Prier le Rosaire avec les Équipes Notre-Dame de St-Denis de La Réunion

En ce mois d’octobre, mois du Rosaire, nous pensons à ce que disait le père dominicain Marie-Joseph Lagrange, fondateur de l’École biblique de Jérusalem, qui priait chaque jour, à genoux, le chapelet dans la basilique Saint-Étienne de Jérusalem : « Le mois d’octobre nous a toujours été favorable ». Oui, l’intercession de la Vierge Marie, Notre-Dame de la Victoire, rend notre temps favorable pour l’accomplissement de la volonté de Dieu dans nos vies.  Notre pape François a choisi ce mois d’octobre comme mois extraordinaire de la mission, notamment par la prière, source de grâces et de conversions. Nous allons prier les mystères lumineux en portant dans notre prière tous les couples et toutes les familles quelle que soit leur situation. Dieu aime chaque famille. Toutes les familles ont besoin du soutien du Saint-Esprit.  Nous méditerons les mystères de la vie publique de Jésus à la lumière de la spiritualité des Équipes Notre-Dame, fondées par le père Henri Caffarel, prêtre catholique, né à Lyon et parti vers le Seigneur en 1996, prophète pour le couple et le mariage. Faisons le signe de la croix qui est le signe de notre salut :

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit. Amen.

Credo. Notre Père. Trois Ave Maria. Gloria. 

 

Mystère lumineux

Le baptême de Jésus au milieu des pécheurs

Dans son évangile, saint Luc nous introduit dans la prière de Jésus lui-même. Il s’agit d’une caractéristique où il excelle pour notre joie. Lors de son baptême dans les eaux du Jourdain, Jésus priait. Lors de la Transfiguration, Jésus priait. Jésus demeurait uni à son Père dans la prière. Il accomplissait ainsi la mission reçue de son Père : la manifestation de l’amour de Dieu pour les hommes et leur salut. Quand Jésus prie, l’Esprit Saint descend sur lui. Quand Jésus prie à la Transfiguration, son corps resplendit de la lumière de Dieu. Par sa foi en Jésus, le chrétien qui prie reçoit le Saint-Esprit, lumière de Dieu. Dans l’Ancien Testament, les rois étaient adoptés par Dieu lors du rite d’intronisation. Devenir roi par la volonté de Dieu et au service du peuple équivalait à une adoption divine, une nouvelle relation avec Dieu, une nouvelle naissance comme l’annonçait le Psaume messianique numéro 2 : Jésus, Messie, oint de l’Esprit Saint, est reconnu par Dieu le Père comme son Fils devant la foule de pécheurs qui ont demandé le baptême à Jean le Baptiste : « Tu es mon fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré. » Fils unique engendré par le Père de toute éternité, Jésus apparaît comme le Messie, libérateur d’Israël, dans le temps. La libération du péché et de la mort qu’il apporte va au-delà d’une libération politique. Entré dans le temps, par son Incarnation dans le sein de la Vierge Marie, Jésus introduit l’humanité dans l’éternité. Les couples dans les Équipes Notre-Dame prient de manière individuelle, en couple et en famille. Au cours des réunions mensuelles, la prière occupe une place centrale et permanente. Le Magnificat de la Vierge Marie clôt ces rencontres entre plusieurs couples. La prière agit à la manière d’un ciment qui unit fortement le couple et la famille.

Prions pour que la prière soit le souffle et le ciment des couples et des familles.

Prions pour que les joies et les peines soient partagées dans la prière.

Prions pour que la prière devienne le repos et la force des parents et des enfants.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.

 

 

Les noces de Cana

De l’Évangile selon saint Jean 2, 1s : « Le troisième jour, il y eut des noces à Cana de Galilée, et la mère de Jésus y était. Jésus aussi fut invité à ces noces, ainsi que ses disciples. Or, il n’y avait plus de vin, car le vin des noces était épuisé. La mère de Jésus, lui dit : « Ils n’ont pas de vin. » Jésus lui dit : « Que me veux-tu, femme ? Mon heure n’est pas encore arrivée. » Sa mère dit aux servants : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. » 

Pour saint Jean, dans le quatrième évangile, la vie publique de Jésus débute lors d’une célébration des noces à Cana. Jésus est venu célébrer les noces de Dieu avec l’humanité, l’union sponsale du Christ et de l’Église. Marie, qui n’est pas citée par son prénom mais dans sa mission de mère de Jésus, y est présente. La mère de Jésus a des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. Son regard attentif lui fait percevoir l’absence de vin. Elle n’exige rien de son fils Jésus.  Marie présente les besoins : « Ils n’ont pas de vin. » En cela, Marie nous apprend à prier avec confiance dans la Providence. La réponse de Jésus peut nous paraître choquante : « Que me veux-tu, femme ? Mon heure n’est pas encore arrivée. » Le père Lagrange, bibliste, qui a vécu 50 ans à Jérusalem, commente cette phrase de Jésus à la lumière des langues orientales et de la culture du pays. Le sens de la phrase varie selon l’intonation et le regard. Tantôt elle signifie « occupez-vous de vos affaires », et tantôt avec un sourire « laissez-moi faire, tout ira bien ». Dans ce contexte, le père Lagrange propose cette traduction : « Ne t’inquiète pas ». La prière de la Vierge Marie obtient aux couples et aux familles de passer des disputes à la réconciliation, de l’égoïsme à l’amour oblatif, de la tristesse à la joie. Aujourd’hui le concubinage s’est généralisé. Le sacrement du mariage demeure pour les chrétiens l’union en Dieu et la sainteté dans la vie ordinaire accomplie dans la foi et l’amour extraordinaires. L’Église catholique élève l’union de l’homme et de la femme, à hauteur de Dieu, par le sacrement du mariage. La relation sentimentale et sexuelle devient relation surnaturelle, découverte de Dieu et union au Christ. L’union conjugale ressemble à une liturgie divine dans la beauté et la grâce. Un littérateur écrivait sur le mariage : « l’un souffre et l’autre s’ennuie ». Le conjoint qui aime souffre, celui qui aime moins s’ennuie. La banalisation menace la vie familiale. C’est pourquoi l’homme et la femme doivent éviter les vulgarités et l’excès de familiarité. Les Équipes Notre-Dame proposent aux couples de prendre rendez-vous-même s’ils vivent ensemble et qu’ils se voient souvent. Il y a toujours des non-dits qui agissent comme les cellules cancérigènes qui se reproduisent de manière nuisible. Lors de ces rendez-vous, cœur à cœur, sans enfants, sans bruit, ni téléphone ni télévision allumée, chaque conjoint offre à l’autre la possibilité de s’exprimer sans que sa parole soit coupée ou critiquée tout de suite. Trois questions fondamentales favorisent ce dialogue en couple : « est-ce que ça va ? » ; y a-t-il quelque chose qui te dérange ? ; « y a-t-il quelque chose que tu aimerais ? » Il arrive que des réponses soient dures. Pourtant il revient au conjoint visé par d’éventuelles remarques de dire « merci, chéri (e) » pour la sincérité et le partage. Au bout de ce moment d’expression réciproque, le couple prend un autre rendez-vous pour continuer à travailler les questions. Aimer, c’est un travail, ou plutôt un art qui demande effort, durée et fidélité. Le bonheur réside précisément dans ce partage unique. Le bonheur n’est pas une destination mais une manière de marcher !

Prions pour la communication non violente dans le couple.

Prions pour les couples en concubinage qui hésitent à se marier civilement ou à l’église.

Notre Père. Avec Maria. Gloria.

 

Jésus dans la synagogue de Nazareth

De l’Évangile selon saint Luc 4, 16s : « Jésus vint à Nazareth où il avait été élevé, entra, selon sa coutume le jour du sabbat, dans la synagogue, et se leva pour faire la lecture. On lui remit le livre du prophète Isaïe et, déroulant le livre, il trouva le passage où il était écrit : « L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a consacré par l’onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres. (…) Il replia le livre, le rendit au servant et s’assit. Tous dans la synagogue tenaient les yeux fixés sur lui. Alors il se mit à leur dire : « Aujourd’hui s’accomplit à vos oreilles ce passage de l’Écriture. »

Dans le sacrement du mariage, les époux reçoivent l’Esprit Saint afin de vivre leur baptême dans la relation conjugale et l’éducation des enfants. Il s’agit de « l’aujourd’hui de Dieu ».

Dans la synagogue de Nazareth, Jésus a lu le prophète Isaïe et il l’a commenté. Dans les Équipes Notre-Dame, les couples lisent la Parole de Dieu. Ils la commentent et l’actualisent. Ils peuvent dire avec Jésus : « Aujourd’hui s’accomplit cette parole. » La relation sentimentale risque de devenir « l’égoïsme à deux » sans l’ouverture aux autres. L’amour conjugal se déploie dans la vie familiale, sociale et ecclésiale. Il y a une fécondité sociale en tout amour. Car le propre de l’amour est de se répandre et de rayonner. Jésus a reçu l’Esprit Saint pour porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, pour guérir les malades et libérer ceux qui dépendaient du pouvoir du diable et de la mort. Dans le sacrement du mariage, l’union sexuelle a une double finalité : affermir l’intimité conjugale et le don de la vie, les enfants. L’écologie est maintenant à l’honneur. Nombreux sont les couples qui aspirent à une écologie intégrale selon l’expression du pape François qui tient compte de toutes les dimensions de la personne humaine et de la création. L’Église catholique propose aux couples la planification des naissances selon des méthodes naturelles. La pilule représente aux yeux des scientifiques une aventure hormonale en perturbant l’ovulation naturelle. On ne maîtrise pas tous les effets secondaires de l’utilisation de la pilule contraceptive. C’est pourquoi des femmes affirment vouloir « plaquer leurs plaquettes des pilules » au profit d’un contrôle naturel et scientifique de la fécondité qui n’est pas à confondre avec la méthode Ogino. Dans la préparation au mariage, des médecins chrétiens qui connaissent la méthode Billings informent sur l’observation naturelle de la glaire cervicale et sur la méthode sympto-thermique. Il y a la dimension biologique mais aussi les dimensions psychologiques, affectives et spirituelles des relations sexuelles dont le but est de grandir dans l’amour et de donner la vie.

Prions pour les formateurs des Centres de préparation au mariage, pour le CLERC, pour l’AMAFAR et pour les associations de formation des parents.

Prions pour les gynécologues et pour les sages-femmes. 

Prions pour les psychologues, les assistantes sociales et tous ceux qui travaillent pour le bien des couples et des familles.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.

 

La Transfiguration de Jésus

De l’Évangile selon saint Luc 9, 28s : « Jésus prenant avec lui Pierre, Jean et Jacques, gravit la montagne pour prier. Et il advint, comme il priait, que l’aspect de son visage devint autre, et son vêtement, d’une blancheur fulgurante. »

Pierre, Jean et Jacques ont éprouvé un grand bonheur à prier avec Jésus qui leur a dévoilé la lumière de sa divinité cachée sous le voile de sa chair humaine. Dans le mariage il y a aussi la lumière de Dieu cachée dans la chair humaine. Le bonheur de la personne humaine se trouve en Dieu. Les Pères de l’Église, dans les premiers siècles de l’histoire du christianisme, aimaient présenter l’homme comme un arbre renversé dont les racines s’enfoncent dans le Ciel. La vie vient de Dieu. Les racines de la vie humaine restent cachées dans le cœur de Dieu. Dieu est Amour. L’humanité a été créée par amour. L’homme et la femme vivent un mystère d’amour.

L’expérience prouve que les richesses et les plaisirs ne parviennent point à combler la soif du cœur ni le désir de l’âme. L’insatisfaction est inhérente à toute expérience humaine. L’amour humain comporte joie et force mais l’insatisfaction demeure. La personne humaine est appelée à aller plus loin sans s’arrêter aux créatures. La personne humaine a été créée pour Dieu. Nous pouvons parler aujourd’hui d’idolâtrie au sujet des relations sentimentales qui ont pris la place de Dieu. Dans l’Ancien Testament, le peuple était tombé dans l’idolâtrie du Veau d’or. Maintenant le risque est de tomber dans l’idolâtrie des relations sentimentales et sexuelles qui ne peuvent pas donner ce qu’elles ne sont pas. Il y a une approche inflationniste de la vie amoureuse qui provoque la déception. Le conjoint n’est pas dieu. Parfois il se prend pour « dieu » exigeant adoration et manifestant une jalousie aux antipodes de l’amour. Pour la foi biblique, les conjoints sont des compagnons en marche vers Dieu. Le choix de Dieu demeure premier. À ce propos, le chrétien qui vit du Christ ressuscité, ne renonce pas à sa foi pour une relation amoureuse qui exigerait l’apostasie, c’est-à-dire l’abandon de sa foi chrétienne vivifiante. Renoncer à sa foi pour un mariage avec quelqu’un d’une autre religion ressemblerait à la démarche malheureuse d’Esaü, qui avait vendu son droit d’aînesse pour un plat de lentilles !

Prions pour la vie spirituelle des couples et des familles.

Prions pour que les couples et les familles prient à la maison : au lever et au coucher avec le signe de la croix, la bénédiction de table, le partage de l’Évangile et la prière du chapelet le soir.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.

  

La célébration de l’Eucharistie

Du livre des Actes des Apôtres 2, 42 : « Les disciples de Jésus se montraient assidus à l’enseignement des apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. La crainte s’emparaît de tous les esprits : nombreux étaient les prodiges et signes accomplis par les apôtres. Tous les croyants, ensemble, mettaient tout en commun ; ils vendaient leurs propriétés et leurs biens et en partageaient le prix entre tous selon les besoins de chacun. Jour après jour, d’un seul cœur, ils fréquentaient assidûment le temple et rompaient le pain dans leurs maisons, prenant leur nourriture avec allégresse et simplicité de cœur. Ils louaient Dieu et avaient la faveur de tout le peuple. Et chaque jour, le Seigneur adjoignait à la communauté ceux qui seraient sauvés. » 

Les Équipes Notre-Dame rassemblent chaque mois quatre, cinq ou six couples pour une soirée de prière, de réflexion et de partage autour d’un dîner. Chaque famille reçoit à tour de rôle chez elle. Saint Luc, dans les Actes des Apôtres, décrit la vie de la première communauté chrétienne qui se réunissait pour louer Dieu en partageant la Parole de Dieu et le Corps du Christ. La célébration de l’eucharistie avait lieu dans les maisons. La joie, fruit de l’Esprit Saint, illuminait ces rassemblements des premiers chrétiens. La joie manque cruellement dans la

La joie et le bonheur ne sont pas des biens faciles mais des biens ardus. Ils méritent l’effort et la foi en Dieu. L’Église a toujours de beaux jours devant elle car elle offre des raisons de vivre et d’espérer. La joie de la prière chrétienne, don surnaturel, dépasse tous les biens du supermarché.

Prions pour que les baptisés n’apostasient pas leur foi chrétienne en délaissant les assemblées dominicales et la célébration de la messe. Prions pour les membres des Équipes Notre-Dame et pour ceux qui vont les rejoindre sur notre île de La Réunion. Prions pour les groupes de prière qui nourrissent la foi et la joie des fidèles chrétiens.

 Notre Père. Ave Maria. Gloria.

Prions : Dieu qui es fidèle et juste, réponds à ton Église en prière, comme tu as répondu à Jésus, ton serviteur. Quand le souffle en elle s’épuise, fais-la vivre du souffle de ton Esprit : qu’elle médite sur l’œuvre de tes mains, pour avancer, libre et confiante, vers le matin de sa Pâque. Par Jésus le Christ, notre Seigneur.

Lundi 28 octobre 2019. Équipes Notre-Dame. Radio-Arc-en-ciel, Prière du Rosaire animée par Marylène et François, Jean-Marie, Denise, Sonia et Henri à la technique et,

Fr. Manuel Rivero o.p.
Dominicains
Cure de la cathédrale
22 avenue de la Victoire
97400 Saint Denis de La Réunion

Les enjeux du « Dimanche de la Parole de Dieu », institué par le pape François, et le père Lagrange par Fr. Manuel Rivero o. p.

Les enjeux du « Dimanche de la Parole de Dieu » institué par le pape François

et le père Lagrange

Pour des « cœurs brûlants »

ZENIT – OCTOBRE 10, 2019 13:39FR. MANUEL RIVERO O.P.SPIRITUALITÉ, PRIÈRETHÉOLOGIE

 

Fr. Manuel Rivero O.P., président de l’Association des amis du père Lagrange O.P. – fondateur de l’École biblique de Jérusalem -, est curé de la cathédrale de Saint-Denis de la Réunion. Il examine les enjeux du « Dimanche de la Parole de Dieu » institué par le pape François, pour que les baptisés aient des « cœurs brûlants ».

Le pape François vient d’instituer « le Dimanche de la Parole de Dieu[1] » qui aura lieu le 3e dimanche du Temps ordinaire, en 2020, ce sera le 26 janvier. Il a choisi la mémoire liturgique de saint Jérôme (350-419), traducteur et commentateur de la Bible, pour mettre en lumière la Parole de Dieu révélée aux hommes : « Ignorer les Écritures, c’est ignorer le Christ », enseignait-il.

Origine surnaturelle des Saintes Écritures

Jean Guitton (†1999)[2], philosophe, membre de l’Académie française, invité par le saint pape Paul VI au concile Vatican II, me disait lors d’un entretien à Paris sur le père Lagrange : « Nos contemporains ne croient pas en la dimension surnaturelle de la Bible ; c’est pourquoi il convient de mettre sur les autels le père Marie-Joseph Lagrange, le fondateur de l’École biblique de Jérusalem, pour relier la foi et la science. » Disciple du père Lagrange à Jérusalem, Jean Guitton vénérait la figure de ce maître en exégèse.

Le cardinal Carlo Maria Martini (†2012), exégète et grand apôtre de la lectio divina, souhaitait aussi la béatification du père Lagrange, dont « la prière était feu », de manière à relier le renouveau de l’exégèse catholique au XIXe siècle avec la sainteté[3].

Le pape cite l’Évangile de saint Luc[4] pour montrer que les disciples ont eu besoin de Jésus pour leur ouvrir l’esprit à l’intelligence des Écritures. Jésus qui avait ouvert les oreilles des sourds et les yeux des aveugles ouvre l’esprit fermé des disciples afin qu’ils reçoivent la lumière de la Révélation divine transmise par les Saintes Écritures. Il s’agit d’un miracle encore plus grand que les guérisons physiques. La présence de Jésus ressuscité ne suffit pas. Les disciples déconcertés et apeurés après le Vendredi saint ont besoin de recevoir le sens des événements par la catéchèse de Jésus qui a accompli les prophéties de l’Ancien Testament dans sa mort et dans sa résurrection : « en son Nom le repentir en vue de la rémission des péchés serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem[5] ».

Jésus, exégète du Père

Jésus, l’exégète du Père, est venu expliquer le mystère de Dieu. Le Prologue de l’Évangile selon saint Jean utilise le mot grec[6] qui a donné en français « exégèse » pour manifester l’œuvre du Fils de Dieu qui par sa prédication « fait voir » et comprendre l’amour du Père que personne n’a jamais vu. Les explications de Jésus s’avèrent indispensables pour enraciner la Parole de Dieu dans les cœurs, autrement le diable parviendrait à arracher cette semence de vie divine restée à la superficie[7].

Sorti vivant du tombeau, Jésus rappelle aux disciples le sens de la croix et de la Passion. La croix devient la clé qui déverrouille les mystères fermés de l’existence humaine frappée par la souffrance, l’injustice, le mal et le malin. Le récit des disciples d’Emmaüs converge vers cette phrase de Jésus : « Ne fallait-il pas que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans sa gloire ?[8] ». Pour entrer dans la gloire de la résurrection il n’y a qu’un seul chemin, le chemin de la croix. Saint Jean de la Croix (†1591), le grand mystique espagnol, faisait remarquer que nombreux sont ceux qui veulent arriver dans la gloire de Dieu en évitant les souffrances. Un proverbe canadien dit le même message d’une autre manière : « Tous veulent aller au paradis mais personne ne veut mourir. »

Messie crucifié

L’originalité de la foi chrétienne se trouve précisément dans la présence de Jésus au cœur des épreuves et de la mort. Folie et scandale de la croix, s’exclamait saint Paul devant des auditoires sceptiques voire révoltés à l’idée d’un Dieu qui souffrirait. Quand Jésus parle du besoin de la croix, il s’agit de la logique de l’amour. Saint Augustin prêchait : « Donnez-moi quelqu’un qui aime et il comprendra ce que je dis. » L’amour rend humble et petit. Ceux qui aiment sont prêts à souffrir et même à donner leur vie pour la personne aimée : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis[9] », enseigne Jésus. Par amour, le Très-Haut est devenu le très-bas, le tout-puissant s’est abaissé jusqu’à la faiblesse et la fragilité, Dieu grand s’est présenté comme un petit bébé à Bethléem. C’est dans l’abaissement et l’humilité que Dieu se révèle amour et qu’il nous apprend à aimer. Les grands saints ont aimé prier au pied de la croix pour y découvrir l’art d’aimer de Dieu.

Des sages humanistes proposent parfois aux chercheurs de Dieu de choisir la religion qui les rend meilleurs. À la lumière de l’Évangile de Jésus, non-violent qui aime jusqu’à la mort, le chrétien pourrait affirmer : « Choisis la religion où Dieu soit Amour et qu’Il te donne la grâce d’aimer sans domination ». Quel homme a-t-il osé dire « venez à moi, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour vos âmes ?[10] ». Dieu ne se trouve pas dans la recherche du sentiment de puissance. Dieu est Amour tel que le décrit saint Paul : « L’amour ne cherche pas son intérêt, ne s’irrite pas, ne tient pas compte du mal (…), il excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout. L’amour ne passe jamais[11] ».

Il arrive que des croyants d’autres religions que le christianisme disent aux chrétiens : « votre religion et la mienne, c’est la même chose. Il n’y a qu’un seul Dieu ». C’est vrai qu’il n’y a qu’un seul Dieu mais la manière d’aimer de Dieu n’est pas la même selon les religions. Aux antipodes de toute domination, Jésus révèle l’amour de son Père. D’après les différentes visions de Dieu il y aura diverses manières d’aimer.

