La Vierge Marie, théologienne par fr. Manuel Rivero, O.P.

28 juin 2019

Belle fête du Sacré-Cœur de Jésus et mémoire de saint Irénée de Lyon, le grand théologien du IIe siècle. 39e anniversaire aussi de mon ordination presbytérale au couvent de Toulouse (28 juin 1980). Ci-joint un article sur la Vierge Marie, théologienne. Avec ma prière. Fr. Manuel.

 

La Vierge Marie, théologienne

Le pape François a participé le 21 juin 2019 à la Rencontre théologique organisée par la Faculté pontificale de théologie de l’Italie méridionale à Naples qui avait pour thème « La théologie après Veritatis gaudium dans le contexte de la Méditerranée ».

Dans son exposé sur l’exercice de la théologie, le pape François n’a pas évoqué la figure de la Vierge Marie, toujours présente dans sa pensée et dans sa prière.

Je voudrais ici mettre en parallèle l’enseignement du pape avec la Vierge Marie, qui occupe dans l’Église la première place parmi les fidèles sauvés par son Fils, Jésus le Christ. En effet, les prières eucharistiques placent la bienheureuse Vierge Marie, Mère de Dieu, avant les apôtres, les martyrs, les docteurs et les saints. Elle est « la toute sainte », habitée par le Saint-Esprit.

La grandeur de Marie trouve sa source dans sa foi en la Parole de Dieu. Aussi est-elle appelée bienheureuse. La foi de Marie est la foi de l’Église. Par son Immaculée Conception, mystère d’absence de péché et de plénitude de grâce au commencement de son existence dans le sein de sa mère que la tradition appelle Anne, épouse de Joachim, Marie jouit d’une intelligence exceptionnelle de la foi en la Parole de Dieu. Sanctifiée par le Saint-Esprit, Marie vit de la foi dans le Verbe de Dieu à travers les questions et l’abandon.

La théologie suppose le déploiement de la raison pour répondre aux questions dans la lumière de la foi en Dieu. Puisqu’il s’agit du mystère de Dieu, la théologie ne peut s’exercer que dans la foi. Le théologien cherche à comprendre et à rendre compte de l’espérance qui est en lui. La foi, grâce de Dieu et tâche humaine, fait entrer dans le cœur de Dieu par la médiation et l’étude de la Révélation divine transmise dans les Saintes Écritures.

La théologie, la foi et la prière

Seul Dieu peut faire connaître Dieu. Seul Dieu parle bien de Dieu. Le théologien se met à l’écoute de la Parole de Dieu dans un climat de prière contemplative en implorant la lumière de l’Esprit Saint.

Le pape souligne que « l’on ne peut faire de la théologie qu’à « genoux ». Les évangélistes aussi bien que l’art chrétien présentent Marie en prière.

Dans son cheminement spirituel de foi, Marie, femme intelligente et libre, s’est posée des questions : « Comment cela se fera-t-il puisque je ne connais point d’homme ? » (Lc 1,34), à l’Annonciation ; « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois ! ton père et moi, nous te cherchons angoissés. » (Lc 2,48), lors du recouvrement de Jésus au Temple de Jérusalem. Et saint Luc, l’évangéliste de préciser que Marie et Joseph ne comprirent pas la réponse de Jésus : « Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père ? » (Lc 2, 49).

Marie n’a pas tout compris à l’avance. Elle a avancé dans la foi, avec la lumière et l’ombre propres à la démarche de foi. La foi biblique renvoie à la Parole de Dieu. Croire, c’est adhérer à la Parole révélée qui est lumière mais les prophéties comportent aussi leur part d’obscurité. Aussi des mystiques comme saint Jean de la Croix parlent-ils de la nuit de la foi et des exégètes comme le père Lagrange évoquent l’obscurité du texte biblique.

Le théologien se pose des questions sur Dieu et il pose des questions sur Dieu aux autres. Saint Thomas d’Aquin (+1274), le grand maître de la théologie, commence chaque article de la Somme théologique par une question. Et il n’a pas peur des questions. Tout au contraire, la joie du théologien se trouve dans le dialogue et le débat contradictoire à la recherche de la Vérité, qui étant une personne, le Christ Jésus, ne saurait rester enfermée dans des définitions conceptuelles ou des mots : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6).

Le bienheureux Pierre Claverie O.P., évêque martyr en Algérie, affirmait : « J’ai besoin de la vérité des autres. » Loin de tout relativisme ou scepticisme, il partageait son expérience de Dieu et des hommes.

À l’exemple de Marie, le théologien se pose des questions et il cherche des réponses en mettant en œuvre la lumière de la raison éclairée par la grâce de la foi.

La théologie, les processus et le progrès dans la connaissance de la Vérité

Tout au long de son existence, Marie a approfondi le mystère de la foi, gardant les paroles et les événements de la vie de son Fils Jésus dans son cœur » (cf. Lc 2,51). Marie a progressé dans la foi en son Fils, jour après jour dans la vie ordinaire de Nazareth. Sur le Calvaire aussi, quand une épée a transpercé son âme (cf. Lc 2, 35), dans la communion de la prière au Cénacle au jour de la Pentecôte, au cœur de la communauté apostolique réunie au nom de Jésus dans l’attente de la descente de l’Esprit Saint.

Marie a grandi dans la connaissance de Dieu auprès de son Fils et au milieu de l’Église. La Constitution Lumen gentium du Concile Vatican II au chapitre VIII a tenu à situer la Vierge Marie dans le mystère du Christ et de l’Église. Les théologiens chrétiens s’interrogent sur Dieu « dans le mystère du Christ et de l’Église ».

La théologie vit toujours en chemin puisque le Christ Jésus est Chemin, Vérité et Vie. Marie-Joseph Lagrange a toujours été habité par une vision dynamique et progressive de l’histoire et de l’exégèse. Pour lui, la vérité était « une vérité en marche ». Dans son discours pour l’inauguration de l’École biblique de Jérusalem, il avait déjà entrevu le beau chemin à parcourir : « Dieu a donné dans la Bible un travail interminable à l’intelligence humaine et, remarquez-le bien, il lui a ouvert un champ indéfini de progrès dans la vérité[1]. » À la suite de saint Vincent de Lérins, le père Lagrange tenait à l’idée du développement de la connaissance de Dieu qui s’exprime dans les dogmes. Il ne s’agit pas d’un changement mais d’un progrès à la manière de la maturation du grain de blé qui devient épi ou de l’enfant qui parvient à l’âge adulte.

Dans la Constitution apostolique « Veritatis Gaudium » sur les universités et les facultés ecclésiastiques, en date du 27 décembre 2017, le pape François a cité la pensée de saint Vincent de Lérins : « Le théologien qui se satisfait de sa pensée complète et achevée est un médiocre. Le bon théologien et philosophe a une pensée ouverte, c’est-à-dire incomplète, toujours ouverte au maiusde Dieu et de la vérité, toujours en développement, selon la loi que saint Vincent de Lérins décrit ainsi : »annis consolidetur, dilatetur tempore, sublimetur aetate » (Commonitorium primum, 23 ; PL 50,668)[2] ». » La vérité se consolide avec les années, elle se développe dans le temps, devenant plus profonde avec l’âge.

D’une manière poétique, Juan Ramón Jiménez, Prix Nobel de littérature en 1956, reliait ainsi l’ancien et le nouveau : « Des racines et des ailes. Mais que les ailes s’enracinent et que les racines volent. » Cette découverte infinie de la vérité se trouve explicitée dans l’Évangile. Jésus exige du bon professeur qu’ « il tire de son trésor du neuf et de l’ancien » (Évangile selon saint Matthieu 13, 52). Le théologien n’est pas un répétiteur ni la vie spirituelle un moule. « Chacun va à Dieu par un chemin virginal », s’exclamait le poète Léon Felipe. Il n’y a pas un seul évangile mais quatre approches différentes du mystère de la vie de Jésus et ces quatre évangiles vont engendrer une multitude de commentaires et d’approfondissement au cours de l’histoire de l’Église qui manifesteront la richesse inépuisable de la Parole de Dieu, transmise de génération en génération sous l’action de l’Esprit Saint. Il y a pluralisme dans la présentation du mystère de Jésus dans les quatre évangiles. Il y a aussi un pluralisme théologique voulu par Dieu dans l’unité de la foi manifesté dans le Credo. Le pape François aime l’image et le modèle du polyèdre pour évoquer la théologie vécue en dialogue et dans l’inculturation.

Femme théologienne

Le pape François a insisté à Naples sur la nécessité de « promouvoir des processus ». La Vierge Marie, femme et mère, a œuvré au développement du salut dans le temps. La femme, de par son corps, a un rapport au temps différent de celui de l’homme. Elle connaît le processus mensuel de sa féminité féconde. Elle sait par son corps que le don d’elle-même à l’homme engagera un processus interne de maternité de neuf mois et pratiquement toute une vie au service de l’enfant. En ce sens, la Vierge Marie représente un modèle d’hospitalité de la Vie de Dieu et de la vie humaine ainsi qu’un paradigme dans l’amour durable, fidèle et absolu.

Marie a préparé la venue du Messie. Elle a impulsé la manifestation publique de Jésus à Cana lors de l’accomplissement du premier miracle dans l’Évangile selon saint Jean. Après l’Ascension de Jésus au Ciel, Marie a préparé la venue de l’Esprit Saint sur les apôtres en priant au Cénacle en communion avec les disciples de Jésus. Maintenant Marie prépare par son intercession la venue du Christ dans nos cœurs et son retour à la fin de l’histoire.

La maternité spirituelle de Marie envers l’Église et l’humanité ne va pas sans douleur. Si la tradition de l’Église parle de la virginité de Marie, avant, pendant et après son accouchement de Jésus, il n’en va pas de même de sa maternité spirituelle qui provoque en elle « des déchirures de l’âme » à comparer aux déchirures de la mise au monde.

Le pape François met en valeur la contribution des femmes à la théologie à Naples et ailleurs dans le monde[3].

La théologie et le discernement

La plénitude de la pensée théologique passe par la sainteté. Il y a une sainteté de l’intelligence de la foi nécessaire aux théologiens. Seule la sainteté conduit au sommet de la théologie par l’intelligence de la foi. Les grands théologiens sont de grands saints. Marie, la toute sainte, la Mère du bel amour, brille au Ciel comme la grande théologienne. Saint Paul enseigne que l’amour donne le discernement : « Et voici ma prière : que votre charité croissant toujours de plus en plus s’épanche en cette vraie science et ce tact affiné qui vous donneront de discerner ce qui est important. » (Épître aux Philippiens, 1, 9-10).

Le théologien reçoit la mission de discerner les signes des temps et d’orienter la marche de l’histoire selon la volonté de Dieu. Les événements appellent interprétation et discernement en vue d’un choix pour que « nos peuples aient la vie en Jésus-Christ » selon le titre de la VeConférence générale de l’épiscopat latino-américain et des Caraïbes au sanctuaire brésilien d’Aparecida au mois de mai 2017 : « Disciples et missionnaires de Jésus-Christ pour que nos peuples aient la vie en lui (Jn 14,6).[4] » Le cardinal argentin Jorge Bergoglio avait reçu la charge de diriger la rédaction finale de cette Conférence latino-américaine. Devenu pape, il enlèvera dans l’exhortation apostolique Evangelii gaudium[5] la conjonction « et » du début du titre pour mieux relier et de manière inséparable le fait d’être disciple et l’envoi en mission : « disciple-missionnaire ». Le disciple de Jésus, l’Envoyé du Père, est automatiquement missionnaire où il n’est pas un vrai disciple. Le missionnaire annonce Jésus comme témoin et disciple selon l’enseignement voulu par le maître qui l’a envoyé. A fortiori, le théologien exerce son ministère d’intelligence de la foi comme disciple-missionnaire, à l’image de la Vierge Marie, premier disciple de Jésus, la première chrétienne, ainsi que la première missionnaire de Jésus qu’elle a porté dans son sein. Lors de la Visitation à sa cousine Élisabeth, Marie porte en elle le Verbe fait chair. La présence de Jésus dans le cœur et dans le sein de Marie fait exulter d’allégresse Jean le Baptiste porté dans le sein de sa mère, Élisabeth. Marie a transmis la Bonne Nouvelle de la venue du Messie, le Verbe fait chair en elle.

La transmission de l’Évangile

Saint Thomas d’Aquin enseigne dans la Somme théologique« Il est plus beau  d’éclairer que de briller seulement, de même est-il plus beau de transmettre aux autres ce qu’on a contemplé que de contempler seulement.[6] » Il y a des « stars », des étoiles qui brillent et des étoiles qui éclairent. Marie est une étoile qui éclaire. Contemplative dans l’action, elle voit Dieu en toute chose et toute chose en Dieu. Disciple-missionnaire de son Fils Jésus, elle transmet la richesse du mystère de Dieu contemplé dans son cœur.

Marie n’a pas fait de prosélytisme. Elle a porté Jésus en elle comme mère physique et en tant que disciple et missionnaire. N’agissant jamais en mère possessive, Marie conduit toujours à Jésus comme le montrent les noces de Cana où elle oriente les serviteurs vers le seul Sauveur : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. » (Jn 2, 5).

Marie a transmis aussi aux apôtres et à la première communauté chrétienne de Jérusalem son expérience de Dieu. Qui d’autre aurait pu renseigner les premiers chrétiens sur l’Annonciation et l’enfance de Jésus hormis sa propre mère, Marie ?

Femme juive, cent pour cent juive, première chrétienne, cent pour cent chrétienne, Marie relie à la manière d’un chaînon l’Ancien et le Nouveau Testament. En devenant chrétienne, elle accomplit sa foi juive. Fille d’Abraham, Marie établit un pont entre la Première Alliance et l’Alliance nouvelle et éternelle de Jésus-Christ. Elle fait passer l’ancienne Loi de Moïse dans la nouvelle Loi de Jésus, celle de l’Esprit Saint, répandu à la Pentecôte.

À la synagogue, Marie exulte de bonheur en entendant la lecture en hébreu de la Loi, des Prophètes et des Psaumes. Le commentaire a lieu en langue araméenne, la langue que Marie parle au quotidien. Elle connaît probablement quelques mots de la langue grecque et de la langue latine. Parler deux langues représente déjà un dialogue intérieur et deux regards différents sur le monde, ce qui facilite l’ouverture à l’altérité et la reconnaissance des valeurs dans l’autre.

Le dialogue inter-religieux et interculturel passe par la connaissance et le pluralisme des langues. Le pape François désire « la rencontre des cultures avec les sources de la Révélation et de la Tradition », en allant dans le sens d’une « Pentecôte théologique ».

Par sa foi à l’Annonciation, Marie accueille le Verbe dans son sein au nom de toute l’humanité. Nouvelle Ève, elle devient cause de salut pour tous les hommes. Marie a accueilli le Fils de Dieu qui prendra chair en elle devenant ainsi la Tête de l’Église qui est le Corps du Christ, le Christ total : Jésus, la Tête, et les baptisés, ses membres. En accueillant le Fils de Dieu, Marie va accueillir aussi l’humanité sauvée par son Fils. Elle sera Mère de Jésus, Mère de Dieu et Mère de l’Église.

