant : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie ta femme, car ce qui est conçu en elle est l’ouvrage de l’Esprit Saint. 21 Elle enfantera un fils et tu lui donneras le nom de Jésus, car il sauvera son peuple de leurs péchés. ». M.-J. Lagrange, Évangile selon saint Matthieu. Études bibliques. Troisième édition. Paris. Librairie Lecoffre. 1927. PP. 9-17.

[3] M.-J. Lagrange, Évangile selon saint Matthieu. Études bibliques. Troisième édition. Paris. Librairie Lecoffre. 1927. P.13.

[4] M.-J. Lagrange, L’Évangile de Jésus-Christ avec la synopse évangélique. Préface de Jean-Michel Poffet O.P.. Présentation de Manuel Rivero O.P. Paris. Artège-Lethielleux. 2017. P.56.

[5] M.-J. Lagrange, Évangile selon saint Matthieu. Études bibliques. Troisième édition. Paris. Librairie Lecoffre. 1927.  P.10.

[6] M.-J. Lagrange, Évangile selon saint Matthieu. Études bibliques. Troisième édition. Paris. Librairie Lecoffre. 1927. P.10.

[7] M.-J. Lagrange, Évangile selon saint Matthieu. Études bibliques. Troisième édition. Paris. Librairie Lecoffre. 1927. PP.13-14.

[8] « En donnant à l’enfant le nom de Jésus, il montre qu’il est instruit du plan divin et qu’il y entre librement. Ayant pris Marie pour femme, il accepte la paternité légale de Jésus, qui en réalité est conçu du Saint-Esprit. Le miracle ne devait se produire qu’une fois, mais il suffisait pour que Marie fût désormais et à jamais épouse du Saint-Esprit. Les situations étaient fixées ». M.-J. Lagrange, Évangile selon saint Matthieu. Études bibliques. Troisième édition. Paris. Librairie Lecoffre. 1927. PP.17-18.

[9] M.-J. Lagrange, des frères prêcheurs. Journal spirituel 1879-1932. Avant-propos de Fr. Manuel Rivero O.P., Paris, Éditions du Cerf, 2014. P. 51. 1erjanvier 1880, au noviciat.

[10] Ibidem.

S. Joseph dans les commentaires évangéliques du p. Lagrange, par le fr. Rivero O.P.

Écho de notre page Facebook : mars 2022

25 mars 2022

L’Annonciation du Seigneur (Luc 1, 26-38)

« Voici la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon ta parole. » Et l’ange la quitta.

Il a plu à Dieu d’attendre le consentement de Marie pour réaliser ce mystère. (Marie-Joseph Lagrange o.p. L’Évangile de Jésus Christ, Artège, 2017.)

Illustration : L’Annonciation du Seigneur à Marie (chasuble dite du P. Lacordaire. Photo M. Rivero).

 

 

 

23 mars 2022

« Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venir abolir, mais accomplir. Amen, je vous le dis : Avant que le ciel et la terre disparaissent, pas un seul iota, pas un seul trait ne disparaîtra de la Loi jusqu’à ce que tout se réalise. » (Saint Matthieu 5, 17.)

La vérité en Dieu est infiniment active. Celle qu’il révèle aux hommes ne peut être lettre morte. L’erreur change et disparaît. La vérité ne change pas ; elle se perfectionne par un véritable développement sans lequel elle ne serait pas une vérité humaine vivante. L’ancienne révélation ne perdra ni un iota ni un trait de ses éléments constitutifs : il y a là une parabole latente. Comme un scribe veille avec un soin jaloux à n’omettre aucun iota ni aucun trait qu’il regarde comme essentiel à une bonne lecture, ainsi Dieu a soin de tous les germes qu’il a déposés dans la révélation. Le Christ apporte un développement essentiel : un pareil bond ne se renouvellera pas. Cependant cette vérité accrue subsistera toujours, elle aussi, jusqu’à son entier développement selon les desseins de Dieu. Elle se développera par un progrès véritable, soit par suite de révélations privées, soit par la méditation des vérités révélées, soit même par leur pratique, toujours sous l’influence de l’Esprit (1). Nier que le Christ ait eu en vue les temps qui suivront sa mission temporaire, c’est lui faire dire que le monde finira avec lui (2).