La souffrance, la peur de souffrir et la mort font peur. Tout homme essaie d’y échapper. Combat naturel qui correspond à la volonté de Dieu. Dieu ne veut pas la mort des hommes. Dieu n’a pas voulu la mort. Celle-ci est entrée dans le monde par la jalousie du diable[12].

Paul Claudel (†1955), poète catholique, réagissait aux questions sur le mal en disant : « Jésus n’est pas venu expliquer le mal mais l’habiter et le vaincre ». Jésus est mort pour vaincre la mort. Son sacrifice a agi comme une arme fatale contre les pouvoirs de la mort. La puissance de l’Amour de Jésus s’est manifestée dans sa résurrection.

Présence de Jésus dans la souffrance et l’insécurité

Le contraire de la foi n’est pas à proprement parler l’athéisme mais la solitude. Chacun a peur de la solitude, de l’échec, de la prison et de la mort. La spécificité de la foi chrétienne apparaît dans la présence aimante de Jésus dans la maladie, l’injustice, l’échec et la mort. Tout au long de l’histoire de l’Église, les chrétiens ont témoigné de cette communion au Christ dans la persécution et la douleur. La foi chrétienne ne consiste pas à penser que Dieu existe. Par la foi, le chrétien contemple Jésus vivant et il s’unit à ses souffrances dans l’espérance de partager sa gloire. Nous comprenons alors le grand nombre de témoignages de baptisés, qui nous partagent leur expérience heureuse de communion avec Dieu dans des circonstances où tout ferait penser au vide et à l’absurde. Des malades témoignent des grâces reçues dans la maladie. Des personnes détenues injustement témoignent des grâces vécues dans le froid des cellules de prison. Le père Pedro Arrupe (†1991), ancien Général de la Compagnie de Jésus, se souvenait des journées passées injustement dans une prison japonaise, cœur à cœur avec Jésus, en le contemplant dans sa Passion, à Gethsémani, dans sa garde à vue dans la maison du grand-prêtre, flagellé, abandonné, insulté, couronné d’épines, crucifié. Le père Arrupe considérait ces jours de tristesse humaine comme de grands moments de sa vie mystique : « Il n’y avait rien dans ma cellule de prison ; j’étais seul avec le Christ[13] ». Là où le mal avait abondé, la grâce avait surabondé.

La Parole de Dieu engendre la foi. Le chrétien découvre alors son identité de fils de Dieu et de frère de Jésus. La Parole de Dieu révèle le mystère de la Trinité et elle révèle aussi l’homme à lui-même : « Le mystère de l’homme ne s’éclaire qu’à la lumière de Jésus » (Concile Vatican II. Gaudium et spes n° 22). Le christianisme ne fait pas partie des religions du livre même s’il vénère les Saintes Écritures. Le Verbe fait chair est vivant. Le texte des bibles devient vivant par l’Esprit de Jésus ressuscité. Sans la grâce intérieure de l’Esprit Saint répandue dans le cœur des croyants, les enseignements des textes bibliques n’apporteraient pas la connaissance ni la vie de Dieu[14].

La Parole de Dieu établit « un dialogue constant de Dieu avec son peuple[15] ». Le mot « dialogue » comprend le mot « logos » qui dans le grec de l’Évangile selon saint Jean désigne le Verbe de Dieu : intelligence divine et Parole. Dans l’Ancien Testament, le mot hébreu « davar » qui signifie « parole » représente un événement. La Parole de Dieu ne saurait pas être réduite à un simple souffle mais elle est créatrice et marque l’histoire.

Ce n’est pas sans raison, que les chrétiens cherchent le dialogue avec les religions et les cultures. Dieu est dialogue dans l’altérité et l’unité. Le Père engendre le Fils et le Fils fait le Père. Sans Fils il n’y a pas de Père. Le Père s’entretien avec son Fils et le Fils rend grâces au Père dans la communion de l’Esprit Saint. Ce dialogue de Dieu « ad intra », dans le mystère de la sainte Trinité, se trouve à la source du dynamisme des dialogues religieux et philosophiques « ad extra » dans l’histoire de l’humanité.

Le Verbe et les mots

Seul Dieu parle bien de Dieu. Jésus, le Verbe fait chair, emprunte nos mots humains les plus justes pour manifester le mystère de Dieu. Le théologien espagnol, Cabodevilla, aimait à dire que « la Parole de Dieu s’est faite chair dans des mots[16] ». L’Incarnation du Fils de Dieu ne se réduit pas à la chair humaine de Jésus, à l’Enfant de la crèche, elle comprend la culture et la langue d’Israël. Les mots humains n’expriment pas toute la richesse des pensées et des sentiments mais ils demeurent la médiation indispensable pour la communication. Dieu est Esprit. Les mots de nos langues et les expériences humaines restent bien en-deçà de la grandeur de Dieu. Pourtant, les mots de la Bible et leur renvoi à la terre et aux travaux des hommes peuvent éveiller l’intelligence à la compréhension de Dieu. C’est ce que fait Jésus dans l’Évangile en parlant des vignes, des mariages, des bergers, des trésors … Dans les Saintes Écritures, les mots sont cent pour cent de Dieu et cent pour cent des hommes. Le pape François rappelle l’enseignement du Concile Vatican II dans la Constitution « Dei Verbum[17] » sur le principe de l’incarnation.

« Cœurs brûlants »

« Notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, quand il nous expliquait les Écritures ?[18] ». La Parole de Dieu fait grandir dans l’amour de Dieu. Il ne sert à rien de se plaindre de l’égoïsme des gens. La conversion passe par un long chemin où la Parole de Dieu joue un rôle fondamental. Les disciples d’Emmaüs marchaient tristes et découragés, le visage sombre. La catéchèse de Jésus, à partir de la Loi, des Prophètes et des Psaumes, a rempli leurs cœurs de la joie pascale.

Aujourd’hui, les catéchistes accomplissent aussi une mission extraordinaire source d’allégresse. J’aime à dire que catéchiste est le plus beau métier du monde. Métier, ministère, service, qui peut illuminer la route des adultes et des enfants à jamais. En tant qu’aumônier de prison, je récolte les fruits de la catéchèse. Souvent les personnes détenues ne se sont pas confessées depuis leur première communion mais les enseignements de la catéchèse gardés dans « le disque dur » de la mémoire remontent lors des événements douloureux.

L’homélie

Le pape François met en valeur l’homélie qui nourrit la foi des chrétiens, « elle possède un caractère presque sacramentel[19] ». L’homélie n’est pas une conférence ni un cours. Dans l’homélie, le prêtre actualise l’Évangile. « Aujourd’hui s’accomplit cette parole », s’était exclamé Jésus en refermant le rouleau du prophète Isaïe dans la petite synagogue de Nazareth. Dans les anciennes basiliques chrétiennes, l’existence de deux ambons, l’un pour l’Ancien Testament et l’autre pour le Nouveau Testament, mettait en évidence la différence et la relation entre eux pour les unir dans le mystère du Christ[20]. Le pape François commente l’accomplissement de l’Ancien Testament par le Christ : « L’Ancien Testament n’est jamais vieux une fois qu’on le fait entrer dans le Nouveau, car tout est transformé par l’unique Esprit qui l’inspire[21].

Le pape évoque « le caractère performatif de la Parole de Dieu[22] », c’est-à-dire qu’elle réalise ce qu’elle dit. Dans la liturgie de la Parole, l’Esprit Saint agit. D’où le symbole de la colombe dans les chaires de nos églises. L’Esprit Saint descend sur l’assemblée pendant la liturgie de la Parole de Dieu en prière pour faire grandir la foi et l’amour. Cette épiclèse fait des fidèles réunis en « un seul corps et un seul esprit dans le Christ » (Canon eucharistique n° III).

Victoria, ma sœur aînée, professeur des écoles pendant toute sa vie, appréciait particulièrement les homélies d’un prêtre de Bilbao qui commençait par une question et qui finissait par une question. Dieu s’adresse à l’intelligence. L’homélie cherche à éveiller l’intelligence. Dans l’Évangile, Marie se pose des questions : « comment[23] », « pourquoi ». L’homélie éclaire les interrogations de l’homme l’orientant vers des choix d’amour à faire dans la liberté. Chesterton (†1936), écrivain catholique anglais, disait avec humour : « Quand on rentre dans une église on est prié d’enlever le chapeau mais pas la tête ! ».

La sonorisation et l’articulation

Pour que l’homélie porte ses fruits, il s’avère indispensable de miser sur une bonne sonorisation. L’un des premiers investissements à prévoir dans une paroisse concerne la sonorisation. Trop souvent, les fidèles se plaignent de ne pas entendre ou de ne pas comprendre les lectures ou l’homélie à cause des défauts dans le système de sonorisation. Pour les nouvelles générations habituées à la perfection technique des media, une sonorisation défectueuse discrédite la valeur sacrée de la Parole de Dieu.

Il convient aussi de former les laïcs à l’utilisation des micros. J’aime à dire sous forme de boutade que « les micros sont comme les personnes, il faut leur parler et non pas les frapper. Si on les frappe, on les abîme ». Pourtant je continue de voir les habitués des paroisses taper sur les micros.

La lecture de la Parole de Dieu suppose aussi une préparation soignée. L’expérience prouve que les formations à la respiration, à l’articulation et à la lecture publique portent des fruits merveilleux et assez rapides. Les comédiens étudient cet art dont les églises ont bien besoin. Il serait bon d’organiser des sessions de formation avec des professionnels du théâtre, par exemple.

La Vierge Marie et la Parole de Dieu

Marie, la mère de Jésus, est louée dans l’Évangile à cause de sa foi en l’accomplissement de la Parole de Dieu en elle (cf. Lc 1, 45). Pour le pape François, cette béatitude de la foi précède les autres béatitudes sur la pauvreté, l’humilité, les artisans de paix …

Saint Ambroise de Milan (†397) partageait son expérience et celle d’une multitude de croyants quand il affirmait que dans la lecture priante de la Parole de Dieu l’homme se promène avec Dieu dans le paradis[24]. Lire les Saintes Écritures équivaut à écouter Dieu qui parle au cœur. Dialogue d’amour qui fait grandir la foi. Le bonheur de Marie a été précisément d’écouter et de prier la Loi, les Psaumes et les Prophètes. La foi ne consiste pas à penser que Dieu existe. Le diable le pense aussi. La foi jaillit de l’âme en réponse à la révélation de l’amour de Dieu dans les Saintes Écritures et dans la prédication. La grandeur de Marie se trouve dans sa foi. Le pape François de citer saint Augustin qui met en lumière Marie comme disciple de Jésus qui écoute et met en pratique la Parole de Dieu.

Modèle de foi, Marie n’a pas tout compris. Saint Luc commente le recouvrement de Jésus au Temple de Jérusalem, quand il a expliqué à Marie et à Joseph qu’ « il devait être dans la maison de son Père » (cf. Lc 2, 49), en soulignant que ni Marie ni Joseph « ne comprirent cette parole ». La foi illumine la route des hommes mais elle comporte aussi un côté obscur qui fait penser à « la nuit de la foi » chantée par saint Jean de la Croix. Le père Marie-Joseph Lagrange a consacré son existence à la traduction et au commentaire de la Bible en reconnaissant aussi que « la Parole de Dieu pouvait être obscure ». Sans cette limite dans la connaissance de Dieu, la foi ne serait plus la foi mais la claire vision.

Saint Luc, l’évangéliste, montre Marie « qui garde fidèlement dans son cœur » (cf. Lc 2, 51) les événements et les paroles de son fils Jésus.

La prière plutôt qu’une action apparaît comme un état dans la vie de Jésus et des apôtres. À l’image de l’amour qui unit ceux qui aiment même s’ils n’y pensent pas, celui et celle qui prie vit en communion avec Dieu. Marie vivait en état de prière par sa foi. Saint Luc fait appel à deux mots importants de la vie spirituelle de Marie, mère et disciple de son Fils Jésus : « garder » et « fidèlement ».

Une mère porte son enfant dans son sein pendant neuf mois. Cette relation unit la mère et le fils d’une manière unique et définitive. Les généticiens disent que chaque enfant laisse dans le corps de sa mère quelques cellules. La mère qui a donné son corps à l’enfant garde quelque chose du corps de celui-ci en elle. Marie garde fidèlement les événements de la vie de Jésus dans son esprit. « Fidèlement » vient de « foi ». Il s’agit de la même étymologie. Toute l’existence de Marie ressemble à un pèlerinage de foi.

Le pape émérite Benoît XVI dans son Exhortation post-synodale « Verbum Domini » sur la Parole de Dieu dans la vie et dans la mission de l’Église « exhorte les chercheurs à approfondir le plus possible le rapport entre la mariologie et la théologie de la Parole[25] ». Marie, « Mère du Verbe de Dieu » et « Mère de la foi » apparaît comme un modèle d’écoute de la Parole de Dieu. À l’Annonciation, Marie écoute avec son cœur l’annonce de l’ange Gabriel. Le livre du Deutéronome présente l’écoute de la Parole de Dieu comme le premier des commandements et le fondement de l’amour de Dieu à vivre par le Peuple de Dieu : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est le seul Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir » (cf. Dt 6, 4).

Un proverbe africain dit « que la femme est fécondée par l’oreille ». Manière de relier l’écoute, l’amour et le don de la vie.

En Marie, femme juive, première chrétienne, l’Ancien Testament passe dans le Nouveau Testament pour s’accomplir en Jésus, née d’une femme (cf. Ga 4, 4) : « Marie est aussi le symbole de l’ouverture à Dieu et aux autres ; de l’écoute active qui intériorise, qui assimile et où la Parole divine devient la matrice de la vie[26] ». La Parole de Dieu devient matrice d’une nouvelle manière de penser, de prier, de parler et d’agir.

Marie et la Trinité

La Vierge Marie, temple de la sainte Trinité, rayonne de la lumière de Dieu. Fille du Père, source de la vie, Marie n’est pas une déesse mais une créature aimée et sauvée par Dieu. Mère du Verbe fait chair, Image du Père, Marie manifeste au monde l’infinie richesse de la connaissance de Dieu révélée par Jésus.

Dans son commentaire au Credo, saint Thomas d’Aquin (†1274) montre comment le Verbe s’est manifesté dans le mystère de l’Incarnation : « Rien n’est plus semblable au Fils de Dieu que le verbe que notre intelligence conçoit sans le proférer par les lèvres. Or, nul ne connaît le verbe tant qu’il demeure dans l’intelligence de l’homme si ce n’est celui qui le conçoit ; mais dès que notre langue le fait entendre, il est connu de nos auditeurs. Ainsi le Verbe de Dieu, aussi longtemps qu’il demeurait dans l’intelligence du Père, était connu seulement de son Père ; mais une fois revêtu d’une chair, comme le verbe de l’homme se revêt du son de sa voix, il s’est alors manifesté au dehors pour la première fois et s’est fait connaître. Selon cette parole de Baruch (3, 38) : « Ainsi il est apparu sur la terre et il a conversé avec les hommes. » Voici le deuxième exemple. Nous connaissons par l’ouïe le verbe proféré par la voix, et cependant nous ne voyons pas et nous ne le touchons pas ; mais si ce verbe nous l’écrivons sur un papier, alors nous pouvons le toucher et le voir. Ainsi le Verbe de Dieu s’est fait lui aussi, et visible et tangible, lorsqu’il s’inscrivit en quelque sorte dans notre chair. Et de même que le papier sur lequel est inscrite la parole du roi, nous l’appelons la parole du roi, de même l’homme auquel est uni le Verbe de Dieu dans une seule personne, nous le nommons le Fils de Dieu[27] ». Ici l’Incarnation du Verbe est comparée au papier. La Vierge Marie a été cette page blanche sur laquelle Dieu a écrit l’histoire du Salut. La page blanche évoque la disponibilité de Marie et l’absence de péché en elle. Par Marie, Dieu s’est rendu visible à nos yeux. La Vie de Dieu s’est manifestée en Jésus[28]. Qui voit Jésus voit le Père. De même qu’un récit fait voir l’histoire racontée comme si elle se déroulait devant nos yeux. Par l’Esprit Saint, la Parole de Dieu rend visible le visage du Christ dans la lumière de la foi : « Jésus-Christ est le visage humain de Dieu et le visage divin de l’homme[29] ».

Loin d’être une mère possessive, Marie conduit toujours à Jésus comme elle l’a fait lors des noces de Cana : « Faites tout ce qu’il vous dira » (cf. Jn 2, 5). Épouse de l’Esprit Saint, don de Dieu qui fait grandir l’Église, Marie contribue par son intercession à la croissance de la foi et du Corps du Christ, l’Église.

La maternité divine de Marie ne s’arrête pas à Noël. Elle se déploie jusqu’au Calvaire où Jésus la donne comme mère spirituelle à Jean, le disciple bien-aimé qui représente l’Église, et à la Pentecôte où l’Esprit Saint descendra sur les apôtres en prière au Cénacle et sur une multitude de croyants rassemblés à Jérusalem.

Sur le Calvaire, une épée a transpercé l’âme de Marie (cf. Lc 2, 35). Les icônes de la Mère de Dieu placent une étoile sur son front et sur ses épaules, symboles de la virginité avant, pendant et après l’accouchement. En revanche, sur le Calvaire, Marie a connu la déchirure de l’âme. La foi et la maternité spirituelle de Marie ne sont pas allés sans souffrance.

L’annonce de la Parole de Dieu pour que les âmes naissent à la vie de Dieu passe par la déchirure de l’accouchement. Sœur Inés de Jesús O.P., (†1993) moniale dominicaine du monastère de Caleruega (Burgos, Espagne), a écrit que « les accouchements des âmes provoquent des déchirures » (Journal spirituel inédit, 28 août 1973). La maternité spirituelle, qui favorise la nouvelle naissance des âmes à la vie de Dieu, passe par les souffrances de l’accouchement de la nouvelle création comme l’enseigne saint Paul[30].

Glorifiée en son corps et en son âme la Vierge Marie, la Mère de Dieu, continue d’œuvrer aux côtés de son Fils pour la croissance du Christ total, la Tête, Jésus, et les membres, les baptisés et ceux qui croient en lui. Bossuet définissait l’Église comme le Christ répandu et communiqué.

Mère du Verbe fait chair en elle, Marie grandit dans sa mission de faire connaître et aimer son Fils qu’elle a accueilli et donné au monde. D’où son rôle dans l’évangélisation. De très nombreuses congrégations religieuses missionnaires ont choisi le patronage de la Vierge Marie, la Mère de la Parole de Dieu. Sur environ 400 congrégations féminines de vie apostolique 130 portent un nom marial[31]. Personne n’a aimé autant le Verbe fait chair que Marie. Nul n’a accueilli avec autant de foi et d’amour la Parole de Dieu que Marie.

Dans la vie d’un chrétien, il y a un va-et-vient entre la prière et l’approfondissement de la Parole de Dieu. Plus la Parole de Dieu est écoutée et priée et plus le fidèle a soif de chercher la richesse des sens de l’Écriture. Trésor inépuisable, source d’eau vive, jamais tarie, comme le dit saint Ephrem cité par le pape François au début de cette lettre apostolique « Aperuit illis ».

Le père Marie-Joseph Lagrange (†1938), avait inauguré l’École biblique de Jérusalem avec une grande vision du sens et du futur de l’interprétation de la Parole de Dieu : « Dieu a donné dans la Bible un champ infini de progrès dans la vérité ».

Le but de ce nouveau « dimanche de la Parole de Dieu » est de faire aimer davantage la révélation divine et de la mettre en pratique. En effet, la liturgie porte la Parole de Dieu à l’instar d’un écrin qui contient un bijou.

Le fondamentalisme représente un péché contre l’intelligence. La vérité évangélique ne ressemble pas à une statue en béton. La Vérité est Chemin et Vie en la personne de Jésus[32]. La Parole de Dieu ne cesse de grandir dans le cœur des chercheurs de Vérité qui l’écoutent et la lisent. La Parole de Dieu fait toutes choses nouvelles[33]. Elle éveille le désir et l’amour. C’est pourquoi la Bible s’achève avec l’Apocalypse en priant : « Maranatha ! Viens Seigneur Jésus » (Ap. 22, 20).

Saint-Denis (La Réunion. France), le 10 octobre 2019.

(La Revue du Rosaire, n° 193, septembre 2007)

© Copyright 2019 – Fr Manuel Rivero

Les enjeux du dimanche de la Parole de Dieu institué par le pape François par Fr. Manuel Rivero o.p.

 

[1] Brigitte Waché, « Marie et les missions dans les congrégations féminines. Essai de typologie 147, in Marie, première missionnaire, 64e session de la Société française d’études mariales, Paris, Médiaspaul, 2007.

[2] Cf. Voir aussi Jean Guitton, Portrait du père Lagrange. Celui qui a réconcilié la science et la foi. Paris. Éditions Robert Laffont. 1992.

[3] Il Cardinale Carlo Maria Martini, S.J.

Gerusalemme, 22 luglio 2007

Molto reverendo e caro padre Manuel Rivero o. p. ,

Le sono molto grato per la sua lettera dell’11 maggio 2007, consegnatami dal nuovo Padre Priore del convento di santo Stefano di Gerusalemme.

Mi dà grande gioia la notizia che la causa di beatificazione del padre Marie Joseph Lagrange, fondatore della Ecole Biblique di Gerusalemme, è già assai avanti. Personalmente non ho conosciuto il padre Lagrange, ma ricordo l’impressione grande che ricevetti dalla lettura del suoi primi articoli sulla Revue Biblique, lettura che feci all’inizio dei miei studi biblici. Anche in seguito ho tratto molto profitto dai suoi commenti ai vangeli, e, pur non conoscendo i particolari, ho ammirato la sua grande obbedienza nel vivere il suo carisma di esegeta in piena disponibilità a fare quanto gli veniva chiesto.

Ho sempre guardato con gratitudine a questa figura di studioso e di figlio devoto della Chiesa, e sono lieto di sapere che egli era anche un uomo fervente, un uomo la cui preghiera era fuoco.

Ritengo che il padre Lagrange sia come l’iniziatore di tutta la rinascita cattolica degli studi biblici. Il pensare che all’inizio ci sia stato un santo ci conforta nel vivere questi studi con l’attitudine di San Girolamo e degli altri esegeti santi, che hanno cercato nella scrittura il volto di Dio.