Le Concile Vatican II, dans sa constitution Gaudium et spes (n°22), enseigne que par son Incarnation, le Fils de Dieu s’est uni d’une certaine manière à tout homme. Il y aura désormais un commun dénominateur entre la Sainte Trinité et tous les hommes : l’humanité de Jésus le Christ. Par cette humanité partagée, Jésus relie tout homme à l’amour trinitaire du Père, du Fils et de l’Esprit. Le dialogue inter-religieux repose sur ce mystère de l’Incarnation où le Fils de Dieu rejoint et il élève tout homme de bonne volonté à la gloire du Père. Le pape François travaille pour que les hommes se gardent mutuellement « dans l’unique famille humaine ».

Par ailleurs, la prière sur les offrandes de la messe en la fête de l’Annonciation, annonce la naissance de l’Église dans le sein de Marie en ce jour-là : « Daigne accepter, Dieu tout-puissant, les dons offerts par ton Église : elle n’oublie pas qu’elle a commencé le jour où ton Verbe s’est fait chair ; accorde-nous, en cette fête de l’Annonciation, de célébrer avec joie les mystères du Christ. »

Jésus étant la Tête de l’Église, là où se trouve la Tête du Corps tous les membres de l’Église présents et à venir, se trouvent aussi reliés dans l’Incarnation du Fils de Dieu. Si l’Église est née dans le sein de Marie au jour de l’Annonciation, selon la loi « lex orandi, lex credendi », chaque croyant en Jésus a Marie pour Mère spirituelle. Celle qui a donné la vie humaine au Fils de Dieu, intercède comme mère spirituelle pour les membres du Corps de son Fils, l’Église. Bossuet définissait l’Église comme « le Christ répandu et communiqué ». La maternité de Marie est répandue en son Fils pour tous ceux qui l’accueillent avec foi et qui deviennent enfants de Dieu faisant corps avec le Fils unique de Dieu (cf. Jn 1, 12).

Marie agit avec sa tendresse maternelle de manière inclusive en veillant à rassembler tous les hommes. La joie de toute mère est de voir ses enfants réunis dans la paix et l’harmonie. Marie intercède auprès de son Fils Jésus pour que l’humanité se rencontre dans le respect et l’esprit fraternel. Marie prend la défense de chaque enfant de Dieu et elle favorise des liens entre les enfants fort différents les uns les autres dans un esprit d’égale dignité, l’opposé du « syndrome de Babel » commenté par le pape François, qui consiste « à ne pas écouter ce que dit l’autre et de croire que je sais ce que l’autre pense et ce que l’autre dira. »

En bonne éducatrice, Marie, mère de Jésus, cherche à effacer le désir de puissance et de domination, en apportant une culture du dialogue et du respect des différences entre les enfants des hommes. La violence étant le langage de ceux qui n’en ont pas, Marie met en lumière la Parole, le Verbe, le Logos en grec qui désigne la raison et la parole, et le dialogue, « dia-logos », en grec. Le dialogue dans l’Église ne correspond pas à une mode mais à l’être même de Dieu qui est dialogue entre le Père et le Fils dans la communion du Saint-Esprit. En ce sens, le dialogue représente une expérience de Dieu.

Théologie de la miséricorde

Aujourd’hui, dans les sanctuaires consacrés à la Mère de Dieu, Marie écoute, parle et donne la parole. Auprès de Marie, les hommes se sentent écoutés, respectés et aimés. Que de dialogues entre Marie et l’humanité sur les cinq continents depuis des siècles. Les malades, les humiliés et les pauvres ont confiance en Marie. Ils lui parlent et se confient à sa prière. En hébreu, le mot miséricorde provient du mot « utérus », « rehem » ; « rahamin », entrailles. Avoir miséricorde renvoie à la sensibilité intime de la mère devant la souffrance de son enfant. Frémissement et réaction. La Vierge Marie, Mère de miséricorde, frémit et réagit en faveur de ceux qui sont considérés ou plutôt déconsidérés comme des « déchets », les naufragés de l’histoire.

Une théologie de l’hospitalité et du dialogue

Modèle d’hospitalité, Marie exercera sa maternité spirituelle selon la volonté de Jésus sur le Calvaire. Le pape François voit dans le mystère pascal la clé de l’interprétation de l’histoire humaine. La Vierge Marie témoigne de la descente du Fils de Dieu sur la terre et dans les ténèbres du mal et de la mort. Debout, près de la croix, elle a vu son Fils Jésus souffrir et mourir. La croix joue le rôle d’une clé qui permet d’ouvrir les portes du sens de l’histoire. Par la croix de Jésus le Christ, le théologien déverrouille les énigmes des événements. Au lieu d’interpréter l’histoire uniquement en fonction des rapports de force pour aboutir à un résultat matériel, la croix de Jésus interpelle les rapports sociaux et elle illumine le mystère de l’homme en dévoilant les pensées secrètes des hommes (cf. Évangile selon saint Luc 2, 35).

Si les évangiles ne rapportent pas d’apparition de Jésus ressuscité à sa mère, de nombreux saints et théologiens y croient dans une logique de l’amour filial : saint Vincent Ferrier O.P., saint Ignace de Loyola, le serviteur de Dieu, le père Marie-Joseph Lagrange, le saint pape Jean-Paul II …

Marie est témoin de la descente et de l’Ascension de Jésus. Mère de miséricorde, comme le chante le Salve Regina, Marie frémit dans son sein devant les souffrances de l’humanité. Théologienne de la miséricorde et de la proximité, Marie est la femme la plus connue et la plus aimée au monde et dans l’histoire des hommes. Fille d’Israël, pays baigné par la mer Méditerranée, elle a chanté la miséricorde de Dieu dans le Magnificat.

Le pape François parle de la Méditerranée comme « un pont –historique, géographique, humain –entre l’Europe, l’Afrique et l’Asie. Il cite Giorgio La Pira, ancien maire de Florence (Italie), laïc dominicain, qui proposait d’installer « une grande tente de paix », à l’image des tentes de la rencontre et de la justice décrites dans l’Ancien Testament. Il s’agit de se rassembler « sous la même tente », un tente commune, à l’image de la terre, appelée par François « la maison commune ». Le pape voit aussi dans la Méditerranée « la matrice historique, géographique et culturelle » de l’annonce du mystère de la mort et de la résurrection de Jésus ainsi que « le laboratoire » de la recherche théologique.

Notre-Dame des réfugiés

Marie et Joseph ont connu la fuite en Égypte (cf. Évangile selon saint Matthieu 2, 13-16). Réfugiés politiques, s’éloignant de la menace du roi Hérode pour protéger la vie de l’enfant Jésus, ils ont souffert dans leur exil. Ils savent ce que c’est que d’être regardés comme des inconnus qui dérangent. Aussi pouvons-nous invoquer la Vierge Marie sous le vocable de « Notre-Dame des réfugiés » et saint Joseph, comme le patron des réfugiés.

Le pape fait appel à la création de nouveaux récits pour renforcer les liens entre les populations de la Méditerranée, caractérisées par le métissage et l’ouverture culturelle à l’autre. Pourquoi ne pas actualiser les paraboles de l’Évangile dans ce souci de renouveler les références littéraires symboliques de la Méditerranée ?  La parabole du bon Samaritain[7], étranger détesté par les autorités de la capitale Jérusalem, qui prend soin d’une victime des bandits à la différence des gens religieux qui ferment les yeux sur ce malheur, pourrait illustrer la réalité des réfugiés étrangers dans la Méditerranée. Des gens bien-pensants et religieux peuvent faire semblant de ne pas voir leur souffrance et accorder la priorité au bien-être de leur famille ou de leur nation. Le saint pape Jean XXIII écrivait déjà avant la Seconde Guerre mondiale dans son journal spirituel : « Les deux grands maux qui intoxiquent aujourd’hui le monde sont le laïcisme et le nationalisme. (…) Au second les ecclésiastiques eux-mêmes apportent leur concours. »[8]

En Méditerranée, quand la tempête soulève le vent et les vagues qui menacent de renverser les bateaux, les marins se tournent vers la Vierge Marie. Un grand nombre de chapelles et d’ex-voto témoignent des grâces reçues.

Puisse l’intercession de la Vierge Marie, fille bien-aimée du Père, épouse du Saint-Esprit et mère de Jésus, le Fils de Dieu, obtenir à l’Église le renouvellement de la théologie et l’envoi des théologiens, hommes et femmes, ayant soif de vérité, de dialogue et de paix.

Saint-Denis (La Réunion. France), le 26 juin 2019.

 

 

 

[1]Discours pour l’inauguration de l’École biblique de Jérusalem, le 15 novembre 1890. Le père Lagrange au service de la Bible. Souvenirs personnels,Paris, Cerf, 1967, p. 104.

[2]Pape François. Discours à la Communauté de l’Université Pontificale Grégorienne et aux Membres de l’Institut Biblique et de l’Institut Oriental Pontifical, 10 avril 2014, AAS 106 (2014), 374.

[3]Voir l’exemple en France des sœurs dominicaines de la Présentation de Tours : https://precheraufeminin.com/

[4]VeConférence générale de l’épiscopat latino-américain et des Caraïbes. Disciples et missionnaires de Jésus-Christ pour que nos peuples aient la vie en lui. Aparecida, Paris, Cerf, 2008.

[5]Pape François, La joie de l’Évangile, exhortation apostolique Evangelii gaudium,24 novembre 2013.

[6]Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, IIa-IIae, q. 188, art. 6.

[7]Cf. Manuel Rivero. Pour une théologie de la communication.Paris. Éditions Parole et silence. 2015. P. 29s. L’actualisation des paraboles.

[8]Jean XXIII. Journal de l’âme, écrits spirituels. Paris. Éditions du Cerf. 1965. P. 407.

 

Écho de notre page Facebook : juin 2019

28 juin 2019
Fête du Sacré-Cœur de Jésus
C’est le 27 juin [1924, à Jérusalem] « en la fête du Sacré-Cœur de Jésus », que le père Lagrange a écrit cette touchante dédicace de son Évangile selon saint Jeanqu’il avait terminé :

Je prie mes collaborateurs de l’École biblique d’agréer l’hommage cordial et fraternel de cet ouvrage, en souvenir d’une vie dominicaine commune qui nous fut toujours douce. J’avais pensé rappeler à ce propos l’idéal des Pythagoriciens… Mais sait-on bien de quel Dieu ils parlaient ? Demandons tout simplement à Notre Seigneur la grâce de mettre en pratique son commandement promulgué par saint Jean : Aimons-nous les uns les autres. (extrait de Le père Marie-Joseph Lagrange. Sa vie et son œuvre par le père Louis-Hugues Vincent, p. 482, Parole et Silence, 2013.)

Photo : Mosaïque du Sacré-Coeur de Jésus. Cathédrale de Saint-Louis, Missouri, E.U.

24 juin 2019
Nativité de saint Jean Baptiste par le père Lagrange

Zacharie s’adresse enfin à ce petit enfant qui lui a été donné et qui sera le Prophète du Très-Haut, bien plus, qui préparera ses voies. Les voies de Dieu ce sont les voies du Messie. Jean devant précéder celui qui à la fois sera l’envoyé de Dieu, et agira comme Dieu lui-même. Désormais l’espérance de la délivrance politique s’efface devant une lumière nouvelle, comme si les vrais ennemis n’étaient autres que les offenses à Dieu. Ce sera le ministère de Jean d’annoncer le salut par la rémission des péchés, en suite de la miséricorde du Cœur de Dieu, qui fera apparaître parmi les hommes un astre levé dans les hauteurs. Les hommes, même au pays d’Israël, sont assis dans des ténèbres épaisses, attendant la lumière du jour pour se mettre en marche. Le Messie leur indiquera le bon chemin, celui de la paix, où ils trouveront le salut. Ainsi le cantique [Benedictus (Luc 1, 67-80)] se termine comme il avait commencé : le Fils de David apparaît sous les traits d’un être divin, dont Jean ne sera que le précurseur. En attendant qu’il fût manifesté à Israël, l’enfant croissait, et la force de l’Esprit s’emparait de lui de plus en plus. Elle le poussa au désert pour le préparer à sa mission. (extrait deL’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, p. Artège-Lethielleux, 2017.)

Photo d’une fresque montrant saint Jean Baptiste présenté à Zacharie par Spinello Aretino (14e)

 

Dimanche 23 juin 2019
Fête-Dieu, Fête du Corps et du Sang du Christ, appelée aussi Fête du Saint Sacrement.

« Ô Mère de Jésus, préparez-moi vous-même à la très douce fête de son Corps et de son Sang, mon bien, ma nourriture, mon tout.

(Marie-Joseph Lagrange, o.p., Journal spirituel, p. 176, Cerf, 2014.)

Photo EBAF (un document précieux) : Au début du XXe siècle, le vénérable père Lagrange présidait la procession solennelle du Saint Sacrement dans le parc de la basilique Saint-Étienne à Jérusalem.

 

16 juin 2019
La révélation de la Trinité des personnes divines par Marie-Joseph Lagrange o.p.
« Dans l’ignorance où nous sommes de Dieu, il nous est doux de savoir qu’il est Père, par conséquent infiniment tendre et indulgent ; Fils incarné pour nous, vivant en nous pour nous faire participer à ce qu’il tient du Père ; Esprit vivifiant et sanctificateur, principe de charité. Oh ! que cette révélation de la Trinité des personnes divines nous est utile, et qu’il en faut remercier Notre-Seigneur ! » (Journal spirituel, pp. 294-295, Cerf, 2014.)

Photo : Le mystère de la Trinité divine vue par Marc Chagall (1952-1953) Musée national Marc Chagall, Nice, Alpes Maritimes.

15 juin 2019

La Vierge de Miséricorde (détail) par Louis Brea, XVe-XVIe siècle. Chapelle de la Miséricorde. Nice (Alpes-Maritimes)

 

Bienheureuse Vierge Marie
Le père Lagrange, un grand serviteur de Marie, tellement grand et qui l’aimait, Elle, « la Vierge Fidèle », comme il disait, d’une affection si tendre, que l’on ose à peine – et en s’excusant – essayer de la raconter.
Le secret de sa vie, c’était ce grand amour pour « Marie Immaculée, Reine du Rosaire » : Le Père cachait jalousement ce trésor semblable à ces fleurs délicates et si belles que l’on craint de les cueillir en bouquet de peur qu’elles ne se fanent ! (Fr. Marie-Reginald Loew, disciple du père Lagrange, extrait de la Revue du Rosaire, octobre-novembre 1939.)

 

10 juin 2019 

Bonjour, la messe pour la cause de béatification du père Lagrange et aux intentions des membres de l’Association des amis du père Lagrange sera célébrée en la cathédrale de Saint-Denis (La Réunion. France), ce lundi de Pentecôte. Viens Esprit Saint sur l’Eglise et sur le monde! Fr. Manuel.