  • Jean 16, 12., donne la clef de ce passage difficile : « L’Esprit de vérité vous guidera vers la vérité tout entière ».
  • Voir les admirables explications de la pensée de Newman, avec toute leur portée, dans la conférence de M. Jacques Chevalier à Oxford (Les Lettres, juillet 1927) : « L’identité des formes ne peut être qu’une identité de mort : une identité de vie suppose un changement continu, dont la continuité même suffit à assurer l’unité et l’identité… Il y a dans le temps quelque chose qui change toujours, mais qui ne change que pour permettre à quelque chose de demeurer le même… » etc.

(Marie-Joseph Lagrange, o.p., L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège-Lethielleux, 2017, p. 169.)

Illustration :  Saint Matthieu par Franz Hals, 1625 env., Musée d’Art d’Europe occidentale et orientale d’Odessa.

 

13 mars 2022
2e dimanche de Carême
(Luc 9, 28b-36)
« Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le ! »

Tout est si lumineux dans cette nouvelle scène qu’on est comme ébloui ; Jésus avait dit aux Juifs : « Si vous aviez cru Moïse, vous me croiriez, car il a écrit de moi ». Et Moïse venait du ciel lui rendre témoignage. On savait qu’Élie annoncerait la venue du Messie ; Élie était venu représenté par le Baptiste ; maintenait il s’associait en personne à l’hommage de Moïse, et tous deux s’entretenaient avec Jésus. Tout le passé le plus divin d’Israël s’inclinait devant le prophète nouveau et appuyait ce qu’il avait annoncé du scandale de sa mort. Cependant la gloire que Jésus avait revendiquée pour sa résurrection se manifestait déjà en lui comme lui appartenant en propre. Enfin Jésus avait accepté le nom de Fils de Dieu, et ce nom lui était donné par une voix qui ne pouvait être autre que celle de son Père.

(Marie-Joseph Lagrange, O.P., L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Artège, 2017, p. 292.)

 

10 mars 2022 – 10 mars 1938

En ce nouveau jour-anniversaire de la « naissance au ciel » du père Marie-Joseph Lagrange, nous unissons nos prières pour la paix en Ukraine. Peuple martyr du régime soviétique entre 1932 et 1933, et, à nouveau, aujourd’hui.

 

7 mars 2022

Le 7 mars 1855, il y a 167 ans, naissait à Bourg-en-Bresse (Ain), Albert Lagrange, le futur Marie-Joseph Lagrange des Frères Prêcheurs. « Les contestations et controverses des années 1890 en France au sujet de la vérité historique de la Bible n’allaient pas tarder à dégénérer en une véritable crise biblique (1) ». Grâce à fr. Marie-Joseph Lagrange, malgré les nombreux déboires rencontrés, avec patience et un travail acharné, l’Église échappera au naufrage des études bibliques.

(1) Bernard Montagnes, Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique, Cerf histoire, 2004.

 

 

 

4 mars 2022
Une guerre est-elle juste ?

Le père Lagrange a vécu la déclaration de guerre de 1914-1918.
Il raconte dans un article « À Jérusalem pendant la guerre », paru dans Le Correspondant, Paris, 23 février 1915, t. 258, p. 640-858, comment ils ont vécu à Jérusalem ces années douloureuses. Comment ils ont été dispersés avant de retrouver leur cher couvent.

En 2005, pour la Revue du Rosaire, le frère Jean-Bernard Dousse, o.p. (1923-2015) a écrit (c’était au moment de la guerre d’Irak) une réflexion sur ce sujet :

Guerre juste ?

De guerre, les informations nous en parlent chaque jour. Partout dans le monde des hommes, des peuples, des nations s’affrontent et s’entretuent. Alors que tous les peuples aspirent profondément à la paix ! La plupart de ces conflits sont dus à la soif du pouvoir, de la possession, ou encore à la haine entre races, ethnies, religions. Or aucun de ces motifs ne peut justifier la guerre. Alors une guerre peut-elle être juste ?

2003 marquait le 40e anniversaire de l’encyclique de Jean XXIII Pacem in terris.  Et Jean-Paul II a saisi l’occasion pour rappeler la responsabilité de tous pour construire la paix. La guerre déclarée, il y a une année, par les États-Unis et l’Angleterre contre l’Irak a soulevé à travers le monde d’innombrables interventions et déclarations, ainsi qu’une réprobation presque unanime de l’opinion mondiale, pour enrayer ce conflit inutile, injuste et meurtrier.