Sarò molto lieto nel sapere ulteriori notizie sullo sviluppo della causa e prego fin da ora perché essa serva a far conoscere questo uomo straordinario, questo figlio obbediente della Chiesa, questo umile servitore del Vangelo.

Suo in X.o

Carlo Maria Card. Martini

(La Revue du Rosaire, n° 193, septembre 2007)

[4] Pape François, Lettre apostolique « Aperuit illis », n°1. Cf. Évangile selon saint Luc 24,45.

[5] Cf. Évangile selon saint Luc 24, 48.

[6] Évangile selon saint Jean 1, 18.

[7] Cf. Évangile selon saint Matthieu 13, 19.

[8] Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 24, 26.

[9] Évangile selon saint Jean 15,13.

[10] Évangile selon saint Matthieu 11,28-30.

[11] Épître de saint Paul aux Corinthiens, 13, 5-8.

[12] Cf. Sagesse 2, 24.

[13] Pedro Miguel LAMET, Arrupe, una explosión en la Iglesia, Madrid, ediciones Temas de hoy, 1990, p.158.

[14] Cf. Enzo Bianchi, « Prier la Parole », in Précis de théologie pratique. Deuxième édition augmentée. Bruxelles. Lumen vitae, 2007, p. 379.

[15] Pape François, Lettre apostolique « Aperuit illis ». n°2.

[16] J.M. Cabodevilla, Palabras son amores. Límites y horizontes del dialogo humano, Madrid, BAC, 1980, p. 251.

 

[17] Pape François, Lettre apostolique « Aperuit illis », n° 9.

[18] Évangile selon saint Luc 24, 32.

[19] Pape François, « Aperuit illis », n°5. Citation aussi d’Evangelii Gaudium, n°142.

[20] Commission biblique international. Inspiration et vérité dans l’Écriture sainte, Paris, Bayard, Fleurus-Mame. Cerf, 2014, p. 250,

[21] Pape François « Aperuit illis », n° 12.

[22] Pape François, « Aperuit illis », n° 2.

[23] Évangile selon saint Luc 1, 34 : « Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme ? », à l’Annonciation ; « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? » (Lc 2, 48), lors du recouvrement de Jésus au Temple de Jérusalem.

[24] Saint Ambroise de Milan, Epistula 49,3 : PL 16, 1204. Cité dans « La Parole du Seigneur. Verbum Domini ». Exhortation apostolique post-synodale du pape Benoît XVI, Paris, 2010, n° 87.

[25] Benoît XVI, Exhortation post-synodale « Verbum Domini », n° 27.

[26] Benoît XVI, Exhortation post-synodale « Verbum Domini », n° 27.

[27] Saint Thomas d’Aquin, Le Credo, Paris, Nouvelles Éditions Latines, 1969, n° 45.

[28] Cf. Première épître de saint Jean 1, 2 : « La Vie s’est manifestée ».

[29] Jean-Paul II. Ecclesia in America, n° 67.

[30] Saint Paul. Épître aux Romains 8, 28.

[31] Brigitte Waché, « Marie et les missions dans les congrégations féminines. Essai de typologie. 147. In Marie, première missionnaire. 64e session de la Société française d’études mariales. Paris, Médiaspaul, 2007.

[32] Cf. Évangile selon saint Jean 14, 6.

[33] Cf. Apocalypse 21, 5.

Écho de notre page Facebook : octobre 2019

29 octobre 2019
De la lettre de saint Paul apôtre aux Romains (8,25).
« Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous y aspirons par la patience. »

Commentaire du P. Lagrange dans Saint Paul, Épître aux Romains, coll. Études bibliques, 1931.

S. Paul, apôtre, par El Greco (1610-1614) Musée d’El Greco, Tolède, Espagne.

 

 

Nous n’avons pas été sauvés par l’espérance, mais, dans la doctrine de Paul, par la foi… Nous savons très bien que le salut ne sera complet que plus tard. C’est une loi de la foi que nous avons acceptée. Dès lors nous n’avons qu’à attendre avec patience… Cependant Paul explique auparavant qu’ayant accepté cette condition de l’espérance, nous ne pouvions avoir la prétention de voir. Car la chose espérée, si on la voit déjà, on n’a plus à l’espérer. Loin donc que notre situation présente nous décourage, nous attendons, et les désirs que nous éprouvons nous sont une certitude que notre espoir ne sera pas confondu.

 

 

 

 

27 octobre 2019
L’humilité du père Lagrange

 

© Livret Pèlerinage du Rosaire 2005.
Maquette MG-Imprimerie.

 

 

 

 

 

 

 

 

27 octobre 2019
Le pharisien et le publicain (Lc 18, 9-14)

« Un pécheur pénitent est plus agréable à Dieu qu’un orgueilleux qui se croit juste, c’est-à-dire, en concret le thème de 16, 15 : Leur erreur religieuse (des Pharisiens), celle qui les caractérise et les rend dangereux, comme guides spirituels du peuple, c’est d’apprécier ce que Dieu compte pour rien et de s’en faire un argument pour établir leur justice. Ils posent donc pour justes, et tout cela : richesse, bonne réputation, art de se faire valoir, constitue une très haute façade, mais une façade aux yeux des hommes, non aux yeux de Dieu qui voit le dedans et qui déteste cette élévation. » (M.-J. Lagrange, L’Évangile selon S. Jean, Lecoffre, 1941, p. 474 et 438.)

 

Photo : Le pharisien et le publicain, Julius Schnorr von Carolsfeld (1860).
Parmi les nombreuses œuvres du XIXe siècle, il y a celle de Julius Schnorr von Carolsfeld (1794-1872) : Une grande colonne, divise la scène en deux parties : à gauche, le long d’un couloir menant à l’extérieur, se trouve le publicain, tandis qu’à droite, le pharisien est sur une partie surélevée à laquelle on accède par trois marches. C’est l’attitude et le vêtement qui indique immédiatement qui sont les deux protagonistes de l’histoire : le pharisien, bien habillé et le buste en avant, indique de sa main gauche que c’est bien lui qui donne une obole ; l’ouverture à droite l’inonde de lumière. Son visage légèrement tourné de profil exprime une certaine suffisance ; son bras tendu en arrière tient ostensiblement une pièce de monnaie. Sous sa main se trouve une coupe déjà remplie de pièces de monnaie et il est clair que lorsqu’il laissera tomber la sienne, il entendra le bruit. La coupe posée sur une colonne décorée d’un riche tissu, témoigne de l’existence d’une mise en scène destinée à rendre les offrandes publiques : le pharisien est donc dans un système où l’ostentation est normale.

Ici, donc, non seulement le comportement du pharisien est critiqué, mais le légalisme rigoureux de l’homme structure son existence et finit par l’enfermer dans sa satisfaction personnelle : le pharisien se tient comme dans une scène, bien éclairée pour être vue. La chose est plus claire si on observe l’attitude du publicain : sa courte robe romaine, fait allusion à sa collaboration avec la puissance occupante, et tandis que le pharisien tient son chapeau sur la tête, le publicain l’a enlevé et se frappe la poitrine, par humilité.

Source la partebuone.it

23 octobre 2019

Avant-propos de la première édition de « L’Évangile selon saint Matthieu », par le P. M.-J. Lagrange, des Frères prêcheurs. Troisième édition. Paris. Librairie Lecoffre. J.Gabalda et Fils, éditeurs. 1927.

p. I. Le premier évangile fut toujours le plus cher à la piété et aux prédicateurs. Saint Dominique le possédait avec les épîtres de saint Paul dans le mince bagage qu’il portait lui-même au cours de ses marches apostoliques. Le Christ de saint Matthieu est moins familier que celui de saint Marc, si indulgent envers des disciples lents à comprendre ; il apparaît moins que dans saint Luc comme le Sauveur du monde, et il n’est pas déclaré le Verbe comme dans saint Jean. Il est le révélateur d’une doctrine essentiellement intérieure, et le fondateur de l’institution chrétienne, établie sur le fondement de Pierre, auquel sont associés les apôtres. Doux et humble de cœur, il n’étend pas la mèche fumante, mais il résiste aux hypocrites et les démasque. Il est le Messie, législateur, non pas comme Moïse, au nom d’un autre, mais en Dieu : le Fils unique qu’Israël a méconnu, et que l’Église écoute. Et si Matthieu n’a pas le réalisme expressif de Marc dans ses récits, ni au même degré la grâce attendrie de Luc, ni le regard de Jean fixé sur les choses divines, il a plus de paroles de Jésus, simples et droites, et si pénétrantes qu’on croit les entendre, avec l’accent et presque les intonations qu’elles avaient sur ses lèvres. Aussi le plus ancien témoin de la tradition ecclésiastique, Papias, a-t-il vu dans l’évangile de Matthieu surtout les Paroles divines. Ce sont ces paroles que nous devions étudier surtout. Pour toutes les parties communes à Matthieu et à Marc, nous avons pris la liberté de renvoyer, une fois pour toutes, au commentaire de Marc. De même pour plusieurs points traités dans le Commentaire de Luc.
Si nous sommes venus si tard au premier évangile, c’est, nous ne l’avons pas dissimulé, à cause de la difficulté fort sérieuse d’expliquer ses rapports d’origine avec les deux autres synoptiques. Sur (p.II) les rapports de saint Luc avec saint Matthieu, nous n’avons rien à ajouter à ce que nous avons dit au Commentaire de Luc. Matthieu ne dépend pas de Luc, cela est toujours aussi clair. Quelle est la dépendance de Luc, et d’où provient-elle ? C’est ce qui est toujours aussi obscur, une dépendance indirecte demeurant plus vraisemblable que la connaissance du Matthieu grec, qui est le premier évangile canonique.
Nous ne pouvons nous dérober à l’examen du rapport entre Matthieu et Marc. Il est poursuivi constamment dans ce Commentaire. Ce sera son originalité parmi les ouvrages catholiques, sûrement au détriment de son intérêt pour un grand nombre de personnes. Mais enfin, il fallait en venir là. Nous avons constaté, avec des ressemblances évidentes, depuis longtemps signalées, des différences qu’on semble laisser dans l’ombre volontiers. Pour le dire d’un mot, et comme en gros, ce double phénomène nous a paru exiger une solution mixte : indépendance d’un texte primitif araméen de l’apôtre Matthieu, dépendance du traducteur grec par rapport à Marc. Cette solution n’est pas nouvelle, mais peut-être n’avait-elle pas été encore exposée avec autant de développement.

Qu’il me soit permis de dédier ce travail, qui sera peut-être le dernier, à mes anciens directeurs de Saint-Sulpice au séminaire d’Issy, et à Mgr Batiffol, puisque notre amitié, presque jubilaire, a commencé dans cette chère maison. Ces maîtres doctes, modestes et pieux, pénétrés d’amour pour les Saintes Lettres, n’omettaient rien pour nous en donner le goût, sans s’arrêter au souvenir de Renan, élève de M. Le Hir, car à Issy nous pouvions remonter au P. Lacordaire, à Fénelon, à Bossuet, à M. Olier, le fondateur. C’est là que nous avons appris cette prière, véritable moelle de l’Évangile : «O Jesu, vivens in Maria, veni et vive in famulis tuis inspiritu sanctitatis tuae, in plenitudine virtutis tuae, in perfectione viarum tuarum, in veritate virtutum tuarum, in communicatione mysteriorum tuorum, dominare omni adversae potestati, in Spiritu tuo, ad gloriam Patris. » (Traduction : « Ô Jésus vivant en Marie, venez et vivez en vos serviteurs, dans votre Esprit de sainteté, dans la plénitude de votre force, dans la vérité de vos vertus, dans la communion de vos Mystères. Dominez sur tout pouvoir, par votre Esprit, pour la gloire de votre Père. Amen. » (Abbé Jean-Jacques Olier, 1608-1657.)

Jérusalem, en la fête de l’Annonciation de Marie, 25 mars 1922.

Photo : Chasuble dite du Père Lacordaire, o.p.

 

 

22 octobre 2019
« L’œuvre d’un pionnier comme le Père Lagrange aura été de savoir opérer les discernements nécessaires sur la base des critères sûrs. » (Jean-Paul II, 31 octobre 1992.)

En ce jour de mémoire de saint Jean-Paul II, il est intéressant de relire ce texte :

Le pape Jean Paul II loue le Père Lagrange

S’adressant aux membres de l’Académie pontificale des sciences le 31 octobre 1992, le pape Jean-Paul II a comparé la crise provoquée par la condamnation de Galilée à celle qui occasionna le désaveu du Père Lagrange :

« En vertu de sa mission propre, l’Église a le devoir d’être attentive aux incidences pastorales de sa parole. Qu’il soit clair, avant tout, que cette parole doit correspondre à la vérité. Mais il s’agit de savoir comment prendre en considération une donnée scientifique nouvelle quand elle semble contredire des vérités de foi. Le jugement pastoral que demandait la théorie copernicienne était difficile à porter dans la mesure où le géocentrisme semblait faire partie de l’enseignement lui-même de l’Écriture. Il aurait fallu tout ensemble vaincre des habitudes de pensée et inventer une pédagogie capable d’éclairer le peuple de Dieu. Disons, d’une manière générale, que le pasteur doit se montrer prêt à une authentique audace, évitant le double écueil de l’attitude timorée et du jugement précipité, qui l’un et l’autre peuvent faire beaucoup de mal.

Une crise analogue à celle dont nous parlons peut être ici évoquée. Au siècle passé et au début du nôtre, le progrès des sciences historiques a permis d’acquérir de nouvelles connaissances sur la Bible et le milieu biblique. Le contexte rationaliste, dans lequel, le plus souvent, les acquis étaient présentés, a pu sembler les rendre ruineux pour la foi chrétienne. Certains, dans le souci de défendre la loi, ont pensé qu’il fallait rejeter des conclusions historiques, sérieusement établies. Ce fut là une décision précipitée et malheureuse. L’œuvre d’un pionnier comme le Père Lagrange aura été de savoir opérer les discernements nécessaires sur la base des critères sûrs. »
(Fr. Manuel Rivero o.p., la Revue du Rosaire, septembre 2005.)

18 octobre 2019
Saint Luc, évangéliste, (1er siècle).
L’esprit du troisième évangile
Marie-Joseph Lagrange o.p. Évangile selon S. Luc (Gabalda, 1936, p. XLIII et s.),

« Qui était ce Jésus, qu’on nommait aussi le Christ ? Où était-il né, quelle fut sa vie, sa doctrine, sa mort ; est-on sûr de ne pas se tromper en le nommant Sauveur et Seigneur ? Ce sont des questions que Luc entendit souvent poser au cours des missions de l’Apôtre (Paul), et (Luc) y a répondu par l’évangile adressé à Théophile. »

« […] Le troisième évangile pourrait aussi bien se résumer dans ce mot : Jésus Christ est le Sauveur des hommes. » […] « S’il y avait un privilège, il semble d’abord qu’il sera au profit des pécheurs, tant est pénétrant l’appel à la miséricorde. » […] « L’évangile du renoncement est aussi celui de la prière » […] « C’est surtout l’Église qui a la fonction de rendre gloire à Dieu. Le troisième évangile lui a fourni ses cantiques […]. Cet évangile si tendre aux pécheurs est aussi l’inspirateur de la pureté […]. »

« L’évangile du renoncement, est aussi celui de la prière, car la vie nouvelle est la vie dans l’Esprit de Dieu, qu’on ne peut obtenir que par la prière.

« Jésus a donné l’exemple. Ce trait essentiel ne pouvait être omis par Marc ni par Matthieu. Dans les trois synoptiques, Jésus a prié à Gethsémani ; dans Mc (6,46) et dans Mt (14, 23) il a prié après la première multiplication des pains ; dans Mc (1, 35) seul, à Capharnaüm après avoir guéri les foules. Mais Luc parle seul de la prière du Christ dans huit circonstances. Il prie au Baptême (3, 21) ; après le premier enthousiasme, il se retire dans le désert pour prier (5, 16) ; il prie avant de choisir ses apôtres, longue nuit de prière (6, 12) ; avant la confession de Pierre (9, 18) pour lequel il a prié spécialement (22, 32) ; il priait lorsque eut lieu la Transfiguration (9, 29) ; c’est sa prière qui a inspiré aux disciples le désir d’avoir une prière enseignée par lui (11, 1) ; il a prié pour ses bourreaux sur la Croix, et c’était une prière que de remettre son esprit entre les mains de son Père (23, 34, 46).

« Aussi Jésus a-t-il recommandé très souvent la prière à ses disciples, une prière instante comme celle de l’ami importun (11, 5-13) ou de la veuve lasse de l’indifférence du juge (18, 1-8), une prière qui a pour objet d’obtenir l’Esprit Saint (11, 13), une prière de tous les temps (21, 36), une prière qui soit une prière, et non une manifestation de suffisance, celle du publicain qui crie miséricorde, et non l’exposé du Pharisien, content de lui (18, 11-13).

« Ce n’est pas d’ailleurs que l’homme doive, se tenir toujours courbé devant Dieu, ne songeant qu’à sa misère, et, par là-même, bornant ses pensées à son intérêt. La prière qui demande est inspirée à chacun par ses besoins. »

[…] « En lisant cet évangile de miséricorde, mais de pénitence, de renoncement sévère, mais en vue de la charité, ces miracles inspirés par la bonté, cette indulgence pour le péché qui n’était point complaisance, mais don divin de sanctification, en apprenant à connaître comment une vierge très pure, mère très tendre, avait enfanté le Fils de Dieu, et qu’il avait consenti à souffrir pour ramener les hommes à son père, le noble Théophile apercevait les raisons de la transformation qui s’opérait sous ses yeux, qui avait sans doute commencé dans son cœur, et il dut les estimer bonnes et solides : le monde possédait un Sauveur. »

Photo : Saint-Luc.Basilique-St-Etienne-Jerusalem-par-Joseph-Aubert-1843-1924.

 

17 octobre 2019
Saint Ignace d’Antioche (35-113 env.), évêque, Père apostolique, martyr.

Emprunts johanniques d’après M.-J. Lagrange, o. p., Évangile selon S. Jean, Paris, 1936, p. XXVI.

Les lettres d’Ignace étant reconnues authentiques, soit qu’elles datent de l’an 107 ou de l’an 115, il est du plus grand intérêt de savoir si elles font allusion au quatrième évangile. Elles ne le nomment pas, cela est certain, mais il est certain qu’elles sont imbues de sa doctrine. La foi en Jésus-Christ et plus encore l’amour de Jésus-Christ sont le foyer de la religion d’Ignace.

[…] Les textes nous paraissent décisifs. Ce ne sont pas des citations, mais il en résulte qu’Ignace avait reçu une impression profonde de la doctrine johannique, telle qu’elle est exprimée par Jo (Jean).

 

JEAN

IGNACE

3, 8. Le vent souffle où il veut…, mais tu ne sais ni d’où il vient, ni où il va. Ph. 7, 1. On ne trompe pas l’Esprit, car il vient de Dieu, il sait d’où il vient et où il va, il pénètre les secrets les plus cachés.
5, 19. Le Fils ne peut rien faire de lui-même rien qu’il ne voit faire au Père. 14, 10. Le Père qui demeure en moi, accomplit les œuvres. 15, 5. En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Magn. 7, 1. De même que le Seigneur, soit par lui-même, soit par ses apôtres, n’a rien fait sans le Père avec lequel il n’est qu’un, vous non plus, en dehors de l’évêque et des presbytres. 
6, 27. Travaillez, non pour la nourriture périssable… 6, 33. Car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel…. 6, 54. Qui mange ma chair et boit mon sang… Rom. 7, 3. Je ne prends plus plaisir à la nourriture corruptible ce que je veux, c’est le pain de Dieu, ce pain qui est la chair de J.C., le Fils de David, et pour breuvage je veux son sang qui est l’amour incorruptible. 
17, 6. J’ai manifesté ton nom… 1, 1. Le Verbe… 1, 18. Le Fils unique, lui, l’a fait connaître. 8, 29. Celui qui m’a envoyé est avec moi… Je fais toujours ce qui lui plaît. Magn. 8, 2. Il n’y a qu’un Dieu et ce Dieu s’est manifesté par J.C., son Fils, qui est son Verbe sorti du silence, celui qui accomplit fidèlement les volontés de celui qui l’a envoyé. 
17, 23. Pour qu’ils soient un comme nous sommes un, moi en eux et toi en moi, pour qu’ils soient parfaitement un… Eph. 5, 1. Quel n’est pas votre bonheur à vous qui lui (Lettre à l’évêque) êtes étroitement unis, comme l’Église l’est à Jésus-Christ et Jésus-Christ à son Père, dans l’harmonie de l’universelle unité. 
6, 51. … Et le pain que moi je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde. 6, 53. Si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme… vous n’aurez pas la vie en vous. 6, 54. Qui mange ma chair… je le ressusciterai. Smyrn. 7. Ils s’abstiennent de l’Eucharistie et de la prière, parce qu’ils ne veulent pas reconnaître dans l’Eucharistie la chair de Jésus-Christ notre Sauveur… Cette chair qui a souffert pour nos péchés… ceux qui le nient n’ont pas la vie. Ils feraient mieux de pratiquer la charité (agapè) pour avoir part à la résurrection. 

 

Photo : Saint Ignace d’Antioche, évêque et martyr. De la ‘Lettre aux chrétiens de Magnésie’ : « Il ne suffit pas d’être appelé chrétien, il faut l’être vraiment. »

 

16 octobre 2019
Sainte Marguerite-Marie Alacoque, o.d.v. (1647-1690 à Paray le Monial)

« Ste Marguerite-Marie, consacrez-moi au Sacré-Cœur de Jésus ! »
(P. Lagrange, Journal spirituel, le 17 octobre 1925, Cerf, 2014, p. 434.)

La grand-mère du père Lagrange, Antoinette-Philippe Cléau (1789-1873), venait de la même région rurale (Charolais) et appartenait au même milieu social. Par l’arrière-grand-mère, Jeanne Aumônier, les Lagrange se reliait – du moins la tradition familiale l’assurait – à sainte Marguerite-Marie Alacoque : le frère de celle-ci, Chrysostome, avait épousé en 1666 Angélique Aumônier. Cette parenté – supposée, mais très vraisemblable – n’est pas l’explication unique à l’intérêt que le P. Lagrange portait à Marguerite-Marie Alacoque. En effet, le nom de celle-ci vient plusieurs fois sous sa plume. (Extraits de Bernard Montagnes, Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique. Cerf, 2004.