10 juin 2019
Lundi de Pentecôte

Marie, Mère de l’Église.
Louis Brea (1450-1525), église Ste Marie-Madeleine, Biot (Alpes-Maritimes)

Mémoire de la Bienheureuse Vierge Marie, Mère de l’Église suivant la volonté du pape François depuis 2018.

 

Quelle heureuse coïncidence qu’en ce jour, dédié à « Marie, Mère de l’Église », et comme chaque mois le 10, jour-anniversaire du départ au Ciel du père Lagrange, nous pouvons confier à l’intercession de la Mère du Christ et Mère de l’Église, tant vénérée par le père Marie-Joseph Lagrange, la cause de sa glorification.

 

 

 

 

 

Sur le sens de cette journée créée en l’honneur de Sainte Marie, Mère de l’Église, Une-nouvelle-messe-mariale-pour-le-lundi-de-Pentecôte-2018.pdf Continue reading ‘Écho de notre page Facebook : juin 2019’ »

13 mai 2019 : Fête de Notre-Dame de Fatima par fr. Manuel Rivero o.p.

Souvenons de notre saint pape Jean-Paul II, victime d’un grave attentat le 13 mai 1981, il demanda à placer la balle qui avait traversé son corps dans la couronne de Notre-Dame-de-Fatima, en signe de reconnaissance.
Quel est le message de Fatima ?
Les apparitions de la Vierge ont été précédées des apparitions d’un ange qui apparut à trois petits bergers : Lucie, François et Jacinthe, qui leur fit répéter cette prière : « Mon Dieu, je crois en vous, je vous adore, j’espère en vous, et je vous aime. Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas. »
Il leur demanda aussi d’offrir au Seigneur des prières et des sacrifices tout en évoquant la miséricorde des cœurs de Jésus et de Marie à leur égard.
Le 13 mai 1917, c’est Notre-Dame qui leur apparaît, vêtue de blanc, plus brillante que le soleil. Elle leur demande de se rendre à Cova da Iria six mois de suite, le 13 de chaque mois, à la même heure. Notre-Dame les exhorte à prier : « Réciter le chapelet tous les jours pour obtenir la paix pour le monde et la fin de la guerre. »
Le 13 juin 1917, Notre-Dame révèle aux enfants que Jésus veut établir dans le monde la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Ce Cœur de Marie est entouré d’épines, symbole des péchés des hommes.
Le 13 juillet 1917, Notre-Dame demande la consécration de la Russie à son Cœur Immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis. Elle donne aussi une nouvelle prière à ajouter dans le chapelet : « Ô mon Jésus, pardonnez-nous, préservez-nous du feu de l’enfer ; emmenez au Paradis toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus besoin. »
Le 13 octobre 1917, un samedi, Notre-Dame demande la construction d’une chapelle en son honneur en disant : « Je suis Notre-Dame du Rosaire. » Elle veut que le chapelet soit prié tous les jours. Ce jour-là eut lieu le miracle du soleil annoncé quatre mois auparavant. Le soleil tourna trois fois sur lui-même lançant de tous côtés des faisceaux de lumière.
Quels enseignements pouvons-nous retenir cent ans après ces apparitions ?
Tout d’abord, Notre-Dame nous renvoie à la conversion et à la prière pour les pécheurs. Jésus a intercédé sur la croix pour les pécheurs. Saint Dominique s’exclamait dans sa prière : « Seigneur, que vont devenir les pécheurs ? » Les enfants de Fatima vont prier le chapelet pour le pardon des pécheurs. Les apparitions mariales n’apportent rien de nouveau à la Révélation divine. Dieu le Père nous a tout dit dans son Fils Jésus. La Révélation est close et le salut nous a été acquis par la mort et la résurrection de Jésus. Nous n’avons pas à courir derrière de nouvelles révélations comme si l’Évangile ne suffisait pas. Ce serait un manque de foi et un péché.
Encore une fois, comme à Lourdes en 1858, la Vierge Marie a choisi des enfants pauvres comme témoins et missionnaires. Les apparitions de Fatima nous font prendre conscience de l’importance des enfants, disciples-missionnaires de Jésus-Christ. Les parents disent souvent : « Nous voulons que nos enfants ne manquent de rien ». Mais ils oublient parfois l’essentiel : la transmission de l’Évangile de Jésus, la prière et le souci des pécheurs et des pauvres. Les familles sont appelées à vivre une conversion dans leurs mentalités, leurs propos et leurs pratiques. Les enfants sont aimés de Dieu, choisis par la Vierge et envoyés comme des missionnaires en donnant un témoignage de prière et de sacrifice.
D’ailleurs, l’idée de sacrifice a pratiquement disparu de l’éducation des enfants. Les pédagogies sont orientées vers les activités ludiques et variées alors que l’existence humaine demeure marquée par la souffrance et le manque. L’enfant ne pourra pas faire face aux épreuves de la vie sans esprit de foi, de prière et de sacrifice.
Quand nous lisons la vie des saints, une flamme d’amour divine jaillit dans nos cœurs qui nous rend heureux tout en restant tenaillés par les douleurs et contrariétés du quotidien. Dans la vie des saints, les sacrifices rythment les jours et les nuits. Les enfants de Fatima se privaient de ce qu’ils chérissaient non pas par masochisme mais pour l’amour de Dieu et des pécheurs, pour raboter leur ego insolant et se donner au service des pauvres. Ils se privaient de manger des figues et des raisins appétissants. Surtout, ils portaient dans la foi moqueries, mépris, punitions, prison et maladie. François est mort à l’âge de 10 ans, le 4 avril 1919. Jacinthe est partie vers le père le 20 février 1920 à l’âge de neuf ans.
Puissions-nous ouvrir notre cœur aux grâces que Dieu veut répandre sur son Église.
Puissions-nous favoriser la catéchèse et la prière du chapelet des enfants en leur faisant découvrir Jésus avec sa Mère, la Vierge Marie, au rythme paisible des grains du chapelet, qui, à l’image de l’arrosage goutte à goutte de nos jardins, vient imbiber nos âmes de l’eau vive de l’Esprit-Saint !
Le père Lagrange, dominicain, fondateur de l’École biblique de Jérusalem, disait un jour à l’un de ces frères : « Le Rosaire, quand on s’en occupe, il réussit toujours ». Occupons-nous du Rosaire des enfants de manière à ce qu’ils réussissent non seulement dans la vie mais surtout leur vie, une vie de foi et d’amour.
Fr. Manuel Rivero O.P.
Cathédrale de Saint-Denis (La Réunion).

Photo : Vierge à l’Enfant. Toscane. Italie.

Extraits-10 mai 2019 : « S’abandonner à l’étreinte de Dieu en Jésus-Christ » par le père Marie-Joseph Lagrange o.p.

Père Marie-Joseph Lagrange o.p. : « S’abandonner à l’étreinte de Dieu en Jésus-Christ »
« L’Évangile est toujours vivant parce que Jésus-Christ a promis à ses apôtres qu’il serait avec eux, jusqu’à la consommation des siècles, qu’il enverrait l’Esprit-Saint, qu’il ferait sa demeure dans les âmes avec son Père et avec l’Esprit qui procède de tous deux.
Il y a un envahissement des choses divines, qui étonne la raison. C’est l’insertion de la divinité dans l’humanité, la nature humaine participant par la grâce à la nature divine, une telle prodigalité de dons, des exigences si hautes qu’une raison trop courte en est écrasée plutôt qu’attirée. On est tenté de dire que c’est trop beau !
Mais en dehors, il n’y a rien, rien qui compte pour nous, rien qui porte la marque de l’infini. Nous voilà en face du néant. Où aller, Seigneur ? Il ne reste qu’à se renfermer dans un doute fastueux – ou désespéré. Ou plutôt à se serrer autour de Pierre qui dit toujours : « « Vous avez les paroles de la vie éternelle », et à s’abandonner à l’étreinte de Dieu en Jésus-Christ. » (Marie-Joseph LAGRANGE, L’Évangile de Jésus-Christ avec la synopse évangélique. Paris. Artège. Lethielleux. 2017. Épilogue, p. 675).

Photo : Jésus avec sainte Catherine de Sienne. Couvent dominicain de Santa Sabine. Rome. Italie.

Écho de notre page Facebook : mai 2019

31 mai 2019
Ave Maria !
La Visitation par Marie-Joseph Lagrange o.p.
« En ces jours-là, Marie se mit en route pour la montagne vers une ville de Juda et elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth. […] (Lc 1, 39-56). »

En comparaison de Nazareth, la Judée est un pays de montagnes (par opposition à la plaine). […] Marie n’est point partie aussitôt, il fallait se préparer ; mais elle ne perd pas de temps en route. De Nazareth à Jérusalem on vient commodément en quatre jours. […] Luc n’a pas dit le nom de ce village, soit qu’il l’ait ignoré, soit plutôt qu’il ait eu trop peu de notoriété pour ses lecteurs hellénistes. […] La tradition locale, antérieure aux croisades, assigne Aïn Karim, répondant assez bien à la distance de cinq milles, seul point de repère indiqué par Théodosius (VIesiècle). […] Élisabeth a compris par l’inspiration de l’Esprit Saint que Marie est déjà la mère du Messie, et elle le nomme « mon Seigneur », comme le psaume 90 attribué à David. Il possède donc déjà une dignité surnaturelle. De la part d’une femme âgée, cette modestie est de l’humilité, dictée par le sentiment religieux. Marie n’a donc pas eu le temps de rien expliquer à Élisabeth ; celle-ci a été prévenue par le tressaillement de son enfant. En décrivant le fait, Luc n’avait pas indiqué la cause ; Élisabeth l’entend d’un mouvement de joie, comme celui des collines en présence de Dieu (Ps 114 (113) 4) ; ce serait cependant un peu forcé de dire que Jean prélude à son rôle de précurseur. C’est Élisabeth qui s’incline devant Marie, comme Jean le fera devant Jésus (Mt 3, 14). […] La foi de Marie est mise dans un entier relief : elle n’est pas dite heureuse à l’accomplissement futur de ce qui a été annoncé à sa foi, mais à cause de sa foi elle-même. Élisabeth est chargée de féliciter Marie, non de donner une nouvelle assurance à sa foi. D’autant que le principal est déjà fait en ce qui regarde Marie. […] On voit que la conception surnaturelle est regardée comme un miracle tout à fait extraordinaire, non comme une vulgaire histoire à la grecque. Avant la prophétie de l’Emmanuel, Isaïe avait aussi fait appel à la foi (Is 7, 9). […] Marie retourne après trois mois auprès de son mari, pour qu’on voie bien qu’elle ne le fuit pas ; elle n’est pas restée plus longtemps parce que le Seigneur ne devait pas rester comme serviteur devant celui qui était son esclave (Jean).

Le Magnificat

[…] On a expliqué le Magnificat, sans se préoccuper de la division en strophes, qui doit plutôt être fixée par le sens des phrases. […] La marche du cantique serait donc celle-ci. Dans la première strophe, Marie rend grâce à Dieu de la faveur qu’il lui a faite, à elle son humble servante. Dans la seconde, elle relève encore la grandeur de cette grâce, montrant clairement qu’elle interprète la situation comme Élisabeth, qui l’a saluée mère du Messie. Cette disproportion entre sa bassesse et l’œuvre que Dieu veut accomplir lui suggère dans une troisième strophe que c’est une œuvre de miséricorde. Dieu, miséricordieux pour ceux qui le servent, a en horreur les orgueilleux. C’est que ses voies ne sont pas celles des hommes. Il se plaît à élever ce qui est bas, à abaisser ce qui est haut. Cette pensée exprimée plus d’une fois par les sages, supposent l’intervention de Dieu dans les choses humaines. Marie voit cette intervention déjà commencée, et Dieu distribuant ses biens sans acception de personnes, répondant aux vœux des pauvres, renvoyant loin de lui les riches.

C’est, dans la quatrième strophe, l’application du principe posé par la troisième des catégories sociales qui représentent en fait les fidèles de Dieu et les orgueilleux ses ennemis. La dernière strophe insiste sur le salut commencé, que Dieu poursuivra, se souvenant de ses promesses. […] On ne trouve dans le cantique aucune pensée recherchée, et, disons-le ouvertement, aucune image originale. Peut-être a-t-on quelquefois exagéré sa valeur littéraire ; il contient trop de réminiscences pour faire beaucoup d’honneur au génie poétique. Pourquoi attribuer à Marie une supériorité profane dont son Fils n’a pas non plus fait de cas ? En revanche tout y coule de source, et l’Église admirera toujours le sentiment religieux de l’humble servante qui ne voit que Dieu dans la gloire qui l’attend. Elle a compris la bonté de Dieu pour les petits, et sa compassion pour les pauvres. Ce seront les sentiments de Jésus. (extraits de L’Évangile selon Saint Luc, pp. 40-54, Marie-Joseph Lagrange o.p., Lecoffre-Gabalda, 1941.)

Photo : Visitation de Camillo Procaccini (c. 1602), Blanton Museum of Art, Austin, Texas.

30 mai 2019
Le rôle du Paraclet : ses rapports avec le Fils par le père Marie-Joseph Lagrange o.p.
– Où vas-tu ? – Mais parce que je vous ai parlé ainsi, la tristesse a rempli votre cœur. (Jean 16, 5-8.)

[…] Il est donc acquis que je vais vers mon Père : vous en êtes attristés, c’est à tort. Le reste suit naturellement. Les disciples ne comprennent pas que c’est dans leur intérêt que Jésus remonte vers son Père. C’est le sentiment perpétuel de ceux qui assistent à la mort des saints. Saint Dominique lui aussi répondit aux siens qu’il leur serait plus utile auprès de Dieu. Il faut que Jésus parte pour envoyer le Paraclet, qui se trouve là où il va, auprès du Père : c’est ce qu’il a déjà annoncé (14, 16 s. ; 26 ; 15, 26). Dans les deux premiers endroits, c’était le Père qui l’envoyait, conformément au but de ce discours, qui était d’insister sur l’unité du Père et du Fils. Mais pourquoi le Fils glorifié n’eût-il pas pu demeurer sur la terre et donner cependant son Esprit ? – C’est le secret de Dieu. On entrevoit seulement une certaine antinomie entre la présence sensible, localisée de sa nature, et la présence spirituelle universelle. De plus, de cette autre manière il semble bien qu’il eût fallu changer complètement le plan du salut, qui est dans l’exercice de la foi. Jésus incarné lui laissait libre carrière, glorifié il l’eût remplacée par une évidence. Il devait donc disparaître ; mais l’Esprit continuerait son œuvre, invisible, secours pour la foi, et lui-même objet de foi. Son rôle sera double, comme il va être indiqué : par rapport au monde (8-11) et par rapport aux disciples (12-15), quoique dans les deux façons ce soit dans l’intérêt des disciples.