Avant d’analyser quelques principes de moralité, arrêtons-nous brièvement à la Bible. Certes il y a de nombreuses guerres dans l’histoire biblique. Celles-ci nous rappellent surtout que Dieu prend l’humanité là où elle est, avec ses faiblesses, son péché, pour l’éduquer et lui faire découvrir ce qui sera le commandement unique donné par Jésus : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »

Mais il y a aussi, dans l’Ancien Testament, des gestes de paix, des initiatives pour éviter qu’une population entière doive payer les conséquences d’une guerre. Même Goliath propose un combat singulier pour déterminer qui sera vainqueur (1 Samuel 17, 8-10). Souvenez-vous aussi de la médiation d’Avigaïl, femme de Naval, alors que David est en route pour venger l’insulte que vient de lui infliger Naval (1 Samuel 18.18 ss.).

La question demeure : une guerre peut-elle être juste ? Philosophes et théologiens se posent la question depuis des siècles. Ils s’efforcent de déterminer des critères, d’établir un cadre pour éliminer l’arbitraire. Au début du 12e siècle, le Décret de Gratien admet trois causes légitimes de guerre : le refoulement des ennemis au-delà des frontières, la récupération des biens dont on a été illégitimement spolié, la réduction des injustices. Au siècle suivant, saint Thomas d’Aquin reconnaît la légitimité de la guerre défensive. Mais qu’en est-il d’une guerre offensive ? Saint Thomas met trois conditions : d’abord l’autorité du prince : « Puisque le soin des affaires publiques a été confié aux princes, c’est à eux qu’il appartient de veiller au bien public de la cité, du royaume ou de la province soumise à son autorité. » Deuxième condition : une cause juste : on ne peut attaquer un ennemi qu’en raison de quelque faute. Enfin, une intention droite chez ceux qui font la guerre, c’est-à-dire vouloir ainsi promouvoir le bien ou éviter le mal. Et Thomas d’ajouter, en citant saint Augustin : « Le désir de nuire, la cruauté dans la vengeance, la violence et l’inflexibilité de l’esprit, la sauvagerie dans le combat, la passion de dominer et autres choses semblables, voilà ce qui dans les guerres est jugé coupable par le droit. » Il faut relever que les chrétiens cherchent à atténuer les effets pervers et à « humaniser » la guerre, par des institutions comme la « Trêve-Dieu », les lieux de refuge, les périodes durant lesquelles cessent les combats.

Le fondement de la réflexion est l’application du 5e commandement : “Tu ne tueras pas”, rappelé par Jésus dans le Sermon sur la montagne (Matthieu 5, 21). Il s’agit donc du respect absolu de la vie et de la personne humaine.

Aujourd’hui, la guerre a pris un nouveau visage : elle n’a plus rien d’humain. Les moyens mis en œuvre n’épargnent rien ni personne. Les armes de destruction massive sont de soi immorales et contre nature. En effet le mal provoqué, les conséquences multiples d’humiliation et de haine, de désir de vengeance ne peuvent se justifier.

Ce sont ces raisons qui furent mille fois répétées pour essayer d’arrêter les faiseurs de guerre de l’administration américaine et de son président. Ceux-ci n’ont pas écouté et ont invoqué un prétendu danger dont les enquêteurs officiels de l’ONU n’ont trouvé nulle trace !

Le mensonge à ce niveau est le contraire d’une justification.

Je voudrais citer quelques paroles décisives touchant la légitimité de la guerre aujourd’hui.

Jean-Paul II (13 janvier 2003) : « Non à la guerre ! Elle n’est jamais une fatalité. Elle est toujours une défaite de l’humanité. Le droit international, le dialogue loyal, la solidarité des États, l’exercice si noble de la diplomatie sont les moyens dignes de l’homme et des nations pour résoudre leurs différends. »

Cardinal Danneels (février 2003) : « Certes, on peut encore parler, peut-être, d’une <guerre juste>. Les moralistes en ont énuméré les critères. Elle ne peut être menée que de manière défensive et en dernier recours. Elle doit être proportionnée à la violence de l’attaquant, limitée à l’intérieur de frontières raisonnables et basée sur une chance tout aussi raisonnable de réussite. Mais aujourd’hui, il faut se demander si de telles conditions peuvent encore être remplies. Une <guerre préventive> peut-elle encore être justifiée ? Il semble que non. Car une telle guerre est probablement toujours une agression. »