Photo : Sainte Marguerite-Marie Alacoque. Confidente du Sacré-Cœur. (Œuvre anonyme)

 

15 octobre 2019
Sainte Thérèse d’Avila (1515-1582), Docteur de l’Église
Ce que le père Lagrange doit à Sainte Thérèse d’Avila

« La ferveur thérésienne ne se borne pas aux années de noviciat. La retraite annuelle, au long de la vie active du P. Lagrange, lui permet de se plonger à nouveau dans les écrits de la sainte. Toutes les citations qui suivent ont été écrites durant une retraite. »Au passage, il note « belle doctrine », ou encore « belle pensée » de sainte Thérèse.
Il s’exclame : « Mon Dieu, votre lumière est admirable ! Soyez béni de l’avoir prodiguée à votre fidèle servante, Thérèse de Jésus ! »
Il rend grâce ainsi : « Lu les Moradas de ma chère sainte Thérèse : quelle clarté, quelle suavité, quel entraînement d’amour de Dieu. » « Durant cette retraite, j’ai relu les Fondations, qui m’ont rappelé la Providence spéciale de Notre Seigneur pour ceux qui sont consacrés à son service. »
Il invoque Thérèse : « Ma bonne et chère sainte, ma courageuse sainte, donnez-moi quelque chose de votre amour pour Jésus. ».
S’adressant au Seigneur, il confesse : « Je me suis présenté à vous avec cette tiédeur invétérée, vous priant de me guérir. Et je suis monté pour demander des lumières à sainte Thérèse, et sans aucune consolation, j’ai compris que j’abusais de sa doctrine, si j’attendais l’heure de la grâce sans rien faire. »
Une autre fois : « Cette retraite a commencé dans un sentiment de sécurité et de foi, elle se continue sans que je voie autre chose que la bonté de l’oraison, « donum optimum« . Sont-ce les carmélites [à qui il avait prêché] qui m’ont obtenu ce désir par l’intercession de sainte Thérèse ? »
Il remarque : « Sainte Thérèse devrait m’enseigner le courage. »
Il prend comme résolution de retraite : « Lire souvent sainte Thérèse puisque ses œuvres me font un bien si grand ». Il reconnaît que « la lecture de sainte Thérèse m’a toujours fait beaucoup de bien ».
Et aussi que « la lecture des lettres de sainte Thérèse – toujours elle – me donne beaucoup d’estime du courage, de l’action. ».
Et encore : « L’impression profonde que me font toujours les écrits de sainte Thérèse me persuade que cette chère sainte me veut du bien. ».
À la lecture de sainte Thérèse, 5e demeure, ch. 3, il note : « Une grâce aussi éminente que celle de l’union n’est pas donnée en vain ; si l’âme qui la reçoit n’en profite point, elle tourne au profit des autres. J’ai connu une personne à qui ce que je dis est arrivé. »
Quand il médite sur la souffrance et l’épreuve que Jésus envoie de ses mains percées pour nous, pensée à laquelle il faut toujours revenir, il ajoute : « Les épreuves des pères Déchaussés et de la sainte Mère elle-même sont aussi bien consolantes. »

Publié en 2015 pour l’Année jubilaire : les 500 ans de sainte Thérèse d’Avila.
Pour retrouver ces extraits : « Journal spirituel » du père Lagrange, Cerf, 2014.
Photo : Sainte Thérèse d’Avila, 17e, Anonyme, Madrid, Musée national du Prado.

11 octobre 2019

Les enjeux du « Dimanche de la Parole de Dieu » et le père Lagrange

Les enjeux du «Dimanche de la Parole de Dieu» institué par le pape François

 

En ce jeudi 10 octobre 2019, célébration de la messe en la cathédrale de Saint-Denis de La Réunion pour la cause de béatification du père Lagrange et pour ses amis. Fr. Manuel.

7 octobre 2019
Notre-Dame du Rosaire, priez pour nous !

Le 3 mai 2008, lors de son discours en la basilique de Sainte-Marie-Majeure, à Rome, le pape Benoît XVI confirmait : « Aujourd’hui la prière du Rosaire n’est pas une pratique reléguée au passé, comme une prière d’un autre temps à laquelle on pense avec nostalgie. Le Rosaire connaît en revanche un nouveau printemps. C’est sans aucun doute un des signes les plus éloquents de l’amour que les jeunes générations nourrissent pour Jésus et pour sa mère Marie. Dans le monde actuel qui est si fragmenté, cette prière nous aide à placer le Christ au centre, comme le faisait la Vierge, qui méditait intérieurement tout ce qui se disait sur son Fils, et ensuite ce qu’Il faisait et disait ».

Le 16 octobre 2002, dans sa lettre apostolique Rosarium Virginis Mariae, le pape Jean-Paul II nous proposait de méditer les mystères lumineux du rosaire. Il est intéressant de découvrir la pensée théologique et spirituelle du frère Lagrange en 1936 telle qu’il la manifestait au cours d’une conférence donnée aux laïcs dominicains appelés à l’époque « tertiaires », c’est-à-dire du Tiers Ordre des Prêcheurs. Pour lui, le rosaire éveille le désir d’approfondir toute la Bible.

« Le Rosaire, comme reflet de la vie de Jésus, est incomplet. On y constate une grande lacune, car il ne dit rien de ce qui est proprement l’Évangile, c’est-à-dire l’enseignement du Sauveur. Cette lacune, il ne pouvait l’éviter, étant une prière qui passe par Marie.

Par une dispensation de sa Sagesse, Dieu n’a pas voulu que la très Sainte Vierge ait pris part ordinairement au ministère de son Fils. Elle apparaît au début, pour solliciter le premier miracle : elle est debout auprès de la Croix pour être constituée par notre Mère par son Fils mourant. Le plus souvent, presque toujours au cours de la prédication, elle est absente. Elle n’avait plus besoin d’être instruite des vérités de l’Évangile telles que Jésus les proposait aux auditeurs, avec mille ménagements appropriés à leur faiblesse.

C’était assez que le Messie fût discuté, méconnu, par un peuple récalcitrant ; la Virginité de sa Mère ne devait pas être jetée en pâture à des enquêteurs malveillants. Elle, absente, le rosaire était interrompu. Mais il en disait assez pour provoquer une curiosité bien légitime.

On ne peut être attentif aux mystères de l’Enfance et de la Passion sans en être porté invinciblement à considérer l’œuvre de l’homme mûr, celle que faisait présager son Enfance, celle qui l’a conduit à sa Passion.

De sorte que l’âme dominicaine, formée par le Rosaire, sera la plus inclinée à se pencher sur l’Évangile pour mieux connaître ce que Jésus exige de nous et l’apprendre dans les faits de sa vie, dans son attitude envers les hommes qu’il est venu sauver, dans les paroles où se répand la lumière, et surtout cette révélation que Dieu est un Père, et qu’il est amour : « Deus caritas est ».

Une fois sur cette voie, le tertiaire dominicain, selon ses facultés et ses loisirs, sera entraîné à la suivre dans les épîtres des Apôtres et surtout de saint Paul, dans les Actes qui conduisent l’Église de Jérusalem à Rome où sera fondé le Siège de Pierre, et même jusque dans cette Jérusalem nouvelle, dont saint Jean nous fait entrevoir dans l’Apocalypse la splendeur encore voilée à nos yeux.

Puis ayant constaté avec quelle fermeté saint Paul affirme que la valeur de l’Ancien Testament est de préparer les âmes au Christ, le dévot du Rosaire voudra connaître ces prophéties auxquelles font allusion les évangélistes et les apôtres, il remontera le cours du temps jusqu’à Jérémie, image du Messie méconnu et souffrant, jusqu’à Isaïe qui eût voulu déchirer les cieux pour en faire descendre l’Emmanuel, jusqu’à David, le type du Roi oint de l’onction divine, jusqu’à Moïse, le législateur dont l’œuvre n’est plus qu’une figure.

Il atteindra Abraham, dont la tente plantée dans le désert contenait toute l’Église, et enfin au premier Adam dont le Christ, le second Adam dans l’histoire, mais le premier par son origine divine, avait expié et réparé la faute.

Alors lui apparaît le Dieu créateur, dont les desseins ne sauraient faillir et qui avait annoncé au couple coupable l’avènement du fils de la femme qui devait triompher du serpent.

Tout cela, l’Église le lui a appris dès ses plus jeunes années, mais le contact avec le livre inspiré, qui est un contact avec l’Esprit de Dieu, le lui rendra plus vivant et par là même plus vivifiant. Le Rosaire aura porté tous ses fruits. » (Fr. Manuel Rivero o. p. dans la Revue du Rosaire, n° 161, octobre 2004)

Photo : Notre Dame du Rosaire par Juan del Castillo (1584-1640)

5 octobre 2019
Bienheureuse Vierge Marie
Ave Maria !

 

 

Vierge toujours bénie et toujours bonne ! Chaque fois que je sens se raviver dans mon cœur la tendresse et la gratitude, c’est le prélude d’une grâce… (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 363.)

 

Photo : L’Annonciation, œuvre de Jean-Joseph Ansiaux (1823), propriété du diocèse de Paris et conservée dans l’ancienne chapelle Marie-Thérèse de la Maison Chateaubriand (14e), après une très belle restauration par la Galerie Mendes.

 

4 octobre 2019
Saint François d’Assise (1182-1226)

L’humble de cœur désire être aux yeux des hommes ce qu’il est aux yeux de Dieu. Il faut épouser l’humilité comme saint François a épousé la pauvreté, par un vrai mariage mystique. Ne pas se pousser au premier plan, affirmer son moi, occuper les autres de son estime, de son affection. Il faut aussi introduire l’humilité dans l’esprit. (Voir la suite dans le Journal spirituel du père Lagrange, Cerf, 2014, p. 15.)

Illustration : San Francesco et Dame Pauvreté, allégorie de Francesco di Giorgio, 1458-60 (Musée Alte Pinakothek, Munich).

2 octobre 2019
En union de prières avec tous nos amis participant au Pèlerinage du Rosaire à Lourdes
https://www.pelerinage-rosaire.org/heureux-les-pauvres-de-coeur/

 

Photo : P. Lagrange. Le Rosaire est le résumé de l’Évangile
Le Fronton de la Basilique du Rosaire

 

1er octobre 2019
Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Docteur de l’Église, patronne des missions.

Dans la basilique de Lisieux, un panneau présentait (il y a une vingtaine d’années) les personnages sur lesquels s’est exercée l’influence de Thérèse de Lisieux. On y voyait une photographie du dominicain Lagrange accompagnée de la légende suivante : « Je dois à sainte Thérèse de n’être pas devenu un vieux rat de bibliothèque. Je lui dois tout, car sans elle j’aurais dû me racornir, me dessécher l’esprit. » Le même propos thérésien prêté au Père Lagrange se lit (avec la date de 1927) sous la plume de l’abbé Pierre Descouvemont dans l’article « Thérèse de l’Enfant-Jésus » du Dictionnaire de spiritualité (t. XV, col.603-604).

Quelle en est la provenance ? Et d’abord ce propos est-il vraisemblable ?

Quant à l’expression rat de bibliothèque, elle appartient au vocabulaire du Père Lagrange : on la retrouve dans son article de la Revue biblique sur la Vie de Jésus par François Mauriac (RB 1936, p. 321-345) : « Les exégètes auraient mauvaise grâce à lui chercher querelle pour des vétilles. Ils feraient figure de rats de bibliothèque, qui, sortis de leur trou, s’en iraient grignoter les Apennins ou le Caucase. Tout de même, protestent-ils, toute vérité a ses droits. » (p. 325)

Quant à l’utilisation de textes de Thérèse de Lisieux, on pourrait songer à l’annotation spirituelle dont le dominicain Ceslas Lavergne a orné sa traduction française de la Synopse des quatre évangiles publiée dans la collection des Études bibliques en 1927. À propos des notes qu’il a ajoutées, Lavergne déclare dans son Avertissement : « Mon cher maître m’ayant encouragé à appuyer discrètement sur la note de piété, j’ai eu recours à sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Dans un temps où l’Évangile n’occupe pas la place qui lui est due dans les lectures et les méditations des chrétiens, n’est-il pas admirable que cette chère petite sainte, qui paraît si uniquement envahie du pur amour de Dieu, se soit si visiblement complue à cette divine lecture. »
Cela est bel et bon, mais appartient à la culture religieuse d’une autre génération que celle du Père Lagrange : Lavergne, né (en 1890) 35 ans après Lagrange, a été ordonné (en 1921) 38 ans après lui. Thérèse de l’Enfant Jésus a été béatifiée en 1923, canonisée en 1925, année des 70 ans du Père Lagrange.

Dans son Journal spirituel, Lagrange écrit, à la date du 30 septembre 1924, jour de S. Jérôme : « Bienheureuse Thérèse de l’Enfant-Jésus, je vous recommande instamment cette bonne Madame Cauvin… Vous voulez passer votre ciel à faire du bien : assistez cette pauvre femme, si abandonnée… »
L’année suivante, le 16 octobre 1925, Lagrange – septuagénaire – note : « Lu la vie de sainte Thérèse de Lisieux par elle-même. Première impression étrange. Elle parle tant d’elle, de ses goûts, des signes qu’elle a demandés et obtenus, de sa sainteté… avec tant de fleurettes, de jouets. On se sent si loin de saint Augustin ou de sainte Thérèse d’Avila… Mais le sens de tout cela est ama et fac quod vis. Dans l’immense clarté d’amour divin où elle vivait, elle se voyait si peu de chose qu’elle pouvait parler d’elle sans le moindre amour-propre. Admirable leçon qu’elle donne plus que tout autre saint, avec un abandon d’enfant gâtée… » Alors peut-on raccorder la Père Lagrange au char de triomphe de Thérèse de Lisieux ?
Après une enquête difficile sur la provenance du logion, j’ai abouti aux archives du Carmel de Lisieux. Là se trouve une lettre du chanoine Terrillon (1893-1969), prêtre du diocèse de Meaux et vice-postulateur de la cause de Mme Martin, qui avait rencontré le Père Lagrange, au printemps de 1927, alors en convalescence dans la maison d’accueil des Franciscaines de Sainte-Marie des Anges à Hyères. Le témoignage du chanoine Terrillon se présente ainsi :

« Le R.P. Lagrange, O.P., dit un jour à [son] interlocuteur, en parlant du livre du P. Petitot sur sainte Thérèse de Lisieux : “Pourquoi avoir voulu enfermer dans la cage de nos cadres théologiques cette petite sainte, qui était faite pour voler librement en plein ciel du bon Dieu ?” Et il ajoutait finement : “Je lui dois de n’être pas devenu un vieux rat de bibliothèque. Je lui dois tout, car, sans elle, j’aurais dû me racornir, me dessécher l’esprit”. »

Le dominicain Hyacinthe Petitot (1880-1934) dont il est question n’était pas, pour le Père Lagrange, un inconnu, car il a été assigné au couvent Saint-Étienne de Jérusalem de 1900 à 1914, d’abord comme novice simple et comme frère étudiant, puis comme professeur (de philosophie d’abord, en 1906-1907, de théologie dogmatique ensuite). Qu’en 1927, le Père Lagrange ait lu son livre de 1925, Thérèse de Lisieux : une renaissance spirituelle, et qu’il en ait jugé les catégories scolastiques trop rigides en regard de la liberté spirituelle de la sainte, rien n’est plus vraisemblable, sans aucun mépris, du reste, pour la théologie thomiste. (Extrait d’une conférence donnée, en juillet 2010, par Bernard Montagnes o.p. à Fanjeaux, Aude.)

Écho de notre page Facebook : septembre 2019

30 septembre 2019
Saint Jérôme. Docteur de l’Église et traducteur de la Vulgate

Lors de ses travaux de traduction de la Vulgate en latin, saint Jérôme eut à combattre le préjugé populaire qui considérait toute nouvelle traduction des Écritures comme un sacrilège.

Le père Lagrange eut également ses propres combats. Parmi lesquels, à l’occasion du congrès de Fribourg sur l’exégèse biblique en 1897, Rome exprima son désaccord sur ses écrits. Le P. Lagrange fit parvenir au maître de l’Ordre la lettre dont un extrait ci-après :

« Je crois pouvoir dire cependant que mes intentions dans l’enseignement ont toujours été pures. Je comprends et j’admire cet attachement à l’Église qui fait qu’on ne veut s’écarter en rien des opinions les plus communes, mais il me semble avoir vu surtout dans saint Jérôme une autre d’attachement qui l’a soutenu dans tous ses travaux, c’est le désir de voir l’Église triompher de ses adversaires. C’est vraiment une passion qui me dévore que le regret de ne pas trouver chez nous catholiques toutes les forces que je voudrais, de voir l’Église moquée par des ennemis puissants, comme au temps de saint Jérôme par les Juifs qui lui reprochaient l’infériorité de sa version. Enfin je voudrais passionnément une exégèse catholique forte, armée, puissante … mais cela me paraît impossible sans une certaine liberté de discussion qui nous permette de mettre au service de la foi les meilleures armes de nos ennemis. Je ne vis pas pour autre chose. Mais j’ai une foi aveugle dans l’obéissance et, je suis convaincu par étude que le système que je préconise irait à la destruction du protestantisme et à la glorification de l’Église, je sais que, dans l’Église catholique, tout doit être soumis au principe d’autorité. Si les temps ne sont pas venus, j’attendrai, et ils ne viendront pour moi que lorsque j’aurai le plein assentiment des supérieurs. » (Bernard Montagnes, Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique, Cerf, 2004, p.149-150.)

27 septembre 2019
Saint Vincent de Paul, apôtre de la charité

Les saints
Interroger ces humbles, vous trouverez en eux des cœurs magnanimes, un désintéressement de grands seigneurs, une liberté princière, ce n’est pas un élan, c’est un état, ils ont horreur du moindre mensonge. Et cependant ils demeurent simples, et ils sont toujours vrais, francs et sincères. Oh, certes, l’univers déjà nous fait connaître la beauté de Dieu. Combien de fois, au spectacle des cieux étoilés, ou de la mer, ou des montagnes, n’avons-nous pas frissonné de ce frisson qu’excite le spectacle de la beauté… et nous disions : quelle doit être la beauté du créateur… Mais quand nous lisons la vie des saints, d’un S. Paul, d’une sainte Perpétue, d’une Ste Thérèse, ou d’un S. Dominique, de St Vincent de Paul ou de S. François de Sales, de S. Charles Borromée ou de Ste Jeanne de Chantal, sans parler de ceux qui sont plus hauts encore, dont les perfections nous éblouissent dans la splendeur de Dieu, nous comprenons le charme souverain qui a attiré tant d’âmes après ces âmes … Qui se donne volontiers à un autre homme ? Et pourtant on se donne aux saints, parce que la beauté de leur âme est vraiment un rayon de la beauté de Dieu parce qu’ils avaient Dieu, ils ont atteint la plus haute perfection de l’homme, que leur intercession vienne en aide à notre faiblesse. (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 373.)

Saint Vincent de Paul, priez pour moi !

21 septembre 2019
Saint Matthieu
Le témoignage du premier évangile

« D’après Mt. Jésus a ordonné à ses disciples de ne pas franchir les limites d’Israël (10, 5), puis il leur a ordonné de prêcher à toutes les nations (24, 14 ; 28, 20). C’est que, entre ces moments, la crise religieuse s’était produite. Jésus allait mourir, et le peuple allait voir le sang du Messie retomber sur sa propre tête. Puis Jésus parlait après sa résurrection. Maintenant il y avait quelque chose de changé. Quand le Ressuscité invite ses envoyés à faire des disciples de toutes les nations (28, 19), à les enseigner du moins, et à les baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, cette affluence des gentils ne risque-t-elle pas de faire éclater le cadre d’Israël ? Et ce baptême de l’Esprit, succédant au baptême de l’eau donné par Jean, n’est-il pas le signe distinctif d’un peuple nouveau qui a remplacé l’ancien, de telle sorte que le signe nouveau rende désormais inutile le signe ancien ?
Pour juger du judéo-christianisme de Mt., il faut le mettre en présence non pas d’une théorie de l’Église, mais, suivant la méthode des critiques, du fait de l’Église au sein de laquelle il vivait.
Nous disons l’Église, et c’est le terme dont il s’est servi, lui seul parmi les évangélistes. Dans un cas c’est un groupement de fidèles, dont on ne saurait dire s’il est local ou s’il comprend une fraternité universelle (18, 17), mais dans l’autre cas (16, 18), c’est incontestablement toute l’église de Jésus, comparée à un édifice qui serait bâti sur un roc. Cette église Mt. l’avait sous les yeux. Assurément quand nous constatons qu’elle a des fidèles dans la terre entière que son organisation enveloppe comme d’un réseau, nous reconnaissons dans les paroles de Jésus une amplitude miraculeuse. Mais rien n’empêchait Mt. de donner ce nom d’église – quel qu’ait été le terme araméen correspondant – au groupement modeste des premiers fidèles serrés auprès des Douze qu’il regardait comme leurs chefs sous l’autorité suprême de Pierre. » (Marie-Joseph Lagrange, Évangile selon Saint Matthieu – Le témoignage du premier évangile, extrait, Lecoffre-Gabalda, 1941, p. CLIII.)

Photo : Portrait de Saint Matthieu, inconnu, attribué au Caravage (17e) Kunsthandel Hoogsteder & Hoogsteder, The Hague.