Ces paroles, en dépit de l’explication qui en est donnée aussitôt, ont toujours paru très obscures. Aujourd’hui cependant tout le monde est d’accord, du moins sur les grandes lignes. Tout d’abord le principe est posé. On dirait, non pas d’un tribunal d’appel, mais de l’appréciation qu’il faudra porter sur l’événement capital qui va se passer, c’est-dire le jugement du Christ, renié par sa nation, et sa mort voulue par Satan qui avait suggestionné le traître. On se demande donc qui a eu tort ou qui a péché – et qui a raison, qui avait pour soi la justice – que penser en somme du jugement déjà rendu ? Il y a eu un accusateur, qui croit avoir déjà gagné sa cause, c’est le monde, qui doit être comme précédemment le monde juif, le seul qui soit vraiment responsable de la condamnation de Jésus. Rien n’empêche d’appliquer le même raisonnement à tous les hommes qui imiteront l’attitude des Juifs, mais ils ne sont pas directement visés. Quelqu’un vient, et c’est le Paraclet, ici spécialement dans le rôle qui convient le mieux à l’étymologie, celui du défenseur, mais de défenseur qui prend l’offensive. Il convaincra le monde, ce qui ne veut pas dire qu’il le persuadera, mais il fera la preuve qu’il a eu tort, non seulement devant le Juge suprême, mais au regard de ceux qui sont de bonne foi et de bonne volonté : en fait ceux-là sont ou devraient devenir des croyants – sauf à faire la part de l’illogisme. – Il n’y a dans Sagesse 1, 5 qu’un vague pressentiment du rôle de l’Esprit Saint comme préservateur de raisonnements insensés. […] (Marie-Joseph Lagrange o.p., Évangile selon Saint Jean,pp. 417-418, Lecoffre-Gabalda, 1936.)

Photo : Détail de la fresque de l’Ascension du Seigneur par Giotto di Bondone (13e). Chapelle Scrovegni. Padoue. Italie.

Illustration par les frères franciscains.ca  : « Les apôtres virent le Christ s’élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée. Et comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s’en allait, voici que deux hommes en vêtements blancs se tenaient devant eux et disaient : « Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Jésus, qui a été enlevé du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. » Ainsi s’exprime Luc dans le récit de l’Ascension du Seigneur que l’on trouve dans les Actes des Apôtres 1, 9-11. Cette ascension de Jésus ne doit pas être comprise comme une sorte de voyage dans l’espace. La nuée qui dérobe Jésus aux regards des disciples est, déjà dans l’Ancien Testament, un symbole de la puissance de Dieu et une manifestation de sa présence. Le sens est donc que Jésus est entré dans le monde et dans la gloire de Dieu, qui transcendent l’espace et le temps.

Giotto, dans son tableau, cherche à illustrer avec précision le récit des Actes des Apôtres. Quarante jours après la résurrection, le Christ monte au ciel. Tout dans cette fresque est orienté vers les cieux. Le peintre a divisé sa composition en deux sections qui correspondent l’un au royaume du ciel, l’autre au royaume de la terre. En bas, agenouillés à même le sol, au sommet du mont des Oliviers, les onze apôtres sont divisés en deux groupes, avec Marie un peu séparée du groupe de gauche. De gauche à droite se trouvent les apôtres André, Jacques, Thaddée, Jean et Pierre. Au centre, il y a la Mère de Dieu et deux anges habillés en blanc. À droite sont les apôtres Matthieu, Barthélemy, Thomas, Simon, Jacques fils d’Alphée et Philippe. Remarquons qu’entre les apôtres, les deux anges volent à faible hauteur. Ceux-ci servent de trait d’union entre les figures terrestres et l’imposante figure du Christ en gloire montant au ciel entre deux rangées d’anges, une à sa droite et l’autre à sa gauche; ces anges ont l’air de trépider, dans un mouvement à la fois ordonné et ondulatoire. Le Seigneur monta au ciel avec joie, au milieu des concerts des anges comme le dit le Psaume (Ps 46, 6) : « Dieu est monté au milieu des cris de joie. » Accompagné des bienheureux et des saints de l’Ancien Testament, la figure du Christ est enveloppée d’un nimbe doré, dénotant sa divinité presque complètement cachée par sa nature humaine.

Les mains du Christ sont déjà au-delà de l’espace et du temps, tandis que les rangées d’anges et de bienheureux tendent à le suivre dans son extase mystique. La lumière émanant du Christ se reflète sur leurs visages et sur ceux des apôtres, qui ne peuvent supporter son intensité. Le manteau du Christ est superbe, flottant dans le vent de la grâce divine. Au premier plan on y voit le somptueux manteau de Barthélemy qui semble rivaliser avec la splendeur éblouissante du vêtement des deux anges. Le visage de la Mère de Dieu, plongé dans l’extase de la vision céleste, se démarque des autres. Nous ne sommes plus du tout les témoins de la sombre entrée dans Jérusalem, préfigurant la passion et la mort du Christ. Il s’agit de la Jérusalem céleste venant accueillir le Christ, un sublime dialogue entre le ciel et la terre.

Georges Morin, o.f.m.

 

28 mai 2019

Ave Maria !
La foi de Marie
Pour le père Lagrange la foi de Marie demeure un modèle et une référence :
Si Jésus sur la Croix a dû subir l’abandon de son Père, pourquoi l’âme de Marie n’aurait-elle pas connu des épreuves mystérieuses qui la plongeaient dans une sorte d’obscurité ? Peut-être cependant Luc n’aurait pas écrit cette phrase (Lc 2, 50), si l’on n’en avait recueilli l’expression de la bouche de Marie. Au moment où la Mère de Jésus rappelait aux premiers chrétiens les souvenirs qu’elle avait conservés dans son cœur, elle pouvait bien dire que dans ces premiers et heureux temps elle n’avait pas compris tout ce que comportaient la nature et la mission de son Fils. Pourquoi avait-il dû se séparer d’eux pour être chez son Père ? Première douleur imposée à la Mère qui en présageait bien d’autres. (M.-J. Lagrange, Évangile selon saint Luc, pp. 97-98, Lecoffre-Gabalda, 1942. Cité dans M. Rivero, Le Père Lagrange et la Vierge Marie, p. 38, Cerf, 2012.)

Photo : Retour de Jésus à Bethléem après son enseignement aux docteurs par S. Martini (1342). Walker Art Gallery. Liverpool (Grande Bretagne).

Illustration : Simone Martini (1284-1344) peintre et miniaturiste italien, considéré comme l’un des maîtres de l’école siennoise est certainement l’un des plus grands et des plus influents artistes du XIVsiècle italien ; le seul capable de lutter contre le sceptre de Giotto : Le retour de Jésus après son enseignement aux docteurs de 1342.
Cette œuvre offre une très curieuse combinaison d’éléments anciens et modernes. Par exemple, le fond doré est un héritage de la tradition byzantine poursuivi par les peintres siennois. Cependant, la qualité du dessin, la beauté des couleurs et la vivacité des expressions sont extraordinairement « modernes » et font de ce tableau un véritable chef-d’œuvre doté d’un grand charme.
L’artiste, et c’est là le nouvel grand élément de l’iconographie classique sur ce thème qui ne s’attarde pas sur le différend avec les docteurs du Temple, mais qui dépeint les trois protagonistes de la Sainte Famille, soulignant leurs réactions à la suite de la découverte de Jésus, trois jours de recherches angoissées de Marie et Joseph.
Ce choix qui déplace la scène du côté plus intime des relations familiales est inhabituel. Simone Martini semble vouloir entrer dans le mystère de la croissance de Jésus mentionné dans l’Évangile et présente la scène sous de nouveaux aspects avec une excellente capacité d’introspection psychologique des personnages.
Il nous semble voir une scène de conflit normal, comme cela se passe chez nous, traduite avec fraîcheur et réalisme, à tel point que ceux qui contemplent l’œuvre peuvent reconnaître la véritable humanité assumée par le Fils lors de l’Incarnation.
Source : Francesca Desiderio. La Famiglia nell’Arte. 2013.
https://it.cathopedia.org/wiki/Ritorno_di_Gesù_a_Betlemme_dopo_la_disputa_con_i_Dottori_(Simone_Martini)

 

21 mai 2019
Ave Maria !
Bienheureux Hyacinthe Marie Cormier o.p.
Le Père Cormier vu par le Père Lagrange. (Bernard Montagnes o.p.)

Déposition d’un témoin en 1936 :
J’ai aussi entendu parler du R. P. Cormier pendant mon séjour à Jérusalem de 1892 à 1895. Je suivais les cours de l’École biblique et le P. Lagrange, directeur de l’École me disait qu’il avait été sous la direction spirituelle du serviteur de Dieu et qu’il considérait cette direction comme une grâce et une garantie de persévérance : il constatait que cette persévérance se manifestait chez tous ceux qui avaient la faveur d’être dirigés par le P. Cormier.

1926, Souvenirs personnels, p. 47-48 :
Je regarde comme une des preuves les plus sensibles de la Providence bienveillante de Dieu à mon égard la grande affection que m’ont témoigné le Père, aujourd’hui cardinal Frühwirth, et le P. Cormier qui m’avait donné l’habit à Saint-Maximin, en me ceignant de sa propre ceinture.

1930, Souvenirs personnels, p. 159-160 :
[Mot de Cormier] « Alors je serai en règle avec Dieu. » Je m’arrête sur ce mot qui révèle si bien la disposition

© École Biblique de Jérusalem

constante de ce saint. Je l’ai beaucoup connu, j’ai eu avec lui des rapports incessants, sollicitant de lui de trancher des cas où un autre eût pu agir par un motif humain. Il ne m’est jamais entré dans la pensée qu’il en viendrait à l’action par un autre motif que de plaire à Dieu. Non, l’idée ne m’est jamais venue de faire appel à l’affection sûrement profonde qu’il avait pour moi, et je n’ai jamais non plus appréhendé qu’il se préoccupât de plaire, ou de faire sa cour. Aucun opportunisme personnel dans sa prudence, mais seulement la volonté de se conformer aux directions données par le Saint-Père. Encore n’hésitait-il pas à lui ouvrir toute sa pensée. Pie X avait de lui une haute estime. Je répète que ce fut une Providence pour moi d’être sous son obéissance.

1933, 12 octobre, lettre au Père Gillet :
Je voudrais bien ne pas tomber dans l’amertume sénile, mais vraiment le monde ne marche pas mieux. J’ai eu le bonheur d’être dans l’Ordre sous les Pères Colchen et Cormier. Il me semble qu’on ne va guère dans leur sens.

1936, Souvenirs de Salamanque :
La figure, au sens plein, du père Cormier, vraiment une grande figure. C’est sous ses traits qu’on se représente le plus volontiers saint Bernard. Et n’a-t-il pas, à son image, puisé dans une vie intense de contemplation, une énergie sans défaillance pour le ministère extérieur ? Nous n’entendons pas comparer son action à celle du dernier des Pères de l’Église, qui s’étendit à toute la chrétienté. Cependant, à un rang moins élevé, c’est la même harmonie entre la vie mystique et la vie active, dont le père Cormier poursuivait très consciemment l’idéal. On s’ouvrait à lui comme malgré soi, tant on était sûr d’obtenir la décision qu’il fallait, l’encouragement qui la rendait acceptable et presque douce.

Vosté à Genevois, 27 mai 1934 :
Le P.Lagrange a dit que si les supérieurs lui en donnaient l’ordre, il écrirait lui-même la vie du Père Cormier.

1936, 29 février, le Père Lagrange au Père Dupuy :
J’ai pu témoigner sur le P. Cormier vendredi en deux séances [du tribunal diocésain]. J’aurais été peiné de mourir sans lui avoir payé ma dette de reconnaissance. Quel honneur et surtout quel grand bien spirituel pour l’Ordre s’il était béatifié !

Photos :
– Bienheureux Hyacinthe-Marie Cormier, Maître général de l’ordre des frères prêcheurs. Cloître S. Dominique de Fiesole. Source : Sœurs dominicaines du Saint-Esprit. Florence. Italie.

– P. Lagrange, allée du moine. Photo EBAF.

 

19 mai 2019
Ave Maria !
Persévérer dans la foi 
« Il nous faut passer par bien des épreuves pour entrer dans le royaume de Dieu » (Actes des Apôtres 14, 22).

 

Le moyen de persévérer est de chercher en tout la Croix ; soit dans les grandes lignes de la vie religieuse, soit dans chaque action, on peut trouver en tout son aimable amertume ; il faut la rechercher et la savourer. – Ô ma Mère, enivrez-moi de la croix. (P. Lagrange, Journal spirituel, Cerf, 2014, p. 195.)

Le père Lagrange a dû soutenir d’âpres combats afin de donner droit de cité dans l’Église catholique aux acquisitions modernes de la science historique. Elles ne révèlent pas moins le visage personnel du fondateur de l’École biblique, qui s’est toujours effacé derrière son œuvre  scientifique. (Bernard Montagnes, o.p., Exégèse et obéissance, Correspondance Cormier-Lagrange, Lecoffre-Gabalda, 1989, Introduction.)

Photo : Saint Dominique au pied de la croix (détail) par Beato Angelico. S. Marc, Florence, Italie.

 

15 mai 2019
Ave Maria !
Bienheureux André Abellon, o.p., de la Province de Toulouse (1375-1450)

Ardent et infatigable prédicateur dans toute la Provence, travailla activement à la réforme de la vie dominicaine avant de devenir prieur du couvent royal de Saint-Maximin. Très attaché à tout ce qui touche la splendeur du culte, il fut l’émule du bienheureux Fra Angelico par son art de peindre. Source : diocese-frejus-toulon.com

« Bienheureux les morts qui meurent dans le Seigneur désormais. Oui, dit l’esprit, afin qu’ils se reposent de leurs travaux, car leurs œuvres les suivent. » (Journal spirituel, Marie-Joseph Lagrange o.p.).

Brève lecture de l’illustration
À la verticale, une chaîne d’associations réunit à la Maiestas Domini, figurée en haut, saint Pierre accueille les élus dans la cité céleste puis, sur la droite, saint Dominique assure leur passage dans l’au-delà et, plus bas, au registre inférieur, les trois saints fondateurs de l’Ordre, Dominique à nouveau, Pierre de Vérone et Thomas d’Aquin. Des aménagements de détail viennent compléter le schéma général : ainsi, vers le milieu du mur, les saints Pierre et Dominique occupent quasiment le même niveau, en se plaçant respectivement sur la droite et sur la gauche du Christ de Majesté représenté au-dessus ; ils tiennent, dès lors, les places traditionnellement réservées aux saints Pierre et Paul sur des compositions aussi réglées que, par exemple, celle de la Traditio Legis dans l’ancienne iconographie chrétienne. Par le jeu des attributs, les principaux personnages de la fresque, vus de face (à l’exception de Pierre de Vérone), sont tous mis en rapport à saint Pierre, vicaire du Christ sur la terre ; Dominique fait le même geste de la main droite levée qu’un peu plus haut Pierre, à l’entrée de la cité céleste ; il affecte, aussi, une posture semblable, le buste vu de face, la tête de trois quart profil. Le procédé est, d’ailleurs, repris pour l’autre grand personnage de l’Ordre, Thomas d’Aquin : au registre inférieur, celui-ci tient un livre ouvert, vu de face par le groupe d’incroyant, et placé sur une diagonale qui le relie, tout en haut, au livre fermé que le Christ-Dieu a dans sa main droite. Par là, à son tour, saint Thomas d’Aquin entre dans une configuration plus large qui le rapproche de saint Pierre qui, lui, tient la clef de sa main droite, l’autre attribut christique*. La position particulière de saint Pierre de Vérone, vue de profil et tourné vers l’extrémité droite du mur, peut s’expliquer par le rôle qu’il joue sur l’autre mur, au sud, en relation directe au Christ de la Passion.