Les responsables des Églises européennes (5 février 2003) : « Utiliser une attaque militaire, et une guerre préventives pour changer le régime d’un État souverain est immoral et constitue une violation de la Charte des Nations Unies […] Tous les États-membres des Nations Unies doivent se conformer aux résolutions onusiennes et résoudre les conflits de manière pacifique. L’Irak ne peut être une exception. »

Conférence des évêques d’Afrique du Sud (5 février 2003) : « Faire la guerre à ce stade est immoral et illégal, et cette option doit donc être exclue. Une invasion de l’Irak ne ferait qu’aggraver le sort d’un peuple déjà durement éprouvé par plus de douze ans d’embargo. Cela risquerait fort de déclencher d’autres conflits et de créer une polarisation dangereuse entre chrétiens et musulmans. Très probablement, cela ne ferait qu’alimenter une nouvelle vague de terrorisme dans le monde.

La lutte contre le terrorisme ne peut être menée à bien au moyen d’une guerre qui inévitablement entraînera la mort de centaines de milliers d’innocents et en terrorisera des millions d’autres. Nous croyons fermement que l’une des principales causes du terrorisme, c’est ce mépris vis-à-vis des revendications légitimes de populations entières qui se sentent socialement, économiquement et politiquement exclues, exploitées et opprimées. »

Mgr O’Donoghue (Angleterre) : « L’Organisation mondiale de la santé estime que ce conflit provoquerait la mort de 100.000 personnes et que 400.000 autres seraient victimes de déplacements et de maladies résultant de cette situation. Des millions de gens seraient obligés de fuir, devenant ainsi des réfugiés. » Je crois que rien ne peut justifier un tel carnage et un tel déplacement de population. Je pense que les deux milliards de livres sterling (= environ trois milliards d’euros) mis de côté par le ministre des Finances pour faire la guerre devraient servir à aider les pauvres dans le monde, anéantis comme ils le sont par l’endettement, la faim, le sous-développement et le sida.

« Il est également important de souligner que tous les pays possédant des armes de destruction massive, y compris le nôtre, doivent se plier aux résolutions des Nations Unies et des traités internationaux. »

Les événements qui se déroulent une année après, montrent combien ces craintes étaient justifiées et réalistes. Les faiseurs de guerre doivent se rendre à l’évidence : il est plus facile d’entrer en guerre que d’en sortir. Et <l’ennemi> a aussi un droit de légitime défense face à l’envahisseur.

Juste, légitime ? L’unique réponse aujourd’hui se résume dans la parole de Jean-Paul II : « Non à la guerre. »

Fr. Jean-Bernard Dousse o.p.
Revue du Rosaire, n° 165, février 2005

 

Prière de Léon XIII

« Saint Michel archange, défendez-nous dans le combat ! Soyez notre secours contre la malice et les embûches du démon. Que Dieu exerce sur lui son empire, nous le demandons en suppliant ! Et vous, prince de la milice du ciel, armé de la force de Dieu, repoussez en enfer Satan et les autres esprits mauvais qui rôdent dans le monde pour perdre les âmes. Amen. »

Illustration : Saint Michel Archange- – Kiev
Fresque de la tentation de Jésus à Jéricho, église Saint-Georges d’Anvers (Belgique). – Renáta Sedmáková

 

02 mars 2022
Prière de saint Jean-Paul II à la Vierge de Zarvaniza

Église catholique grecque catholique de Saint-Nicolas à Lviv (Ukraine)

Ô Bienheureuse Marie, Madone de Zarvaniza,
Je te rends grâce pour le don de ma présence dans la Rus’ de Kiev,
D’où la lumière de l’Évangile s’est répandue sur toute la région.

Face à ton icône miraculeuse,
Conservée dans cette église Saint-Nicolas,
A Toi, Mère de Dieu et Mère de l’Église,
Je confie mon voyage apostolique en Ukraine.

Sainte Mère de Dieu,
Étend ton manteau maternel sur tous les chrétiens
Et sur tous les hommes de bonne volonté
Qui vivent au sein de cette grande Nation.

Conduis-les vers ton Fils Jésus
Qui est pour tous Chemin, Vérité et Vie.

Aujourd’hui, nous pouvons demander : Notre Dame de Zarvaniza, sauve l’Ukraine et tes enfants.

haut-lieu marial à l’ouest du pays, surnommé « la Lourdes de l’Ukraine »
Voyage apostolique du pape saint Jean Paul II en Ukraine en 2001

Illustration : Polski : Matka Boża Zarwanicka
Українська: Ікона Божої Матері Зарваницької
Icône 17e