 

19 septembre 2019
La pécheresse pardonnée (Luc 7, 47)

Extraits du commentaire du P. Lagrange :

[…] La pécheresse… avec quelle indulgence Jésus raconte son amour repentant ! Dieu ne pardonne qu’à ceux qui l’aiment. […] L’âme ne peut demeurer dans l’indifférence envers son Dieu. Le péché fait obstacle à la charité ; si elle pénètre, le péché est effacé. Aussi Jésus prononce cette parole, d’où sortira la théologie du pardon, en suivant le mouvement actuel de son cœur : « Ses péchés, ses nombreux péchés, sont pardonnés, parce qu’elle a aimé beaucoup. » La parabole retourne sa pointe contre ceux qui sont dans le cas de Simon : on a peu à leur pardonner, mais ils n’aiment guère. Ne peut-on donc pas aimer Dieu d’un grand amour sans l’avoir au préalable offensé ? À Dieu ne plaise ! On comprend assez que le divin médecin voulait encourager les pécheurs ; plus tard les pleurs d’Augustin couleront au souvenir de la pécheresse. Il voulait avertir aussi ceux qui se croient dispensés d’aimer Dieu beaucoup parce qu’ils se sentent assez justes pour qu’il n’ait rien à leur pardonner. Tout cela s’entend de l’offense envers Dieu, de l’amour de Dieu qui enlève l’offense. Et pourtant la pécheresse n’a témoigné d’amour qu’à Jésus. Avec quelle simplicité il représente Dieu, tenant comme adressées à Dieu les assurances de repentir rendues à sa propre personne !

(Voir le commentaire en entier dans Marie-Joseph Lagrange, L’Évangile de Jésus Christ avec la synopseLa pécheresse pardonnée (80), Artège-Lethielleux, 2017, p.187-190)

Photo : Jésus et la pécheresse au repas chez Simon le Pharisien par Andreï Nikolaïevitch Mironov, en russe Андре́й Никола́евич Миро́нов (2011).

 

17 septembre 2019

La résurrection du fils de la veuve de Naïm (Luc 7, 11-17)

Commentaire du P. Lagrange : Jésus pouvait plus encore. Sa parole ramène une âme du lieu mystérieux qui les abrite après leur séparation du corps. La scène est touchante, racontée par saint Luc avec un pathétique discret. Un jeune homme, déjà la proie de la mort, porté en terre sur un brancard. Un fils unique. Une mère veuve. Une foule émue, le Seigneur touché de compassion, qui ose dire à la mère : « Ne pleurez pas ! » Il touche le cercueil ouvert, commande au jeune homme de se lever, et le rend à sa mère. Le peuple s’écrie : Un grand prophète a été suscité parmi nous ; Dieu a visité son peuple. Ils admiraient ce pouvoir souverain ; il fallait aimer aussi cette bonté. Le nom de Neinévocateur du souvenir est encore celui d’un petit village au sud-est de Nazareth (en-Nasira), presque en face du Thabor. (L’Évangile de Jésus avec la synopse évangélique, Artège-Lethielleux, 2017, p. 181.

Photo : La résurrection du fils de la veuve de Naïm par le Christ (détail d’un tableau du 19se trouvant dans la petite église actuelle construite en 1881 sur les ruines de l’ancienne. Source : Custodia Terrae Sanctae)

 

12 septembre 2019

Le Saint Nom de Marie dans la vie et l’œuvre du P. Lagrange

La rédaction de son livre L’Évangile de Jésus-Christ avec la synopse évangélique en 1927 a été confiée à Marie : « Très douce Mère, Marie Immaculée, Reine du très saint Rosaire, c’est pour vous plaire que je commence l’Évangile de Jésus-Christ, et par vous à votre Fils : aidez-moi. Faites-le moi mieux connaître, donnez-moi de l’aimer et étant devenu uni à ses sentiments, d’avoir pour vous son amour, sa tendresse, et comme étant aussi votre esclave, la docilité et le dévouement d’un bon serviteur. Suppléez à tout ! Saint Joseph priez pour moi ! Saint Dominique, aidez votre enfant. » (12 juin 1927)

« Abandon sans réserve de l’École biblique entre les mains de Marie Immaculée : elle lui est dédiée, c’est son œuvre. Le mois du Rosaire nous a toujours été propice. » (Journal spirituel, 27 septembre 1898)

« Et maintenant, chers et cuisants souvenirs, de tant de grâces reçues, de tant de grâces rebutées, envolez-vous, muées en prières, vers l’autel du Rosaire sur lequel, pour la première fois, j’ai dit la messe. Daigne la Vierge très pure que les Espagnols ont tant aimée, les sauver par sa toute-puissante intercession. » (Souvenirs de Salamanque)

« Le révélateur de la foi, la source de la grâce, c’est Jésus, mais on a recours pour s’unir à lui à l’intercession de sa très Sainte Mère. Vous entendez bien que c’est là tout le Rosaire. Non, tout est de l’ordre des faits ; c’est une histoire qui se déroule, celle de Jésus, si intimement liée à celle de Marie. Le Rosaire est un résumé de l’Évangile, nous orientant vers la fin que nous fait espérer l’Incarnation et la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Mais alors le Rosaire supplée à la lecture de l’Écriture, et la rend inutile ? Disons plutôt qu’il la fait désirer, qu’il nous la rend même nécessaire, si nous voulons réellement avoir devant les yeux les mystères que nous devons méditer. » (Conférence aux laïcs dominicains – Tiers Ordre – sur « Comment lire la Sainte Écriture » en 1936). Fr. Manuel Rivero o.p. « Pensées sur la Vierge Marie » (la Revue du Rosaire, Octobre 2007)

 

10 septembre 2019

10 mars 1938 : « Je m’abandonne à Dieu », telles furent les dernières paroles du P. Marie-Joseph Lagrange o.p

 

Messe pour la cause de béatification du père Lagrange et les amis du père Lagrange au monastère des moniales dominicaines de Saint-Denis de La Réunion en ce 10 septembre. Joie dans l’Esprit. Fr. Manuel.

9 septembre 2019
Une date à retenir !
Pour les habitants de Rennes et environs, une très belle exposition à voir :

21 septembre 2019 – 22 septembre 2019,
Couvent des Dominicains, 3 rue Brizeux 35700 RENNES

 Exposition de rares photos de Jérusalem et Moyen-Orient de la fin du XIXes, sur les pas du Père Lagrange et visite du Couvent des Dominicains de Rennes.

Dans le cloître du Couvent des dominicains, ouvert pour l’occasion, exposition de photos prises lors des expéditions archéologiques des frères dominicains à la fin du XIXes. et début XXes. L’exposition restera visible la semaine suivante, le matin de 9h à 12h, sur demande.
Photos exceptionnelles de Jérusalem et du Moyen-Orient (fin du XIXeet début XXes.) de la Photothèque de l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem.

8 septembre 2019

 

Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie.

« Ave Maria ! Emissiones tuae ! Coruscate ! Je te salue, Marie. Tes Parfums ! Exhalent ! »

« Comme thème de la retraite qui devait précéder la profession des vœux simples mais perpétuels qui étaient alors en usage, je ne songeai pas à examiner ma vocation … Je pris pour thème de mes méditations les sept paroles de Marie telles qu’elles sont commentées par saint Bernardin de Sienne (Marie-Joseph Lagrange. Souvenirs personnels). »

 

Photo : La Nativité de la Vierge Marie par Andrea di Bartolo (1400 env.). National Gallery of Art, Washington.

 

6 septembre 2019

 


Hommage à Mgr Roger Etchegaray (25 septembre 1922-4 septembre 2019).

Une grande figure de l’Église catholique et un témoin de la sainteté du P. Lagrange :
Lettre du Cardinal Roger Etchegaray à frère Manuel Rivero o. p.
« Rome, le 7 octobre 2008, N.-D. du Rosaire

J’ai le grand plaisir de recevoir « Prier 15 jours avec le P. Lagrange ». C’est à travers les écrits du P. Montagnes que j’ai découvert et aimé tout à la fois ce religieux, spirituel et exégète. Me trouvant à Jérusalem, il y a trois mois, je me suis recueilli profondément sur sa dalle, suppliant la Vierge Marie de nous le montrer un jour « bienheureux ». »

« Ô Marie, Toi qui es toujours devant » : 
« Nous Te regardons Marie : Tu as toujours pris les devants, Tu as toujours devancé l’Église et l’humanité. Liée à l’existence du Christ, Tu l’as précédé sur terre en devenant Sa mère. Tu nous as précédés au pied de la Croix où du Cœur transpercé de ton Fils est née l’Église. Tu nous précèdes enfin au ciel où, en regardant Ton destin bienheureux, nous lisons notre propre destin. Tu es le prototype, la maquette de l’Église de demain. Tu es l’image anticipée, l’icône merveilleuse de l’humanité réconciliée. Tu résumes en Toi toute la trajectoire du monde, depuis la création jusqu’au jugement dernier ». (Cardinal Roger Etchegaray)

4 septembre 2019
Le buisson ardent du Sinaï

L’immortalité platonicienne de l’âme n’étant pas dans la perspective religieuse des Israélites, lorsque l’Écriture parlait d’une survie normale, cette survie devait s’entendre de la résurrection. C’est ainsi que raisonne Jésus. « N’avez-vous pas lu dans le livre de Moïse, à l’endroit du buisson » – le buisson ardent du Sinaï– « comment Dieu lui parla, disant : Je suis le Dieu d’Abraham, et Dieu d’Isaac, et Dieu de Jacob ? Il n’est pas Dieu des morts mais des vivants. Vous êtes grandement dans l’erreur. » (Marie-Joseph Lagrange o. p., Journal spirituel, p. 492)

Photo : Moïse devant le Buisson Ardent, Ex. 3, 2. Chagall (1960-1966).
L’Ardent Buisson, planté en plein milieu, lèche de ses flammèches de sang le triple cercle jaune-bleu-rouge d’une présence invisible, que déploie de ses bras et ailes diaphanes, un Ange vert au nez grec et aux cheveux bouclés. De part et d’autre de « Celui-qui-est » dans un océan bleu, tiré de lignes réfractaires, et barré tout en haut d’un riche horizon vert, deux Moïses regardent, tournés l’un vers Yahvé » et l’autre vers la Loi qu’il observe en avant ! Le triptyque se donne de droite à gauche comme se lit l’hébreu. Le même mouvement pousse les deux Moïses. (Texte de V.-P. Toccoli, s.d.b., Marc Chagall, La Bible Rêvée.NGM Publischers, SEA, 2002.)

Actualité de la cause de béatification du Serviteur de Dieu, Marie-Joseph Lagrange o. p.

Actualité cause de béatification

Actualité cause de béatification

Introduction

La cause de béatification du père Joseph-Marie Lagrange o.p. a été ouverte en 1986. Il est actuellement « serviteur de Dieu », qui est la première étape vers la béatification.

Ouverture de la cause

L’ouverture de la cause de béatification a eu lieu le 15 novembre 1987, à la demande de l’École biblique et de la Province dominicaine de Toulouse, après le chapitre général de l’Ordre des Prêcheurs tenu à Avila.

Postulateur

En 2022, le postulateur pour l’ordre des Prêcheurs est Fr. Massimo Mancini, o.p., qui a succédé au Fr. Gianni Festa, o.p.

L’acteur, qui assume le rôle de représentation de la cause et la prise en charge des frais est la Province dominicaine de Toulouse.

Biographie critique

Le père Bernard Montagnes a rédigé la biographie critique suite à l’enquête, menée par les pères Joseph Doré et Maurice Gilbert, sur les écrits du père Lagrange : Marie-Joseph Lagrange, Une biographie critique. Coll. Histoire–Biographie, Éd. du Cerf, 2005.

Promotion de la cause

Un colloque a eu lieu le 27 novembre 2017 à l’université Angelicum (Rome), à l’occasion de la réédition de L’Évangile de Jésus Christ du père Marie-Joseph Lagrange o.p. Il a donné lieu à des conférences sur la figure du Père Lagrange, la vertu de son exégèse, son héritage, aujourd’hui, à l’École biblique, et son itinéraire spirituel, accompagné de divers documents et photos.

Un autre colloque est à venir : il se tiendra les 17 et 18 mars 2020 à Bologne, et aura pour thème : « L’exégèse biblique du serviteur de Dieu Marie-Joseph Lagrange, o.p., une lecture théologique ».

Prier pour la cause

« Père Saint, tu as mis en ton serviteur le frère Marie-Joseph Lagrange, le désir de la vérité et un goût passionné pour la Parole de Dieu. À la lumière de la Loi de Moïse, des Prophètes et des Psaumes, il a scruté le mystère de Jésus-Christ et son cœur est devenu brûlant. Avec la Vierge Marie, il a médité l’Évangile dans la prière du Rosaire. Il a voué son existence à l’étude scientifique de la Bible dans l’harmonie évangélique de la foi et de la raison afin de sauver les âmes perturbées par la critique scientifique.

Ceux qui l’ont connu ont témoigné de sa foi rayonnante et de son exemplaire obéissance dans les épreuves.

Nous te prions, Père, de hâter le jour où l’Église reconnaîtra publiquement la sainteté de sa vie, afin que son exemple bienfaisant entraîne nos frères à croire en la Parole de Dieu.

Que l’intercession du frère Marie-Joseph Lagrange nous obtienne les grâces dont nous avons besoin, et en particulier : (préciser laquelle).

Nous te le demandons, Père, au nom de ton Fils Jésus-Christ, dans la communion du Saint-Esprit, un seul Dieu vivant pour les siècles des siècles. Amen. »

 

 

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Août 2019

 

 

 

 

Écho de notre page Facebook : août 2019

Actualité de la cause de béatification du père Marie-Joseph Lagrange o. p.

Actualité cause de béatification

 

31 août 2019
La Vierge Marie dans le mystère du Christ et de l’Église

Tout au long de son existence, Marie a approfondi le mystère de la foi, gardant les paroles et les événements de la vie de son Fils Jésus dans son cœur » (cf. Lc 2, 51). Marie a progressé dans la foi en son Fils, jour après jour dans la vie ordinaire de Nazareth. Sur le Calvaire aussi, quand une épée a transpercé son âme (cf. Lc 2, 35), dans la communion de la prière au Cénacle au jour de la Pentecôte, au cœur de la communauté apostolique réunie au nom de Jésus dans l’attente de la descente de l’Esprit Saint.

Marie a grandi dans la connaissance de Dieu auprès de son Fils et au milieu de l’Église. La Constitution Lumen gentium du Concile Vatican II au chapitre VIII a tenu à situer la Vierge Marie dans le mystère du Christ et de l’Église. Les théologiens chrétiens s’interrogent sur Dieu « dans le mystère du Christ et de l’Église ».

La théologie vit toujours en chemin puisque le Christ Jésus est Chemin, Vérité et Vie. Marie-Joseph Lagrange a toujours été habité par une vision dynamique et progressive de l’histoire et de l’exégèse. Pour lui, la vérité était « une vérité en marche ». Dans son discours pour l’inauguration de l’École biblique de Jérusalem, il avait déjà entrevu le beau chemin à parcourir : « Dieu a donné dans la Bible un travail interminable à l’intelligence humaine et, remarquez-le bien, il lui a ouvert un champ indéfini de progrès dans la vérité (1). (Extrait de La Vierge Marie, théologienne par Manuel Rivero o. p.) https://fr.zenit.org/articles/la-vierge-marie-theologienne-par-le-fr-manuel-rivero-o-p/

(1) Discours pour l’inauguration de l’École biblique de Jérusalem, le 15 novembre 1890. Le père Lagrange au service de la Bible. Souvenirs personnels, Paris, Cerf, 1967, p. 104.

Photo : La Vierge à l’Annonciation, Fra Angelico (1450-55). Detroit Institut of Arts.
Fra Angelico représente ce moment juste après l’annonce de l’Ange. La Vierge Marie incline la tête en signe de consentement à la volonté de Dieu. L’Annonciation était un thème fréquent au 15siècle ; les artistes italiens analysaient et représentaient chaque aspect de cet événement miraculeux.

 

29 août 2019
Martyre de Saint Jean-Baptiste
Éloge de Saint Jean-Baptiste par Jésus
« Jean était la lampe qui brûle et qui luit » (Jean 5, 35). (M.-J. Lagrange, Journal spirituel, Cerf, 2017, p. 36).

Extrait d’un commentaire du P. Lagrange
L’imparfait indique que Jean était déjà mort […]. C’est une allusion au zèle brûlant du Baptiste pour la pénitence, en même temps que la révélation qu’il avait communiquée sur le Christ […]. Ce n’est pas sans dessein que Jésus ne parle plus ensuite de la chaleur de la flamme, mais seulement de la lumière. Cette lumière a attiré les Juifs ; ils s’en sont approchés avec joie, espérant qu’elle annonçait le réveil de leurs espérances. Mais leur joie a été de courte durée […]. Ils n’ont pas laissé à cette parole ardente le temps de les pénétrer intérieurement ; il y ont pris plaisir un moment, puis ils ont pensé à autre chose (L’Évangile selon Saint Jean,éd. Lecoffre-Gabalda, 1936, p. 151-152).

 

27-28 août 2019
L’influence d’une maman
Sainte Monique a beaucoup prié pour obtenir la conversion de son fils Augustin. C’est ainsi qu’ils allaient ensemble aux Sermons de l’évêque saint Ambroise de Milan, jusqu’au jour de la conversion et du baptême de ce futur Père de l’Église.

Le Père Lagrange débute sa quatrième conférence à Toulouse en 1902 : – La Méthode historique même en matière scientifique, par ces mots :

Saint Augustin est le seul Père qui ait laissé des Rétractations, c’est-à-dire, dans le sens latin surtout, qui soit revenu sur sa pensée. Son étonnante candeur lui a permis peut-être, mieux qu’à un autre, de reconnaître que son prodigieux génie avait prodigué sur plusieurs points de vues très différentes. Si on s’en était tenu à son grand principe, si bien analysé par saint Thomas, que Dieu n’enseigne pas la science dans l’Écriture, l’exégèse catholique aurait évité bien des déboires. Mais l’aigle d’Hippone prêtait lui-même à confusion, en disant, dans son livre des Confessions(XII, 31), livre très lu, que par une illumination spéciale, l’auteur inspiré « avait compris et pensé dans ses paroles en les écrivant, tout ce que nous avons pu y trouver, et tout ce que nous n’avons pas pu, ou que nous ne pouvons pas encore, mais qu’on peut y trouver ». Avec sa parfaite simplicité, le grand docteur confesse qu’il n’a pas pris cette opinion dans la tradition, mais c’est ainsi, dit-il, que je ferais, si mes paroles pouvaient avoir tant d’ampleur. Si ces expressions avaient été prises à la lettre, c’en était fait de l’exégèse historique. La pensée de l’auteur sacré ne devait plus être interprétée comme saint Athanase (De Decret, Nic.,§ 14, n° 173)en particulier l’avait compris, d’après le temps et les circonstances ; elle se mesurait à la science de Dieu, autant du moins qu’elle peut être reçue dans l’esprit de l’homme, et Moïse, par exemple, aurait saisi d’avance et caché dans son texte tous les sens qu’on pourrait y découvrir. C’est presque cependant là qu’en est venue l’exégèse du XIXesiècle sur le premier chapitre de la Genèse.
Nous avons déjà exposé les principes, vous savez dans quelle mesure la Bible contient des propositions scientifiques, vous vous dites sans doute qu’en examinant maintenant les cas particuliers je vais enfoncer une porte ouverte. Il sera bon toutefois d’y passer, car passer par une porte ouverte, c’est quelquefois le moyen de savoir comment on peut ouvrir les autres sans les enfoncer. […] (La Méthode historique. La critique biblique et l’Église, éd. Foi Vivante 31, Cerf, 1966, p.96-97)

Illustration : Sainte Monique dans le Petit Livre des Saints, éd. du Chêne, t.2, 2011, p. 146.
Petite et accipietis (Demandez et vous recevrez)

S. Augustin et Sainte Monique écoutant un Sermon de S. Ambroise de Milan-Vergos Group (15e)-Museu National d’Art de Catalunya.

23 août 2019
Sainte Rose de Lima, patronne du continent latino-américain

Santa Rosa, ora pro nobis. Sainte Rose, priez pour nous. (Marie-Joseph Lagrange. 30 août 1883, Appel au diaconat, Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 205.)

Rose de Sainte Marie du Tiers Ordre de saint Dominique vécue son union au Christ dans la prière incessante et joyeuse. Active auprès des malades et des déshérités qu’elle soignait, qu’elle visitait, qu’elle accueillait avec tout son amour et sa patience ; elle était toujours disponible à tous. Elle aimait répéter : « Si les hommes savaient ce qu’est vivre dans la grâce, ils ne s’effraieraient d’aucune souffrance et pâtiraient volontiers toute peine, parce que la grâce est le fruit de la patience ». Sainte Rose de Lima est la première sainte canonisée du continent latino-américain, dont elle est la première patronne. (Fr. Manuel Rivero o.p.)

Illustration : Sainte Rose de Lima (photo Manuel Rivero o.p.)

 

21 août 2019
Saint Pie X (élu le 4 août 1903, † 20 août 1914)

En matière d’études bibliques, l’urgence devient celle du contrôle et même de la répression. Aussi le projet d’une institution romaine vouée à la science biblique tombe en sommeil, comme le déplore le P. Lagrange, le 29 octobre 1903, dans une lettre au P. Ambroise Gardeil : « Le Saint-Père n’est évidemment pas entré dans la pensée de Léon XIII et n’y entrera probablement pas. Ceux qui veulent démolir se passent de permission… et nous en sommes là. On travaille beaucoup ici… pour l’avenir. »

Par le Père Cormier, Maître général, familier de Pie X, le P. Lagrange sait ce que le pape pense de l’École biblique. « Le Saint-Père me dit : « En cette matière, soyez dur ; vous pouvez être assuré de l’appui du Saint-Siège » » (10 septembre 1906). « Il ne pense pas qu’à Jérusalem on soit bien enchanté de ce qu’il fait et bien empressé à le seconder efficacement con amore. Un de nos Pères […] lui a dit que les études philosophiques et théologiques souffraient de la prépondérance donnée au reste » (22 avril 1908). « L’opinion s’est répandue chez certains de nos Pères que des professeurs ont pour tactique de se taire, attendant des jours meilleurs, et prévoyant que, s’ils avaient le malheur de risquer des opinions peu agréées, le pape frapperait comme un sourd, quod est inconveniens [ce qui ne convient pas» (18 juin 1909).