* La clef et le livre sont les prolongements de la main : en ce sens ces attributs reprennent la représentation de la baguette qu’on introduit dans l’iconographie du Christ dès le IIIesiècle et qui marque, entre autres aspects, ses pouvoirs de magicien.

Source : Extrait de Religion civique et art monumental à Florence au XIVe siècle. Daniel Russo. Décoration peinte de la salle capitulaire à Sainte-Marie-Nouvelle :https://www.persee.fr/doc/efr_0223-5099_1995_act_213_1_4952

Photo : L’Église militante et triomphante sous la conduite de l’Ordre Dominicain. Fresque de Andrea di Bonaiuto (1365), chapelle des Espagnols, Sainte-Marie-Nouvelle, Florence, Italie.

Pour admirer les détails de cette œuvre : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/8/82/Way-of-salvation-church-militant-triumphant-andrea-di-bonaiuto-1365.jpg

14 mai 2019
Ave Maria
Saint Matthias, apôtre
Inauguration de la doctrine évangélique
Choix des douze apôtres

Jésus donne les clefs du Royaume à S. Pierre (détail fresque par Perugino) Chapelle Sixtine (1481-83) Vatican-Rome

C’est ici un moment décisif du ministère de Jésus. Tout d’abord il a seul prêché la pénitence, en vue du règne de Dieu prochain. Les évangélistes n’ayant reproduit qu’un trait particulier de cette prédication, on est porté à penser qu’elle se tenait dans le ton des anciens prophètes, surtout d’Isaïe, en insistant sur le caractère miséricordieux de l’intervention divine, comme il avait fait à Nazareth. Déjà cependant il avait groupé auprès de lui les disciples de la première heure, et il leur avait adjoint le publicain Lévi, nommé désormais Matthieu. Nathanaël était, selon toute vraisemblance, devenu Barthélemy. D’autres, dont nous ignorons le nombre, s’étaient habitués à vivre plus ou moins souvent dans sa compagnie. L’opposition instinctive des Pharisiens, leurs questions insidieuses, avaient été pour le Maître une occasion de révéler que sa doctrine contenait un principe nouveau. Il avait fait entrevoir que, lui disparu, son œuvre serait néanmoins continuée (Mc 2, 20). Il fallait donc former ces successeurs, leur conférer une autorité dérivée de la sienne, les avoir pour premiers auditeurs de son programme et ensuite pour témoins. Jésus s’arrêta au chiffre de douze, qui était celui des douze tribus d’Israël. De même que les patriarches nés de Jacob étaient pour tout le peuple les ascendants glorieux dont chaque tribu se prévalait, rappelée par une origine commune au sentiment de l’amitié, ainsi les douze seraient les pères du nouvel Israël qu’il était venu fonder.

Avant de faire cette démarche qui réglait déjà le dessein de son œuvre, Jésus recourut à la prière : il monta sur la montagne et passa la nuit dans une instante supplication. Étant homme il devait prier ; étant notre modèle il invitait dès lors son Église à instituer des prières spéciales pour implorer de Dieu des pasteurs fidèles. (Marie-Joseph Lagrange o.p., L’Évangile de Jésus Christ avec la Synopse évangélique, Artège-Lethielleux, 2017, pp. 162-163.)

Les douze apôtres : Pierre (Simon-Pierre) et son frère André ; Jacques le Majeur et son frère Jean, tous deux fils de Zébédée ; Philippe ; Nathanaël appelé Barthélemy ; Thomas ; Jacques le Mineur, fils d’Alphée ; Jude (appelé aussi Thaddée ; Simon le Zélote, Judas Iscariote ; ce dernier a été remplacé par Matthias.

« Seigneur, donnez-nous des prêtres. Seigneur, donnez-nous de saints prêtres » 

 

10 mai 2019
Ave Maria

P. Lagrange priant
Photo EBAF

La prière du fondateur de l’École biblique était « feu » : véritable va-et-vient entre la Parole de Dieu scrutée dans l’étude scientifique, l’Écriture sainte et le Rosaire

Vierge du Rosaire par François Brea (1555)

qui le plongeait dans un voyage intérieur riche en découvertes spirituelles accordées par l’Esprit Saint. (Fr. Manuel Rivero o.p.)

En ce jour, particulièrement, jour-anniversaire de son départ au Ciel, confions-lui la ou les grâce(s) dont nous avons besoin pour que Fr. Manuel Rivero les présente, au cours de la célébration de la messe de ce jour, en même temps que notre fervente prière pour la béatification du Père Marie-Joseph Lagrange.

Qu’un premier miracle soit reconnu par son intercession, avec l’aide de la Vierge Marie, en ce mois qui lui dédié.

8 mai 2019

Notre-Dame des Prêcheurs
Vitrail Dominicans Nashville

Ave Maria
Notre-Dame des Prêcheurs
Dès avant son entrée dans l’Ordre des Prêcheurs, le père Lagrange avait l’habitude d’écrire « Ave Maria » en haut de chacune des pages de son Journal pour rester dans un climat de prière contemplative au cours de ses études. Par le « Réjouis-toi Marie » de l’archange Gabriel, il demeurait « en état d’Annonciation », éveillé à la visite de Dieu qui vient combler de joie l’humanité à l’exemple de la Vierge Marie. (Extrait de « La dévotion du père Lagrange à la Vierge Marie » par fr. Manuel Rivero o.p., vice-postulateur de la cause du P. Lagrange

Saint Dominique a confié son Ordre à la Vierge Marie.
https://www.notrehistoireavecmarie.com/…/saint-dominique-c…/
par Fr. Augustin Laffay o.p.

Source illustration : https://www.nashvilledominican.org/prayer/our-lady/

 

3 mai 2019

Ave Maria !
Saints Philippe et Jacques le Mineur, apôtres et martyrs (1ersiècle)
Tous deux témoins de la résurrection du Sauveur

Philippe dit à Jésus : « Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit » Jésus lui dit : « Depuis si longtemps je suis avec vous, et tu ne m’as pas connu, Philippe ? Celui qui m’a vu à vu le Père » […] (Jean 14, 8.)

Saints Jacques le Mineur et Philippe par Paolo Veronese (1565) – National Gallery d’Irlande, Dublin

Et le père Lagrange de commenter : La réponse de Jésus ne dit pas expressément que Philippe l’a vu des yeux du corps ; cela allait de soi, depuis le temps que le Maître était avec ses disciples, mais qu’il ne l’a pas connu, c’est-à-dire n’a pas bien compris que Dieu était en lui à ce point que le voir c’était voir Dieu même. […] Philippe ne se contentait pas de la foi : il faut même dire que sa foi était quelque peu inconsciente, puisque Jésus la réveille, et lui fait comprendre en même temps qu’il doit s’en contenter. (Extrait de l’Évangile selon saint Jean 14, 9. par le P. M.-J. Lagrange des Frères Prêcheurs, Lecoffre-Gabalda, 1936, pp. 376-377.)

Pour saint Jacques le Mineur, le P. Lagrange écrit :

[…] Le Christ avait recommandé de tout prêcher sur les toits ; mais enfin cette prédication avait été confiée à ceux qui avaient d’abord reçu les confidences. Ceux-là étaient les Apôtres, et tous les chrétiens savaient les noms des principaux, de ceux qui étaient encore les autorités, les notables de la communauté, les « colonnes » [Pierre, Jacques et Jean] de l’édifice. […] Leur chef était naturellement saint Jacques, « le frère du Seigneur » que l’antiquité a regardé comme le premier évêque de Jérusalem. (Extrait de Saint Paul. Épître aux Galates, par M.-J. Lagrange des Frères Prêcheurs, Lecoffre-Gabalda, 1926.)

Saint Jacques, une belle Épître, un maître de vie pour chacun de nous
Le 28 juin 2006, à l’occasion de l’audience générale, Benoît XVI écrit : […] la Lettre de saint Jacques nous montre un christianisme très concret et pratique. La foi doit se réaliser dans la vie, surtout dans l’amour du prochain et notamment dans l’amour pour les pauvres. […] Et nous exhorte à nous abandonner entre les mains de Dieu, dans tout ce que nous accomplissons, en prononçant toujours les paroles : « Si le Seigneur le veut bien » (Jc 4, 15)

Photo : Tableau de Paolo Veronese, 1565, National Gallery d’Irlande, Dublin.
Jacques le Mineur tient sur ses genoux le manuscrit de sa Lettre. À gauche, il présente le foulon, instrument de son martyre.
Saint Philippe s’appuie sur la croix, où il a été attaché comme son Maître.

 

1er mai 2019

Ave Maria !
En ce premier jour du mois de Marie, nous fêtons Saint Joseph, artisan

Saint Joseph
Autel de Saint Joseph-Basilique St-Étienne de Jérusalem. Photo EBAF

Le 8 décembre 1870 le pape Pie IX déclara officiellement Saint Joseph, Patron de l’Église universelle, et fit du 19 mars une fête solennelle ; – en 1889, le pape Léon XIII démontra comment Saint Joseph est le modèle des pères de famille et des travailleurs, et lui décerna officiellement le titre de « saint patron des pères de famille et des travailleurs », titre que la piété populaire lui avait déjà décerné depuis des siècles ; – en 1955, le pape Pie XII reprit bien volontiers le principe de la fête du travail en instituant la solennité de Saint Joseph artisan et en la fixant au 1er mai de chaque année ; Saint Joseph est ainsi l’un des saints que l’on fête deux fois dans l’année (19 mars et 1er mai) ; – le pape Jean XXIII a ajouté son nom au canon de la Messe.
Source : http://www.saintjosephduweb.com/Historique-de-la-fete-de-Saint-Joseph-du-19-mars-et-du-1er-mai_a7.html

Le père Lagrange écrit dans ses Souvenirs personnels : Le père provincial, avant de me donner l’habit, me fit demander si je tenais à un nom de religion. Je proposai Joseph par dévotion pour l’époux de Marie. […] Tous les novices recevaient d’abord le nom de Marie, mais leur second nom demeurait seul en usage, sauf pour le cas où les deux patrons étaient Marie et Joseph. C’est pourquoi j’ai toujours signé Marie-Joseph, heureux de ce double patronage, commémoré par la fête des Épousailles, supprimée depuis.

Le père Lagrange vénère Joseph, son saint patron, comme « le grand silencieux, contemplateur du mystère ».
Extrait de : Le père Lagrange et la Vierge Marie. Méditations des mystères du Rosaire. Cinquième mystère joyeux, par Manuel Rivero, o.p., pp. 74-75, Cerf, 2012.

Photo EBAF
Saint Joseph portant une tige de fleurs de lys, par Joseph-Jean-Félix Aubert (1849-1924), peintre chrétien, autel Saint Joseph, Basilique St-Étienne, Jérusalem. Voir http://www.domjer.org/?tag=joseph

L’iconographie de saint Joseph le représente le plus souvent tenant une fleur de lys ou un rameau d’amandier fleuri. Le nard est peut-être une particularité des représentations de saint Joseph dans le monde hispano-américain, avec des racines bibliques. Selon une tradition répandue dans les pays hispaniques, Joseph portait à la main une branche de nard lorsqu’il vint demander Marie comme épouse. La fleur de nard dit la pureté et l’amour.
Le blason du pape François comporte une fleur de nard, symbole de la protection et de l’amour de Joseph, saint patron de l’Église universelle. (Extrait de l’article d’Anita Bourdin du 19 mars 2017 et la belle prière qui le termine https://fr.zenit.org/articles/il-a-quatre-ans-linauguration-du-pontificat-sous-le-signe-de-joseph-et-du-nard/)

Écho de notre page Facebook : avril 2019

 

30 avril 2019
Saint Pie V, o.p., pape (1566-1572)

Saint Pie V  priant pour la victoire de Lépante  contre les musulmans

Dans la basilique Saint-Étienne de Jérusalem, il y a un autel de la Vierge [au pied duquel le père Lagrange allait prier durant de longues heures]. À droite, quand on fait face au chœur, se trouvent deux peintures, d’origine inconnue :

  1. La première représente, selon une tradition dominicaine ancienne, saint Dominique recevant le Rosaire de la Vierge Marie. En réalité, on ne prête qu’aux riches, et l’on sait que cette tradition du Rosaire est plus tardive, et qu’elle concernait un autre dominicain, le bienheureux Alain de la Roche.
  2. La deuxième, un peu abîmée, représente Pie V priant pour la victoire contre les musulmans pendant la bataille navale de Lépante. Si le camail de Pie V est abîmé, c’est que la peinture porte encore les traces d’un projectile qui l’a touchée pendant la guerre de 1967.

Source : http://www.domjer.org/?paged=6

On peut également lire sur le site des moniales dominicaines d’Estavayer-le-Lac, en Suisse, une courte et précise évocation de Saint Pie V : http://www.moniales-op.ch/spiritualite/dominicains/saint-pie-v:

Savez-vous pourquoi le pape porte une soutane blanche ? Nous sommes en 1566, un nouveau pape est élu : Pie V, un frère dominicain qui sera canonisé en 1712. Cet homme, humble, ferme, austère et pieux, a été choisi pour réformer la Curie romaine, après les vifs débats qui ont marqué le Concile de Trente. Il renonce aux atours écarlates et dorés et conserve son modeste habit blanc de dominicain. Les cardinaux, notons-le, ne semblent pas avoir été tentés par la même démarche. (Jean-Pierre Fragnière)

Bio-express de saint Pie V

Entré dans l’Ordre des Prêcheurs à 14 ans, Pie V ou plutôt Michele Ghislieri (1504-1572), devient pape sous le nom de Pie V en 1566. Il met en application les décrets du Concile de Trente, promulgue le bréviaire et le missel romain. Saint Pie V institue la fête du Rosaire en action de grâce après la victoire de Lépante sur les Turcs.

Une prière de saint Pie V

Jésus Christ, mon Seigneur crucifié, Fils de la Bienheureuse Vierge Marie, ouvre tes oreilles et écoute-moi, ainsi que tu as écouté ton Père sur le Mont Thabor.

Jésus Christ, mon Seigneur crucifié, Fils de la Bienheureuse Vierge Marie, ouvre tes yeux et regarde-moi, ainsi que tu as regardé, du haut de la croix, ta Mère chérie, affligée par la douleur.

Jésus Christ, mon Seigneur crucifié, Fils de la Bienheureuse Vierge Marie, ouvre ta bouche, et parle-moi, ainsi que tu as parlé à saint Jean, lorsque Tu l’as donné pour fils à ta Mère.

Jésus Christ, mon Seigneur crucifié, Fils de la Bienheureuse Vierge Marie, ouvre tes bras sacrés et embrasse-moi, ainsi que Tu les as ouverts sur l’arbre de la Croix pour embrasser le genre humain.

Jésus Christ, mon Seigneur crucifié, Fils de la Bienheureuse Vierge Marie, ouvre ton cœur, reçois le mien et accorde-moi ce que je te demande, si telle est Ta volonté. Amen !

 

29 avril 2019

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380). Tertiaire dominicaine.

Sainte Catherine de Sienne,
mère spirituelle des 2e et 3e ordre de Saint Dominique
par Cosimo Rosselli (15e)

Patronne principale de l’Italie par le pape Pie XII, le 18 juin 1939. Docteur de l’Église par le pape Paul VI, le 3 octobre 1970. Co-patronne de l’Europe par le pape saint Jean-Paul II, le 1eroctobre 1979.

Dans son Journal spirituel, Cerf, 2014, le père Lagrange fait souvent référence aux écrits de Sainte Catherine de Sienne, ex. p. 62 :

– Se gourmander sévèrement des pensées non seulement mauvaises mais inutiles. Songer à son impuissance, à son ingratitude. De là naît l’humilité, et l’humilité purge le cœur de toute vaine pensée en l’occupant au-dedans.

« Pauvreté, silence, exercice intérieur de l’esprit »
C’est exactement la doctrine de Sainte Catherine de Sienne.

Illustration
Sainte Catherine de Sienne, (la mama) mère spirituelle des 2eet 3Ordre de Saint Dominique, par Cosimo Rosselli (1431-1507), National Gallery of Scotland.

Sainte Catherine de Sienne préside. Elle porte la robe blanche (pureté) et le manteau noir (pénitence) de l’Ordre de Saint Dominique.  Avec ses pieds, elle écrase un être effrayant, le diable, elle le soumet. Parmi les personnages auréolés, à gauche, Saint Laurent, diacre et Saint Dominique tenant un lys et la Règle. À droite, Saint Raymond de Capoue ?, l’Archange Raphaël avec le jeune Tobie. Deux groupes de tertiaires sont agenouillés. À l’un, Sainte Catherine présente le livre de la Règle de l’Ordre, et à l’autre, un rouleau de règlements à observer. Le retable a peut-être été peint pour le couvent de Sainte-Catherine à Florence où se trouvaient trois nièces du peintre.

 

24 avril 2019

La Conversion de S. Augustin, 1430 env. par Guido Pietro dit Fra Angelico, Musée Thomas Henry, Cherbourg

La Conversion de S. Augustin, évêque et docteur de l’Église
« Tolle lege ». (Prend et lis) S. Augustin, Confessions 8, 12, 29

Augustin, quel contraste avec tous les prétendus mystiques païens : sa confession, Dieu, qu’on sent si présent… il est en contact avec lui, le prend à témoin, implore son pardon, se sent pardonné… quelle réalité de vie divine. (Marie-Joseph Lagrange o.p., Journal spirituel, p. 432)

 

Description de l’œuvre
Fra Angelico représente saint Augustin au moment où il est frappé par la grâce dans son jardin. À Milan, Augustin partage avec Alypius une maison avec un jardin. Il a la tête dans les mains. La peinture du Quattrocento utilise la position et la gestuelle pour rendre compte des sentiments des personnages.
La tête baissée exprime au Moyen Âge le chagrin ou la douleur. Saint Augustin a les yeux fermés, il a un songe.
Deux hypothèses ont été proposées pour expliquer l’attitude du saint. Il pleure car il est touché par la grâce de Dieu ou il pleure car cette conversion est un déchirement, il lui faut renoncer à sa vie de plaisirs.
Derrière lui, se trouve son fidèle ami Alypius qui lui aussi va se convertir. Certains historiens ont pensé qu’il s’agissait plutôt de son unique fils Adéodat.
Le jardin est clos, il peut représenter le jardin de la vertu à laquelle Augustin va accéder par sa conversion.
Le paon perché sur le mur de la maison est symbole de vérité et d’immortalité. Au Moyen Âge, on pensait que la chair de cet animal était imputrescible ce qui signifie que sa chair ne pouvait pas pourrir. Chaque année, il perd ses plumes qui repoussent au printemps, ce qui peut évoquer la résurrection du Christ.
Les papillons sur la barrière au pied de saint Augustin sont aussi symbole de l’immortalité de l’âme car le papillon qui sort de la chrysalide est symbole de résurrection.
La sauterelle qu’on remarque sur la barrière de l’enclos peut faire l’objet de plusieurs interprétations : l’invasion de sauterelles détruit la moisson. Mais la sauterelle aussi détruit le serpent, ce qui peut exprimer la maîtrise de soi et le refus des plaisirs.
La moitié des moutons (premier plan au bas du tableau, à peine visibles sur cette photo, sont noirs, les autres sont blancs, on peut y voir une allusion au manichéisme ; certains seraient proches de Dieu et les autres suivraient un dieu mauvais, et seraient hérétiques. On peut y voir une référence à la future charge d’évêque de saint Augustin.
Le figuier sous lequel est assis le saint est un arbre qui nourrit l’homme sans lui demander de gros efforts de culture, il symbolise la volonté de survie mais aussi la richesse naturelle, il s’accroche au moindre creux de rocher pour y puiser de l’eau.
Le personnage à l’entrée de la grotte, en haut à droite, est souvent considéré comme un ermite. Augustin écrira plus tard les règles de vie pour les ermites.

Source : discip.ac-caen.fr

 

21 avril 2019

Christ est ressuscité ! Alléluia !
Belle et sainte fête de la Résurrection du Seigneur à toutes et à tous !

Le Christ est ressuscité, lui la résurrection, et il a transfiguré dans la beauté ce qui était sans beauté ni éclat. Le Seigneur comme un dormeur s’est éveillé et a déjoué toutes les ruses de l’ennemi. Il est ressuscité et il donne la Joie à toute la création. Il est ressuscité et la prison de l’enfer a été évacuée. Il est ressuscité et a transformé le corruptible en incorruptible. Le Christ ressuscité a rétabli Adam dans sa dignité première d’immortel. (Sermon de saint Épiphane, évêque de Salamine, Père de l’Église, IVe siècle, Lectionnaire patristique dominicain– Jean René Bouchet, Paris, éd. du Cerf, 1994.)

St Jean et St Pierre au tombeau vide du Christ par Giovanni Francesco Romanelli (1640), Viterbo, Italie.

« C’est alors qu’entra l’autre disciple [Jean], lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit et il crut. Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts. » (Jean 20, 6-9.)

Le père Lagrange nous précise :

C’est ce point que saint Jean a raconté en détail, car il prit part à cette recherche anxieuse, se désignant lui-même comme « cet autre disciple que Jésus aimait » […]. Saint Jean dit seulement que dès lors il crut que Jésus était ressuscité, et ce fut sûrement la conviction de Pierre. Jusqu’à ce moment, ils n’avaient pas compris d’après l’Écriture que le Christ devait ressusciter. Il l’avait cependant annoncé lui-même à tous ses Apôtres. Mais l’événement leur paraissait tellement improbable que seule l’évidence du fait eut le pouvoir de les convaincre, et il leur apparut alors que cette consécration suprême du Messie avait été prédite (Isaïe 53, 11).

Extrait de L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangéliquepar Marie-Joseph Lagrange o.p., pp. 629-630, éd. Artège-Lethielleux, 2017.

 

20 avril 2019
Samedi saint
Un grand silence parce que le Roi dort

« Un grand silence règne aujourd’hui sur la terre, un grand silence et une grande solitude.
Un grand silence parce que le Roi dort. La terre a tremblé et s’est calmée parce que Dieu s’est endormi dans la chair et qu’il est allé réveiller ceux qui dormaient depuis des siècles […].»

(Sermon de saint Épiphane, évêque de Salamine, Père de l’Église, IVe siècle, pour le deuxième nocturne – Lectionnaire patristique dominicain– Jean René Bouchet, Paris, éd. du Cerf, 1994.)

Illustration : La Descente du Christ aux enfers (ou aux limbes) par Beato Angelico (15e). Fresque cellule 31, Couvent San Marco, Florence, Italie. Sophie de Gourcy précise, dans son livre Apprendre à voir la Nativité, DDB, 2016 : Les limbes sont appelés à partir du XIIIsiècle « prison des âmes ». […] Le Christ en fera sauter la porte lorsque, selon le symbole des apôtres, le Credo, il aura été crucifié, sera mort et descendra « aux enfers ».

Par Fra Angelico, on voit le Sauveur renverser et écraser la porte qui maintenait les justes dans l’attente de leur délivrance. Ce lieu de réclusion était une grotte privée de lumière. Fra Angelico la peignit dans une fresque du couvent San Marco vers 1443, cellule 31. La descente aux enfers du Sauveur est comme un souffle dont la force arrache la porte de ses gonds, écrase un diable qui tentait de s’opposer à la libération des âmes des justes détenues dans ces profondeurs obscures […].

 

19 avril 2019

En ce Vendredi saint, c’est avec une grande tristesse que fr. Manuel Rivero o.p., président de notre Association des Amis du père Lagrange, nous a appris, hier, le départ au Ciel de sa sœur, Marie-Victoire, qu’il a confiée à l’intercession du frère Marie-Joseph Lagrange.

Nous exprimons à Fr. Manuel et à sa famille notre grande amitié en cette triste circonstance et les assurons de nos ferventes prières pour leur chère défunte.

 

19 avril 2019
La Semaine sainte avec le P. Lagrange
La Passion de Jésus
Vendredi saint
Le crucifiement et la mort du Christ

Alors, il [Pilate] leur livra Jésus pour être crucifié. Ils prirent donc Jésus. Et portant sa croix [il] sortit vers l’endroit du « Crâne », qu’on nomme en hébreu « Golgotha » où ils le crucifièrent (Jn 19, 16-18.)

Pour approfondir :

Christ en croix et saint Dominique (détail)
Fresque de Fra Angelico. Musée San Marco

 

 

Pilate fit donc relâcher Barabbas, et abandonna Jésus à la haine des Juifs, ce qui veut dire qu’il le condamna juridiquement à mort, les soldats romains étant chargés de l’exécution. […]
[La crucifixion] était le supplice des esclaves et des bandits. Ce fut celui qu’endura Jésus.
[…] On le crucifia donc, clouant d’abord ses mains au gibet qu’on éleva ensuite sur le pieux droit, en secouant sans s’en inquiéter son corps endolori […] Quand on commença de crucifier Jésus, il n’était guère plus de midi. […] Jésus expira vers trois heures du soir. […]

Ayez pitié de nous, très doux Jésus, qui dans votre clémence avez souffert pour nous.

(Extraits de L’Évangile de Jésus avec la synopse évangélique, Marie-Joseph Lagrange o.p.,  éd. Artège-Lethielleux, 2017.)

 

18 avril 2019
La Semaine sainte avec le P. Lagrange
Jeudi saint
Jésus reprend les disciples de leur ambition et leur lave les pieds

Lors donc qu’il leur eut lavé les pieds, et qu’il eut repris ses habits et se fut remis à table, il leur dit : « Comprenez-vous ce que je vous ai fait ?… Vous m’appelez « Maître » et « Seigneur » ; et vous dites bien, car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Car je vous ai donné un exemple, afin que vous agissiez vous aussi comme j’ai agi envers vous. » (Jn 13, 12-15.)

Pour approfondir :

L’intention principale de Jésus était de donner à ses disciples un exemple d’humilité qui fût une leçon éternelle dans son Église. Ce qui hausse cette basse fonction jusqu’à l’héroïsme, c’est que lui, sorti de Dieu, et allant à Dieu, savait que Judas Iscariote, fils de Simon, l’un des Douze, songeait en ce

Le lavement de pieds. Servir avec amour
Jun Jamosmos (21e)

moment même à le livrer. Et il lui laverait les pieds comme aux autres. Aussi bien ce n’est pas Judas qui protesta ! […]

Ce que Jésus en avait fait, c’était donc seulement pour abaisser à jamais les sursauts de l’orgueil ou de la vanité chez les siens. C’est ce qu’il énonce clairement, sans faire aucune allusion à un état inférieur de pureté qu’il aurait ainsi rendu plus parfait : « Comprenez-vous ce que je vous ai fait ? Vous m’appelez Maître et Seigneur et vous dites bien ; car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous devez aussi vous laver les pieds les uns aux autres. »

Les fidèles savent très bien que l’imitation de Jésus doit s’étendre à tous leurs actes, à toutes leurs pensées, à toute leur vie, et que pourtant cet exemple particulier n’est point spécialement obligatoire. Cependant, pour honorer ce souvenir, les rois ont lavé les pieds des pauvres le jeudi saint, et les prélats de l’Église le font encore. Et qu’on n’allègue pas l’inconvenance de s’humilier devant un frère qui est peut-être un apostat dans son cœur. Jésus l’a fait à l’égard de Judas, et cependant il savait qu’il était déjà figuré dans l’Écriture : « Celui qui mange mon pain a levé contre moi son talon. »

(L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Marie-Joseph Lagrange o.p., pp. 541-542, éd. Artège-Lethielleux, 2017.)

 

17 avril 2019
La Semaine sainte avec le P. Lagrange
Mercredi saint
La trahison de Judas

Judas dit aux grands prêtres : « Que voulez-vous me donner et moi je vous le livrerai ? Ceux-ci lui assurèrent trente pièces d’argent… » Et dès lors, il cherchait une occasion pour le livrer. (Mt 26, 14-16.)