Non seulement le P. Lagrange est empêché en 1907 de publier quoi que ce soit sur l’Ancien Testament, mais après son Évangile selon saint Marc (1911), la Congrégation romaine responsable des séminaires jette en 1912 un blâme public sur ses publications. C’est alors que le P. Lagrange adresse au pape une admirable lettre de soumission, dans laquelle il proteste de son intention de servir l’Église et non de la subvertir, lettre qui émut Pie X. Le P. Cormier en avertit aussitôt le P. Lagrange le 5 septembre 1912 : « J’ai eu hier l’audience du Saint-Père, qui spontanément m’a exprimé sa grande et pleine satisfaction de votre lettre, m’encourageant à la publier. J’ai ajouté que vous aviez été peiné que certains vous attribuassent d’être rationaliste et insoumis. Votre désir était, au contraire, de sauvegarder la véracité, même historique de l’Ancien Testament et vos écrits dans ce sens sont de beaucoup antérieurs aux récentes décisions. » La bienveillance de Pie X se maintient ensuite puisqu’en mars 1913, comme le P. Lagrange le raconte à Tisserant, il a reçu une bénédiction spéciale du Saint-Père par un de ses anciens amis, camérier de cape et d’épée.

Dans ses Souvenirs personnels, écrits en 1926, le P. Lagrange revient sur cet épisode : « Quand je pense à l’accueil plein de bonté que fit Pie X à ma soumission de 1912, je me dis que si je lui avais écrit alors [en 1909] une lettre filiale, pour lui ouvrir mon cœur plus complètement que je ne l’avais fait jusqu’alors, ses soupçons se seraient peut-être évanouis. Je me suis trop condamné à ne rien faire qui parût être une captatio benevolentiae [La captatio benevolentiae est un procédé rhétorique qui consiste à s’assurer d’entrée de jeu de la sympathie de l’interlocuteur].Et que pouvait une lettre contre les attaques sans cesse renouvelées auprès de Sa Sainteté ? » (p. 184). (Bernard Montagnes o. p., Les papes du père Lagrange, extrait de la Revue du Rosaire, n° 196, décembre 2007)

 

19 août 2019
Jésus signe de contradiction (Luc 12, 49-53) par Marie-Joseph Lagrange o. p.
« Ne pensez pas que je suis venu jeter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu jeter la paix, mais le glaive. …….. »

[…] S’il était permis de se dérober à l’impression profonde de cette confidence pathétique, où toute l’âme de Jésus proteste contre le sens matériel des paroles, il faudrait rappeler que ce n’est là qu’un aspect de sa mission, tellement affligeant qu’il voile un moment tout le reste : la paix intérieure rendue aux hommes, leur réunion dans une société régie par l’amour. Il faudrait bien noter aussi que ces paroles si évidemment authentiques – qui eût osé risquer ce paradoxe ? – sont le démenti le plus décisif à ces critiques qui ne voient dans Jésus que le prophète du règne de Dieu imminent, dans la parfaite innocence, sous le regard du Messie.

 

Ce que Jésus avait déjà annoncé des persécutions qui attendent ses messagers, il l’embrasse d’un coup d’œil sous le côté le plus pénible à son Cœur aimant, une longue suite de dissensions et de querelles. Si du moins elles n’étaient qu’entre ses disciples et ceux du dehors ! (Extrait de L’Évangile de Jésus Christ, p. 385, Artège-Lethielleux, 1917)

 

Illustration : Les moines de Tibhirine, en prière, tués en haine de la foi, comme tant d’autres, aujourd’hui encore dans le monde. Détail d’un tableau accroché dans la chapelle du monastère à Midelt, au Maroc.

 

 

 

15 août 2019
Assomption de la Vierge Marie, patronne principale de la France
« Je vous salue, blanc lis de la glorieuse et paisible Trinité. Ô vous de qui a voulu naître et du lait de laquelle a voulu se nourrir le Roi des cieux, abreuvez nos âmes des effusions de la grâce divine. Ainsi-soit-il. » (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 167.)

Le Journal spirituel du frère Marie-Joseph Lagrange révèle son dialogue fervent avec la Vierge Marie qu’il invoque surtout sous le vocable de Marie Immaculée, Vierge Marie Immaculée, Mère Immaculée. Dans son cœur à cœur avec Marie, il l’appelle « ma Dame, mon Avocate, ma Patronne, mon Guide, ma Reine, ma Mère ! » C’est à la bienheureuse Vierge Marie Immaculée qu’il se consacre le 31 mai 1880. Il remet son corps et son âme, tout son être, entre les mains de la Vierge Marie, « Maîtresse de sa vie présente et future ». Mû par un ardent désir de louer, de bénir et de prêcher l’amour de Jésus-Christ, il comptesur l’intercession de sa Mère. Dominicain, il oriente tous ses efforts vers « le salut des âmes », but de l’ordre créé par saint Dominique. Les chrétiens savent que la Vierge Marie n’est pas une mère possessive. Loin de s’enfermer dans une prière intimiste, la prière mariale du frère Marie-Joseph manifeste le don total de lui-même par amour au service du Règne de Dieu.
(Fr. Manuel Rivero O. P. : La dévotion du P. Lagrange à la Vierge Marie. Extrait.)

Illustration : La mort et l’Assomption de la Vierge Marie. Panneau de reliquaire, 1432 env., Isabella Stewaer Gardner Museum, Boston, USA.
Ce panneau a été peint par Fra Angelico pour la basilique des Dominicains de Santa Maria Novella à Florence.
Fra Angelico fait preuve ici d’une grande délicatesse tout en étant bien complexe.

Le panneau représente la « Dormition » de la Vierge. Autour de la Vierge, se trouvent les disciples. À sa tête, parmi les disciples, le peintre a représenté saint Dominique. À ses pieds, l’un d’eux porte une palme terminée en broussaille. Quatre apôtres s’inclinent et se penchent pour enlever le corps vieilli de Marie qui repose sur un somptueux drap d’or, entouré de quatre chandeliers. Au centre, le Christ tient l’âme représentée sous la figure d’un petit enfant.

Dans la deuxième partie, Marie s’élève sur des nuées lumineuses, les mains étendues vers le Christ, entourée d’une gloire rayonnante.

Dans la troisième partie, Jésus vêtu d’une tunique d’un bleu intense, descend du ciel penché en avant, ouvrant grand ses bras pour accueillir sa divine Mère. Il est accompagné de sept séraphins,

Dans les trois zones l’artiste a réuni, autour de Marie, des anges qui vaquent à diverses occupations. On en voit quatre agenouillés, admirant la Vierge s’élevant sur les nuages ; puis, ce sont, de chaque côté, trois esprits célestes, jouant de divers instruments ; deux avec de longues trompettes ; un troisième fait résonner un tambourin et trois jouent sur des instruments à cordes. Quatorze anges ont formé autour de la Reine du ciel une ronde joyeuse. Fra Angelico est parvenu à entourer Marie de vingt et un anges, ils sont à genoux, dansent et semblent flotter, tourbillonner, attirés par un centre qui les emporte.

On peut souligner ici la variété des bleus utilisés par Fra Angelico, donnant à chacun une signification particulière, bleu sombre pour la Vierge morte, bleu clair, délicat, léger pour la Vierge montée au ciel, et bleu sursaturé pour le Christ.

 

10 août 2019

Belle fête de saint Laurent, diacre et martyr, depuis le monastère des moniales dominicaines d’Alcala la Real (Andalousie. Espagne), où je vais célébrer la messe ce matin pour la cause de béatification du père Lagrange ainsi que pour ses amis.
Le chapitre général de l’Ordre des prêcheurs qui vient de se clôturer à Bien Hoa (Vietnam) a mis en valeur dans le prologue des textes du chapitre l’exemple du père Lagrange qui vécut sa vie intellectuelle en équipe avec les autres professeurs de l’Ecole biblique de Jérusalem au coeur d’une communauté dominicaine de prière et de vie fraternelle. Le chapitre général a souligné la synergie entre la communauté et la mission. Les couvents des dominicains étaient appelés au début de l’Ordre « sainte prédication ». Ce ne sont pas les murs qui font le couvent mais la communauté apostolique des frères au service du salut des âmes.
Le saint patron de baptême du père Lagrange, saint Albert le Grand, parlait de « la recherche de la vérité dans la douceur de l’amitié ». Le père Lagrange a vécu la recherche exégétique en équipe pluridisciplinaire (historiens, géographes, archéologues, théologiens …) dans une Ecole biblique fondée au couvent de Jérusalem afin que la Parole de Dieu ne soit pas uniquement étudiée dans les bibliothèques mais qu’elle soit priée, célébrée dans la liturgie, vécue dans la charité et transmise dans la prédication et l’enseignement.
Au mois de juin dernier, le pape François a présenté sa vision de la théologie à Naples dans la perspective du dialogue et du travail interdisciplinaire. Le père Lagrange en son temps a relevé les défis de l’exégèse en équipe de manière scientifique et surnaturelle.
Belle journée dans la lumière de l’Esprit Saint ! Fr. Manuel.

 

8 août 2019
Notre Père Saint Dominique

 

Dominique ! Quelle nature ardente et généreuse, droite. Sans la moindre finesse de dissimulation ; quelle grâce enflammée, quelle prière pour les âmes, c’est vraiment une nouvelle effusion de l’Esprit de Dieu… (M.-J. Lagrange, Journal spirituel, p. 434, Cerf, 2014.)

 

Illustration : Saint Dominique dispute avec les hérétiques. Fresque de Simone Martini à la chapelle des Espagnols de Sainte-Marie-Nouvelle à Florence.
Dominique répond en ordre aux arguments de ses adversaires en comptant sur ses doigts. Au bas de la fresque, des chiens noirs et blancs représentent les Prêcheurs qui arrachent les brebis aux loups qui les dévorent. Le chien est au Moyen Âge le symbole classique du prédicateur, parce qu’il aboie contre l’erreur, met en fuite les faux bergers et les voleurs et guérit avec sa langue. (Source : Saint Dominique. Textes et légendes de Marie-Humbert Vicaire, o.p., DDB, 1957.)

6 août 2019
« Celui-ci est mon fils bien-aimé, écoutez-le »
La Transfiguration est un gage certain de la gloire de Jésus, la scène de Gethsémani le montre au point où il s’abaisse le plus pour satisfaire aux conditions de la nature humaine. Plus d’un Père a pensé que les témoins étaient les mêmes parce que le souvenir de la lumière éclatante devait les préserver contre le scandale de l’agonie. Pierre a été choisi, comme le chef désigné. Jean était le plus aimé. Jacques son frère ne le quittait pas et devait être le premier des Apôtres à verser son sang pour l’évangile… (lire le texte en entier dans L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, par le P. Marie-Joseph Lagrange, p. 291 et suivantes, Artège-Lethellieux, 2017.)

Illustration : La Transfiguration du Christ par Duccio di Buoninsegna (1308-1311) National Gallery, Londres.

4 août 2019

Saint Jean-Marie Vianney

L’influence du saint Curé d’Ars dans la vie et l’oeuvre du P. Lagrange
par Fr. Manuel Rivero o.p.
Président de l’association des amis du père Lagrange

Dès sa tendre enfance, la vie d’Albert Lagrange a été marquée par le  curé d’Ars, comme il le raconte dans son Journal spirituel. Sa mère, Élisabeth, qui avait déjà perdu deux bébés, craignant pour la vie de son fils l’avait conduit à Ars : « Je suis né le 7 mars, jour de la Saint-Thomas ; j’ai été baptisé le 12, fête de saint Grégoire et, selon l’usage, sans doute consacré à Marie à l’autel de la Vierge noire. Je me trouvais donc, dès le début sous la protection de saint Joseph. Ma mère m’a mis en vœu pendant trois ans, me faisant porter le bleu et le blanc en l’honneur de Marie. Quelle douce pensée, et n’est-ce pas l’origine de sa tendresse pour moi !  Mes parents m’ont amené en pèlerinage à Ars, le saint curé m’a béni, et peut-être guéri d’une fatigue d’entrailles. »

Selon le frère L.-H. Vincent o.p., disciple, confident et ami du frère Lagrange pendant quarante-cinq ans, le curé d’Ars aurait dit à sa maman : « L’enfant ne mourra pas, il deviendra un jour une lumière pour l’Église. » La sœur du frère Lagrange, Thérèse Lagrange, affirmait tenir ces paroles de sa mère peu avant la mort de celle-ci.

Au cours de l’été 1879, avant d’entrer dans l’ordre de saint Dominique, Albert Lagrange, alors séminariste à Issy-les-Moulineaux, avait fait avec sa mère un pèlerinage à Ars pour demander au saint curé Jean-Marie Vianney la grâce du discernement : « Pendant les vacances, j’allai à Ars avec ma mère, et je fus bien touché. »

Au couvent de Saint-Maximin, le frère Marie-Joseph Lagrange, novice, se confie à l’intercession du curé d’Ars afin d’obtenir l’humilité. Lors de la pose de la première pierre de l’École biblique de Jérusalem, le 5 juin 1891, le frère Lagrange y déposa un fragment de la soutane du curé d’Ars.

Tout au long de sa vie, le frère Lagrange œuvra pour le salut des âmes par l’interprétation de la Parole de Dieu. À la suite du curé d’Ars, il travailla à la sanctification  du Peuple de Dieu. Les frères dominicains qui ont vécu avec lui témoignent de sa disponibilité quand il s’agissait d’écouter la confession d’un prêtre alors que le portier du couvent craignait de déranger ce frère si occupé par ses recherches et ses publications. À l’exemple du curé d’Ars, le père Lagrange aimait profondément le sacerdoce et les prêtres.

Le 25 mars 1992, en la fête de l’Annonciation du Seigneur, Monseigneur Guy Bagnard, évêque de Belley-Ars, a demandé la béatification du père Lagrange au pape Jean-Paul II.

Confions au saint curé d’Ars et au père Lagrange les vocations religieuses et sacerdotales dont l’Église a besoin.

 

4 août 2019
Histoire d’héritage (Luc 12, 13-14)
Réflexion du père Lagrange

Si cet homme avait paru à Jésus apte à la perfection, il lui aurait plutôt dit : « Donne-moi joyeusement ta part, et suis-moi. » Mais, il n’entend pas supprimer parmi les hommes l’exercice du droit de propriété. Ils devraient seulement comprendre qu’il n’en est pas chargé. Ce n’est pas sa mission. Sa mission est de prêcher le détachement des biens du monde. Il répond donc : « Ô homme ! Qui m’a établi pour être juge ou faire vos partages ? » […] Que les richesses échappent aux doigts glacés des morts, c’est un thème banal, cher aux moralistes et aux satiriques. Mais, aucun d’eux n’a éprouvé cette émotion de la perte d’une âme qui s’est abaissée au niveau de l’or. Jésus seul a fait entendre cette parole intérieure dans la nuit, suprême avertissement de Dieu à un homme qui va perdre et qui peut encore être sauvé. (L’Évangile de Jésus Christ, pp. 375-376, Artège-Lethielleux, 2017.)

Photo : Christ et le jeune homme riche par Ludwig von Hofmann (1824-1911)

Écho de notre page Facebook : juillet 2019

31 juillet 2019
Saint Ignace de Loyola

Alors qu’il est au noviciat, Albert Lagrange demande à saint Ignace s’il veut bien le diriger et commence les Exercices spirituelsprécédés par une prière à la très douce Marie :

« Ô très douce Marie, ma Mère, grâce vous soient rendues : il me semble que vous m’avez rendu la paix du noviciat simple, un peu de détachement et un désir ardent de travailler pour votre gloire, d’aimer Jésus seul. Et pourtant je suis vraiment plus faible et plus engourdi que jamais : seule votre grâce Immaculée peut vivifier ces désirs de mort qui tendent toujours à la vanité. Vous avez été si bonne de me faire religieux. Je suis venu pour vous, ‘Ave Maria !’ Je resterai pour vous si vous m’en faites la grâce : mais ne permettez pas que tout cela n’aboutisse qu’à une vie naturelle et scientifique ! Ce serait trop misérable ! Enflammez-moi de votre esprit : je me donne à vous, pour être votre chose et votre instrument. Gardez tous mes frères, donnez-nous l’amour de Jésus : qu’un souffle nouveau nous embrase, et soyez éternellement  bénie ! »

Puis, il ajoute :

 

 

« Commencé les exercices de St Ignace sous la protection de la Bienheureuse Vierge Marie. Je promets à St Ignace, s’il veut bien me diriger, de ne jamais plaisanter de la Compagnie, et même de pousser à l’union. »

Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, pp. 167-168, Cerf, 2014.

 

 

28 juillet 2019
Marie, Mère de la Sagesse

 

« Daignez donc, ô Mère de la Sagesse, instruire vos enfants : votre conversation n’a pas d’amertume, votre discipline est douce, vos leçons forment l’esprit et le cœur. »
(M.-J. Lagrange, Journal spirituel, p. 104, Cerf, 2014.)

 

 

22 juillet 2019
Mémoire de sainte Marie-Madeleine

Dans sa prière de feu, le père Lagrange prie au pied de la Croix de Jésus à la suite de saint Dominique tel que Fra Angelico le représente dans le cloître du couvent saint Marc de Florence (Italie). Il désire partager la foi douloureuse de la Vierge Marie, de sainte Marie-Madeleine et de saint Jean :
« Permettez moi, ô Jésus, de me tenir constamment au pied de la Croix avec votre Mère Immaculée, Ste Marie-Madeleine et St Jean. » (Journal spirituel, p. 58, Cerf, 2014. Cité par fr. Manuel Rivero o. p. dans « La dévotion du père Lagrange à sainte Marie-Madeleine » https://www.mj-lagrange.org/?p=11868)

Photo : Fra Angelico, NY Metropolitan Museum.
Dans le détail de cette oeuvre, à gauche du Crucifié, S. Augustin et S. Dominique. À droite, S. Thomas d’Aquin. Cette fresque endommagée, mais poignante, a été réalisée en 1440, lorsque Fra Angelico et ses collaborateurs décoraient le couvent de San Marco à Florence de fresques financées par Cosimo de Médicis. Cette peinture peut bien avoir été peinte pour Cosimo et enregistrée en 1492 dans l’inventaire du palais Médicis. Comme dans toutes les fresques de San Marco, des saints nés des centaines d’années après la crucifixion participent à l’événement par la méditation.

21 juillet 2019
Se rapprocher très près de Jésus. Prendre du temps. Commentaire du père Lagrange.

[Jésus] était venu pour annoncer la bonne parole, il y vaquait, et Marie, assise à ses pieds, l’écoutait. Très active, Marthe aurait suffi à la besogne, mais sa sœur se rendait-elle compte de l’importance de cet office, puisqu’elle ne venait pas l’aider […]. Quant à obliger Marie à s’occuper des soins de Marthe si opportuns qu’ils soient, le Seigneur s’y refuse : « Car Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera pas ôtée. »  Cette bonne part, la meilleure, c’est de se rapprocher très près de Jésus pour l’entendre parler au cœur. (Marie-Joseph Lagrange des Frères Prêcheurs, L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, p. 354, Artège-Lethielleux, 2017)

Photo : Jésus dans la maison de Marthe et Marie par Cornelis Kruseman (1853).

 

18 juillet 2019
Saint Barthélemy des Martyrs o. p. par Marie-Joseph Lagrange o.p. Journal spirituel, p. 239, Cerf, 2014.

« Il n’y aurait pas d’hérésies si l’on observait les canons.

« Voir ce que dit Grenade, Traité de l’oraison II, p. 88, cap. IV, du danger des études philosophiques, quand un jeune homme ne fait que commencer à goûter le lait de J.-C. Qui a J.-C. didicerunt mites esse et humiles corde, plus cogitando et orando proficiunt quam legendo et audiendo. Augustin, ch. 112. » [Un religieux peu exact à garder sa règle nuit plus à l’Ordre par sa tiédeur qu’il ne lui pourrait servir par une science extraordinaire.]

[Saint Barthélemy des Martyrs (1514-1590), évêque de Braga au Portugal, fut l’un des disciples du théologien Louis de Grenade. Il a été béatifié par Jean-Paul II le 7 juillet 2001.]

Photo : Saint Barthélemy des Martyrs par António André (1618-1625). Musée de Aveiro, Portugal.

 

16 juillet 2019

« Une nouvelle évangélisation est nécessaire et nous sommes tous appelés à le faire précisément. […] La mission ce n’est pas ce que nous faisons, la mission est ce que nous sommes. Et si cela est clair, tout suivra. Nous sommes des prédicateurs même lorsque nous ne prêchons pas. Nous sommes des prédicateurs même si, dans notre vieillesse, nous ne pouvons plus parler. Nous sommes des prédicateurs même si nous ne sommes pas ordonnés. Nous sommes des prédicateurs même si nous sommes malades. Nous sommes des prédicateurs même si nous menons des recherches sérieuses seuls dans nos chambres. Nous sommes des prédicateurs lorsque nous aidons les moins privilégiés. Nous sommes des prédicateurs. C’est notre identité. » Ces quelques mots ont été prononcés lors de son discours, le 13 juillet 2019, par Fr. Gerard Francisco Timoner O. P., élu 88e Maître de l’Ordre des Prêcheurs successeur de saint Dominique. Il est le premier frère asiatique à être élu à cette charge pour les neuf prochaines années. Seigneur, nous te louons !

Le père Lagrange réalisait la Parole dans l’étude et l’enseignement, actes de charité, la charité de la vérité. La Vérité étant le don par excellence. Si de nombreux saints ont servi l’humanité par des aumônes et des soins médicaux, les prêcheurs accomplissent le service de la Vérité par l’annonce de la Parole de Dieu. Pour saint Thomas d’Aquin, le but de la vie religieuse n’est rien d‘autre que la charité. « Enseigner, c’est aimer », écrivait le philosophe espagnol Joaquim Xirau (1895-1946), pour qui la transmission du savoir passe par la bonté. Enseigner l’Évangile, c’est aimer l’autre en lui donnant Dieu. L’évangélisation engendre en ce sens une nouvelle création avec des mentalités et des relations nouvelles. (extrait de « Le Père Lagrange, lumière pour la nouvelle évangélisation » par fr. Manuel Rivero, o.p.)
https://www.mj-lagrange.org/?p=3271

Photo : Fr. Gerard Francisco Timoner, O. P., 88e Maître de l’Ordre des Frères Prêcheurs.