Pour approfondir :

La fête de Pâque approchait, et les meneurs du Sanhédrin n’étaient pas sans inquiétude, car ils savaient que durant ces huit jours de fête Pilate était aux aguets. Si le Galiléen prenait fantaisie d’exciter le peuple, le gouverneur ne manquerait pas cette occasion de frapper fort. Il fallait se hâter, car arrêter Jésus durant les solennités, c’eût été provoquer le tumulte qu’on craignait. Le secret n’importait pas moins que la promptitude, et il n’y avait plus que deux jours avant la fête ! L’intervention de Judas Iscariote tira d’embarras les chefs du sacerdoce et le groupe des docteurs Pharisiens. […]

Judas était de Qarioth, au sud de la Judée, d’un tempérament plus froid que les Galiléens enthousiastes, mais, assure-t-on, plus intelligent, plus cultivé, digne de la confiance que lui témoigna Jésus en l’envoyant prêcher le Règne de Dieu. Il [Judas] s’aperçut peu à peu des prétentions extravagantes de son chef, qui se disait Messie et Fils de Dieu, et qui cependant, à l’occasion, se dérobait au péril, c’était donc un séducteur : la Loi ordonnait de le dénoncer ; Judas fit son devoir. […]

 

La trahison de Judas (1303)
Giotto, fresque chapelle des Scrovegni, Padoue, Italie

Ce qu’il y a de vrai dans les conjectures de la critique, c’est que Judas avait en effet commencé avec de bonnes dispositions. Sans cela Jésus ne l’aurait pas admis parmi les Douze. Sa prescience de l’avenir n’était point une raison de s’abstenir. Elle imitait celle de son Père qui accorde des grâces de choix à de futurs prévaricateurs. Et il est possible en effet que Judas, étant de la Judée, ait été plus imbu, que les autres disciples, des doctrines des Pharisiens, plus porté à se détacher de son Maître, poursuivi par eux avec tant d’acharnement. Il espérait sans doute – quelques disciples en furent d’abord presque là –, mais avec une ambition plus basse et l’amour du lucre, que le règne de Dieu tournerait à son profit. Ce calcul échouant, il se dégagea. […] Judas avait pris l’initiative, et il accepta le prix de la trahison. On convint de trente deniers.

[…] Il ne restait plus au misérable qu’à trouver une occasion favorable, c’est-à-dire à organiser un guet-apens pour mettre la foule en présence d’un fait accompli. Ces princes de la naissance et de l’intelligence dédaignaient la foule, mais ils la craignaient.

[…] L’entrevue du traître et de ceux qui le payaient aurait lieu dans la nuit.
(L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Marie-Joseph Lagrange o.p., pp. 533-534, éd. Artège-Lethielleux, 2017.)

 

16 avril 2019
La Semaine sainte avec le P. Lagrange
Mardi saint
Jésus qui va être glorifié donne un commandement nouveau 

Jésus dit : « Petits enfants, c’est pour peu de temps encore que je suis avec vous … Vous me chercherez… Et comme j’ai dit aux Juifs : « Où je vais, vous ne pouvez venir », à vous aussi je le dis maintenant… Je vous donne un commandement nouveau : c’est que vous vous aimiez les uns les autres, comme je vous ai aimés, vous aussi, le uns les autres. C’est à cela que tous reconnaîtront que vous êtes pour moi des disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jean 13, 33-35)

Approfondissement : Le sacrement d’amour institué, Jésus ouvre son cœur à ses disciples plus largement que jamais. Déjà sa Passion est commencée, puisque Judas est allé chercher main-forte, et c’est à la fois sa gloire propre d’accomplir cet acte d’obéissance et de charité, et la gloire de son Père à laquelle il rapporte tout ce qu’il fait. Car le Père ne la gardera pas cachée dans son secret éternel : il la fera rejaillir sur le Fils lui-même, et ce sera bientôt, c’est-à-dire par sa résurrection et son exaltation. Or cela ne pourra être sans que le Maître s’éloigne des siens. Il s’attendrit à cette pensée, les nomme ses petits enfants – c’est la seule fois ! – et les avertit, comme il avait averti les Juifs, qu’ils ne pourront le suivre. Il leur lègue donc une dernière parole, un commandement nouveau : qu’ils s’aiment les uns les autres, comme il les a aimés. Ce sera pour le monde la marque qu’ils sont vraiment ses disciples. Ce commandement nouveau rappelle la nouvelle alliance que Jésus venait de promulguer. Il devient nouveau parce que Jésus en est le modèle, parce qu’il en est l’inspirateur et toute la raison […].
(L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, pp. 549-550. Marie-Joseph Lagrange, o.p., éd. Artège-Lethielleux, 2017.)

 

15 avril 2019
La Semaine sainte avec le P. Lagrange
Lundi saint
L’onction à Béthanie (Jn 12, 3)

Onction de Jésus par Marie de Béthanie, pendant le repas chez Simon
par Philippe de Champagne (détail) (17e). Musée des Beaux Arts, Nantes. France

« Marie (de Béthanie) donc prit une livre d’un parfum de nard authentique d’une grande valeur. Elle oignit les pieds de Jésus. Elle les essuya avec ses cheveux. La maison fut remplie de l’odeur du parfum. »

Approfondissement : Le repas était commencé, lorsque Marie, sœur de Lazare, prit une livre, c’est-à-dire trois cent grammes d’un parfum de nard, de la plus pure qualité. Elle en oignit la tête de Jésus, suivant l’usage ordinaire, puis, comme il restait encore beaucoup, elle le répandit à profusion sur ses pieds, si bien qu’elle se vît obligée de les essuyer avec ses cheveux, ayant brisé le vase d’albâtre pour le verser jusqu’à la dernière goutte. L’odeur de l’huile parfumée remplit toute la maison […]. En effet le cœur attentif de Marie avait été touché d’un pressentiment auquel les autres demeuraient fermés ; elle avait oint d’avance le corps du Maître tant aimé. Et ce geste était si beau, étant inspiré par une lumière divine, que Jésus annonça solennellement : Partout ou sera prêché l’Évangile, dans le monde entier, on parlera aussi de ce qu’a fait cette femme, en mémoire d’elle. Prophétie réalisée dans toutes les chaires où l’on prêche la Passion. (L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, Marie-Joseph Lagrange, o.p., p. 463, éd. Artège-Lethielleux, 2017.)

 

14 avril 2019
L’entrée messianique de Jésus et sa Passion à Jérusalem
Une belle méditation du P. Lagrange :

C’était donc une entrée messianique à laquelle Jésus se prêtait, lui qui avait toujours refusé de se laisser nommer Messie, si ce n’est en secret, par les plus fidèles. Mais le moment était venu. […] Jésus agréait ces humbles hommages, lui le roi humble et doux. [….] On saluait donc le Fils de David, le roi d’Israël, le Messie tant désiré.

Jésus cependant était bien éloigné des sentiments du triomphateur antique. En descendant du Capitole, le vainqueur faisait égorger les rois vaincus. C’est lui qui devait être la victime, et avec lui cette ville de Jérusalem qu’il était venu sauver. Voyant devant lui, dans l’éclat encore récent de leurs grandes pierres blanches, les palais, les remparts, le Temple du Seigneur ruisselant d’or, toute cette sainte Sion où l’attendaient la haine et la perfidie, il pleura.

Jésus pleure sur Jérusalem
par Carl Olsen (20e)

Combien de saints ont pleuré avec lui en relisant ce thrène (lamentation de Jésus sur Jérusalem) : « Ah ! si dans ce jour tu avais connu, toi aussi, ce qu’il fallait pour ta paix ! – Mais maintenant cela est caché à tes yeux. Car des jours viendront sur toi, où tes ennemis feront un retranchement contre toi, et ils t’entoureront et te presseront de toute part, et ils te briseront (ruine du Temple de Jérusalem) sur le sol, toi et tes enfants demeurant chez toi, et ne laisseront pas chez toi pierre sur pierre, parce que tu n’as pas su le temps de sa visite. » (Luc 19, 42-44)

Monotone cantilène de l’amour méconnu. Toi, et toi, et toujours toi ! Jésus ne cherche pas dans Jérusalem le lieu où il doit mourir. Ses yeux ne s’arrêtent pas à la place du Golgotha. Ce qui oppresse sa pensée, c’est un peuple en fureur, les factions déchaînées, l’union d’un jour dans la rage du désespoir contre un ennemi de sang-froid qui resserre le réseau de ses postes, qui monte à l’assaut ; c’est la plainte des enfants écrasés sous les pierres qui s’écroulent, c’est la torche jetée dans le Temple, et la fin du culte rendu à Dieu dans les sacrés parvis [….]. (Pour lire le texte en entier, se reporter à l’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique par Marie-Joseph Lagrange, pp. 468-469, Artège-Lethielleux, 2017.)

 

10 avril 2019
Jour-anniversaire de la mort du père Marie-Joseph Lagrange, en communion avec fr. Manuel Rivero o.p., nous disons ensemble la prière pour la glorification de ce grand serviteur de Dieu :

9 avril 2019
La vérité qui rend libre

Il y a péril à méconnaître l’Envoyé de Dieu « Celui qui m’a envoyé est véridique ; et ce que j’ai entendu de Lui, c’est de cela que je parle dans le monde. » (Jean 8, 26.)

Méditation : « La vérité [de Jésus] pratiquée grandit dans l’âme et lui donne cette énergie qui est vraiment la délivrance et la liberté. » (Marie-Joseph Lagrange o.p., L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, pp. 327-328, éd. Artège-Lethielleux, 2017.)

 

7 avril 2019

Jésus et la pécheresse (2011)
Andreï-Nikolaïevitch Mironov (en russe : Андре́й-Никола́евич Миро́нов par wikipedia

« Femme, où sont-ils ? Personne ne t’a condamnée ? » « Personne, Seigneur. » Et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, désormais ne pèche plus. » (Jean 8, 10-11.)

Commentaire du P. Lagrange : La justice et la miséricorde se sont rencontrées. La justice ne consent pas à une absolution juridique qui ne tiendrait pas compte du caractère antisocial de la faute ; la miséricorde ne consent pas à condamner, parce qu’elle a lu le repentir dans ce cœur encore serré par l’effroi. Recommander le ferme propos [la résolution], c’est supposer le repentir. (L’Évangile de Jésus Christ avec la synopse évangélique, p. 324, Artège Lethielleux, 2017.)

Rosaire, radio Arc-en-ciel, le 18 mars 2019. Rosaire avec saint Joseph par Fr. Manuel Rivero O.P.

Bonsoir, chers amis du Rosaire. Demain, le 19 mars, nous célébrerons la fête de saint Joseph, le père adoptif de Jésus.
Nous allons méditer les mystères de la vie de Jésus à partir de saint Joseph tel que la révélation biblique le présente dans l’Évangile selon saint Matthieu. Si saint Luc, évangéliste, nous a transmis les événements de la naissance et de l’enfance de Jésus à partir de Marie, saint Matthieu le fait à partir de Joseph.

Faisons le signe de la croix en prenant dans nos mains la croix du chapelet :
Tous : Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen.
Credo. Notre Père. 3 Ave Maria.

Premier mystère joyeux : la généalogie de Jésus

De l’Évangile selon saint Matthieu 1,1 : « Livre de la Genèse de Jésus-Christ, fils de David, fils d’Abraham. »

Saint Matthieu révèle la nouvelle genèse, la nouvelle création, accomplie par Jésus, le Fils de Dieu fait homme, né de Marie, descendant de la tribu de David par l’adoption de Joseph. Il y a le livre de la Genèse qui dévoile l’origine du monde en Dieu. Il y a la nouvelle genèse proclamée dans l’Évangile.

Saint Joseph (détail)
Fra Angelico

Pour saint Matthieu, c’est Joseph qui assure la continuité entre l’Ancien et le Nouveau Testament en tant que membre de la tribu de David. Le Messie devait naître de la descendance du roi David. Jésus naîtra à Bethléem, la ville de David. La généalogie de saint Matthieu aboutit à Joseph, l’époux de Marie, « de laquelle naquit Jésus, que l’on appelle Christ » (Mt 1,16).

Dieu est entré dans l’histoire des hommes. Il n’a pas reculé devant leurs turpitudes et leurs crimes. Cette histoire marquée par des infidélités, des adultères et des meurtres nous l’appelons histoire sainte parce que sanctifiée par notre Dieu trois fois saint.

Dieu a sanctifié Joseph pour la mission à accomplir : devenir l’époux aimant et fidèle de Marie d’une part et le protecteur de Jésus en tant que père adoptif et éducateur d’autre part.

Prions pour notre temps et pour notre histoire personnelle et collective, sanctifiés par Dieu.
Prions que nous accomplissions la mission que Dieu nous confie.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.
CD Devenir n°10 Saint Joseph

Deuxième mystère : l’Annonciation faite à Joseph

De l’Évangile selon saint Matthieu 1,18s : « Telle fut la genèse de Jésus Christ. Marie, sa mère, était fiancée à Joseph : or, avant qu’ils eussent mené vie commune, elle se trouva enceinte par le fait de l’Esprit-Saint. Joseph, son mari, qui était un homme juste et ne voulait pas la dénoncer publiquement, résolut de la répudier sans bruit. Alors qu’il avait formé ce dessein, voici que l’Ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ta femme : car ce qui a été engendré en elle vient de l’Esprit Saint. »

Joseph connaissait la droiture et la sainteté de Marie. Comme la fiancée n’habitait pas la maison du futur mari, peut-être des gens ont rapporté à Joseph la grossesse de Marie avec des commentaires malveillants. Le « ladilafé». L’Ange confirme en songe à Joseph l’honnêteté de Marie et la sainteté de l’enfant, conçu par l’Esprit-Saint.

Prions pour tous les couples et pour toutes les familles.
Prions pour que disparaissent la médisance et la calomnie, l’envie et la jalousie.

Notre Père. Avec Maria. Gloria.
CD Devenir n°10 Saint Joseph

Troisième mystère : Joseph donne le nom à l’Enfant Jésus

De l’Évangile selon saint Matthieu : « L’Ange du Seigneur dit à Joseph en songe : « Marie, ta femme, enfantera un fils, et tu l’appelleras du nom de Jésus, car c’est lui qui sauveras son peuple de ses péchés. »
Jamais un homme dans l’Ancien Testament n’avait reçu un telle mission : veiller sur celui qui allait libérer Israël non des peuples ennemis mais de ses péchés !

Moïse avait été choisi et envoyé pour faire sortir Israël de l’esclavage de l’Égypte vers la Terre promise. Les Juges comme Samson avaient vaincu les oppresseurs par une force physique extraordinaire, don de Dieu.

Joseph reçoit une tâche et une grâce uniques : devenir le père adoptif du Messie libérateur des puissances du mal et de la mort.

Dans l’Évangile selon saint Matthieu, c’est Joseph et non Marie qui donne le nom de Jésus à l’enfant conçu du Saint-Esprit. Le nom était accordé le huitième jour après la naissance au moment de la circoncision.

Joseph a veillé sur son épouse, Marie, et sur  l’Enfant Jésus pour qu’ensemble, en famille de Dieu, la mission du Messie puisse être menée à bien selon le plan de Dieu.

L’étymologie du mot « évêque » nous révèle le sens de cette charge : « veiller sur », « surveiller ». En ce sens, saint Joseph est le modèle des évêques, les surveillants du troupeau qui leur est confié par Dieu. Il arrive que saint Joseph soit représenté dans l’art portant le bâton fleuri d’Aaron, le grand-prêtre choisi par Dieu (cf. Nb 17, 20-25). En effet, si le grand-prêtre veillait sur le temple, saint Joseph a veillé sur son épouse, le temple de Dieu, « le buisson ardent », symbole de la présence de la divinité. Saint Paul, inspiré par l’Esprit-Saint, écrit aux chrétiens de Colosses qu’en Jésus « habite corporellement la plénitude de la divinité » (Col 2,9). La Vierge Marie a porté en son sein corporellement cette plénitude de la divinité et saint Joseph a veillé sur elle et sur le développement intégral de son fils adoptif, Jésus.