16 juillet 2019
Le cardinal François-Xavier Nguyen Van Thuan cite le père Lagrange et sa mort exemplaire
« Jérusalem, Jérusalem »

François-Xavier Nguyen van Thuan est né au Vietnam en 1928. Ordonné prêtre en 1953, consacré évêque en 1967, il a été nommé par Paul VI archevêque coadjuteur de Saigon en 1975. Mais après quelques mois, avec l’arrivée du régime communiste, il est arrêté et incarcéré. Il a vécu treize ans en prison sans avoir été jugé ni condamné. En 1994, il est nomme vice-président du Conseil pontifical Justice et Paix. En 1998, il est nommé Président de ce Conseil où il succède au cardinal Etchegaray. En 2001, il est crée cardinal. Il meurt en septembre 2002. Sa cause de béatification est en cours.

Dans sa prédication des Exercices spirituels au pape Jean-Paul II et à la curie romaine en 1999 , il rappelle la mort exemplaire du père Lagrange au milieu de ses frères le 10 mars 1938 au couvent dominicain de Saint-Maximin (Var. France), la mort comme acte de foi et d’amour suprêmes : « Je me souviens du récit des derniers moments du père Joseph Lagrange, o.p., fondateur de l’École biblique de Jérusalem, et qui fut un exemple de courage, d’humilité et de foi dans l’épreuve (…), les mains tendues vers le haut, il s’est exclamé : « Jérusalem, Jérusalem ». Comme s’il avait vu la Jérusalem céleste. Puis, peu à peu, il a fermé les yeux, incliné la tête et expiré ».
Fr. Manuel Rivero O.P.

14 juillet 2019
Parabole du bon Samaritain (Lc 10, 25-37)
Qui est mon prochain ? commenté par le père Lagrange

Demande-le à chacun de ces trois hommes ! Les deux premiers ne s’en soucient guère. Le troisième, le Samaritain te répondra : c’est celui qui a besoin d’un secours, quelle que soit sa nationalité ou sa croyance ; à l’occasion tout homme est notre prochain, et nous sommes aussi son prochain. Le scribe ne s’y méprit pas. Celui qui savait ce qu’est le prochain, c’est celui qui a exercé la charité. Jésus lui dit : « Va, toi aussi fais de même. » Quelle date dans l’histoire de l’humanité que ce simple dialogue ! (L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, p. 353, Artège-Lethielleux, 2017.)
Photo : Le Bon Samaritain par Josep Tapiró i Baró (1836-1913).
Légende en vietnamien : Ai là ngưòi thân cận của tôi ? = Qui est mon prochain ?

13 juillet 2014
Bon samedi en ce 13 juillet, depuis le Chapitre général de l’Ordre des prêcheurs au Vietnam. Nous aurons ce matin la messe du Saint Esprit avant l’élection du Maître de l’Ordre. Avec ma prière pour la cause de béatification du père Lagrange et pour son rayonnement dans l’Eglise et le monde. Fr. Manuel.

11 juillet 2019
Belle fête de saint Benoît, maître de la paix intérieure dans l’amour et la prière. Depuis Bien Hoa (Vietnam). Fr. Manuel

11 juillet 2019
La récompense promise au détachement (Mt 19, 27-29)

L’évangile de saint Matthieu de ce jour illustre bien la joie des frères dominicains réunis actuellement en chapitre à Biên Hòa au Vietnam. Le père Lagrange rappelle les termes de ce passage de l’évangile de saint Mathieu et le commente : « Nous avons tout quitté et nous t’avons suivi ! » Et aussitôt les paroles graves, chargées de pressentiments, se font encourageantes et découvrent un joyeux avenir : « En vérité, je vous le dis,  nul n’aura quitté maison, frères, sœurs, mère, père, enfants ou champs à cause de moi et à cause de l’Évangile, qui ne reçoive le centuple dès maintenant, de ce temps, en maisons, frères, sœurs, mères, enfants et champs ! ». Une ombre cependant, car nommer l’évangile, c’est annoncer des contradictions, il faudra donc compter aussi avec les persécutions. Mais la récompense toute pure est dans le siècle à venir, et c’est la vie éternelle. En faisant cette promesse aux siens, Jésus parlait en Dieu qui dispose de l’avenir, par le don de la vie éternelle, et même par l’assistance et la consolation offertes dans des familles spirituelles à ceux qui ont tout quitté pour le suivre […]. (Marie-Joseph Lagrange o.p., L’Évangile de Jésus Christ, p. 438, Artège-Lethielleux, 2017.)

 

10 juillet 2019

 

 

6 juillet 2019
En ce jour de la mémoire de la bienheureuse Vierge Marie
fr.Manuel Rivero, O. P., président de l’association des amis du père Lagrange, est parti à destination de Biên Hòa au Viet Nam où s’ouvre le chapitre général OP 2019.
https://capitulumgeneraleop2019.net/fr/category/francais/

Le rôle de la Vierge Marie dans l’intelligence des Écritures par fr. Marie-Joseph Lagrange, o. p. dans son Avant-propos au Commentaire de l’évangile selon saint Jean :

« Il sied d’être timide à la suite d’Origène. Osons le dire : les évangiles sont la part choisie de toutes les Écritures, et l’évangile de Jean est la part choisie parmi les autres ; nul ne peut en acquérir l’esprit s’il n’a pas reposé sur la poitrine de Jésus, et s’il n’a reçu de Jésus Marie pour sa mère. Le nom de Marie, cependant, ranime la confiance. C’est par elle que nous implorons la lumière surnaturelle nécessaire à l’intelligence, quelle qu’elle soit, d’un livre si chargé de sens divins. » (cité par fr. Manuel Rivero, o.p. dans son livre La spiritualité mariale du Père Lagrange. Méditations des mystères du Rosaire, p. 37, Cerf, 2012.

Photo : Notre-Dame de La Vang – Viet Nam
Đức Mẹ La Vang
Thánh địa hành hương Việt Nam

 

3 juillet 2019
Thomas. La foi au ressuscité par le P. Marie-Joseph Lagrange O.P.
« Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru. »

Plusieurs apôtres avaient douté, surtout du témoignage de la Magdeleine ou des femmes. La première tradition n’a désigné personne. Jean ne vit pas d’inconvénient à nommer Thomas, qui fut sans doute le plus récalcitrant, et il appliqua sa méthode de retenir un cas unique mais de le mettre dans tout son jour, pour en tirer une grave leçon sur les conditions de la foi. […] Thomas est encore nommé Didyme, et l’on a voulu voir dans ce nom un symbole de son caractère ; il serait celui qui est partagé en deux, qui ne croit pas facilement. Mais ne signifie pas une personne divisée d’avec elle-même. […] Thomas décidément incrédule, rentra chez lui, si même il n’avait pas refusé de venir. Thomas se refuse même à croire au témoignage de ses frères et répond mot pour mot à leur récit enthousiaste par une froide dénégation. Il ne s’en rapportera qu’au témoignage de ses sens. […]  « Paix à vous ! ». C’est tout d’abord à Thomas que Jésus s’adresse : indiquant d’une main son autre main percée, il invite Thomas à y mettre le doigt, et comme celui-ci demeure immobile il ouvre ses deux mains et lui montre la trace des clous, il l’invite même à mettre sa main dans son côté. Ainsi daigne-t-il consentir à l’épreuve du toucher à laquelle Thomas attachait tant de prix. […] Cependant à cette condescendance il joint un avertissement bien mérité : « ne deviens pas incrédule », car Thomas ne l’avait que trop été, mais comme nous disons « ne fais pas » l’incrédule, mais fidèle. Il n’y a aucun indice que Thomas ait usé de la permission. C’eût été trop fort. Son mouvement n’est pas de faire ce qu’on lui offre, mais de reconnaître la divinité de Jésus, car c’est bien à lui qu’il parle.

Jésus avait fait connaître sa nature divine, mais personne encore dans l’évangile ne lui avait donné ce titre, qu’il avait revendiqué mais non pas sous ce terme exprès. Il jaillit de l’évidence de la résurrection, et sur les lèvres de l’incrédule Thomas, le premier : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (L’Évangile selon saint Jean, pp. 516-519, Lecoffre-Gabalda, 1936. L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, pp. 638-639,  Artège-Lethielleux, 2017.)

La Vierge Marie, théologienne par fr. Manuel Rivero, O.P.

28 juin 2019

Belle fête du Sacré-Cœur de Jésus et mémoire de saint Irénée de Lyon, le grand théologien du IIe siècle. 39e anniversaire aussi de mon ordination presbytérale au couvent de Toulouse (28 juin 1980). Ci-joint un article sur la Vierge Marie, théologienne. Avec ma prière. Fr. Manuel.

 

La Vierge Marie, théologienne

Le pape François a participé le 21 juin 2019 à la Rencontre théologique organisée par la Faculté pontificale de théologie de l’Italie méridionale à Naples qui avait pour thème « La théologie après Veritatis gaudium dans le contexte de la Méditerranée ».

Dans son exposé sur l’exercice de la théologie, le pape François n’a pas évoqué la figure de la Vierge Marie, toujours présente dans sa pensée et dans sa prière.

Je voudrais ici mettre en parallèle l’enseignement du pape avec la Vierge Marie, qui occupe dans l’Église la première place parmi les fidèles sauvés par son Fils, Jésus le Christ. En effet, les prières eucharistiques placent la bienheureuse Vierge Marie, Mère de Dieu, avant les apôtres, les martyrs, les docteurs et les saints. Elle est « la toute sainte », habitée par le Saint-Esprit.

La grandeur de Marie trouve sa source dans sa foi en la Parole de Dieu. Aussi est-elle appelée bienheureuse. La foi de Marie est la foi de l’Église. Par son Immaculée Conception, mystère d’absence de péché et de plénitude de grâce au commencement de son existence dans le sein de sa mère que la tradition appelle Anne, épouse de Joachim, Marie jouit d’une intelligence exceptionnelle de la foi en la Parole de Dieu. Sanctifiée par le Saint-Esprit, Marie vit de la foi dans le Verbe de Dieu à travers les questions et l’abandon.

La théologie suppose le déploiement de la raison pour répondre aux questions dans la lumière de la foi en Dieu. Puisqu’il s’agit du mystère de Dieu, la théologie ne peut s’exercer que dans la foi. Le théologien cherche à comprendre et à rendre compte de l’espérance qui est en lui. La foi, grâce de Dieu et tâche humaine, fait entrer dans le cœur de Dieu par la médiation et l’étude de la Révélation divine transmise dans les Saintes Écritures.

La théologie, la foi et la prière

Seul Dieu peut faire connaître Dieu. Seul Dieu parle bien de Dieu. Le théologien se met à l’écoute de la Parole de Dieu dans un climat de prière contemplative en implorant la lumière de l’Esprit Saint.

Le pape souligne que « l’on ne peut faire de la théologie qu’à « genoux ». Les évangélistes aussi bien que l’art chrétien présentent Marie en prière.

Dans son cheminement spirituel de foi, Marie, femme intelligente et libre, s’est posée des questions : « Comment cela se fera-t-il puisque je ne connais point d’homme ? » (Lc 1,34), à l’Annonciation ; « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois ! ton père et moi, nous te cherchons angoissés. » (Lc 2,48), lors du recouvrement de Jésus au Temple de Jérusalem. Et saint Luc, l’évangéliste de préciser que Marie et Joseph ne comprirent pas la réponse de Jésus : « Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père ? » (Lc 2, 49).

Marie n’a pas tout compris à l’avance. Elle a avancé dans la foi, avec la lumière et l’ombre propres à la démarche de foi. La foi biblique renvoie à la Parole de Dieu. Croire, c’est adhérer à la Parole révélée qui est lumière mais les prophéties comportent aussi leur part d’obscurité. Aussi des mystiques comme saint Jean de la Croix parlent-ils de la nuit de la foi et des exégètes comme le père Lagrange évoquent l’obscurité du texte biblique.

Le théologien se pose des questions sur Dieu et il pose des questions sur Dieu aux autres. Saint Thomas d’Aquin (+1274), le grand maître de la théologie, commence chaque article de la Somme théologique par une question. Et il n’a pas peur des questions. Tout au contraire, la joie du théologien se trouve dans le dialogue et le débat contradictoire à la recherche de la Vérité, qui étant une personne, le Christ Jésus, ne saurait rester enfermée dans des définitions conceptuelles ou des mots : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6).

Le bienheureux Pierre Claverie O.P., évêque martyr en Algérie, affirmait : « J’ai besoin de la vérité des autres. » Loin de tout relativisme ou scepticisme, il partageait son expérience de Dieu et des hommes.

À l’exemple de Marie, le théologien se pose des questions et il cherche des réponses en mettant en œuvre la lumière de la raison éclairée par la grâce de la foi.

La théologie, les processus et le progrès dans la connaissance de la Vérité

Tout au long de son existence, Marie a approfondi le mystère de la foi, gardant les paroles et les événements de la vie de son Fils Jésus dans son cœur » (cf. Lc 2,51). Marie a progressé dans la foi en son Fils, jour après jour dans la vie ordinaire de Nazareth. Sur le Calvaire aussi, quand une épée a transpercé son âme (cf. Lc 2, 35), dans la communion de la prière au Cénacle au jour de la Pentecôte, au cœur de la communauté apostolique réunie au nom de Jésus dans l’attente de la descente de l’Esprit Saint.

Marie a grandi dans la connaissance de Dieu auprès de son Fils et au milieu de l’Église. La Constitution Lumen gentium du Concile Vatican II au chapitre VIII a tenu à situer la Vierge Marie dans le mystère du Christ et de l’Église. Les théologiens chrétiens s’interrogent sur Dieu « dans le mystère du Christ et de l’Église ».

La théologie vit toujours en chemin puisque le Christ Jésus est Chemin, Vérité et Vie. Marie-Joseph Lagrange a toujours été habité par une vision dynamique et progressive de l’histoire et de l’exégèse. Pour lui, la vérité était « une vérité en marche ». Dans son discours pour l’inauguration de l’École biblique de Jérusalem, il avait déjà entrevu le beau chemin à parcourir : « Dieu a donné dans la Bible un travail interminable à l’intelligence humaine et, remarquez-le bien, il lui a ouvert un champ indéfini de progrès dans la vérité[1]. » À la suite de saint Vincent de Lérins, le père Lagrange tenait à l’idée du développement de la connaissance de Dieu qui s’exprime dans les dogmes. Il ne s’agit pas d’un changement mais d’un progrès à la manière de la maturation du grain de blé qui devient épi ou de l’enfant qui parvient à l’âge adulte.

Dans la Constitution apostolique « Veritatis Gaudium » sur les universités et les facultés ecclésiastiques, en date du 27 décembre 2017, le pape François a cité la pensée de saint Vincent de Lérins : « Le théologien qui se satisfait de sa pensée complète et achevée est un médiocre. Le bon théologien et philosophe a une pensée ouverte, c’est-à-dire incomplète, toujours ouverte au maiusde Dieu et de la vérité, toujours en développement, selon la loi que saint Vincent de Lérins décrit ainsi : »annis consolidetur, dilatetur tempore, sublimetur aetate » (Commonitorium primum, 23 ; PL 50,668)[2] ». » La vérité se consolide avec les années, elle se développe dans le temps, devenant plus profonde avec l’âge.

D’une manière poétique, Juan Ramón Jiménez, Prix Nobel de littérature en 1956, reliait ainsi l’ancien et le nouveau : « Des racines et des ailes. Mais que les ailes s’enracinent et que les racines volent. » Cette découverte infinie de la vérité se trouve explicitée dans l’Évangile. Jésus exige du bon professeur qu’ « il tire de son trésor du neuf et de l’ancien » (Évangile selon saint Matthieu 13, 52). Le théologien n’est pas un répétiteur ni la vie spirituelle un moule. « Chacun va à Dieu par un chemin virginal », s’exclamait le poète Léon Felipe. Il n’y a pas un seul évangile mais quatre approches différentes du mystère de la vie de Jésus et ces quatre évangiles vont engendrer une multitude de commentaires et d’approfondissement au cours de l’histoire de l’Église qui manifesteront la richesse inépuisable de la Parole de Dieu, transmise de génération en génération sous l’action de l’Esprit Saint. Il y a pluralisme dans la présentation du mystère de Jésus dans les quatre évangiles. Il y a aussi un pluralisme théologique voulu par Dieu dans l’unité de la foi manifesté dans le Credo. Le pape François aime l’image et le modèle du polyèdre pour évoquer la théologie vécue en dialogue et dans l’inculturation.

Femme théologienne

Le pape François a insisté à Naples sur la nécessité de « promouvoir des processus ». La Vierge Marie, femme et mère, a œuvré au développement du salut dans le temps. La femme, de par son corps, a un rapport au temps différent de celui de l’homme. Elle connaît le processus mensuel de sa féminité féconde. Elle sait par son corps que le don d’elle-même à l’homme engagera un processus interne de maternité de neuf mois et pratiquement toute une vie au service de l’enfant. En ce sens, la Vierge Marie représente un modèle d’hospitalité de la Vie de Dieu et de la vie humaine ainsi qu’un paradigme dans l’amour durable, fidèle et absolu.

Marie a préparé la venue du Messie. Elle a impulsé la manifestation publique de Jésus à Cana lors de l’accomplissement du premier miracle dans l’Évangile selon saint Jean. Après l’Ascension de Jésus au Ciel, Marie a préparé la venue de l’Esprit Saint sur les apôtres en priant au Cénacle en communion avec les disciples de Jésus. Maintenant Marie prépare par son intercession la venue du Christ dans nos cœurs et son retour à la fin de l’histoire.

La maternité spirituelle de Marie envers l’Église et l’humanité ne va pas sans douleur. Si la tradition de l’Église parle de la virginité de Marie, avant, pendant et après son accouchement de Jésus, il n’en va pas de même de sa maternité spirituelle qui provoque en elle « des déchirures de l’âme » à comparer aux déchirures de la mise au monde.

Le pape François met en valeur la contribution des femmes à la théologie à Naples et ailleurs dans le monde[3].

La théologie et le discernement

La plénitude de la pensée théologique passe par la sainteté. Il y a une sainteté de l’intelligence de la foi nécessaire aux théologiens. Seule la sainteté conduit au sommet de la théologie par l’intelligence de la foi. Les grands théologiens sont de grands saints. Marie, la toute sainte, la Mère du bel amour, brille au Ciel comme la grande théologienne. Saint Paul enseigne que l’amour donne le discernement : « Et voici ma prière : que votre charité croissant toujours de plus en plus s’épanche en cette vraie science et ce tact affiné qui vous donneront de discerner ce qui est important. » (Épître aux Philippiens, 1, 9-10).

Le théologien reçoit la mission de discerner les signes des temps et d’orienter la marche de l’histoire selon la volonté de Dieu. Les événements appellent interprétation et discernement en vue d’un choix pour que « nos peuples aient la vie en Jésus-Christ » selon le titre de la VeConférence générale de l’épiscopat latino-américain et des Caraïbes au sanctuaire brésilien d’Aparecida au mois de mai 2017 : « Disciples et missionnaires de Jésus-Christ pour que nos peuples aient la vie en lui (Jn 14,6).[4] » Le cardinal argentin Jorge Bergoglio avait reçu la charge de diriger la rédaction finale de cette Conférence latino-américaine. Devenu pape, il enlèvera dans l’exhortation apostolique Evangelii gaudium[5] la conjonction « et » du début du titre pour mieux relier et de manière inséparable le fait d’être disciple et l’envoi en mission : « disciple-missionnaire ». Le disciple de Jésus, l’Envoyé du Père, est automatiquement missionnaire où il n’est pas un vrai disciple. Le missionnaire annonce Jésus comme témoin et disciple selon l’enseignement voulu par le maître qui l’a envoyé. A fortiori, le théologien exerce son ministère d’intelligence de la foi comme disciple-missionnaire, à l’image de la Vierge Marie, premier disciple de Jésus, la première chrétienne, ainsi que la première missionnaire de Jésus qu’elle a porté dans son sein. Lors de la Visitation à sa cousine Élisabeth, Marie porte en elle le Verbe fait chair. La présence de Jésus dans le cœur et dans le sein de Marie fait exulter d’allégresse Jean le Baptiste porté dans le sein de sa mère, Élisabeth. Marie a transmis la Bonne Nouvelle de la venue du Messie, le Verbe fait chair en elle.

La transmission de l’Évangile

Saint Thomas d’Aquin enseigne dans la Somme théologique« Il est plus beau  d’éclairer que de briller seulement, de même est-il plus beau de transmettre aux autres ce qu’on a contemplé que de contempler seulement.[6] » Il y a des « stars », des étoiles qui brillent et des étoiles qui éclairent. Marie est une étoile qui éclaire. Contemplative dans l’action, elle voit Dieu en toute chose et toute chose en Dieu. Disciple-missionnaire de son Fils Jésus, elle transmet la richesse du mystère de Dieu contemplé dans son cœur.

Marie n’a pas fait de prosélytisme. Elle a porté Jésus en elle comme mère physique et en tant que disciple et missionnaire. N’agissant jamais en mère possessive, Marie conduit toujours à Jésus comme le montrent les noces de Cana où elle oriente les serviteurs vers le seul Sauveur : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. » (Jn 2, 5).

Marie a transmis aussi aux apôtres et à la première communauté chrétienne de Jérusalem son expérience de Dieu. Qui d’autre aurait pu renseigner les premiers chrétiens sur l’Annonciation et l’enfance de Jésus hormis sa propre mère, Marie ?

Femme juive, cent pour cent juive, première chrétienne, cent pour cent chrétienne, Marie relie à la manière d’un chaînon l’Ancien et le Nouveau Testament. En devenant chrétienne, elle accomplit sa foi juive. Fille d’Abraham, Marie établit un pont entre la Première Alliance et l’Alliance nouvelle et éternelle de Jésus-Christ. Elle fait passer l’ancienne Loi de Moïse dans la nouvelle Loi de Jésus, celle de l’Esprit Saint, répandu à la Pentecôte.

À la synagogue, Marie exulte de bonheur en entendant la lecture en hébreu de la Loi, des Prophètes et des Psaumes. Le commentaire a lieu en langue araméenne, la langue que Marie parle au quotidien. Elle connaît probablement quelques mots de la langue grecque et de la langue latine. Parler deux langues représente déjà un dialogue intérieur et deux regards différents sur le monde, ce qui facilite l’ouverture à l’altérité et la reconnaissance des valeurs dans l’autre.