Prions pour tous ceux qui veillent sur les autres : le pape, les évêques, les prêtres, les parents, les éducateurs, les surveillants de prison …
Prions pour que les responsables veillent sur les autres sans désir de domination à l’image de saint Joseph, homme juste et chaste.
Prions pour ceux qui sont sous le patronage de saint Joseph.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.
CD Devenir n°10 Saint Joseph

Quatrième mystère : la naissance de Jésus

De l’Évangile selon saint Matthieu 1, 22s: « Tout ceci advint pour que s’accomplît cet oracle prophétique du Seigneur : Voici que la vierge concevra et enfantera un fils, et on l’appellera du nom d’Emmanuel », ce qui se traduit : « Dieu avec nous ». Une fois réveillé, Joseph fit comme l’Ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui sa femme ; et il ne la connut pas jusqu’au jour où elle enfanta un fils, et il l’appela du nom de Jésus. »

Joseph se montre homme de peu de paroles mais homme d’action. Saint Joseph figure dans l’histoire de la Bible et de l’Église comme « le grand silencieux ». S’il nous est possible d’accéder à l’âme de la Vierge Marie à travers ses quelques phrases retenues dans les évangiles, il n’en va pas de même pour son époux Joseph. Pas une seule phrase de lui n’a été rapportée par les évangélistes.

Pourtant ce silence non seulement ne nuit pas à sa sainteté mais il accorde une grande profondeur à sa mission. Joseph a reçu l’annonce de l’ange en songe. Il s’est levé pour accomplir la mission demandée par Dieu : prendre Marie pour épouse et veiller sur l’enfant Jésus qui va naître non pas d’un vouloir de l’homme mais de l’Esprit-Saint.

C’est pourquoi saint Matthieu, évangéliste, l’appelle « juste ». Pour nous le mot justice nous fait penser à la justice sociale et aux revendications salariales. Dans la Bible la justice équivaut à la sainteté. Joseph est juste non seulement parce qu’il a travaillé correctement dans son atelier d’artisan dans le bâtiment mais parce qu’il a ajusté sa volonté à celle de Dieu. La prière du Notre Père a pris chair en lui : « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel ».

La volonté de Dieu conduit précisément le croyant à la plus haute réalisation de son existence malgré les apparences. Nombreux sont ceux qui plaignent Joseph. Un ami m’avouait un jour : « J’ai toujours eu pitié de saint Joseph qui me semblait un personnage falot chargé d’un mauvais rôle. Il n’était pas tout à fait un mari ni tout à fait un père. Mais j’ai découvert la force de sa mission quand je suis moi-même devenu père. À la naissance de mon premier enfant, j’ai été saisi d’un sentiment étrange. Ma femme tenait dans ses bras le bébé qui venait de sortir de son sein. Il faisait partie d’elle-même. Ce n’était pas mon cas. Le bébé s’interposait maintenant entre la femme que j’aimais et moi. Recouvert de sang, ses cris ne me le rendaient pas attirant. Je me suis dit intérieurement qu’il me fallait l’accepter, l’ « adopter » et le reconnaître comme mon enfant. Et à ce moment-là, j’ai pensé à saint Joseph. Me voilà en train de vivre sa propre démarche d’ « adoption ».

Au fond, toute personne se trouve face au dilemme de l’adoption d’une manière ou d’une autre. Pas d’adoption, pas d’engagement, pas d’amour. Il me semble possible de parler d’adoption dans les différentes situations de l’existence : notre corps, notre famille, notre histoire, notre pays, notre sexe, nos travaux et missions …

Consécration au Seigneur Jésus par l’entremise de son père adoptif, saint Joseph : « Entre tes mains, saint Joseph, je remets mon corps et mon âme, ma vie et ma mort, mes projets et mes soucis matériels, ma famille et toutes les familles, le pape et tous les évêques qui veillent sur ton Église.

Saint Joseph, tu as accompli la volonté de Dieu dans la prière silencieuse, je te prends pour modèle et je me confie à ton intercession auprès de Jésus le Christ, notre Sauveur, pour adopter avec foi le contexte familial et social que je n’ai pas choisi, où Dieu m’appelle à servir saintement. Amen ! »

Notre Père. Avec Maria. Gloria.
CD Devenir n°10 Saint Joseph

Cinquième mystère : La fuite en Égypte et le retour à Nazareth

De l’Évangile selon saint Matthieu 2, 13s : « Voici que l’Ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph et lui dit : « Lève-toi, prends avec toi l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte ; restes-y jusqu’à ce que je te le dise. Car Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr. » Il se leva, prit avec lui l’enfant et sa mère, de nuit, et se retira en Égypte. (…) Quand Hérode eut cessé de vivre, voici que l’Ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph, en Égypte, et lui dit : « Lève-toi, prends avec toi l’enfant et sa mère, et mets-toi en route pour la terre d’Israël ; car ils sont morts, ceux qui en voulaient à la vie de l’enfant. » Il se leva, prit avec lui l’enfant et sa mère, et rentra dans la terre d’Israël. »
Joseph a sauvé l’Enfant Jésus de la menace mortelle d’Hérode. Marie et Joseph ont connu l’angoisse de l’exode. Ils ont vécu en réfugiés politiques en Égypte.

Prions pour tous les réfugiés politiques et économiques.
Prions pour ceux qui sont menacés de mort sans oublier les enfants dans le ventre de leur mère menacés par l’avortement.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.
CD Devenir n°10 Saint Joseph
…………………………
Prions : Dieu tout-puissant, à l’aube des temps nouveaux, tu as confié à saint Joseph la garde des mystères du salut ; accorde maintenant à ton Église, toujours soutenue par sa prière, de veiller sur leur achèvement. Par Jésus-Christ …

Bénédiction :
La prière de ce soir a été animée par Joëlle, Sonia, Henri à la technique, et moi-même, le frère Manuel, dominicain.
Chant sur saint Joseph par Jean Claude Gianadda. CD Devenir.
Bonne fête de saint Joseph à tous !
Bonne nuit et à lundi prochain !

CD Il est vivant n° 6 Couronnée d’étoiles

Photos: Fra Angelico. Saint Joseph. Florence. Italie.

Écho de notre page Facebook : mars 2019

31 mars 2019

Regard de Jésus (détail)
Fra Angelico (1400-1455)

Dieu seul peut rendre à la raison affaiblie par le péché son empire sur les puissances sensibles, c’est en lui qu’elle trouve sa force ; et c’est la prière qui lui donne ce regard souverain qui charme les passions indomptées et les amène soumises aux pieds de l’intelligence. (Marie-Joseph Lagrange des Frères prêcheurs. Journal spirituel, p. 109, Cerf, 2017.)

 

 

25 mars 2019

L’Annonciation à la lumière de la vie et de l’œuvre du père Lagrange
Texte paru dans la Revue du Rosaire de septembre 2010
par Fr. Manuel Rivero, o.p.

Dieu aime ce qui est petit et pauvre. Sa puissance se déploie dans la faiblesse humaine. Le père Lagrange précise que Nazareth, petit village, n’est pas cité dans l’Ancien Testament ni par l’historien juif Flavius Josèphe ni dans le Talmud. C’est là que l’ange Gabriel est apparu à Marie. Les Grecs orthodoxes placent l’Annonciation près de la fontaine de Nazareth suivant un évangile apocryphe désigné sous le nom de l’apôtre Pierre. Faute de renseignements vérifiables, nous pouvons imaginer Marie en train de prier comme aiment à la montrer les artistes chrétiens, le livre de la Parole sur ses genoux ; ou en train de nettoyer sa maison et de faire cuire le repas ; ou encore un seau d’eau fraîche sur la tête, porté avec équilibre et élégance comme le font encore beaucoup de femmes de pays pauvres.

Les Grecs se saluent en se souhaitant la joie tandis que dans les langues araméenne et hébraïque, la salutation souhaite la paix. D’où les différentes traductions possibles en français : « Je vous salue », « Paix sur toi » ou « Réjouis-toi, Marie ».

Quant à l’étymologie de Marie, une multitude de livres et d’articles ont vu le jour à la recherche de la bonne explication. Le père Lagrange retient celle de « dame » ou « princesse » en harmonie avec la pratique de l’Église qui se confie à l’intercession de la Vierge Marie sous le vocable de « Notre-Dame ».

L’évangéliste saint Luc s’est intéressé à la généalogie des femmes. Élisabeth, cousine de Marie, descend de la tribu d’Aaron. Pour le père Lagrange, il ressort de l’Évangile que non seulement Joseph mais aussi Marie descendaient de la tribu de David. L’Annonciation : « Il sera grand et sera appelé fils du Très-Haut, et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père », et le Benedictus : « Le Seigneur nous a suscité une corne de salut, dans la maison de David, son serviteur » (Luc 1, 69), relient la naissance de Jésus au roi David. Jésus, dont l’étymologie évoque déjà sa mission de Sauveur est né de la descendance du roi David, la tribu du Messie selon les prophéties.

La question de Marie : « Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme ? » est interprétée par de nombreux exégètes catholiques comme un propos de virginité. Au premier siècle, de nouveaux courants ascétiques comme les Esséniens de Qumrân pratiquaient le célibat et la chasteté. « Si Marie entendait demeurer vierge, pourquoi était-elle fiancée ? » se demande le père Lagrange. Il y répond en évoquant le probable souhait de Marie d’échapper aux propositions répétées de mariage. Avec Joseph, homme juste, Marie pouvait accomplir sa vocation divine dans la paix. Par ailleurs, il nous est possible de penser en cohérence avec la foi et la droiture de Marie et de Joseph que ces deux fiancés avaient pris cette décision d’un commun accord, s’aimant avec tendresse, respect et renoncement pour le Royaume des Cieux (Voir Alonso Gómez Fernández, Tras las huellas de José. Icono del Padre y Guardián del Arca, Santo Domingo, República Dominicana, Ediciones Ama, 2008, p. 220).

À la différence de Zacharie qui n’avait pas cru et qui avait demandé un signe, Marie croit aux paroles de l’ange Gabriel : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon ta parole ! »

Prions pour nos frères juifs. Confions-les à l’intercession de la Vierge Marie, femme cent pour cent juive et cent pour cent chrétienne, la première chrétienne, la première Église.
Prions aussi pour ceux qui n’arrivent pas à croire en la Parole de Dieu révélée dans la Bible.

 

17 mars 2019

Transfiguration (détail) (1518-1520)-Raffaello Sanzio-Pinacothèque Vaticane.

 

« La présence de Dieu est une lumière : parce que, quand on voit tous les objets en Dieu, aucun d’eux ne peut arrêter la pensée, la fixer et la détourner de sa fin suprême. Dans la nuit, on se heurte à chaque pierre du chemin ; le jour, on franchit les plus sérieux obstacles. » (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, p. 109, Cerf, 2017.)

 

 

14 mars 2019

Saints Dominicains (détail) Fra Angelico ; cinquième panneau de la prédelle du Retable de Fiesole ; 1420 env. ; Londres, National Gallery.

 

« Quand nous lisons la vie des saints, d’un S. Paul, d’une sainte Perpétue, d’une Ste Thérèse, ou d’un S. Dominique, de S. Vincent de Paul ou de S. François de Sales, de S. Charles Borromée ou de Ste Jeanne de Chantal, sans parler de ceux qui sont plus hauts encore, dont les perfections nous éblouissent dans la splendeur de Dieu, nous comprenons le charme souverain qui a attiré tant d’âmes après ces âmes… Qui se donne volontiers à un autre homme ? Et pourtant on se donne aux saints, parce que la beauté de leur âme est vraiment un rayon de la beauté de Dieu <par ce qu’ils avaient Dieu, ils ont atteint la plus haute perfection de l’homme, que leur intercession vienne en aide à notre faiblesse>. » (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, p. 373, Cerf, 2017.)

 

 

10 mars 2019

 

 

Marie-Joseph Lagrange (7 mars 1855 – 10 mars 1938)

Aujourd’hui est le « jour-anniversaire » de la « montée au Ciel » du père Marie-Joseph Lagrange o.p., fondateur de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem. La messe est célébrée par Fr. Manuel Rivero o.p. à la mémoire du P. Lagrange, pour sa prochaine glorification et aux intentions particulières des amis de l’association. C’est aussi l’occasion à tous ceux qui aiment le P. Lagrange et qui demandent son intercession pour obtenir des grâces, de s’associer à cette célébration et de présenter à Dieu leur prière.

 

 

5 mars 2019

La vocation personnelle

Couronnement de la Vierge
Beato Angelico (1438-1440)

Devenir fils de saint Dominique, Albert Lagrange y a déjà songé à plusieurs reprises, dès le séminaire d’Autun. Comment l’appel s’est-il manifesté ? Par saint Dominique en personne, tel du moins que l’a peint Fra Angelico, tel que l’a présenté le P. Lacordaire.

« Depuis que j’avais lu les Conférences de Notre-Dame et la Vie de saint Dominique, l’idéal dominicain dominait de haut ma pensée. Je m’étais donné à saint Dominique moins après la lecture de l’œuvre (de Lacordaire), que pour avoir été séduit par la radieuse image du saint empruntée au couronnement de la Vierge par le bienheureux Angelico de Fiesole. Je ne doutais pas de l’exactitude de ce portrait : et c’était bien, en effet, ce qu’on peut imaginer de la vision aimante d’une âme pure. Longtemps avant d’entrer dans son Ordre, j’étais son fils, je le priais chaque jour. »

(Souvenirs personnels, p. 254-255, cité par B. Montagnes, Marie-Joseph Lagrange. Une biographie critique, p. 32, Cerf, 2004.)

 

3 mars 2019

La Vierge à la grenade, Sandro Botticelli, 1487, (détail), Galerie des Offices, Florence, Italie.

La Vierge à la grenade, Sandro Botticelli, 1487, (détail), Galerie des Offices, Florence, Italie.

Quel fruit ai-je porté ?

« Notre Seigneur a dit : Vous les connaîtrez à leurs fruits. Parole terrible pour moi. Durant le temps que j’ai passé plus en contact avec le monde, quel fruit ai-je porté ? » (Marie-Joseph Lagrange, Journal spirituel, 26 septembre 1913, Cerf, 2014.)

 

Lecture d’image :

La symbolique chrétienne interprète les grains serrés et unis dans le sang sous une même écorce comme le Corps du Christ, c’est-à-dire l’Église, l’union des fidèles soudés par une même foi. À partir de la Renaissance, dans le domaine artistique, la grenade est associée à la Vierge et à l’enfant Jésus. On compte ainsi de nombreuses Vierges dites « à la grenade ». La grenade éclatée avec ses grains répandus est l’allégorie de la charité et des dons de l’amour généreux. (Hans Biedermann, Michel Cazenave, Encyclopédie des symboles, Librairie générale française, Paris, 1996.)