Le dialogue inter-religieux et interculturel passe par la connaissance et le pluralisme des langues. Le pape François désire « la rencontre des cultures avec les sources de la Révélation et de la Tradition », en allant dans le sens d’une « Pentecôte théologique ».

Par sa foi à l’Annonciation, Marie accueille le Verbe dans son sein au nom de toute l’humanité. Nouvelle Ève, elle devient cause de salut pour tous les hommes. Marie a accueilli le Fils de Dieu qui prendra chair en elle devenant ainsi la Tête de l’Église qui est le Corps du Christ, le Christ total : Jésus, la Tête, et les baptisés, ses membres. En accueillant le Fils de Dieu, Marie va accueillir aussi l’humanité sauvée par son Fils. Elle sera Mère de Jésus, Mère de Dieu et Mère de l’Église.

Le Concile Vatican II, dans sa constitution Gaudium et spes (n°22), enseigne que par son Incarnation, le Fils de Dieu s’est uni d’une certaine manière à tout homme. Il y aura désormais un commun dénominateur entre la Sainte Trinité et tous les hommes : l’humanité de Jésus le Christ. Par cette humanité partagée, Jésus relie tout homme à l’amour trinitaire du Père, du Fils et de l’Esprit. Le dialogue inter-religieux repose sur ce mystère de l’Incarnation où le Fils de Dieu rejoint et il élève tout homme de bonne volonté à la gloire du Père. Le pape François travaille pour que les hommes se gardent mutuellement « dans l’unique famille humaine ».

Par ailleurs, la prière sur les offrandes de la messe en la fête de l’Annonciation, annonce la naissance de l’Église dans le sein de Marie en ce jour-là : « Daigne accepter, Dieu tout-puissant, les dons offerts par ton Église : elle n’oublie pas qu’elle a commencé le jour où ton Verbe s’est fait chair ; accorde-nous, en cette fête de l’Annonciation, de célébrer avec joie les mystères du Christ. »

Jésus étant la Tête de l’Église, là où se trouve la Tête du Corps tous les membres de l’Église présents et à venir, se trouvent aussi reliés dans l’Incarnation du Fils de Dieu. Si l’Église est née dans le sein de Marie au jour de l’Annonciation, selon la loi « lex orandi, lex credendi », chaque croyant en Jésus a Marie pour Mère spirituelle. Celle qui a donné la vie humaine au Fils de Dieu, intercède comme mère spirituelle pour les membres du Corps de son Fils, l’Église. Bossuet définissait l’Église comme « le Christ répandu et communiqué ». La maternité de Marie est répandue en son Fils pour tous ceux qui l’accueillent avec foi et qui deviennent enfants de Dieu faisant corps avec le Fils unique de Dieu (cf. Jn 1, 12).

Marie agit avec sa tendresse maternelle de manière inclusive en veillant à rassembler tous les hommes. La joie de toute mère est de voir ses enfants réunis dans la paix et l’harmonie. Marie intercède auprès de son Fils Jésus pour que l’humanité se rencontre dans le respect et l’esprit fraternel. Marie prend la défense de chaque enfant de Dieu et elle favorise des liens entre les enfants fort différents les uns les autres dans un esprit d’égale dignité, l’opposé du « syndrome de Babel » commenté par le pape François, qui consiste « à ne pas écouter ce que dit l’autre et de croire que je sais ce que l’autre pense et ce que l’autre dira. »

En bonne éducatrice, Marie, mère de Jésus, cherche à effacer le désir de puissance et de domination, en apportant une culture du dialogue et du respect des différences entre les enfants des hommes. La violence étant le langage de ceux qui n’en ont pas, Marie met en lumière la Parole, le Verbe, le Logos en grec qui désigne la raison et la parole, et le dialogue, « dia-logos », en grec. Le dialogue dans l’Église ne correspond pas à une mode mais à l’être même de Dieu qui est dialogue entre le Père et le Fils dans la communion du Saint-Esprit. En ce sens, le dialogue représente une expérience de Dieu.

Théologie de la miséricorde

Aujourd’hui, dans les sanctuaires consacrés à la Mère de Dieu, Marie écoute, parle et donne la parole. Auprès de Marie, les hommes se sentent écoutés, respectés et aimés. Que de dialogues entre Marie et l’humanité sur les cinq continents depuis des siècles. Les malades, les humiliés et les pauvres ont confiance en Marie. Ils lui parlent et se confient à sa prière. En hébreu, le mot miséricorde provient du mot « utérus », « rehem » ; « rahamin », entrailles. Avoir miséricorde renvoie à la sensibilité intime de la mère devant la souffrance de son enfant. Frémissement et réaction. La Vierge Marie, Mère de miséricorde, frémit et réagit en faveur de ceux qui sont considérés ou plutôt déconsidérés comme des « déchets », les naufragés de l’histoire.

Une théologie de l’hospitalité et du dialogue

Modèle d’hospitalité, Marie exercera sa maternité spirituelle selon la volonté de Jésus sur le Calvaire. Le pape François voit dans le mystère pascal la clé de l’interprétation de l’histoire humaine. La Vierge Marie témoigne de la descente du Fils de Dieu sur la terre et dans les ténèbres du mal et de la mort. Debout, près de la croix, elle a vu son Fils Jésus souffrir et mourir. La croix joue le rôle d’une clé qui permet d’ouvrir les portes du sens de l’histoire. Par la croix de Jésus le Christ, le théologien déverrouille les énigmes des événements. Au lieu d’interpréter l’histoire uniquement en fonction des rapports de force pour aboutir à un résultat matériel, la croix de Jésus interpelle les rapports sociaux et elle illumine le mystère de l’homme en dévoilant les pensées secrètes des hommes (cf. Évangile selon saint Luc 2, 35).

Si les évangiles ne rapportent pas d’apparition de Jésus ressuscité à sa mère, de nombreux saints et théologiens y croient dans une logique de l’amour filial : saint Vincent Ferrier O.P., saint Ignace de Loyola, le serviteur de Dieu, le père Marie-Joseph Lagrange, le saint pape Jean-Paul II …

Marie est témoin de la descente et de l’Ascension de Jésus. Mère de miséricorde, comme le chante le Salve Regina, Marie frémit dans son sein devant les souffrances de l’humanité. Théologienne de la miséricorde et de la proximité, Marie est la femme la plus connue et la plus aimée au monde et dans l’histoire des hommes. Fille d’Israël, pays baigné par la mer Méditerranée, elle a chanté la miséricorde de Dieu dans le Magnificat.

Le pape François parle de la Méditerranée comme « un pont –historique, géographique, humain –entre l’Europe, l’Afrique et l’Asie. Il cite Giorgio La Pira, ancien maire de Florence (Italie), laïc dominicain, qui proposait d’installer « une grande tente de paix », à l’image des tentes de la rencontre et de la justice décrites dans l’Ancien Testament. Il s’agit de se rassembler « sous la même tente », un tente commune, à l’image de la terre, appelée par François « la maison commune ». Le pape voit aussi dans la Méditerranée « la matrice historique, géographique et culturelle » de l’annonce du mystère de la mort et de la résurrection de Jésus ainsi que « le laboratoire » de la recherche théologique.

Notre-Dame des réfugiés

Marie et Joseph ont connu la fuite en Égypte (cf. Évangile selon saint Matthieu 2, 13-16). Réfugiés politiques, s’éloignant de la menace du roi Hérode pour protéger la vie de l’enfant Jésus, ils ont souffert dans leur exil. Ils savent ce que c’est que d’être regardés comme des inconnus qui dérangent. Aussi pouvons-nous invoquer la Vierge Marie sous le vocable de « Notre-Dame des réfugiés » et saint Joseph, comme le patron des réfugiés.

Le pape fait appel à la création de nouveaux récits pour renforcer les liens entre les populations de la Méditerranée, caractérisées par le métissage et l’ouverture culturelle à l’autre. Pourquoi ne pas actualiser les paraboles de l’Évangile dans ce souci de renouveler les références littéraires symboliques de la Méditerranée ?  La parabole du bon Samaritain[7], étranger détesté par les autorités de la capitale Jérusalem, qui prend soin d’une victime des bandits à la différence des gens religieux qui ferment les yeux sur ce malheur, pourrait illustrer la réalité des réfugiés étrangers dans la Méditerranée. Des gens bien-pensants et religieux peuvent faire semblant de ne pas voir leur souffrance et accorder la priorité au bien-être de leur famille ou de leur nation. Le saint pape Jean XXIII écrivait déjà avant la Seconde Guerre mondiale dans son journal spirituel : « Les deux grands maux qui intoxiquent aujourd’hui le monde sont le laïcisme et le nationalisme. (…) Au second les ecclésiastiques eux-mêmes apportent leur concours. »[8]

En Méditerranée, quand la tempête soulève le vent et les vagues qui menacent de renverser les bateaux, les marins se tournent vers la Vierge Marie. Un grand nombre de chapelles et d’ex-voto témoignent des grâces reçues.

Puisse l’intercession de la Vierge Marie, fille bien-aimée du Père, épouse du Saint-Esprit et mère de Jésus, le Fils de Dieu, obtenir à l’Église le renouvellement de la théologie et l’envoi des théologiens, hommes et femmes, ayant soif de vérité, de dialogue et de paix.

Saint-Denis (La Réunion. France), le 26 juin 2019.

 

 

 

[1]Discours pour l’inauguration de l’École biblique de Jérusalem, le 15 novembre 1890. Le père Lagrange au service de la Bible. Souvenirs personnels,Paris, Cerf, 1967, p. 104.

[2]Pape François. Discours à la Communauté de l’Université Pontificale Grégorienne et aux Membres de l’Institut Biblique et de l’Institut Oriental Pontifical, 10 avril 2014, AAS 106 (2014), 374.

[3]Voir l’exemple en France des sœurs dominicaines de la Présentation de Tours : https://precheraufeminin.com/

[4]VeConférence générale de l’épiscopat latino-américain et des Caraïbes. Disciples et missionnaires de Jésus-Christ pour que nos peuples aient la vie en lui. Aparecida, Paris, Cerf, 2008.

[5]Pape François, La joie de l’Évangile, exhortation apostolique Evangelii gaudium,24 novembre 2013.

[6]Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, IIa-IIae, q. 188, art. 6.

[7]Cf. Manuel Rivero. Pour une théologie de la communication.Paris. Éditions Parole et silence. 2015. P. 29s. L’actualisation des paraboles.

[8]Jean XXIII. Journal de l’âme, écrits spirituels. Paris. Éditions du Cerf. 1965. P. 407.

 

Écho de notre page Facebook : juin 2019

28 juin 2019
Fête du Sacré-Cœur de Jésus
C’est le 27 juin [1924, à Jérusalem] « en la fête du Sacré-Cœur de Jésus », que le père Lagrange a écrit cette touchante dédicace de son Évangile selon saint Jeanqu’il avait terminé :

Je prie mes collaborateurs de l’École biblique d’agréer l’hommage cordial et fraternel de cet ouvrage, en souvenir d’une vie dominicaine commune qui nous fut toujours douce. J’avais pensé rappeler à ce propos l’idéal des Pythagoriciens… Mais sait-on bien de quel Dieu ils parlaient ? Demandons tout simplement à Notre Seigneur la grâce de mettre en pratique son commandement promulgué par saint Jean : Aimons-nous les uns les autres. (extrait de Le père Marie-Joseph Lagrange. Sa vie et son œuvre par le père Louis-Hugues Vincent, p. 482, Parole et Silence, 2013.)

Photo : Mosaïque du Sacré-Coeur de Jésus. Cathédrale de Saint-Louis, Missouri, E.U.

24 juin 2019
Nativité de saint Jean Baptiste par le père Lagrange

Zacharie s’adresse enfin à ce petit enfant qui lui a été donné et qui sera le Prophète du Très-Haut, bien plus, qui préparera ses voies. Les voies de Dieu ce sont les voies du Messie. Jean devant précéder celui qui à la fois sera l’envoyé de Dieu, et agira comme Dieu lui-même. Désormais l’espérance de la délivrance politique s’efface devant une lumière nouvelle, comme si les vrais ennemis n’étaient autres que les offenses à Dieu. Ce sera le ministère de Jean d’annoncer le salut par la rémission des péchés, en suite de la miséricorde du Cœur de Dieu, qui fera apparaître parmi les hommes un astre levé dans les hauteurs. Les hommes, même au pays d’Israël, sont assis dans des ténèbres épaisses, attendant la lumière du jour pour se mettre en marche. Le Messie leur indiquera le bon chemin, celui de la paix, où ils trouveront le salut. Ainsi le cantique [Benedictus (Luc 1, 67-80)] se termine comme il avait commencé : le Fils de David apparaît sous les traits d’un être divin, dont Jean ne sera que le précurseur. En attendant qu’il fût manifesté à Israël, l’enfant croissait, et la force de l’Esprit s’emparait de lui de plus en plus. Elle le poussa au désert pour le préparer à sa mission. (extrait deL’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, p. Artège-Lethielleux, 2017.)

Photo d’une fresque montrant saint Jean Baptiste présenté à Zacharie par Spinello Aretino (14e)

 

Dimanche 23 juin 2019
Fête-Dieu, Fête du Corps et du Sang du Christ, appelée aussi Fête du Saint Sacrement.

« Ô Mère de Jésus, préparez-moi vous-même à la très douce fête de son Corps et de son Sang, mon bien, ma nourriture, mon tout.

(Marie-Joseph Lagrange, o.p., Journal spirituel, p. 176, Cerf, 2014.)

Photo EBAF (un document précieux) : Au début du XXe siècle, le vénérable père Lagrange présidait la procession solennelle du Saint Sacrement dans le parc de la basilique Saint-Étienne à Jérusalem.

 

16 juin 2019
La révélation de la Trinité des personnes divines par Marie-Joseph Lagrange o.p.
« Dans l’ignorance où nous sommes de Dieu, il nous est doux de savoir qu’il est Père, par conséquent infiniment tendre et indulgent ; Fils incarné pour nous, vivant en nous pour nous faire participer à ce qu’il tient du Père ; Esprit vivifiant et sanctificateur, principe de charité. Oh ! que cette révélation de la Trinité des personnes divines nous est utile, et qu’il en faut remercier Notre-Seigneur ! » (Journal spirituel, pp. 294-295, Cerf, 2014.)

Photo : Le mystère de la Trinité divine vue par Marc Chagall (1952-1953) Musée national Marc Chagall, Nice, Alpes Maritimes.

15 juin 2019

La Vierge de Miséricorde (détail) par Louis Brea, XVe-XVIe siècle. Chapelle de la Miséricorde. Nice (Alpes-Maritimes)

 

Bienheureuse Vierge Marie
Le père Lagrange, un grand serviteur de Marie, tellement grand et qui l’aimait, Elle, « la Vierge Fidèle », comme il disait, d’une affection si tendre, que l’on ose à peine – et en s’excusant – essayer de la raconter.
Le secret de sa vie, c’était ce grand amour pour « Marie Immaculée, Reine du Rosaire » : Le Père cachait jalousement ce trésor semblable à ces fleurs délicates et si belles que l’on craint de les cueillir en bouquet de peur qu’elles ne se fanent ! (Fr. Marie-Reginald Loew, disciple du père Lagrange, extrait de la Revue du Rosaire, octobre-novembre 1939.)

 

10 juin 2019 

Bonjour, la messe pour la cause de béatification du père Lagrange et aux intentions des membres de l’Association des amis du père Lagrange sera célébrée en la cathédrale de Saint-Denis (La Réunion. France), ce lundi de Pentecôte. Viens Esprit Saint sur l’Eglise et sur le monde! Fr. Manuel.

10 juin 2019
Lundi de Pentecôte

Marie, Mère de l’Église.
Louis Brea (1450-1525), église Ste Marie-Madeleine, Biot (Alpes-Maritimes)

Mémoire de la Bienheureuse Vierge Marie, Mère de l’Église suivant la volonté du pape François depuis 2018.

 

Quelle heureuse coïncidence qu’en ce jour, dédié à « Marie, Mère de l’Église », et comme chaque mois le 10, jour-anniversaire du départ au Ciel du père Lagrange, nous pouvons confier à l’intercession de la Mère du Christ et Mère de l’Église, tant vénérée par le père Marie-Joseph Lagrange, la cause de sa glorification.

 

 

 

 

 

Sur le sens de cette journée créée en l’honneur de Sainte Marie, Mère de l’Église, Une-nouvelle-messe-mariale-pour-le-lundi-de-Pentecôte-2018.pdf Continue reading ‘Écho de notre page Facebook : juin 2019’ »

13 mai 2019 : Fête de Notre-Dame de Fatima par fr. Manuel Rivero o.p.

Souvenons de notre saint pape Jean-Paul II, victime d’un grave attentat le 13 mai 1981, il demanda à placer la balle qui avait traversé son corps dans la couronne de Notre-Dame-de-Fatima, en signe de reconnaissance.
Quel est le message de Fatima ?
Les apparitions de la Vierge ont été précédées des apparitions d’un ange qui apparut à trois petits bergers : Lucie, François et Jacinthe, qui leur fit répéter cette prière : « Mon Dieu, je crois en vous, je vous adore, j’espère en vous, et je vous aime. Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas. »
Il leur demanda aussi d’offrir au Seigneur des prières et des sacrifices tout en évoquant la miséricorde des cœurs de Jésus et de Marie à leur égard.
Le 13 mai 1917, c’est Notre-Dame qui leur apparaît, vêtue de blanc, plus brillante que le soleil. Elle leur demande de se rendre à Cova da Iria six mois de suite, le 13 de chaque mois, à la même heure. Notre-Dame les exhorte à prier : « Réciter le chapelet tous les jours pour obtenir la paix pour le monde et la fin de la guerre. »
Le 13 juin 1917, Notre-Dame révèle aux enfants que Jésus veut établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Ce Cœur de Marie est entouré d’épines, symbole des péchés des hommes.
Le 13 juillet 1917, Notre-Dame demande la consécration de la Russie à son Cœur Immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis. Elle donne aussi une nouvelle prière à ajouter dans le chapelet : « Ô mon Jésus, pardonnez-nous, préservez-nous du feu de l’enfer ; emmenez au Paradis toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus besoin. »
Le 13 octobre 1917, un samedi, Notre-Dame demande la construction d’une chapelle en son honneur en disant : « Je suis Notre-Dame du Rosaire. » Elle veut que le chapelet soit prié tous les jours. Ce jour-là eut lieu le miracle du soleil annoncé quatre mois auparavant. Le soleil tourna trois fois sur lui-même lançant de tous côtés des faisceaux de lumière.
Quels enseignements pouvons-nous retenir cent ans après ces apparitions ?
Tout d’abord, Notre-Dame nous renvoie à la conversion et à la prière pour les pécheurs. Jésus a intercédé sur la croix pour les pécheurs. Saint Dominique s’exclamait dans sa prière : « Seigneur, que vont devenir les pécheurs ? » Les enfants de Fatima vont prier le chapelet pour le pardon des pécheurs. Les apparitions mariales n’apportent rien de nouveau à la Révélation divine. Dieu le Père nous a tout dit dans son Fils Jésus. La Révélation est close et le salut nous a été acquis par la mort et la résurrection de Jésus. Nous n’avons pas à courir derrière de nouvelles révélations comme si l’Évangile ne suffisait pas. Ce serait un manque de foi et un péché.
Encore une fois, comme à Lourdes en 1858, la Vierge Marie a choisi des enfants pauvres comme témoins et missionnaires. Les apparitions de Fatima nous font prendre conscience de l’importance des enfants, disciples-missionnaires de Jésus-Christ. Les parents disent souvent : « Nous voulons que nos enfants ne manquent de rien ». Mais ils oublient parfois l’essentiel : la transmission de l’Évangile de Jésus, la prière et le souci des pécheurs et des pauvres. Les familles sont appelées à vivre une conversion dans leurs mentalités, leurs propos et leurs pratiques. Les enfants sont aimés de Dieu, choisis par la Vierge et envoyés comme des missionnaires en donnant un témoignage de prière et de sacrifice.
D’ailleurs, l’idée de sacrifice a pratiquement disparu de l’éducation des enfants. Les pédagogies sont orientées vers les activités ludiques et variées alors que l’existence humaine demeure marquée par la souffrance et le manque. L’enfant ne pourra pas faire face aux épreuves de la vie sans esprit de foi, de prière et de sacrifice.
Quand nous lisons la vie des saints, une flamme d’amour divine jaillit dans nos cœurs qui nous rend heureux tout en restant tenaillés par les douleurs et contrariétés du quotidien. Dans la vie des saints, les sacrifices rythment les jours et les nuits. Les enfants de Fatima se privaient de ce qu’ils chérissaient non pas par masochisme mais pour l’amour de Dieu et des pécheurs, pour raboter leur ego insolant et se donner au service des pauvres. Ils se privaient de manger des figues et des raisins appétissants. Surtout, ils portaient dans la foi moqueries, mépris, punitions, prison et maladie. François est mort à l’âge de 10 ans, le 4 avril 1919. Jacinthe est partie vers le père le 20 février 1920 à l’âge de neuf ans.
Puissions-nous ouvrir notre cœur aux grâces que Dieu veut répandre sur son Église.
Puissions-nous favoriser la catéchèse et la prière du chapelet des enfants en leur faisant découvrir Jésus avec sa Mère, la Vierge Marie, au rythme paisible des grains du chapelet, qui, à l’image de l’arrosage goutte à goutte de nos jardins, vient imbiber nos âmes de l’eau vive de l’Esprit-Saint !
Le père Lagrange, dominicain, fondateur de l’École biblique de Jérusalem, disait un jour à l’un de ces frères : « Le Rosaire, quand on s’en occupe, il réussit toujours ». Occupons-nous du Rosaire des enfants de manière à ce qu’ils réussissent non seulement dans la vie mais surtout leur vie, une vie de foi et d’amour.
Fr. Manuel Rivero O.P.
Cathédrale de Saint-Denis (La Réunion).

Photo : Vierge à l’Enfant. Toscane. Italie.